Définition de EMPRUNTER
Prononciation : an-prun-té
DÉFINITIONS
1
Obtenir à titre de prêt. Emprunter de l'argent, un cheval, un livre.Nature : Absolument.
Ceux qui empruntent sont bien malheureux
Bientôt, pour subsister, La noblesse sans bien trouva l'art d'emprunter
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. v.
Pour empêcher les emprunts d'où naissent la fainéantise, les fraudes et la chicane, le roi Asychis ne permettait aux Égyptiens d'emprunter qu'à condition d'engager le corps de leur père à celui dont on empruntait
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. III, 3
Il emprunte de tous côtés, pour se cacher à lui-même sa misère
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans la Vallière.
2
Tirer de, prendre de, recevoir de. La lune emprunte sa lumière du soleil. Les magistrats empruntent leur autorité du pouvoir qui les institue.Aimez donc la raison, et que tous vos écrits Empruntent d'elle seule et leur lustre et leur prix
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Art p. I
Virgile a emprunté d'Homère quelques comparaisons, quelques descriptions
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Ess. sur la poésie ep. chap. 3
Les Grecs ont emprunté des Égyptiens l'idée et la forme des temples
Il [Napoléon] compte sur cette puissance d'illusion que lui donne sa renommée ; jusqu'à ce jour, elle a emprunté de lui une force réelle et immanquable ; il s'efforce donc par des raisonnements spécieux de soutenir la confiance des siens, et peut-être aussi le faible espoir qui lui reste
de SÉG. dans Hist. de Napol. VIII, 11
Nature : Absolument.
Voilà où elle [l'âme] est tombée quand elle a voulu emprunter des sens ; mais ce n'est pas encore là la fin de ses maux ; car ces sens dont elle emprunte, empruntent eux-mêmes de tous côtés
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans la Vallière.
3
Avoir recours à, employer.Sans emprunter ta main pour servir ma colère
de Pierre CORNEILLE dans Cinna, III, 4
J'emprunte du secours et le fais hautement
de Pierre CORNEILLE dans Nic. III, 8
Vos deux filles, seigneur, ont emprunté ma voix, Et leur coeur par ma bouche expliquait leurs misères
de Jean de MAIRET dans Mort d'Asdr. III, 1
Ne saurait-il rien voir qu'il n'emprunte vos yeux ?
de Jean RACINE dans Brit. I, 2
L'insolent de la force empruntait le secours
de Jean RACINE dans Phèd. IV, 1
Et j'irais pour ma cause emprunter d'autres bras !
4
Se couvrir d'une fausse apparence. Emprunter le masque de la vertu, le langage de l'humanité.Il faut d'un suppliant emprunter le visage
de Jean RACINE dans Mithr. III, 1
D'Achille qui l'aimait, j'empruntai le langage
de Jean RACINE dans Iphig. I, 5
5
Nature : V. n. Sémantique : Terme d'organiste. Lorsque, le sommier n'étant pas bien fermé, le vent qui doit aller dans un tuyau entre dans un autre, on dit : ce tuyau emprunte.6
Sémantique : Terme d'arithmétique. Se dit, dans l'opération de la soustraction, pour prendre une dizaine au chiffre placé à la gauche du chiffre supérieur trop faible pour que la soustraction se fasse.7
S'emprunter, Nature : v. réfl. Être obtenu par emprunt. Il y a des choses qui ne peuvent s'emprunter.REMARQUE
1
Quand le régime indirect d'emprunter est un nom de chose, il faut de : la lune emprunte sa lumière du soleil ; quand c'est un nom de personne, on met indifféremment à ou de : j'ai emprunté mille francs de mon ami ou à mon ami.HISTORIQUE
1
XIIe s.Respondi li prophetes : Va, emprunte de tes veisins vaissels vuidz et mulz
dans Rois, p. 355
2
XIIIe s.Dont emprunterent li message dui cens mars en la ville, et les baillerent au duc
de Geoffroi de VILLEHARDOUIN dans XX
Adonc avint que li rois de Cypre en ala à Acre et vot emprunter deniers à un bourjois
dans Chron. de Rains, p. 47
Et s'il n'a nul home [pour un jugement par pairs], il les doit emprunter à son segnor, et li sires y est tenus à prester
de Philippe de BEAUMANOIR dans 46
Li pechierres empruntera et ne soldra mie
dans Psautier, f° 45
Par foi, Hiamont, trop par as mal erré, Quant sans ton pere t'es à Carlon mellé ; Car ci François ne sunt mie empruté ; Bien nous chalengent la lor grant herité
dans Agolant, p. 172
Ne semble pas chevalier empruté
dans ib. p. 163
Au partir que il firent d'Acre, le conte de Poitiers empronta joiaus à ceulz qui ralerent en France
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 257
Dame, bien soiez venue, Dit li moines, et bien trouvée. Cele ne fut pas empruntée, Ainz tert [essuye] ses ieux, si lui respond
dans Fabliaux, 2e éd. p. 245
3
XIVe s.Furent maintes dames parées, Pas ne sembloient empruntées
dans Chastelain de Couci, V. 906
Le dit Jehan emprinta de la Maison-Dieu de Bourges huit liz granz
dans Bibl. des Chartes, 4e série, t. II, p. 68
4
XVe s.Quel couleur [du drap] vous semble plus belle ? .... Tel que vous le pourrez avoir ; Qui emprunte n'y choysist mye
dans Patelin
Furent empruntez cinquante mille ducats d'un marchand de Milan
de Philippe de COMMINES dans VII, 4
5
XVIe s.Ce sont advantages empruntez, non pas nostres
de Michel de MONTAIGNE dans I, 242
ÉTYMOLOGIE
1
Berry, emprêter, empreuter ; wallon, epronter ; ital. improntare. Diez, trouvant le valaque imprumút, emprunt, imprumutá, emprunter, qui paraît venir du latin promutuum, un prêt, regarde le mot français comme ayant même origine. Mais im-promútuum, avec l'accent sur mú aurait donné sans doute comme dans le valaque impromut et non emprunt ; du moins c'est là une grave difficulté. Scheler essaye de la lever en recourant non au substantif, mais au verbe : verbe fictif impromutuare, d'où impromptuare, impromptare. Ce qui gêne un peu, ajoute-t-il, c'est la voyelle u pour le latin o. Cette difficulté de l'u pour l'o subsiste dans l'ancienne étymologie im-promptare, qui en a une autre, c'est que impromptare, qui vient par promptus, de promere, produire, fournir, devrait signifier prêter et non emprunter. Remarquons toutefois que, à côté d'emprunter, se trouve le Berry emprêter et l'ancien français emprest (voy. EMPRUNT, à l'historique) ; ceux-là viennent certainement de en, et praestare. On notera les formes citées à l'historique, empruter, emprinter, qui, réunies au Berry empreuter, semblent indiquer une incertitude entre ces formes. Il faut donc admettre que impraestare, qui, naturellement, signifierait prêter, a pris le sens d'emprunter. Impromptare, de son côté, a reçu dans l'italien inprontar la double acception, celle de prêter qui est directe, et celle d'emprunter qui est inverse. De cette discussion on peut conjecturer qu'une confusion s'est faite entre impromutuare et impromtare ; que l'u de promutuum s'est fait sentir dans emprunt ; que promptare se retrouve dans le wallon epronter et l'italien improntar, et praestare, dans l'ancien français emprest et le Berry emprêter.Synonymes de EMPRUNTER
- CONTREFAIRE
- COPIER
- DÉROBER
- ÉCUMER
- EMPLOYER
- IMITER
- MIMER
- PARODIER
- PASTICHER
- PILLER
- PIRATER
- PLAGIER
- RAPPELER
- SINGER
- USER