L'oeuvre L'art poétique de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX
Ecrit par Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX
Date : 1674
Citations de "L'art poétique"
Utilisé pour le mot | Citation |
À | La nature, féconde en bizarres portraits, Dans chaque âme est marquée à de différents traits |
ABHORRÉ, ÉE | Chez nos dévots aïeux le théâtre abhorré |
ABJECT, ECTE | Au contraire, cet autre, abject en son langage, Fait parler les bergers comme on parle au village |
ABONDANCE | Souvent trop d'abondance appauvrit la matière |
ABORDER | Je chante les combats et cet homme pieux Qui, des bords phrygiens conduit dans l'Ausonie, Le premier aborda les champs de Lavinie |
ABSURDE | Un merveilleux absurde est pour moi sans appas |
ACCOMPLI, IE | Les ordres le plus sûrement accomplis sont ceux.... Qu'en un lieu, qu'en un jour un seul fait accompli Tienne jusqu'à la fin le théâtre rempli |
ACHETEUR, EUSE | Son livre, aimé du ciel et chéri des lecteurs, Est souvent chez Barbin entouré d'acheteurs |
ACTEUR, TRICE | Thespis fut le premier qui, barbouillé de lie, Promena par les bourgs cette heureuse folie, Et d'acteurs mal ornés chargeant un tombereau, Amusa les passants d'un spectacle nouveau |
ADMETTRE | Mon esprit n'admet point un pompeux solécisme, Ni d'un vers ampoulé l'orgueilleux barbarisme |
ADMIRER | La cour.... Distingua le naïf du plat et du bouffon, Et laissa la province admirer le Typhon |
ADMIRER | L'ignorance toujours est prête à s'admirer |
ADULATEUR, TRICE | Soit qu'il fasse au sénat courir les sénateurs, D'un tyran soupçonneux pâles adulateurs |
AFFAMÉ, ÉE | Une garnison affamée par l'ennemi ... dans la disette, une muse affamée Ne peut pas, dira-t-on, subsister de fumée |
AFFAMÉ, ÉE | .... je ne puis souffrir ces auteurs renommés, Qui, dégoûtés de gloire et d'argent affamés |
AFFECTER | Perse en ses vers obscurs, mais serrés et pressants, Affecta d'enfermer moins de mots que de sens |
ÂGE | Chaque âge a ses plaisirs, son esprit et ses moeurs |
AIGUISER | Et n'allez point toujours d'une pointe frivole, Aiguiser par la queue une épigramme folle |
AIMABLE | Rien n'est beau que le vrai, le vrai seul est aimable |
AIMER | Aimez qu'on vous conseille et non pas qu'on vous loue |
AISÉ, ÉE | Oh ! que j'aime bien mieux cet auteur plein d'adresse Qui, sans faire d'abord de si hautes promesses, Me dit d'un ton aisé, doux, simple, harmonieux.... |
AISÉMENT | Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement, Et les mots pour le dire arrivent aisément |
AJOUTER | Ajoutez quelquefois, et souvent effacez |
ALARMER | Heureux si ses discours craints du chaste lecteur, Ne se sentaient des lieux où fréquentait l'auteur, Et si du son hardi de ses rimes cyniques, Il n'alarmait souvent les oreilles pudiques |
AMASSER | La vieillesse chagrine incessamment amasse |
AMBITIEUX, EUSE | L'ode avec plus plus d'éclat et non moins d'énergie, Élevant jusqu'au ciel son vol ambitieux |
AMORCE | Craignez d'un vain plaisir les trompeuses amorces |
AMOUREUX, EUSE | Tous ces pompeux amas d'expressions frivoles Sont d'un déclamateur amoureux de paroles |
AMPOULÉ, ÉE | Ni d'un vers ampoulé l'orgueilleux solécisme |
AMUSEMENT | Le lecteur sage fuit un vain amusement |
APPAUVRIR | Souvent trop d'abondance appauvrit la matière |
APPLAUDIR | À son entrée tout le monde applaudit Tel vous semble applaudir, qui vous raille et vous joue |
APPUI | Et sous l'appui des lois mit la faible innocence |
ARDENT, ENTE | Tantôt comme une abeille ardente à son ouvrage |
ARÈNE | J'aime mieux un ruisseau qui, sur la molle arène, En un pré plein de fleurs lentement se promène |
ARRIVER | Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement, Et les mots pour le dire arrivent aisément |
ART | Mettant leur Apollon aux gages d'un libraire, Ils font d'un art divin un métier mercenaire |
ARTISTEMENT | Six vers artistement rangés |
ASSASSIN | Dans Florence jadis vivait un médecin, Savant hâbleur, dit-on, et célèbre assassin |
ASSIDU, UE | Écoutez tout le monde, assidu consultant ; Un fat quelquefois ouvre un avis important |
ASSORTI, IE | Que d'un art délicat les pièces assorties N'y forment qu'un seul tout de diverses parties |
ASTAROTH | [Ces poëtes] N'offrent rien qu'Astaroth, Belzébut, Lucifer |
ASTRAGALE | Ce ne sont que festons, ce ne sont qu'astragales |
ASTRE | Si son astre en naissant ne l'a formé poëte |
ATHÉISME | À la fin tous ces jeux que l'athéisme élève Conduisent tristement le plaisant à la grève |
ATHLÈTE | Aux athlètes dans Pise elle [l'ode] ouvre la barrière |
ATTACHER | Inventez des ressorts qui puissent m'attacher |
ATTIÉDIR | Vos froids raisonnements ne feront qu'attiédir Un spectateur.... |
AUTEL | À sa gloire en cent lieux fit dresser des autels |
AVANT | Avant donc que d'écrire apprenez à penser |
BADINAGE | Faire Dieu le sujet d'un badinage affreux |
BADINAGE | Imitez de Marot l'élégant badinage |
BADINER | Ce n'est pas quelquefois qu'une muse un peu fine Sur un mot en passant ne joue et ne badine |
BALLADE | La ballade, asservie à ses vieilles maximes, Souvent doit tout son lustre au caprice des rimes |
BALUSTRE | Là ce balcon s'enferme en un balustre d'or |
BARBARE | D'un seul nom quelquefois le son dur et bizarre Rend un poëme entier ou burlesque ou barbare |
BARBARISME | Mon esprit n'admet point un pompeux barbarisme, Ni d'un vers ampoulé l'orgueilleux solécisme |
BARBON | Enfant au premier acte et barbon au dernier |
BARBOUILLÉ, ÉE | Thespis fut le premier qui, barbouillé de lie.... |
BARQUE | Empêcher que Caron, dans la fatale barque, Ainsi que le berger, ne passe le monarque |
BARRIÈRE | Aux athlètes dans Pise elle ouvre la barrière |
BASSESSE | Le vers se sent toujours des bassesses du coeur |
BASSESSE | Quoi que vous écriviez, évitez la bassesse |
BEAU ou BEL, BELLE | Rien n'est beau que le vrai, le vrai seul est aimable |
BEAUTÉ | Ses ouvrages, tout pleins d'affreuses vérités, Étincellent pourtant de sublimes beautés |
BIENSÉANCE | .... La scène demande une exacte raison ; L'étroite bienséance y veut être gardée |
BIZARRE | Un honnête homme, un fat, un jaloux, un bizarre |
BOND | Sa muse.... Ne s'élève jamais que par sauts et par bonds |
BORNER | Qui ne sait se borner ne sut jamais écrire |
BOUFFON, ONNE | Mais de ce style [le burlesque] enfin la cour désabusée, Dédaigna de ces vers l'extravagance aisée, Distingua le naïf du plat et du bouffon |
BOUT | comm, On dit, à ce propos, qu'un jour ce dieu bizarre, Voulant pousser à bout tous les rimeurs françois, Inventa du sonnet les rigoureuses lois |
BOUTIQUE | Et Gombaud tant loué garde encor la boutique |
BRAVER | Le latin dans les mots brave l'honnêteté ; Mais le lecteur français veut être respecté |
BRIGUE | Ne descendons jamais dans ces lâches intrigues ; N'allons point à l'honneur par de honteuses brigues |
BRODEQUIN | Eschyle dans le choeur jeta les personnages, D'un masque plus honnête habilla leurs visages, Sur les ais d'un théâtre en public exhaussé Fit paraître l'acteur d'un brodequin chaussé |
BROUILLER | Ronsard qui le suivit, par une autre méthode, Réglant tout, brouilla tout, fit un art à sa mode |
BURLESQUE | D'un seul nom quelquefois le son dur ou bizarre Rend un poëme entier ou burlesque ou barbare |
BURLESQUE | Que ce style jamais ne souille votre ouvrage ; Imitons de Marot l'élégant badinage, Et laissons le burlesque aux plaisants du pont Neuf |
CABALER | Du mérite éclatant cette sombre rivale [l'envie] Contre lui chez les grands incessamment cabale |
CADENCE | Enfin Malherbe vint, et le premier en France, Fit sentir dans les vers une juste cadence |
CAPRICE | .... Un baiser cueilli sur les lèvres d'Iris, Qui mollement résiste et par un doux caprice Quelquefois le refuse afin qu'on le ravisse |
CAPRICE | L'élégie en orna ses douloureux caprices |
CAPTIF, IVE | Dans son génie étroit il est toujours captif ; Pour lui Phébus est sourd et Pégase est rétif |
CARRIÈRE | Aux athlètes dans Pise elle ouvre la barrière, Chante un vainqueur poudreux au bout de la carrière |
CEINTURE | On dirait que, pour plaire instruit par la nature, Homère ait à Vénus dérobé sa ceinture |
CENSURE | Craignez-vous pour vos vers la censure publique, Soyez-vous à vous-même un sévère critique |
CHANSON | Il faut même en chansons du bon sens et de l'art |
CHANSON | Un amant de son père écoute les leçons, Et court chez sa maîtresse oublier ces chansons [remontrances] |
CHANSONNETTE | Souvent l'auteur altier de quelque chansonnette Au même instant prend droit de se croire poëte |
CHANTER | Je chante les combats et cet homme pieux Qui, des bords phrygiens conduit dans l'Ausonie, Le premier aborda les champs de Lavinie |
CHANTRE | Du plus habile chantre un bouc était le prix |
CHAQUE | Chaque passion parle un différent langage |
CHARBONNER | Charbonner de ses vers les murs d'un cabaret |
CHARGÉ, ÉE | N'offrez point un sujet d'incidents trop chargé |
CHARGER | .... D'acteurs mal ornés chargeant un tombereau |
CHARGER | Telle qu'une bergère aux plus beaux jours de fête De superbes rubis ne charge point sa tête |
CHARMANT, ANTE | Si l'or seul a pour vous d'invincibles appâts, Fuyez ces lieux charmants qu'arrose le Permesse, Ce n'est point sur ses bords qu'habite la richesse |
CHARMER | Ainsi, pour nous charmer, la tragédie en pleurs, D'Oedipe tout sanglant fit parler les douleurs |
CHASTE | Ses discours craints du chaste lecteur |
CHASTEMENT | L'amour le moins honnête, exprimé chastement, N'excite point en nous de honteux mouvement |
CHATOUILLER | Un auteur vertueux en ses vers innocents Ne corrompt point le coeur en chatouillant les sens |
CHERCHER | Que jamais du sujet le discours s'écartant N'aille chercher trop loin quelque mot éclatant |
CHERCHER | Un censeur.... dont le crayon sûr aille d'abord chercher L'endroit que l'on sent faible et qu'on se veut cacher |
CHIMÉRIQUE | Enflant d'un vain orgueil son esprit chimérique |
CHOEUR | La tragédie, informe et grossière en naissant, N'était qu'un simple choeur où chacun, en dansant, Et du dieu des raisins entonnant les louanges, S'efforçait d'attirer de fertiles vendanges |
CHOIX | Il est un heureux choix de mots harmonieux ; Fuyez des mauvais sons le concours odieux |
CIEL | S'il ne sent point du ciel l'influence secrète, Si son astre en naissant ne l'a formé poëte |
CIRCONSTANCE | C'est là [dans le poëme épique] qu'il faut des vers étaler l'élégance ; N'y présentez jamais de basse circonstance |
CITÉ | Mais du discours enfin l'harmonieuse adresse Rassembla les humains dans les forêts épars, Enferma les cités de murs et de remparts |
CLAIREMENT | Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement |
CLIMAT | Les climats font souvent les diverses humeurs |
COEUR | Il faut que le coeur seul parle dans l'élégie |
COLÈRE | La colère est superbe et veut des mots altiers |
COMBAT | Je chante les combats |
COMBLE | Que le trouble [dans une pièce de théâtre], toujours croissant de scène en scène, à son comble arrivé se débrouille sans peine |
COMÉDIE | Des succès fortunés du spectacle tragique Dans Athènes naquit la comédie antique |
COMIQUE | J'aime mieux Arioste et ses fables comiques |
COMIQUE | Que la nature donc soit votre étude unique, Auteurs qui prétendez aux honneurs du comique |
COMMERCE | Entretient dans ses vers commerce avec les dieux |
COMMUN, UNE | Soyez plutôt maçon si c'est votre talent, Ouvrier estimé dans un art nécessaire, Qu'écrivain du commun et poëte vulgaire |
CONCEVOIR | Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement |
CONCOURS | Fuyez des mauvais sons le concours odieux |
CONDUIRE | Souvent la peur d'un mal nous conduit dans un pire |
CONSEILLER | Aimez qu'on vous conseille et non pas qu'on vous loue |
CONSTRUCTION | Votre construction semble un peu s'obscurcir |
CONSULTANT | Écoutez tout le monde, assidu consultant |
CONSULTER | Craignez d'un vain plaisir les trompeuses amorces, Et consultez longtemps votre esprit et vos forces |
CONSUMER | N'allez pas sur des vers sans fruit vous consumer |
CONTAGION | Cette contagion [du mauvais goût] infecta les provinces |
CONVERSER | C'est peu d'être agréable et charmant dans un livre ; Il faut encor savoir et converser et vivre |
CONVERTIR | Tout ce qu'il a touché se convertit en or |
CORRIDOR | Ici s'offre un perron, là règne un corridor |
COUPABLE | Trahissant la vertu sur un papier coupable |
COUPLET | Et fournir sans génie un couplet à Linière |
COURAGE | Homère aux grands exploits anima les courages |
COURONNÉ, ÉE | Si bientôt imprimant ses sottes rêveries, Il ne se fait graver au devant du recueil, Couronné de lauriers par la main de Nanteuil |
CRAINTIF, IVE | Loin ces rimeurs craintifs, dont l'esprit flegmatique Garde dans ses fureurs un ordre didactique |
CRAYON | [Un censeur].... dont le crayon sûr d'abord aille chercher L'endroit que l'on sent faible et qu'on se veut cacher |
CRI | Que produira l'auteur après de si grands cris ? La montagne en travaille enfante une souris |
CRI | Juvénal, élevé dans les cris de l'école, Poussa jusqu'à l'excès sa mordante hyperbole |
CRITIQUE | Craignez-vous pour vos vers la censure publique, Soyez-vous à vous-même un sévère critique |
CROÎTRE | Que le trouble, toujours croissant de scène en scène, à son comble arrivé, se débrouille sans peine |
CUEILLI, IE | [L'ode] Vante un baiser cueilli sur les lèvres d'Iris, Qui mollement résiste, et, par un doux caprice, Quelquefois le refuse afin qu'on le ravisse |
CUEILLIR | Telle qu'une bergère au plus beau jour de fête De superbes rubis ne charge point sa tête, Et, sans mêler à l'or l'éclat des diamants, Cueille en un champ voisin ses plus beaux ornements |
CYNIQUE | Et si du son hardi de ses rimes cyniques Il [Régnier] n'alarmait souvent les oreilles pudiques |
DAMERET | Gardez donc de donner, ainsi que dans Clélie, L'air ni l'esprit français à l'antique Italie, Et, sous des noms romains faisant notre portrait, Peindre Caton galant et Brutus dameret |
DÉBROUILLER | illon sut le premier, dans ces siècles grossiers, Débrouiller l'art confus de nos vieux romanciers |
DÉBUT | Que le début [du poëme] soit simple et n'ait rien d'affecté |
DÉCLAMATEUR | Tous ces pompeux amas d'expressions frivoles Sont d'un déclamateur amoureux de paroles |
DÉCLINER | J'aimerais mieux encor qu'il déclinât son nom, Et dît : je suis Oreste ou bien Agamemnon |
DÉCOUVRIR | La nature féconde en bizarres portraits, Dans chaque âme est marquée à de différents traits ; Un geste la découvre, un rien la fait paraître |
DÉFAUT | Un sonnet sans défaut vaut seul un long poëme |
DEGRÉ | Il n'est point de degré du médiocre au pire |
DELÀ | Un rimeur sans péril, delà les Pyrénées |
DÉLICAT, ATE | D'un pinceau délicat l'artifice agréable Du plus affreux objet fait un objet aimable |
DÉPEINDRE | S'il rencontre un palais, il m'en dépeint la face |
DÉPENS | Aux dépens du bon sens gardez de plaisanter |
DÉPLOYER | La liberté française en ces vers se déploie |
DÉPOUILLER | Tantôt, comme une abeille ardente en son ouvrage, Elle s'en va de fleurs dépouiller le rivage |
DÉPOUILLER | Dépouillez devant eux l'arrogance d'auteur |
DÉRIDER | J'aime mieux Arioste et ses fables comiques Que les auteurs toujours froids et mélancoliques Qui, dans leur sombre humeur, se croiraient faire affront, Si les Grâces jamais leur déridaient le front |
DÉSABUSÉ, ÉE | Mais de ce style enfin la cour désabusée Dédaigna de ces vers l'extravagance aisée, Distingua le naïf du plat et du bouffon.... |
DESCRIPTION | Soyez riche et pompeux dans vos descriptions |
DÉSERTEUR | Je ne puis admirer ces dangereux auteurs Qui, de l'honneur en vers infâmes déserteurs, Trahissent la vertu sur un papier coupable |
DÉSORDRE | Son style impétueux [de l'ode] souvent marche au hasard ; Chez elle un beau désordre est un effet de l'art |
DÉSORDRE | La raison outragée enfin ouvrit les yeux, La chassa [la pointe] pour jamais des discours sérieux.... Ainsi de toutes parts les désordres cessèrent |
DESPOTIQUE | Vous avez sur ses vers un pouvoir despotique |
DÉTAIL | Ne vous chargez jamais d'un détail inutile ; Tout ce qu'on dit de trop est fade et rebutant |
DÉTENDRE | Si le sens de vos vers tarde à se faire entendre, Mon esprit aussitôt commence à se détendre |
DÉTESTABLE | Qui dit froid écrivain dit détestable auteur |
DIABLE | Eh ! quel objet enfin à présenter aux yeux Que le diable toujours hurlant contre les cieux ? |
DIAMANT | Et, sans mêler à l'or l'éclat des diamants, Cueille en un champ voisin ses plus beaux ornements |
DIDACTIQUE | Loin ces rimeurs craintifs dont l'esprit flegmatique Garde dans ses fureurs un ordre didactique |
DIEU | Et, fabuleux chrétiens, n'allons point dans nos songes, D'un Dieu de vérité faire un Dieu de mensonges |
DIFFAMER | J'aime sur le théâtre un agréable auteur Qui, sans se diffamer aux yeux du spectateur, Plaît par la raison seule.... |
DIGUE | Où sont ces grands guerriers dont les fatales ligues Devaient à ce torrent opposer tant de digues ? |
DIRE | Qui dit froid écrivain dit détestable auteur |
DIRE | On dirait que, pour plaire, instruit par la nature, Homère ait à Vénus dérobé sa ceinture |
DISCERNER | ....Sachez de l'ami discerner le flatteur |
DISCOURS | Voulez-vous du public mériter les amours, Sans cesse en écrivant variez vos discours |
DISETTE | Mais quoi ! dans la disette une muse affamée Ne peut pas, dira-t-on, subsister de fumée |
DIVERS, ERSE | La fable offre à l'esprit mille agréments divers |
DIVERTISSEMENT | Un lecteur sage fuit un vain amusement, Et veut mettre à profit son divertissement |
DIVIN, INE | Sans la langue en un mot, l'auteur le plus divin Est toujours, quoi qu'il fasse, un méchant écrivain |
DIVINITÉ | [Dans le poëme épique] Chaque vertu devient une divinité |
DOCTEUR | On chassa ces docteurs prêchant sans mission |
DOUCEREUX, EUSE | Peignez donc, j'y consens, les héros amoureux, Mais ne m'en faites pas des bergers doucereux |
DOULEUR | Il faut dans la douleur que vous vous abaissiez ; Pour me tirer des pleurs il faut que vous pleuriez |
DOULEUR | Le comique, ennemi des soupirs et des pleurs, N'admet point en ses vers de tragiques douleurs |
DOUX, DOUCE | Oh ! que j'aime bien mieux cet auteur plein d'adresse Qui, sans faire d'abord de si haute promesse, Me dit d'un ton aisé, doux, simple, harmonieux.... |
DOUX, DOUCE | Passer du grave au doux, du plaisant au sévère |
ÉCARTER | Jamais de la nature il ne faut s'écarter |
ÉCHO | Écho n'est plus un son qui dans l'air retentisse, C'est une nymphe en pleurs qui se plaint de Narcisse |
ÉCLAIRCIR | Ce terme est équivoque, il le faut éclaircir |
ÉCLAIRER | Faites choix d'un censeur solide et salutaire, Que la raison conduit et le savoir éclaire |
ÉCOLIER, IÈRE | Un poëme excellent où tout marche et se suit.... Jamais d'un écolier ne fut l'apprentissage |
ÉCOUTER | Écoutez tout le monde, assidu consultant ; Un fat quelquefois ouvre un avis important |
ÉCRIRE | Quoi que vous écriviez, évitez la bassesse ; Le style le moins noble a pourtant sa noblesse |
ÉCRIRE | Avant donc que d'écrire, apprenez à penser |
ÉCRIRE | Qui ne sait se borner ne sut jamais écrire |
ÉCRIT | Surtout qu'en vos écrits la langue révérée Dans vos plus grands excès vous soit toujours sacrée |
ÉCRIVAIN | Travaille pour la gloire, et qu'un sordide gain Ne soit jamais l'objet d'un illustre écrivain |
ÉCRIVAIN | Soyez plutôt maçon, si c'est votre talent, Ouvrier estimé dans un art nécessaire, Qu'écrivain du commun et poëte vulgaire |
EFFACER | Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage ; Polissez-le sans cesse et le repolissez ; Ajoutez quelquefois et souvent effacez |
EFFRONTÉ, ÉE, | Au mépris du bon sens, le burlesque effronté Trompa les yeux d'abord, plut par sa nouveauté |
ÉGAL, ALE | Un style trop égal et toujours uniforme En vain brille à nos yeux, il faut qu'il nous endorme |
ÉGAYÉ, ÉE | De la foi d'un chrétien les mystères terribles D'ornements égayés ne sont pas susceptibles |
ÉGAYER | Ainsi, dans cet amas de nobles fictions, Le poëte s'égaye en mille inventions |
ÉGLOGUE | Mais souvent dans ce style un rimeur aux abois Jette là de dépit la flûte et le hautbois, Et, follement pompeux dans sa verve indiscrète, Au milieu d'une églogue entonne la trompette |
ÉLÉGANT, ANTE | Imitons de Marot l'élégant badinage |
ÉLÉGIE | La plaintive élégie en longs habits de deuil Sait les cheveux épars gémir sur un cercueil ; Elle plaint des amants la joie et la tristesse, Flatte, menace, irrite, apaise une maîtresse ; Mais, pour bien expliquer ses caprices heureux, C'est peu d'être poëte, il faut être amoureux |
ÉLEVER | À la fin tous ces jeux que l'athéisme élève |
ÉLOGE | Il vous comble partout d'éloges fastueux |
EMBARRASSER | Il est certains esprits dont les sombres pensées Sont d'un nuage épais toujours embarrassées |
EMPARER (S') | Bientôt l'amour, fertile en tendres sentiments, S'empara du théâtre ainsi que des romans |
EMPHASE | Il réprime des mots l'ambitieuse emphase ; Ici le sens le choque, et plus loin c'est la phrase |
EMPRUNTER | Aimez donc la raison, et que tous vos écrits Empruntent d'elle seule et leur lustre et leur prix |
EN | [Le jeune homme] Est vain dans ses discours, volage en ses désirs |
EN | La tragédie, informe et grossière en naissant, N'était qu'un simple choeur.... |
EN | [Le jeune homme] Est vain dans ses discours, volage en ses désirs |
ENCHANTER | Là pour nous enchanter tout est mis en usage ; Tout prend un corps, une âme, un esprit, un visage |
ENCLIN, INE | Plus enclin à blâmer que savant à bien faire |
ENDORMIR | Un style trop égal et toujours uniforme En vain brille à nos yeux, il faut qu'il nous endorme |
ENFANT | Un rimeur, sans péril, de là les Pyrénées, Sur la scène en un jour enferme des années ; Là souvent le héros d'un spectacle grossier, Enfant au premier acte, est barbon au dernier |
ENFANTER | Que Racine, enfantant des miracles nouveaux, De ses héros sur lui [le roi] forme tous les tableaux |
ENFIN | Enfin Malherbe vint, et le premier en France, Fit sentir dans les vers une juste cadence |
ENFIN | Et, pour finir enfin par un trait de satire, Un sot trouve toujours un plus sot qui l'admire |
ENFUMER | Mais, pour un vain bonheur qui vous a fait rimer, Gardez qu'un sot orgueil ne vous vienne enfumer |
ENJAMBER | Enfin Malherbe vint.... Et le vers sur le vers n'osa plus enjamber |
ENNUYER | On lit peu ces auteurs faits pour nous ennuyer, Qui toujours sur un ton semblent psalmodier |
ÉNONCER | Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement |
ENTASSER | La vieillesse chagrine incessamment amasse, Garde non pas pour soi les trésors qu'elle entasse |
ENTONNER | Et du dieu des raisins entonnant les louanges |
ENTRAILLES | Un auteur qui, pressé d'un besoin importun, Le soir entend crier ses entrailles à jeun, Goûte peu d'Hélicon les douces promenades |
ENTRÉE | Que dès les premiers vers l'action préparée, Sans peine du sujet aplanisse l'entrée |
ENVELOPPER | Dans ce sac ridicule où Scapin s'enveloppe, Je ne reconnais plus l'auteur du Misanthrope |
ÉPARS, ARSE | La plaintive élégie, en longs habits de deuil, Sait, les cheveux épars, gémir sur un cercueil |
ÉPICIER, IÈRE | Tes vers, aussi peu lus que ceux de Pelletier, N'ont fait de chez Sercy qu'un saut chez l'épicier |
ÉPIGRAMME | D'un trait plaisant aiguiser l'épigramme |
ÉPINEUX, EUSE | À vous qui.... Courez du bel esprit la carrière épineuse |
ÉPIQUE | D'un air plus grand encor la poésie épique, Dans le vaste récit d'une longue action, Se soutient par la fable et vit de fiction |
ÉPURÉ, ÉE | Par ce sage écrivain la langue réparée N'offrit plus rien de rude à l'oreille épurée |
ÉQUERRE | Notre assassin [un mauvais médecin] renonce à son art inhumain, Et, désormais la règle et l'équerre à la main, Laissant de Galien la science suspecte, De méchant médecin devient bon architecte |
ÉQUITÉ | La force tenait lieu de droit et d'équité |
ÉQUIVOQUE | Ce terme est équivoque, il le faut éclaircir |
ESCALIER | Au vestibule obscur il marque une autre place, Approuve l'escalier tourné d'autre façon |
ESCLAVE | La rime est une esclave et ne doit qu'obéir |
ESCRIMER | Laissons-les donc entre eux s'escrimer en repos |
ESPRIT | Ô vous donc qui, brûlant d'une ardeur périlleuse, Courez du bel esprit la carrière épineuse |
ESPRIT | Je sais qu'un noble esprit peut sans honte et sans crime Tirer de son travail un tribut légitime |
ÉTALER | Voulez-vous sur la scène étaler des ouvrages Où tout Paris en foule apporte ses suffrages |
ÉTEINDRE | Et son feu [d'un auteur], dépourvu de sens et de lecture, S'éteint à chaque pas faute de nourriture |
ÉTENDUE | Donnez à votre ouvrage une juste étendue |
ÉTINCELER | Ses ouvrages [de Juvénal], tout pleins d'affreuses vérités, Étincellent pourtant de sublimes beautés |
ÉTROIT, OITE | Si son astre en naissant ne l'a formé poëte, Dans son génie étroit il est toujours captif ; Pour lui Phébus est sourd, et Pégase est rétif |
ÉVEILLER | Il faut que sa douceur [de l'idylle] flatte, chatouille, éveille |
ÉVÉNEMENT | Chaque vers, chaque mot court à l'événement |
ÉVERTUER (S') | Lorsqu'à la bien chercher d'abord on s'évertue [la rime] |
ÉVITER | Un vers était trop faible, et vous le rendez dur ; J'évite d'être long et je deviens obscur |
EXCELLENT, ENTE | La nature, fertile en esprits excellents, Sait entre les auteurs partager les talents |
EXCELLER | Tel excelle à rimer qui juge sottement |
EXERCER | Le meurtre s'exerçait avec impunité |
EXHAUSSÉ, ÉE | Éschyle dans le choeur jeta les personnages, D'un masque plus honnête habilla les visages, Sur les ais d'un théâtre en public exhaussé Fit paraître l'acteur d'un brodequin chaussé |
EXPLIQUER | Ainsi la tragédie agit, marche et s'explique |
EXPLOIT | Bientôt, ressuscitant les héros des vieux âges, Homère aux grands exploits anima les courages |
EXPOSER | Ce qu'on ne doit point voir, qu'un récit nous l'expose |
EXPRESSION | Selon que notre idée est plus ou moins obscure, L'expression la suit ou moins nette ou plus pure |
EXPRIMER | Mais, pour bien exprimer ces caprices heureux [de l'élégie], C'est peu d'être poëte, il faut être amoureux |
EXTASIER (S') | Chaque vers qu'il entend le fait extasier |
FABLE | La Fable offre à l'esprit mille agréments divers |
FACE | S'il rencontre un palais, il m'en décrit la face |
FACE | D'un secret tout à coup la vérité connue Change tout, donne à tout une face imprévue |
FADE | Tout ce qu'on dit de trop est fade et rebutant |
FANGEUX, EUSE | J'aime mieux un ruisseau.... Qu'un torrent débordé qui, d'un cours orageux, Roule plein de gravier sur un terrain fangeux |
FARD | Soyez simple avec art, Sublime sans orgueil, agréable sans fard |
FARDÉ, ÉE | L'un n'est point trop fardé, mais sa muse est trop nue |
FASTE | Mais sa muse [de Ronsard], en français parlant grec et latin, Vit dans l'âge suivant, par un retour grotesque, Tomber de ses grands mots le faste pédantesque |
FASTUEUX, EUSE | Son tour [de l'idylle] simple et naïf n'a rien de fastueux |
FAT | Écoutez tout le monde, assidu consultant ; Un fat quelquefois ouvre un avis important |
FAUX, FAUSSE | Quelquefois du bon or je sépare le faux |
FÉCOND, ONDE | Qu'en nobles sentiments il soit toujours fécond |
FERTILE | Ainsi qu'en sots auteurs, Notre siècle est fertile en sots admirateurs |
FESTON | Ce ne sont que festons, ce ne sont qu'astragales |
FEU | Sa muse en arrivant ne met pas tout en feu |
FEUILLET | Je saute vingt feuillets pour en trouver la fin |
FICTION | La poésie épique.... Se soutient par la fable et vit de fiction |
FIGURE | De figures sans nombre égayez votre ouvrage |
FIGURER | Bientôt ils défendront de peindre la prudence, De donner à Thémis ni bandeau ni balance, De figurer aux yeux la guerre au front d'airain |
FLAMME | L'un peut tracer en vers une amoureuse flamme |
FLATTER | Mais tout ce beau discours dont il vient vous flatter N'est rien qu'un piége adroit.... |
FLATTEUR, EUSE | Mais sachez de l'ami discerner le flatteur |
FLÉCHIR | [L'ode] Mène Achille sanglant au bord du Simoïs, Ou fait fléchir l'Escaut sous le joug de Louis |
FLEGMATIQUE | Loin ces rimeurs craintifs dont l'esprit flegmatique.... |
FLEUR | Le poëte.... ....Orne, élève, embellit, agrandit toutes choses, Et trouve sous sa main des fleurs toujours écloses |
FLEURIR | Marot, bientôt après fit fleurir les ballades |
FOI | Cultivez vos amis, soyez homme de foi |
FOIS | Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage, Polissez-le sans cesse et le repolissez |
FOLLEMENT | Et, follement pompeux, dans sa verve indiscrète |
FORCE | La force tenait lieu de droit et d'équité |
FORCE | Craignez d'un vain plaisir les trompeuses amorces, Et consultez longtemps votre esprit et vos forces |
FORCÉ, ÉE | Que de remparts détruits ! que de villes forcées ! |
FORÊT | Rassembler les humains dans les forêts épars |
FOU ou FOL, FOLLE | C'était un riche abbé fou de l'architecture |
FOUDROYÉ, ÉE | Besançon fume encor sur son roc foudroyé |
FOURMILLER | C'est peu qu'en un ouvrage où les fautes fourmillent Des traits d'esprit semés de temps en temps pétillent |
FRANÇAIS, AISE | Le Français, né malin, forma le vaudeville |
FRAPPER | Voilà ce qui surprend, frappe, saisit, attache |
FREDONNER | On dirait que Ronsard sur ses pipeaux rustiques Vient encor fredonner ses idylles gothiques |
FRÉNÉSIE | Le rhume à son aspect se change en pleurésie, Et par lui la migraine est bientôt frénésie |
FRÉQUENTER | Heureux si ses discours [de Régnier], craints du chaste lecteur, Ne se sentaient des lieux où fréquentait l'auteur |
FRONT | J'aime mieux Arioste et ses fables comiques Que ces auteurs toujours froids et mélancoliques Qui dans leur sombre humeur se croiraient faire affront Si les grâces jamais leur déridaient le front |
FRUIT | N'allez pas sur des vers sans fruit vous consumer |
FUITE | Chanter du peuple hébreu la fuite triomphante |
FUMÉE | ....Une muse affamée Ne peut pas, dira-t-on, subsister de fumée |
GAIN | Travaillez pour la gloire, et qu'un sordide gain Ne soit jamais l'objet d'un illustre écrivain |
GALANT, ANTE | Gardez donc de donner, ainsi que dans Clélie, L'air ni l'esprit français à l'antique Italie, Et, sous des noms romains faisant notre portrait, Peindre Caton galant et Brutus dameret |
GARDER | Gardez donc de donner ainsi que dans Clélie L'air ni l'esprit français à l'antique Italie |
GARDER | Gardez qu'une voyelle à courir trop hâtée Ne soit d'une voyelle en son chemin heurtée |
GARDER | Gardez-vous d'imiter ce rimeur furieux |
GASCON, ONNE | Tout a l'humeur gasconne en un auteur gascon |
GÉNIE | Mais pourtant on a vu le vin et le hasard Inspirer quelquefois une muse grossière, Et fournir sans génie un couplet à Linière |
GÉNIE | Dans son génie étroit il est toujours captif, Pour lui Phébus est sourd et Pégase est rétif |
GLACÉ, ÉE | Je hais ces vains auteurs dont la muse forcée M'entretient de ses feux, toujours froide et glacée |
GLACER | J'aime mieux Bergerac et sa burlesque audace Que ces vers où Motin se morfond et nous glace |
GOGUENARD, ARDE | Toutefois n'allez pas, goguenard dangereux, Faire Dieu le sujet d'un badinage affreux |
GOTHIQUE | On dirait que Ronsard sur ses pipeaux rustiques Vient encor fredonner ses idylles gothiques |
GOURMANDER | C'est Neptune en courroux qui gourmande les flots |
GRÂCE | Tout reçoit dans ses mains une nouvelle grâce |
GRAVE | Heureux qui dans ses vers sait d'une voix légère Passer du grave au doux, du plaisant au sévère ! |
GRAVIER | Un torrent débordé qui, d'un cours orageux, Roule plein de gravier sur un terrain fangeux |
GRÈVE | À la fin tous ces jeux, que l'athéisme élève, Conduisent tristement le plaisant à la Grève |
GRIMACER | Si, moins ami du peuple, en ses doctes peintures, Il [Molière] n'eût point fait souvent grimacer ses figures |
GROSSIER, IÈRE | Villon fut le premier dans ces siècles grossiers.... |
GROTESQUES | Mais sa muse [de Ronsard], en français parlant grec et latin, Vit dans l'âge suivant, par un retour grotesque, Tomber de ses grands mots le faste pédantesque |
GUÈRE ou GUÈRES | On ne lit guère plus Rampale et Ménardière, Que Magnon, du Souhait, Corbin et la Morlière |
GUERRE | Bientôt ils défendront.... De figurer aux yeux la Guerre au front d'airain |
GUERRIER, IÈRE | Aux plus savants auteurs comme aux plus grands guerriers Apollon ne promet qu'un nom et des lauriers |
HABILE | Du plus habile chantre un bouc était le prix |
HABILLER | Eschyle dans le choeur jeta les personnages, D'un masque plus honnête habilla les visages |
HABITER | Ce n'est point sur ses bords [du Permesse] qu'habite la richesse |
HABITUER | Mais, lorsqu'à la chercher [la rime] d'abord on s'évertue, L'esprit à la trouver aisément s'habitue |
HÂBLEUR, EUSE | Dans Florence jadis vivait un médecin, Savant hâbleur, dit-on, et célèbre assassin |
HALLE | Le Parnasse parla le langage des halles |
HARDIESSE | Souvent dans son orgueil un subtil ignorant Blâme des plus beaux vers la noble hardiesse |
HARMONIEUX, EUSE | Il est un heureux choix de mots harmonieux ; Fuyez des mauvais sons le concours odieux |
HARMONIEUX, EUSE | Gardez-vous d'imiter ce rimeur furieux Qui, de ses vains écrits lecteur harmonieux, Aborde en récitant quiconque le salue |
HASARD | Mais pourtant on a vu le vin et le hasard Inspirer quelquefois une muse grossière |
HÂTÉ, ÉE | Gardez qu'une voyelle à courir trop hâtée Ne soit d'une voyelle en son chemin heurtée |
HÂTER | Hâtez-vous lentement ; et, sans perdre courage, Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage |
HAUT, AUTE | Ce poëte orgueilleux [Ronsard] trébuché de si haut |
HAUTBOIS | Mais souvent dans ce style [le style pastoral] un rimeur aux abois Jette là, de dépit, la flûte et le hautbois, Et, follement pompeux en sa verve indiscrète, Au milieu d'une églogue entonne la trompette |
HAUTEUR | C'est en vain qu'au Parnasse un téméraire auteur Pense de l'art des vers atteindre la hauteur |
HAUTEUR | Sophocle.... Lui donna [à la tragédie] chez les Grecs cette hauteur divine Où jamais n'atteignit la faiblesse latine |
HÉMISTICHE | Que toujours, dans vos vers, le sens coupant les mots Suspende l'hémistiche, en marque le repos |
HÉRISSER | La prose la [la pointe] reçut aussi bien que les vers ; L'avocat au palais en hérissa son style |
HÉROÏQUE | Qu'en lui jusqu'aux défauts tout se montre héroïque |
HÉROS | ....Un écrivain qui s'aime Forme tous ses héros semblables à soi-même |
HEUREUX, EUSE | Il est un heureux choix de mots harmonieux ; Fuyez des mauvais sons le concours odieux |
HEURTER | Gardez qu'une voyelle à courir trop hâtée Ne soit d'une voyelle en son chemin heurtée |
HISTORIEN | Sans tous ces ornements [de la Fable] le vers tombe en langueur.... ; Le poëte n'est plus qu'un orateur timide, Qu'un froid historien d'une fable insipide |
HONNÊTETÉ | Le latin dans les mots brave l'honnêteté, Mais le lecteur français veut être respecté |
HONNEUR | N'allons point à l'honneur par de honteuses brigues |
HONNEUR | Que la nature donc soit votre étude unique, Auteurs qui prétendez aux honneurs du comique |
HORLOGE | Ou le temps qui s'enfuit une horloge à la main |
HUÉE | Et Socrate par lui, dans un choeur de nuées, D'un vil amas de peuple attirer les huées |
HUMBLE | Telle aimable en son air, mais humble dans son style, Doit éclater sans pompe une élégante idylle |
HUMEUR | Les climats font souvent les diverses humeurs |
HURLER | Eh ! quel objet enfin à présenter aux yeux Que le diable toujours hurlant contre les cieux ? |
HYPERBOLE | Juvénal, élevé dans les cris de l'école, Poussa jusqu'à l'excès sa mordante hyperbole |
IDÉE | Selon que notre idée est plus ou moins obscure, L'expression la suit ou moins nette ou plus pure |
IDYLLE | Telle aimable en son air, mais humble dans son style, Doit éclater sans pompe une élégante idylle ; Son tour simple et naïf n'a rien de fastueux, Et n'aime point l'orgueil d'un vers présomptueux |
IGNORANCE | L'ignorance toujours est prête à s'admirer |
IGNORER | Mais souvent un auteur qui se flatte et qui s'aime, Méconnaît son génie et s'ignore soi-même |
ILIADE | Le seul courroux d'Achille, avec art ménagé, Remplit abondamment une Iliade entière |
ILLUSTRER | C'est par là que Molière illustrant ses écrits... |
IMITÉ, ÉE | Il n'est point de serpent ni de monstre odieux Qui, par l'art imité, ne puisse plaire aux yeux |
IMPRESSION | Un jeune homme toujours bouillant dans ses caprices Est prêt à recevoir l'impression des vices |
IMPROMPTU | Il met tous les matins six impromptus au net |
IMPROPRE | En vain vous me frappez d'un son mélodieux, Si le terme est impropre ou le tour vicieux |
IMPRUDENCE | ....De pèlerins une troupe grossière.... Joua les saints, la Vierge et Dieu, par piété ; Le savoir, à la fin dissipant l'ignorance, Fit voir de ce projet la dévote imprudence |
IMPUR, URE | Du moindre sens impur la liberté l'outrage, Si la pudeur des mots n'en adoucit l'image |
INCESSAMMENT | La vieillesse chagrine incessamment amasse |
INCIDENT | N'offrez point un sujet d'incidents trop chargé |
INFECTER | Un vil amour du gain infectant les esprits |
INFLEXIBLE | Un sage ami, toujours rigoureux, inflexible, Sur vos fautes jamais ne vous laisse paisible |
INFLUENCE | S'il [le poëte] ne sent point du ciel l'influence secrète |
INFORME | La tragédie informe et grossière en naissant N'était qu'un simple choeur.... |
INTÉRESSER | Voulez-vous longtemps plaire et jamais ne lasser ? Faites choix d'un héros propre à m'intéresser |
INTRAITABLE | Mais souvent sur ses vers un auteur intraitable à les protéger tous se croit intéressé |
INTRIGUE | Ne descendons jamais dans ces lâches intrigues, N'allons point à l'honneur par de honteuses brigues |
INTRIGUE | Et qui, débrouillant mal une pénible intrigue, D'un divertissement me fait une fatigue |
INTRIGUER | L'âge viril, plus mûr, inspire un air plus sage, Se pousse auprès des grands, s'intrigue, se ménage |
INVENTION | Virgile au prix de lui n'a pas d'invention |
INVENTION | Le poëte [épique] s'égaye en mille inventions, Orne, élève, embellit, agrandit toutes choses |
IRIS | L'ode.... Vante un baiser cueilli sur les lèvres d'Iris |
JADIS | Dans Florence jadis vivait un médecin |
JALOUSIE | Fuyez surtout, fuyez ces basses jalousies, Des vulgaires esprits malignes frénésies |
JALOUSIE | Tels deux fougueux taureaux, de jalousie épris, Auprès d'une génisse au front large et superbe.... |
JEU | Insipides plaisants, bouffons infortunés, D'un jeu de mots grossier partisans surannés |
JEUNE | Le jeune homme, toujours bouillant dans ses caprices, Est prompt à recevoir l'impression des vices |
JOIE | Il trépigne de joie, il pleure de tendresse |
JOIE | Aux accès insolents d'une bouffonne joie La sagesse, l'esprit, l'honneur furent en proie |
JOUER | Ce n'est pas quelquefois qu'une muse un peu fine Sur un mot en passant ne joue et ne badine |
JOUER | Tel vous semble applaudir qui vous raille et vous joue |
JOUG | [La rime] Au joug de la raison sans peine elle fléchit, Et, loin de la gêner, la sert et l'enrichit |
JOUR | Tel écrit récité se soutint à l'oreille, Qui, dans l'impression au grand jour se montrant, Ne soutient pas des yeux le regard pénétrant |
JOYEUX, EUSE | ...Le petit enfant qui va, saute et revient, Et joyeux à sa mère offre un caillou qu'il tient |
JUDICIEUX, EUSE | Mais il est des objets que l'art judicieux Doit offrir à l'oreille et reculer des yeux |
JUGER | Tel excelle à rimer qui juge sottement |
LAISSER | Évitons cet excès ; laissons à l'Italie De tous ces faux brillants l'éclatante folie |
LANGAGE | Le Parnasse parla le langage des halles |
LANGAGE | Chaque passion parle un différent langage |
LANGUE | Surtout qu'en vos écrits la langue révérée Dans vos plus grands excès vous soit toujours sacrée.... |
LANGUE | Sans la langue, en un mot, l'auteur le plus divin Est toujours, quoi qu'il fasse, un méchant écrivain |
LAURIER | Aux plus savants auteurs, comme aux plus grands guerriers, Apollon ne promet qu'un nom et des lauriers |
LECTEUR, TRICE | Un lecteur sage fuit un vain amusement, Et veut mettre à profit son divertissement |
LECTURE | Et son feu, dépourvu de sens et de lecture, S'éteint à chaque pas faute de nourriture |
LÉGITIME | Je sais qu'un noble esprit peut, sans honte et sans crime, Tirer de son travail un tribut légitime |
LENTEMENT | J'aime mieux un ruisseau qui, sur la molle arène, Dans un pré plein de fleurs lentement se promène, Qu'un torrent... |
LICENCE | Enfin de la licence [de la comédie] on arrêta le cours |
LIE | Thespis fut le premier qui, barbouillé de lie, Promena par les bourgs cette heureuse folie [la tragédie] |
LIEU | Heureux si ses écrits [de Régnier], craints du chaste lecteur, Ne se sentaient des lieux où fréquentait l'auteur |
LIEU | Il faut que chaque chose y soit mise en son lieu [dans un poëme] |
LIMITE | Quelquefois dans sa course un esprit vigoureux, Trop resserré par l'art, sort des bornes prescrites, Et de l'art même apprend à franchir les limites |
LITIÈRE | Lucile le premier.... Vengea l'humble vertu de la richesse altière, Et l'honnête homme à pied du faquin en litière |
LIVRE | Son livre est d'agréments un fertile trésor |
LOIN | Loin ces rimeurs craintifs.... |
LONG, ONGUE | Un sonnet sans défaut vaut seul un long poëme |
LONG, ONGUE | J'évite d'être long, et je deviens obscur |
LOUER | Aimez qu'on vous conseille, et non pas qu'on vous loue |
LUSTRE | Aimez donc la raison ; que toujours vos écrits Empruntent d'elle seule et leur lustre et leur prix |
MAÇON | Soyez plutôt maçon si c'est votre talent, Ouvrier estimé dans un art nécessaire, Qu'écrivain du commun et poëte vulgaire |
MADRIGAL | Le madrigal, plus simple et plus noble en son tour, Respire la douceur, la tendresse et l'amour |
MAIN | Mais souvent sur ses vers un auteur intraitable, à les protéger tous se croit intéressé, Et d'abord prend en main le droit de l'offensé |
MAINTENIR | L'âge viril, plus mûr.... Contre les coups du sort songe à se maintenir |
MAISON | De tous ses amis morts un seul ami resté Le mène en sa maison de superbe structure |
MAL, ALE | Souvent la peur d'un mal nous conduit dans un pire |
MALIN, MALIGNE | D'un trait de ce poëme [la satire] en bons mots si fertile, Le Français, né malin, forma le vaudeville |
MANIÉ, ÉE | Que ses discours [de l'auteur comique], partout fertiles en bons mots, Soient pleins de passions finement maniées |
MARCHER | Marchez donc sur ses pas [de Malherbe], aimez sa pureté |
MARCHER | La vieillesse chagrine incessamment amasse.... Marche en tous ses desseins d'un pas lent et glacé |
MARCHER | La raison pour marcher n'a souvent qu'une voie |
MARCHER | Ainsi la tragédie agit, marche et s'explique |
MARCHER | Son style impétueux souvent marche au hasard |
MARQUER | Le magistrat des lois emprunta le secours [à Athènes], Et, rendant par édit les poëtes plus sages, Défendit de marquer les noms et les visages [dans la comédie] |
MARQUER | La nature féconde en bizarres portraits Dans chaque âme est marquée à de différents traits |
MARQUER | Au vestibule obscur il marque une autre place |
MARTYRE | Je hais ces vains auteurs.... Ils ne savent jamais que se charger de chaînes, Que bénir leur martyre, adorer leur prison.... |
MASCARADE | Marot bientôt après fit fleurir les ballades, Tourna des triolets, rima des mascarades |
MASQUE | Eschyle dans le choeur jeta les personnages, D'un masque plus honnête [que la lie dont Thespis se barbouillait] habilla les visages |
MAUVAIS, AISE | Fuyez des mauvais sons le concours odieux |
MAXIME | La ballade, asservie à ses vieilles maximes, Souvent doit tout son lustre au caprice des rimes |
MÉCHANT, ANTE | Sans la langue, en un mot, l'auteur le plus divin Est toujours, quoi qu'il fasse, un méchant écrivain |
MÉCONNAÎTRE | Et mille fois un fat finement exprimé Méconnut le portrait sur lui-même formé |
MÉDIOCRE | ....Dans l'art dangereux de rimer et d'écrire Il n'est point de degré du médiocre au pire |
MÉDIOCRITÉ | C'est un vice [la jalousie] qui suit la médiocrité |
MÉLANCOLIQUE | ....Ces auteurs toujours froids et mélancoliques, Qui, dans leur sombre humeur, se croiraient faire affront, Si les Grâces jamais leur déridaient le front |
MÉLANGE | Et de vos fictions le mélange coupable Même à ses vérités [de l'Évangile] donne l'air de la fable |
MÊLER | Et sans mêler à l'or l'éclat des diamants |
MÊLER | Horace à cette aigreur [la satire] mêla son enjouement ; On ne fut plus ni fat ni sot impunément |
MÉLODIEUX, EUSE | En vain vous me frappez d'un son mélodieux, Si le terme est impropre ou le tour vicieux.... |
MÊME | Mais souvent un esprit qui se flatte et qui s'aime, Méconnaît son génie et s'ignore soi-même |
MÉNADE | Horace a bu son soûl quand il voit les ménades |
MÉNAGÉ, ÉE | Le seul courroux d'Achille, avec art ménagé, Remplit abondamment une Iliade entière |
MÉNAGER | Nous voulons qu'avec art l'action [d'un poëme dramatique] se ménage |
MÉNAGER | L'âge viril.... Se pousse auprès des grands, s'intrigue, se ménage |
MENER | [L'ode] Mène Achille sanglant aux bords du Simoïs |
MÉPRIS | Au mépris du bon sens, le burlesque effronté Trompa les yeux d'abord.... |
MER | Ainsi tel.... S'en va, mal à propos, d'une voix insolente, Chanter du peuple hébreu la fuite triomphante, Et, poursuivant Moïse au travers des déserts, Court avec Pharaon se noyer dans les mers |
MERCENAIRE | Et font d'un art divin [la poésie] un métier mercenaire |
MÉRITÉ, ÉE | L'Évangile à l'esprit n'offre de tous côtés Que pénitence à faire et tourments mérités ; Et de vos fictions le mélange coupable Même à ses vérités donne l'air de la fable |
MERVEILLE | ....Un amas de vains admirateurs.... prompts à crier merveille |
MERVEILLE | Une merveille absurde est pour moi sans appas |
MESSALINE | Ou que, poussant à bout la luxure latine, Aux portefaix de Rome il [Juvénal] vende Messaline |
MESURE | Pour enfermer son sens dans la borne prescrite, La mesure est toujours trop longue ou trop petite |
MESURE | Et malheur à tout nom qui, propre à la censure, Put entrer dans un vers sans rompre la mesure |
MESURER | Lui-même [Apollon] en [du sonnet] mesura le nombre et la cadence |
MÉTHODE | Ronsard..., par une autre méthode, Réglant tout, brouilla tout, fit un art à sa mode |
MÉTHODIQUE | Sans garder dans ses vers un ordre méthodique, Son sujet de soi-même et s'arrange et s'explique |
MÉTIER | Ces auteurs... qui... Mettent leur Apollon aux gages d'un libraire, Et font d'un art divin un métier mercenaire |
MÉTIER | Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage, Polissez-le sans cesse et le repolissez |
MIEUX | Le vers le mieux rempli, la plus noble pensée... |
MILIEU | Que le début, la fin [d'un poëme] répondent au milieu |
MIROIR | Lucile le premier.... Aux vices des Romains présenta le miroir |
MISÈRE | Dans Florence jadis vivait un médecin, Savant hâbleur, dit-on, et célèbre assassin ; Lui seul y fit longtemps la publique misère |
MISSION | On chassa ces docteurs prêchant sans mission [ceux qui jouaient des mystères] |
MODE | Ronsard.... Réglant tout, brouilla tout, fit un art à sa mode |
MODÈLE | Étudiez la cour et connaissez la ville ; L'une et l'autre est toujours en modèles fertile |
MODÈLE | .... Ce guide fidèle [Malherbe] Aux auteurs de ce temps sert encor de modèle |
MOEURS | Des siècles, des pays étudiez les moeurs |
MOEURS | Chaque âge a ses plaisirs, son esprit et ses moeurs |
MOLLEMENT | Vante un baiser cueilli sur les lèvres d'Iris, Qui mollement résiste.... |
MONARQUE | Empêcher que Caron, dans sa fatale barque, Ainsi que le berger, ne passe le monarque |
MONTAGNE | Que produit un auteur après tous ces grands cris ? La montagne en travail enfante une souris |
MONTAGNE | De morts et de mourants cent montagnes plaintives |
MONTER | ....Le théâtre abhorré Fut longtemps de la France un plaisir ignoré ; De pèlerins, dit-on, une troupe grossière En public à Paris y monta la première |
MONTRER | Marot.... Tourna des triolets.... Et montra pour rimer des chemins tout nouveaux |
MONTRER | D'un nouveau personnage inventez-vous l'idée ? Qu'en tout avec soi-même il se montre d'accord |
MORDANT, ANTE | Juvénal, élevé dans les cris de l'école, Poussa jusqu'à l'excès sa mordante hyperbole |
MORFONDRE | J'aime mieux Bergerac et sa burlesque audace, Que ces vers où Motin se morfond et nous glace |