Définition de CROIRE

DÉFINITIONS - REMARQUE - SYNONYME - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : kroi-r' ; en 1703, la prononciation indiquée est crere, sur le théâtre on disait je croa et non pas

DÉFINITIONS

1
Nature : V. a. Être persuadé qu'une chose est vraie, est réelle.
Un Turc, un hérétique qui ne croit ni ciel, ni saint, ni Dieu, ni loup-garou
Mais encore faut-il croire quelque chose dans le monde ; qu'est-ce que vous croyez ?
La promptitude à croire le mal sans l'avoir assez examiné est un effet de l'orgueil et de la paresse
Incrédules les plus crédules, ils croient les miracles de Vespasien pour ne pas croire ceux de Moïse
Vous ne pouviez plus mal choisir que d'accuser le Port-Royal de ne pas croire l'Eucharistie
Il ne croit donc pas le sacrifice de la messe
de Blaise PASCAL dans ib.
Le pape entreprend donc sur nos libertés dans cette bulle où il veut nous obliger de croire ses décisions
de Blaise PASCAL dans ib. 19
Quand les pères ont condamné Eutychès, parce qu'il ne croyait qu'une nature en Jésus-Christ, a-t-il dit que non et qu'il en croyait deux ?
En montrant la vérité, on la fait croire
de Blaise PASCAL dans dans COUSIN
C'est un aveuglement de vivre mal en croyant Dieu
de Blaise PASCAL dans ib.
Que dirai-je de ceux qui croyaient la transmigration des âmes ?
Tels sont les prodiges qu'il faut croire quand on ne veut pas croire les miracles du Tout-puissant ?
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans ib. II, 13
Au troisième jour il ressuscite, il paraît aux siens qui l'avaient abandonné et qui s'obstinaient à ne pas croire sa résurrection
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans ib. II, 6
Ces hommes délicats qui ne croient pas la vérité de Jésus-Christ et de la parole
Les uns croient la Providence, les autres la nient
Ce qu'il croyait il le voyait, au lieu que les autres croient ce qu'ils voient
Le gouverneur ne savait que croire des dieux, il était obsédé d'Épicuriens
Il a recours au Dieu de ses pères ; il redoute ses jugements qu'il faisait semblant de ne pas croire
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Car. Doutes sur la relig.
Nous nous laissons mollement entraîner au cours fatal que nous emporte sur le préjugé général que nous ne croyons rien
Vous tremblez sur un avenir que vous vous étiez vanté de ne pas croire
de Jean-Baptiste MASSILLON dans ib. Vérit. de la relig.
Ceux de Formose croient une espèce d'enfer
Ces auteurs, me repartit-il, n'ont pas cherché dans l'Écriture ce qu'il faut croire, mais ce qu'ils croient eux-mêmes
Si quelque chose justifie ceux qui croient une fatalité à laquelle rien ne peut se soustraire....
Vous croyez tous les maux que votre âme redoute
Si ces philosophes croient l'existence de Dieu et l'immortalité de l'âme
Croire une chose comme l'Évangile, comme un article de foi, la croire fermement.
Croire tout comme article de foi, être extrêmement crédule.
Sémantique : Familièrement. J'aime mieux le croire que d'y aller voir, se dit de choses qu'on dédaigne de vérifier, ou qu'on n'a pas le temps ou le moyen de vérifier.
Si vous ne le croyez pas, allez-y voir, se dit à une personne qui doute.
Sémantique : Terme de pratique. Croire un titre, le recevoir pour preuve.
Faire croire une chose, la persuader. Nous serions coupables de faire croire une fausseté.
Je fis croire et je crus ma victoire certaine
Se faire croire, obtenir créance. Ce voyageur raconte de telles choses, qu'il a beaucoup de peine à se faire croire.
Ô bienheureux soupirs, favorables moments, Où l'un et l'autre coeur, plein de doux sentiments, Aime et le dit et se fait croire !
de Jean de LA FONTAINE dans Daphné, III, 4
Se faire croire une chose, se la persuader à soi-même.
L'homme est ainsi fait qu'à force de lui dire qu'il est un sot, il le croit ; et, à force de se le dire à soi-même, on se le fait croire
2
Ajouter foi à, obéir à, suivre l'avis. Croyez-vous cet homme-là ? Il ne croit pas les médecins. Je vous crois. Croyez-moi, ne faites point cela.
Il croit cette âme basse et se montre sans foi ; Mais, s'il croyait la sienne, il agirait en roi
Ah ! ah ! qui des deux croire ? Ce discours au premier est fort contradictoire
Les sages le prévirent ; mais les sages sont-ils crus en ces temps d'emportement, et ne se rit-on pas de leurs prophéties ?
Un honnête homme qui dit oui et non mérite d'être cru ; son caractère jure pour lui, donne créance à ses paroles et lui attire toute sorte de confiance
Non, ou vous me croirez, ou bien de ce malheur Ma mort m'épargnera la vue et la douleur
Oui, monsieur, je vous crois, comme mon propre père
Qui l'aurait crue [la maréchale de Clérambault], on eût fait son repas sans quitter les cartes
Souffle sur ton amour, ami, si tu me crois
Sémantique : Par extension.
J'ai failli, je l'avoue, et mon coeur imprudent A trop cru les transports d'un désir trop ardent
Et croire la pitié qui me pourrait surprendre
Et de mille remords son esprit combattu Croit tantôt son amour et tantôt sa vertu
Nature : S. m. Le croire, l'action d'ajouter foi.
Jamais on ne toucha mieux le naturel de la croyance en matières de choses humaines que quand on a dit que le croire est une courtoisie ; car, comme c'est une courtoisie de croire à un homme d'honneur, aussi est-ce une incivilité bien rustique de démentir de braves et fidèles écrivains
de GARASSE dans Rech. des recherches, p. 806, dans LACURNE
3
En croire, locution dans laquelle en, signifiant proprement sur cela, est devenu explétif.
Ne vous alarmez pas, elle ne m'en croit pas
Je n'en serai point cru à mon serment, et l'on dira que je rêve
Les enfants n'en veulent plus croire leurs grands-pères
De cette sorte, saint Jean-Baptiste, qu'on jugea digne d'être le Christ, n'en fut pas cru quand il montra le Christ véritable
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans ib. II, 10
On aimera mieux qu'un faussaire soit prophète qu'Isaïe, ou que Jérémie, ou que Daniel ; ou bien chaque siècle aura porté un faussaire heureux que tout le peuple en aura cru
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans ib. II, 13
M'en croirez-vous ? Lassé de ses trompeurs attraits, Au lieu de l'enlever, fuyez-la pour jamais
Ah ! fallait-il en croire une amante insensée ? Ne devais-tu pas lire au fond de ma pensée ?
de Jean RACINE dans ib. V, 3
Quelle faiblesse à moi d'en croire un furieux ?
Je m'en fie à Burrhus ; j'en crois même son maître
Là, si vous m'en croyez, d'un amour éternel Nous irons confirmer le serment solennel
Ah ! si vous m'en croyez, ne m'interrogez pas
J'obéis sans rien craindre et j'en crois les oracles
À l'en croire, s'il faut l'en croire, locutions qui expriment le doute. À l'en croire, tout est perdu.
Sémantique : Par extension.
En croirez-vous cette lettre ? S'il en croit votre ardeur, je suis sûr du trépas ; Mais peut-être, madame, il ne l'en croira pas
Et vous n'en croirez pas toute cette colère
En crois-tu mes soupirs ? en croiras-tu mes larmes ?
J'en ai cru le hasard
Si j'en crois leurs alarmes
Que n'en croyais-je alors ma tendresse alarmée ?
Que si j'en crois ma gloire, il y faut renoncer
de Jean RACINE dans ib. II, 7
En croirez-vous toujours un farouche scrupule ?
Je connais mal peut-être une loi si nouvelle, Mais j'en crois ma vertu qui parle aussi haut qu'elle
Et j'en croyais trop tôt un déplaisir mortel
Ciel ! que vois-je ! en croirai-je ma vue ?
N'en croyez pas, madame, un orgueil téméraire
En faire croire, dire des mensonges, tromper la crédulité.
À qui vous veut ouïr, vous en faites bien croire
Il en ferait bien croire à des esprits mal faits
de QUINAULT dans la Comédie sans comédie, II, 5
4
Penser, présumer, s'imaginer. Que va-t-on croire de moi ? Vous ne sauriez croire combien cela me contrarie. Il a cru bien faire.
Je vous pardonne d'avoir cru sur la foi du P. Bauny qu'Aristote ait été de ce sentiment
Si on leur fait entendre que vous croyez pouvoir faire votre salut en calomniant vos ennemis
Je ne crois pas que j'en pusse sortir, si on y recevait de vos nouvelles
Mais c'est un jeune fou qui se croit tout permis Et qui pour un bon mot va perdre vingt amis
Un homme ne veut point croire qu'il soit orgueilleux, ni lâche, ni paresseux, il veut croire qu'il a raison
Elle croyait servir l'État, elle croyait assurer au roi des serviteurs en conservant à Dieu des fidèles
Assiége-t-il quelque place, il invente tous les jours de nouveaux moyens d'en avancer la conquête ; on croit qu'il expose les troupes ; il les ménage en abrégeant le temps des périls par la vigueur des attaques
Augustin crut que la pénitence n'avait rien qui déshonorât le sacerdoce
de Esprit FLÉCHIER dans Panég. I, p. 260
Vous croyez qu'un amant vienne vous insulter ? Il vous rapporte un coeur qu'il n'a pu vous ôter
Mais cependant, seigneur, que faut-il que je croie D'un bruit qui me surprend et me comble de joie ?
Que croira-t-on de vous, à voir ce que vous faites ?
Les grands ne comptent le reste des hommes pour rien et ne croient être nés que pour eux-mêmes
Jésus-Christ souffre à notre place et les grands croient que tout doit souffrir pour eux
À voir le climat affreux de la Moscovie, on ne croirait jamais que ce fût une peine d'en être exilé
Il en est de l'esprit et du goût comme de la philosophie ; rien n'est plus rare que d'en avoir, plus impossible que d'en acquérir, et plus commun que de s'en croire beaucoup
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Essai sur la société des gens de lettres, Oeuvres, t. III, p. 44, dans POUGENS.
Rome a trop cru de moi
Et j'y pouvais un jour, sans trop croire de moi, Prétendre, en les servant, un honorable emploi
Je crois, à ce que je crois, employés comme incise, c'est-à-dire d'après mon opinion, selon mon sentiment Vous ferez bien, je crois, de ne plus fréquenter cet homme-là. Il avait, à ce que je crois, étudié la question la matinée.
Je crois bien, signifie en certaines circonstances déterminées par le contexte : cela n'est pas étonnant.
Il n'aime plus cette personne, je crois bien, elle n'est plus la même
Regarder comme. On le crut fou.
Il ne faut presque rien pour être cru fier, incivil, méprisant, désobligeant ; il faut encore moins pour être estimé tout le contraire
Croire quelque chose à quelqu'un, croire qu'il possède cette chose. Je lui crois beaucoup d'habileté Je croyais à cet homme plus de droiture qu'il n'en a.
5
S'en rapporter à, compter sur.
Je croirais ses conseils et je verrais Pyrrhus
J'ai prononcé sa grâce et je crois sa promesse
Je fus sourde à la brigue et crus la renommée
Un malheureux sans nom, si l'on croit l'apparence
6
Nature : V. n. Ajouter foi.
Je crois sur sa parole, et lui dois tout crédit
Juste retour, monsieur, des choses d'ici-bas ; Vous ne vouliez pas croire, et l'on ne vous croit pas
Être porté à se soumettre aux autorités supérieures, célestes.
L'esprit croit naturellement, et la volonté aime naturellement, de sorte que, faute de vrais objets, il faut qu'ils s'attachent aux faux
Qu'il croie par raison ou par erreur
Du monde des humains inexplicable histoire ! Partout c'est le besoin d'adorer et de croire
7
Avoir la foi. À la première prédication des apôtres, beaucoup crurent.
Je vois, je sais, je crois, je suis désabusée
Il y a trois moyens de croire : la raison, la coutume, l'inspiration
Le miracle qu'elle attendait est arrivé ; elle croit, elle qui jugeait la foi impossible
8
Croire à, avoir confiance en, ajouter foi à.
Il [Attila] croyait fort aux devins, et c'était peut-être tout ce qu'il croyait
Quoi ! vous ne croyez pas au séné, ni à la casse, ni au vin émétique ? - Et pourquoi veux-tu que j'y croie ?
Allez, ne croyez point à monsieur votre père
Direz-vous qu'ils la reçoivent [cette constitution] extérieurement, mais que dans leur âme ils n'y croient pas ?
Ô ciel ! qu'on doit peu croire Aux dehors imposants des humaines vertus !
de Jean-Baptiste Louis GRESSET dans Édouard III, II, 6
9
Croire à, être persuadé de l'existence de, de la vérité de. Il proteste de son innocence ; mais je n'y crois pas.
Comment n'eussent-ils pas cru aux oracles ? ils croyaient bien aux songes
Le mot célèbre de Fontenelle à un prince qui lui disait qu'il croyait peu à la vertu : monseigneur, il y a d'honnêtes gens, mais ils ne viennent pas vous chercher
Ainsi de nouvelles erreurs entretiennent dans des erreurs anciennes ; et on croit à toutes avec d'autant plus de confiance, qu'on croit à un plus grand nombre
de Etienne Bonnot de CONDILLAC dans Hist. anc. III, 3
Je crois à la victoire et non pas à la paix
de LUCE DE LANCIVAL dans Hector, V, 4
Je ne crois plus aux Dieux, je crois aux fils ingrats
Il est dit : croyez à l'Église ; mais il n'est pas dit : croyez aux miracles, à cause que le dernier est naturel et non pas le premier ; l'un avait besoin de précepte, non pas l'autre
10
Croire en, être persuadé de l'existence de. Croire en Dieu.
Attend pour croire en Dieu que la fièvre le presse
Croire en soi, avoir une idée exagérée de son mérite.
11
Se croire, Nature : v. réfl. Avoir certaine opinion de soi. Cet homme se croit habile.
Pour être plus qu'un roi, tu te crois quelque chose
Il n'y a que deux sortes d'hommes : les uns justes qui se croient pécheurs, les autres pécheurs qui se croient justes
Penser quelque chose au sujet de soi. Il se croyait au moment de réussir.
Je me croirais haï d'être aimé faiblement
Avoir confiance en soi.
Tout est illustre en eux quand ils daignent se croire
Écoutez tout le monde, croyez peu de gens, gardez-vous bien de vous croire trop vous-même
Être cru. Ce qui se dit souvent finit par se croire.
S'en croire, obéir au sentiment qu'on a.
Mais, si je m'en croyais, je ne le verrais pas
S'en croire beaucoup, s'en croire beaucoup trop, avoir en ses forces ou son mérite une confiance exagérée.

REMARQUE

1
1. Croire, suivi de que, dans une phrase affirmative, veut l'indicatif : Je crois que cela est.
Mais autrefois il n'en était pas ainsi ; et le sens dubitatif qui est naturellement attaché à croire faisait qu'on mettait volontiers le subjonctif : La plus belle des deux je crois que ce soit l'autre
Je croyais bien qu'on fût damné pour n'avoir pas de bonnes pensées, mais....
Vous croyez donc qu'il faille avoir Beaucoup de peine à Rome en fait que d'aventures ?
de Jean de LA FONTAINE dans Cand.
Elle croyait que le petit Noirmoutier dût être aveugle
Je croyais que tout fût perdu
Je croyais que vous n'eussiez point fait réponse au cardinal
Il croyait que ce dût être le 15e de ce mois
Malgré ce rejet actuel du subjonctif, on l'admettra sans peine dans une phrase telle que celle-ci : Nous nous demandons sans cesse ce qu'on croit que nous soyons
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Myst. Incarn.
2
2. Croire suivi de que, dans une phrase négative ou interrogative, veut le subjonctif : Je ne crois pas qu'il vienne. Croyez-vous qu'il le fasse ? Avez-vous cru qu'il partît si tôt ? Je ne croyais pas qu'il payât. Croyez-vous encore qu'il ait de l'habileté, après toutes les sottises qu'il a faites ?
3
3. Croire, dans une phrase interrogative, suivi de que, peut être suivi du futur de l'indicatif ou du conditionnel : Croyez-vous qu'il payera ses dettes ? Aviez-vous cru qu'il payerait ses dettes ? Les grammairiens se sont efforcés d'établir une différence de sens entre ces constructions et celles où l'on met le subjonctif ; croyez-vous qu'il paye ? aviez-vous cru qu'il payât ? mais toutes les différences paraissent arbitraires.
4
4.
Croire se construit avec un verbe à l'infinitif sans préposition intermédiaire ; on n'imitera donc pas les exemples suivants : Ils [les évêques de Beauvais et Beaufort] crurent d'en venir facilement à bout
Mais enfin croyez-vous de vivre toujours ?
5
5. On a dit en croire à :
Vous n'en avez cru ni à ma parole ni à l'expérience
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans cité dans le Dict. de BESCHERELLE
Il est mort ; cependant si j'en crois à mes yeux....
de CRÉB. dans Électre, IV, 1
Cet homme, car déjà j'en crois à ma fureur
de BERNIS dans Religion, I, 233

SYNONYME

1
1. CROIRE QUELQUE CHOSE, CROIRE à QUELQUE CHOSE ; CROIRE QUELQU'UN, CROIRE à QUELQU'UN. Croire quelque chose, c'est l'estimer véritable : Je crois ce que vous me dites. Croire à quelque chose, c'est y ajouter foi, y avoir confiance, s'y fier : Je ne crois pas à l'efficacité de ce remède. Croire quelqu'un, c'est ajouter foi à ce qu'il dit : Il ne faut pas croire les menteurs. Croire à quelqu'un, c'est croire à son existence : Croire aux sorciers, c'est croire qu'il y en a ; Croire les sorciers, c'est croire ce qu'ils disent.
2
2. FAIRE CROIRE, FAIRE ACCROIRE., Faire croire, c'est persuader à autrui une chose que l'on croit vraie ou que l'on croit fausse. Faire accroire, c'est persuader à autrui une chose que l'on sait fausse. Aussi faire croire peut se dire des choses comme des personnes : Ce nuage de poussière me fit croire qu'une troupe de cavaliers venait ; mais faire accroire ne peut se dire que des personnes.

HISTORIQUE

1
XIe s.
Il dit au rei : jà mar crerez Marsile
dans Ch. de Rol. XI
Iert i sis nies [son neveu y sera] li quens Rolans, ce crei [je crois]
dans ib. XLII
Mort sont li conte, se est qui mei en creit
dans ib. XLII
Del rei paien, sire, por ver [pour vrai] creez
dans ib. LIII
[Il] Ne creit en Deu le fil sainte Marie
dans ib. CXII
Respont li dus : sire, je vous en crei
dans ib. CCLII
Li reis creit Deu, faire veut son service
dans ib. CCLXVIII
Creire [elle] veut Deu, chrestientet demande
dans ib. CCXCII
2
XIIe s.
Ostages bien creüz [en qui on puisse se fier]
dans Ronc. p. 12
Se ne creez mes dits
dans ib. p. 22
Creez [croyez] mon los [conseil]
dans ib. p. 27
Si voirement come nous le creon
dans ib. p. 48
Las ! se jel pert, de ce sui bien creanz, Jamais n'ert jor que n'en soie dolans
dans ib. p. 86
Et si [il] cresra sainte crestienté
dans ib. p. 117
Dame, cil dex en cui [nous] somes creant
dans ib. p. 121
[Dame] qui croit faus druz [amant] menteor
dans Couci, I
Je sai moult bien qu'ele croit les felons
dans ib. XII
Conseil [il] aura creü moult fol et enfantif
dans Sax. XXIV
3
XIIIe s.
Biaus sire, nous avons vos lettres veües, qui nous dient que nous vos creons de tout ce que vos dirés
Et vos feistes mout mal quant vos les creütes
de Geoffroi de VILLEHARDOUIN dans CXXIII
Les lettres disoient que autant les creüt-on comme lor seigneurs
Bien fait qui se porvoit En croire ce qu'il doit, Ce dit li vilains
dans Proverbes du comte de Bret. Ms. de St-Germ. f° 114, dans LACURNE
Çà est li bons vins de Soissons ; Sor l'erbe vert et sor les jons Fait bon boivre à henap [coupes] d'argent ; Caiens [céans] croit l'en [l'on fait crédit] toute la gent ; Caiens boivent et fol et saige
de CORTOIS D'ARTOIS dans Ms. de St-Germ. f° 83, dans LACURNE
Se croire me voulez, bien serez assenée [dirigée]
dans Berte, XLVI
Constance, dist Symons, je croi que elle ait faim
dans ib. XLIX
Sachiez, vous en avez mauvais conseil creü
dans ib. LI
Un certain messager qui bien faisoit à croire [en qui on se pouvait fier] Pour bien faire message, n'estoit pas com le loire
dans ib. LXVI
Je croi qu'ele soit morte
dans ib. XCV
Ains croi [je] que sans point de demore, Son hommage [tu] li renoiasses, Ne jamès par amor n'amasses
dans la Rose, 4264
Amors, qui te fait en li croire, Te tolt ton sens et ta memoire, Et de ton cuer les iex avugle
dans ib. 6929
Et trouva que le Vieil de la Montagne ne creoit pas en Mahommet, ainçois creoit en la loy de Haali, qui fu oncles de Mahommet
Il a maint preuhomme chevalier en la terre des Crestiens et des Sarrazins, qui onques ne crurent Dieu ne sa mere
Le saint roi se esforça de tout son pooir, par ses paroles, de moi faire croire en la loi crestienne
Ertaut de Nogent fu le bourgois du monde que le conte creoit le plus
Moult de ses gens li loerent [conseillèrent] que il attendist tant que ses gens feussent revenus, parce que il ne li estoit pas demouré que la tierce partie de ses gens ; et il ne les en voult onques croire
4
XIVe s.
Et il s'en croient au jugement de ceulz qui sont bons et sages
Qui croit paroles doucereuses souvent les trouve venimeuses
de Antoine LE ROUX DE LINCY dans Prov. t. II, p. 387
Vous parlez saigement ; Se ne croy vo conseil, jammais Diex ne m'ament [m'amende] ; Car de boin conseil croire, vienent li bien souvent
dans Baud. de Seb. VIII, 460
5
XVe s.
Il estoit moult aimé et cru en la ville
Puis que nature s'entremit D'entailler si digne figure, Il est à croire qu'elle y mit De ses biens à comble mesure
de Alain CHARTIER dans Excusation de maître Alain.
Et le roy, croyant ces choses, s'en alla audit pais de Normandie
de JEAN DE TROYES dans Chron. 1475
Et pour ce à vous bien confesser me doy De croire [prêter] ainsi, dont j'ai grant repentance, Quant on n'a pas renvoyé devers moy Un prest que fis....
de Eustache DESCHAMPS dans Poésies mss. f° 343, dans LACURNE
Suppliant au roy ne vouloir legierement croire contre luy et son filz
de Philippe de COMMINES dans I, 1
Le bruyt d'artillerie faisoit croire de tous les deux costez quelque grande entreprinse
de Philippe de COMMINES dans I, 11
Quant le roy eut ce ouy, il dit à Tanor : Tanor, ne me croyez jamais, se celluy qui là a parlé n'est Salphar de Liban
dans Perceforest, t. VI, f° 107
Le roy y estoit en personne, qui à ce siege ne croyoit personne [ne s'en rapportait à personne]
dans ib. t. V, f° 101
Il ne fut pas maistre pour lors ne cru de faire son vouloir
de LOUIS XI dans Nouv. I
6
XVIe s.
Il appert par les livres des anciens Peres que cela estoit receu sans difficulté, de dire croire l'Eglise, et non pas en l'Eglise
Ils l'envoyarent vivre en la forest de Biere ; je croy qu'elle n'y soit plus maintenant
Messieurs, je croy que vous soyez faict mal, pardonnez le nous
Je croy en Dieu le pere tout-puissant.... Je croy la saincte et catholicque Eglise Estre des sainctz et des fideles une Vraye union, entre eux en tout commune.... Finalement croi la vie eternelle
de Clément MAROT dans IV, 342
Je croy que, avant que recepvez ceste reponse, vous aurez du roy ce que avés demandé
Je vous supplie le croire de ce que je l'ay prié vous dire
S'il en faut croire du Bellay
de Michel de MONTAIGNE dans I, 25
Je ne croy pas que ces mouvements se feissent avecques discours [réflexion]
de Michel de MONTAIGNE dans I, 50
Si ce sont medecins, je les crois en ce qu'ils disent de....
de Michel de MONTAIGNE dans I, 58
Je crois de la medecine tout le pis ou le mieulx qu'on vouldra
de Michel de MONTAIGNE dans I, 130
Ils croyent les ames immortelles, et les mauldites estre logées du costé de l'occident
de Michel de MONTAIGNE dans I, 238
Les grands esprits font un aultre genre de biencroyants
de Michel de MONTAIGNE dans I, 389
Au moins se trouveroit-il une chose qui se croiroit par les hommes d'un consentement universel
de Michel de MONTAIGNE dans II, 319
Il ne fault pas croire à chascun, dict le precepte
de Michel de MONTAIGNE dans II, 331
Du mont souvent armée devalla, Croyant pour vray qu'en la campaigne il soit : Puis ne trouvant personne, s'en alla, Et croit qu'il est monté par autre voye
Je n'en diray pas davantage, sinon que je me fay croire qu'elle en viendroit à bout en huit jours
Et, pour cela, il s'en faisoit croire, et parloit. d'une braveté grande
Ses amis allerent enhortans le peuple assistant de croire à ce qu'il avoit dit
de Jacques AMYOT dans Solon, 11
Les Megariens le creurent facilement
de Jacques AMYOT dans ib. 12
Ne croire point aux dieux
de Jacques AMYOT dans Péric. 60
Il leur feit à croire que Alexandre s'estoit, en dormant, apparu à luy
de Jacques AMYOT dans Eum. 25
Plusieurs croient que le poëte et l'historien soient d'un mesme mestier ; mais ils se trompent beaucoup
de Pierre de RONSARD dans 514
Legier croire [croire légèrement] fait decevoir ; Il faut congnoistre avant que aymer
dans l'Amant rendu Cordelier, p. 514, dans LACURNE
Ne croire à Dieu que sur bons gages
de Randle COTGRAVE dans
Fol ne croit jusques à tant qu'il reçoit
de Randle COTGRAVE dans
Pour neant demande conseil qui ne le veut croire
de Randle COTGRAVE dans
Qui sempres croit et asne meine, son corps ne sera jà sans peine
de Randle COTGRAVE dans

ÉTYMOLOGIE

1
Saintong. crére ; wallon, creure ; Berry, creire ; provenç. creire ; espagn. creer ; portug. crer ; ital. credere ; du latin credere.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
6. Racine a dit : Vous croyez qu'un amant vienne vous insulter, Andr. II, 1. Laharpe trouve là une faute évidente qu'il faut corriger en lisant : croyez-vous ? On ne peut être de l'avis de Laharpe ; les exemples cités à la Remarque 1 rendent sa correction tout à fait inutile.
2
7. Croyez-moi que, reconnaissez avec moi.
Croyez-moi qu'Alcidon n'en sait guère en amour
Si tes feux en son coeur produisaient même effet, Crois-moi que ton bonheur serait bientôt parfait
Cela [à propos de paroles flatteuses du roi sur les Grignan] fut charmant, et l'on doit être comblé ; mais croyez-moi que les temps changent
3
8. Je l'ai cru s'éteindre, a été dit pour : J'ai cru qu'il s'éteignait.
Hélas ! qu'il était grand quand je l'ai cru s'éteindre, Votre amour, et qu'à tort ma flamme osait s'en plaindre !
4
Ajoutez : M. Darmesteter, Mém. de la Soc. de linguistique, t. III, p. 52, a décomposé le verbe credo, en do, je donne, et çrad, coeur (le même que kard, voy. COEUR) : je donne mon coeur, ma foi ; sanscr. çraddadhami ( le a de la terminaison " dhami" est long).

Synonymes de CROIRE

Termes proches de CROIRE