Définition de FRONT

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : fron ; le t se lie : un fron-t élevé ; au pluriel, l's se lie : des fron-z élevés

DÉFINITIONS

1
Partie de la face qui s'étend de l'origine des cheveux aux sourcils et d'une tempe à l'autre. Un front large. Un front élevé. Il a le front bas.
Aux lauriers immortels qui lui ceignent le front
Elle vient, et son front, siége de la candeur, Annonce en rougissant les vertus de son coeur
Le front est une des grandes parties de la face, et l'une de celles qui contribuent le plus à la beauté de sa forme
Son front était pensif, son âme était émue
Partout où, le long des chemins, J'ai posé mon front dans mes mains, Et sangloté comme une femme...
de Alfred DE MUSSET dans Poésies nouv. Nuit de décembre
Sémantique : Fig.
Quant aux volontés souveraines De celui qui fait tout et rien qu'avec dessein, Qui les sait que lui seul ? comment lire en son sein ? Aurait-il imprimé sur le front des étoiles Ce que la nuit des temps enferme dans ses voiles ?
Quelle Jérusalem nouvelle.... Et porte sur le front une marque immortelle ?
Sion a son front dans les cieux
de Jean RACINE dans ib. III, 8
Frotter son front, geste que l'on fait quand on cherche quelque idée.
J'ai beau frotter mon front, j'ai beau mordre mes doigts ; Je ne puis arracher du creux de ma cervelle Que des vers plus forcés que ceux de la Pucelle
Se frapper le front, se dit d'un geste qu'on fait quand on a quelque inspiration ou réminiscence soudaine. Il se frappa le front, en s'écriant : J'y suis.
Donner du front contre, se heurter le devant de la tête contre.
Peut-être en ce moment, pour vous épouvanter, Il se soufflettera d'une main mutinée, Se donnera du front contre une cheminée
Dérider le front, ôter du front les rides qui indiquent le sérieux, la préoccupation.
J'aime mieux Arioste et ses fables comiques Que ces auteurs toujours froids et mélancoliques Qui dans leur sombre humeur se croiraient faire affront Si les grâces jamais leur déridaient le front
Le front rougit, se dit d'un sentiment de honte qui y fait monter la rougeur.
Son front, nouveau tondu, symbole de candeur, Rougit en approchant d'une honnête pudeur
Combien nos fronts pour elle ont-ils rougi de fois !
Je ne suis point de ces femmes hardies Qui, goûtant dans le crime une tranquille paix, Ont su se faire un front qui ne rougit jamais
Sémantique : Fig. N'avoir point de front, n'avoir ni honte, ni pudeur.
On dit, dans un sens analogue, endurcir son front.
Elle a endurci son front, elle ne sait plus rougir
2
Le devant de la tête de certains animaux. Le front d'un cheval, d'un boeuf.
Son front large [d'un monstre marin] est armé de cornes menaçantes
Chez les crustacés, intervalle qui sépare les yeux quand le bord antérieur de la tête ne se prolonge point en rostre.
Chez les insectes, partie antérieure et supérieure de la tête, comprise entre la bouche, les antennes, les yeux et l'occiput.
3
Se dit pour le visage entier. Un front serein. Un front sévère.
Il est vrai, s'agissant d'un secret qui nous touche, On croit que le front parle, au défaut de la bouche
Il lit au front de ceux qu'un vain luxe environne Que la fortune vend ce qu'on croit qu'elle donne
de Jean de LA FONTAINE dans Phil. et Bauc.
Ce front satisfait Dit assez à mes yeux que Porus est défait
Je me connais, je sais que, blanchi sous les armes, Ce front triste et sévère a pour vous peu de charmes
Songe à ce bras puissant, vainqueur de tant de rois, à cet aimable front que la gloire couronne
Il verra si mon front soutiendra la couronne
4
La tête, surtout dans le style élevé et les vers.
Chaque mot sur mon front fait dresser mes cheveux
Je renvoie Hermione, et je mets sur son front, Au lieu de ma couronne, un éternel affront
Et pourquoi me cacher ? et par quelle injustice Faut-il que sur mon front sa honte rejaillisse ?
Sémantique : Fig. Humilier, courber, baisser le front, se dit de l'humiliation, de l'abaissement de la servitude.
Avec plaisir, sans doute, il verrait à ses pieds Des sénateurs tremblants les fronts humiliés
J'en eus [des amis] quand j'étais reine, et le peu qui m'en reste Sous un joug étranger baisse un front abattu
Sémantique : Fig. Relever le front, reprendre du courage, de l'audace, de la fermeté.
Ainsi ce peuple esclave, oubliant son devoir, Contre son roi lève un front indocile
Messène après quinze ans de guerres intestines Lève un front moins timide et sort de ses ruines
Et lorsque l'Italie en secouant ses fers Lève un front menaçant....
de SAURIN dans Spartacus, I, 1
Reine du monde, ô France, ô ma patrie, Soulève enfin ton front cicatrisé
de Pierre Jean de BÉRANGER dans Enf. de la Fr.
Le front levé, c'est-à-dire avec assurance, sans craindre aucun reproche.
L'on aime à aller le front levé dans la famille des Pourceaugnac
Quand je vois dans ce temple, aux vertus élevé, L'infâme trahison marcher le front levé
L'impudicité ne marche pas le front levé chez les chrétiens
5
La personne elle-même, dans le langage poétique.
Le front à qui le coeur ne fait point de reproche Souffre aisément son juge et n'en craint point l'approche
Joint qu'au moindre attentat contre un front couronné C'est être criminel que d'être soupçonné
de Jean de ROTROU dans ib.
Souvenez-vous qu'il règne, et qu'un front couronné....
6
L'air, l'attitude, le langage, les manières, surtout en poésie.
Et reconnaissez-vous au front de vos amis Qu'ils soient prêts à tenir ce qu'ils vous ont promis ?
Mais sachez qu'il n'est point de si cruel trépas, Où d'un front assuré je ne porte mes pas
Il s'avance au trépas Avec le même front qu'il donnait les États
De quel front soutenir ce fâcheux entretien ?
Je verrai le témoin de ma flamme adultère Observer de quel front j'ose aborder son père
Ah ! Dieux ! lorsqu'à mes voeux l'ingrat inexorable S'armait d'un oeil si fier, d'un front si redoutable....
de Jean RACINE dans ib. IV, 5
.... Tous les jours.... un homme, un vil esclave D'un front audacieux me dédaigne et me brave
Il [Harlai] se présente aux Seize, il demande des fers Du front dont il aurait condamné ces pervers
De quel front, avec quelle assurance, avec quelle intrépidité.
Ceux qui ont vu de quel front il [Charles 1er] a paru dans la salle de Westminster
Les dehors, l'apparence, par opposition aux sentiments du coeur.
Et c'est mal démêler le coeur d'avec le front Que prendre pour sincère un changement si prompt
7
Impudence, effronterie.
Il a bien le front de m'accuser d'avarice
de Claude Favre de VAUGELAS dans Q. C. 467
A-t-il encor le front de vous parler de moi ?
Quoi ! vous avez le front de trouver cela beau ?
C'est une chose étonnante que vous ayez le front de parler si haut
Quoi ! vous avez le front de rire, et devant nous ?
Allons, mon ami, de la tête et du front ; je suis là
De quel front, avec quelle impudence.
De quel front donnerais-je un exemple aujourd'hui, Que mes lois, dès demain, puniraient en autrui ?
De quel front s'en aller le voir et lui parler ?
de Jean de LA FONTAINE dans Faucon.
Avec quel front osent-ils parler de la loi ?
Madame ! et de quel front vous unir à mon sort, Quand je ne cherche plus que la guerre et la mort ?
Que veut-il ? de quel front cet ennemi de Dieu Vient-il infecter l'air qu'on respire en ce lieu ?
De quel front un Alexandre VI, l'horreur de toute la terre, avait-il osé se dire le vicaire de Dieu ?
Un front d'airain, une extrême impudence. Cet homme a un front d'airain.
J'ai vu que l'impudence est la reine du monde Et qu'il faut, quand on veut y faire son chemin, Aller à la fortune avec un front d'airain
de LA CHAUSSÉE dans Gouvern. I, 3
On dit dans le même sens : C'est un front d'airain.
8
Sémantique : Fig. et dans le langage élevé et poétique. Le haut, le sommet. Cette montagne élève son front jusque dans les nues.
J'avais atteint le front des collines prochaines
de D'AVRIGNY dans Jeanne d'Arc, III, 5
Pourquoi balancez-vous vos fronts que l'aube essuie, Forêts, qui tressaillez avant l'heure du bruit ?
9
Étendue que présente le devant de certaines choses. Le front d'un bâtiment.
S'il est vrai, comme on l'assure, qu'il y ait dans Paris seul vingt-quatre mille maisons à front de rue
de VAUBAN dans Dîme, p. 76
Sémantique : Terme de fortification. Front d'une place, ce qui est compris entre les deux bastions voisins.
Une forteresse qui montre de tous côtés un front redoutable
10
La face d'une troupe rangée en ligne. Le front d'un bataillon est le premier rang composé des chefs de file.
Combattre avec les miens au front de la bataille
Cette phalange était divisée en dix petits corps, dont chacun présentait un front de cinquante hommes sur trente-deux de profondeur
En donnant au corps de bataille moins de front et plus de profondeur
de Charles ROLLIN dans ib. t. I, p. 312
Le front des Russes n'était plus en face de notre colonne, mais sur notre gauche
Passer sur le front d'une troupe, se porter sur le front d'une troupe rangée en bataille.
Front de bandière, ligne des étendards et des drapeaux à la tête d'un corps campé.
Front de bataille, rang antérieur d'une troupe ou d'une ligne déployée ; quand elle n'est pas déployée, on l'appelle tête de colonne.
Marcher en front de bandière, marcher avec tout l'appareil de la guerre.
Les Samoïèdes, les Lapons, les Kamshatkadiens n'ont jamais marché en front de bandière pour détruire leurs voisins
Faire front, se dit d'une troupe qui, étant de flanc, se tourne de manière à présenter le front.
Front ! terme de commandement militaire, pour dire à une troupe de faire face.
Sémantique : Terme de marine. Ordre de marche dans lequel tous les vaisseaux d'une armée navale sont rangés sur une ligne perpendiculaire au vent. Former une ligne de front.
11
Sémantique : Terme de perspective. Projection orthographique d'un objet sur le plan parallèle au tableau.
12
De front, Nature : loc. adv. Par devant.
Elles s'allaient rencontrer de front l'une l'autre
de René DESCARTES dans Monde, 8
La choquer hardiment [la fortune], et, sans craindre la mort, Se présenter de front à son plus rude effort
Quelque effort que nous fassions pour détourner nos visages de peur que la vérité ne nous éclaire de front
Pendant qu'Adraste l'aurait attaqué de front
La colonne était attaquée à la fois de front et par les deux flancs
Il [Napoléon] multiplia ses ordres, il outra ses excitations, et il engagea de front une bataille qu'il avait conçue dans un ordre oblique
Sémantique : Fig. Sans ménagement, sans prendre des biais.
Je sais ce que tu dis, et n'irai pas, de front, Faire un commandement qu'ils prendraient pour affront
Il est certains esprits qu'il faut prendre de biais, Et que, heurtant de front, vous ne gagnez jamais
Toute loi qui attaque de front un vice que les moeurs tolèrent est nécessairement bientôt éludée et oubliée
Si l'on n'osa pas les heurter de front [les auteurs du XVIIe siècle].... on les attaqua d'une manière indirecte
13
De front, sur la même ligne.
Les voilà qui voguent de front
Une ville composée d'une rue qui s'appelle la grande, quoique deux carrosses n'y puissent passer de front
Pareils en quelque sorte aux anciens qui avaient l'adresse de mener jusqu'à huit chevaux attelés de front, M. Leibnitz mena de front toutes les sciences
Sémantique : Fig. En même temps. Mener deux affaires de front.
Le christianisme fait marcher de front les mystères de la divinité et les mystères du coeur humain
14
Front à front, Nature : loc. adv. Opposé l'un à l'autre, en face l'un de l'autre.
Ces deux hommes [Condé et Turenne], tantôt unis.... tantôt opposés front à front

HISTORIQUE

1
XIe s.
Entre les ieuz mult [il] ot large le front
dans Ch. de Rol. XCII
2
XIIe s.
Et vos [votre] douz front qui plus est clair que glace
dans Couci, X
3
XIIIe s.
Quand vient en mai, que l'on dit as lons jours, Que Franc de France repairent de roi court [de la cour du roi], Regnauz repaire devant au premier front
dans Romancero, p. 49
De Constantinoble, qui tenoit trois liues devers la terre de front, ne pooit li os [l'armée] ataindre que l'une des portes
Einsi furent les batailles longuement front à front
de Geoffroi de VILLEHARDOUIN dans LXXXII
Li dus de Venise ot fait ses nes [navires] et ses vaissiaux ordener tout d'un front
de Geoffroi de VILLEHARDOUIN dans LXXVII
Contraire chose sont celes qui tout droit, front à front, sont l'une contre l'autre, si comme est froit contre chaut
Cil qui i faut [qui est éhonté] est apelez sans vergoigne et sanz front
de Brunetto LATINI dans ib. p. 273
Et li frons de la maison doit estre contre midi
de Brunetto LATINI dans ib. p. 176
4
XIVe s.
Tellement fu li mur par sa force [du chevalier] minez Que deux hommes de front y fussent bien entrez
dans Guesclin 20218
5
XVe s.
....Il tient son front Par devant eulx, comme orgueilleux et fiers
de Eustache DESCHAMPS dans f° 234, dans LACURNE
6
XVIe s.
Pour entreprendre de marcher front à front avecques ces gents là
de Michel de MONTAIGNE dans I, 155
Les hommes d'armes qui faisoient front en l'armée de Tigranes
de Michel de MONTAIGNE dans II, 94
Les Romains furent contraints de venir au combat tout de front par païs uny et plain
de Jacques AMYOT dans Pyrrhus, 46
Autrement, comme pourrois-je ny ayec quel front me trouver en la compagnie des autres honestes dames quand....
de Jacques AMYOT dans Agis et Cléom. 19
Le roi de Navarre se revolte et celebre son changement en une procession generale à fin d'estouffer les hontes secrettes et reproches domestiques par le front d'un acte public
Il fit de sa file son front
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans ib. I, 149
Les assiegez leur laisserent gagner le front de la breche
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans ib. I, 184
S'il y avoit jardin derriere le manoir, et terre qui n'eust point front avec les dits survivans, leur est tenu bailler quatre pieds de voyes, pour eschange d'autre heritage
dans Nouv. coust. gén. t. I, p. 394
Nul ne peut faire bastir et edifier maison ou autre edifice sur front de rue sans prendre alignement de la justice
dans ib. t. II, p. 1028

ÉTYMOLOGIE

1
Provenç. front ; espagn. frente ; portug. et ital. fronte ; du latin frontem ; sansc. bhruva ; gaélique, a-bhra ; bas-bret. a-brant ; angl. brow.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
De front, de face, sans présenter le corps de côté.
On m'a conduit au second par un escalier à demi rompu et si étroit qu'à peine y pouvais-je passer de front
de LETOURNEUR dans Trad. de Clarisse Harlowe, t. VII, p. 608
2
Sémantique : En termes de travaux d'art, front de taille, la face du terrain, là où s'arrête le foncement.
L'aération s'obtiendra, comme au Saint-Gothard, par l'injection d'air comprimé jusqu'au front de taille.... [en cas d'irruption des eaux] on séparera ce front de taille du reste de la galerie par une sorte de carapace à cloisons hermétiques
de H. DE PARVILLE dans Journ. offic. 17 août 1875, p. 6891
Front d'attaque, la face par laquelle on commence le creusement d'un tunnel, d'un puits, etc.
Le front d'attaque, dans chacun de ces chantiers, présente une section de 6 à 7 mètres carrés
dans le Soleil, 18 août 1875
3
Front large, nom d'une espèce de phascolome, dont la chair est excellente.
Deux espèces [de phascolomes] au moins vivent aussi bien l'une que l'autre dans notre pays, le wombat et le front large
dans Journ. offic. 29 oct. 1876, p. 7764, 3e col.

Synonymes de FRONT

Termes proches de FRONT

Phonétiquement proche de FRONT