Définition de BLESSER

DÉFINITIONS - PROVERBES - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : blè-sé

DÉFINITIONS

1
Faire une plaie, une contusion, une fracture, une écorchure. Blesser légèrement. Il fut blessé au bras. Sans qu'aucun des leurs fût blessé. Connaître quel organe intérieur a été blessé. Les liens blessent les bras. De peur que le boeuf ne se blesse la cuisse. Blesser, en bêchant, les racines d'un arbre. La selle blessait le cheval.
Des souliers qui me blessent furieusement
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans le Bourg. gent. II, 8
.... plus d'un héros Dans le soulier qui le blesse Peut regretter ses sabots
de Pierre Jean de BÉRANGER dans Gueux.
Nature : Absolument.
Car enfin l'intention de celui qui blesse ne soulage point celui qui est blessé
de Blaise PASCAL dans Prov. 7
2
Toucher, en parlant des passions, et surtout de l'amour.
La pitié qui me blesse Sied bien aux plus grands coeurs et n'a point de faiblesse
de Pierre CORNEILLE dans Poly. I, 1
Fuyez un ennemi qui sait votre défaut, Qui le trouve aisément, qui blesse par la vue, Et dont le coup mortel vous plaît quand il vous tue
de Pierre CORNEILLE dans Poly. I, 1
Vous voulez rendre compte à l'objet qui vous blesse De la bonté d'Octave et de votre faiblesse
de Pierre CORNEILLE dans Cinna, III, 2
La main qui me blessait a daigné me guérir
de Pierre CORNEILLE dans Rodog. IV, 3
3
Causer une impression désagréable. Blesser la vue ou les yeux. Une amertume persistante qui blesse le goût.
Phèdre ici vous chagrine et blesse votre vue
de Jean RACINE dans Phèd. I, 1
êtes-vous trop pour moi ? suis-je trop peu pour vous ? C'est m'offrir, et ce mot peut blesser les oreilles
de Pierre CORNEILLE dans Sertor. II, 2
Ce grand prince vous sert et vous servira mieux Quand il n'aura plus rien qui lui blesse les yeux
de Pierre CORNEILLE dans Nicom. IV, 2
Il n'a devant les yeux que sa chère Troyenne ; Tout autre objet le blesse
de Pierre CORNEILLE dans Andr. II, 3
4
Offenser, choquer. Haïr ceux qu'on a blessés. Blesser quelqu'un par d'amères railleries. Blesser les oreilles par des paroles désagréables. S'il y a dans ma lettre quelque chose qui vous blesse. J'espère le dire sans blesser ce personnage.
Oenone, il peut quitter cet orgueil qui te blesse
de Jean RACINE dans Phèd. III, 1
Ici tous les objets vous blessent, vous irritent
de Jean RACINE dans Athal. II, 3
Blesser quelqu'un au coeur, l'offenser dans ses sentiments les plus chers.
Apprends donc que Lélie A pu blesser mon coeur par une perfidie
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Sgan. 19
5
Causer un tort, un préjudice, un dommage. Les clauses de ce contrat blessent mes intérêts. Sans blesser l'intérêt général.
Contre un si grand rival j'agis à force ouverte, Sans blesser son honneur, sans pratiquer sa perte
de Pierre CORNEILLE dans Nicom. III, 8
Ceux mêmes dont ma gloire aigrit l'ambition, M'arracheront peut-être un pouvoir qui les blesse
de Jean RACINE dans Iphig. I, 1
Parle, et, sans espérer que je blesse ma gloire, Voyons comme tu sais user de la victoire
de Jean RACINE dans Alex. V, 3
Ah ! sans doute, l'horreur d'une action si noire Vous guérit d'un amour qui blessait votre gloire
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Zaïre, IV, 5
6
Enfreindre, pécher contre. Son langage blessait les convenances. Blesser la pureté de la langue. Il ne put agir ainsi sans blesser sa conscience.
Sans blesser la charité et votre conscience mortellement
de Blaise PASCAL dans Lettr. 7
Sans toutefois blesser la vérité
de Blaise PASCAL dans Prov. 6
Celui qui blesse la vérité offense les dieux
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans Tél. III
Je sais que, sans blesser l'honneur le plus sévère, Je ne puis m'affranchir des mains de votre père
de Jean RACINE dans Phèd. V, 1
Malheur à qui, du ciel blessant les priviléges, Foule aux pieds ses décrets arbitres des humains !
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Oedipe, III, 1
7
Se blesser, Nature : v. réfl. Se faire une blessure. Il s'est gravement blessé avec son fusil.
Se blesser l'un l'autre. Dans ce duel, les deux adversaires se sont blessés.
8
Sémantique : Fig. S'offenser. C'est un homme susceptible qui se blesse facilement.
9
En parlant d'une femme, faire une fausse couche.
Si l'on parle de se blesser à cinq mois
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 62
Lorsqu'elle [l'électrice de Brandebourg] apprit que l'électeur [de Saxe] s'était fait catholique, elle en fut outrée au point qu'elle s'en blessa
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 47, 60

PROVERBES

1
Vous ne savez pas où le bât le blesse, vous ne savez pas quelle pensée, quel ennui le tourmente.
Jusqu'au revoir, adieu, beau courrier offensé. - Ce n'est pas là, coquine, où le bât m'a blessé ; Mon coeur est plus navré de ton humeur sévère
de Jean-François REGNARD dans le Distr. II, 1

HISTORIQUE

1
XIe s.
La gent de France iert blecée et blesmie
dans Ch. de Rol. XLIII
2
XIIe s.
S'il chiet [tombe], jà ne se blecera ; que [car] Deux sor lui sa main tendra
dans Liber psalm. p. 285
3
XIIIe s.
Amis, vo grant beautés, vos sens, vostre prouesse M'ont si feru d'un dart d'amour qu'au cuer me blece....
de AUDEFROY LE BAST. dans Romancero, p. 13
Nostres sires Diex redrece les bleciez que deables avoit navrez
dans Psautier, f° 176
Ensi remest li assaus devers nostre gent, et mout en i ot de bleciés et de navrés
de Geoffroi de VILLEHARDOUIN dans LXXVII
Estes-vous mout blecie ? nel me devez celer
dans Berte, XVII
Sachiez qu'ele n'en bleça mie, Quant ele dist : biaus douz amis, Tout ont mon cuer el vostre mis Cist douz mot....
dans Lai de l'ombre
Et quant aucuns à honor monte Par son sens ou par sa proece, C'est la chose qui plus la [l'envie] blece
dans la Rose, 250
On doit moult penre garde se li oirs est moult bleciés du testament
de Philippe de BEAUMANOIR dans XII, 37
Et estoit [la reine] en trop grant peril de mort, pource qu'elle estoit bleciée d'un enfant qu'elle avoit eu
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 281
4
XIVe s.
Mais Bertran en jura, oiant tous les plus haus : Qui sans estre blecié retourra [retournera] es praiauls, Encroer le fera plus haut que une saux [saule]
dans Guesclin. 20199
5
XVe s.
Si ne blesserez mie, la gentillesse ni la noblesse de vous
de Jean FROISSART dans I, I, 242
Le dieu d'amours me courut seure, Et me trest de la droitte fleche, Dont les plus amoureux il bleche
de Jean FROISSART dans Espin. amour.
Quant j'ay par vous aucun mal qui me blesse, Je l'endure par le conseil d'Espoir
de Charles D'ORLÉANS dans Ball. 19
S'il est aucun qui soit prins de tristesse, Voise veoir [qu'il aille voir] son douz maintenement ; Je me fais fort que le mal qui le blesse Le laissera pour lors soudainement
de Charles D'ORLÉANS dans Ball. 9
6
XVIe s.
Cela ne blesse en rien nostre foy
de Jean CALVIN dans Instit. 103
Se sentant blecé à mort d'une arquebusade
de Michel de MONTAIGNE dans I, 6
Je les veoy d'une veue moins blessée de passion qu'un aultre
de Michel de MONTAIGNE dans I, 103
J'ay veu tel grand blecer la reputation de sa religion pour....
de Michel de MONTAIGNE dans I, 224
Il vouloit bien assommer, mais non pas blecer, et pourtant ne combattoit que de masse
de Michel de MONTAIGNE dans I, 323
Le son de nos mots blece la pureté de leurs aureilles
de Michel de MONTAIGNE dans III, 5

ÉTYMOLOGIE

1
Wallon, blèsî ; namurois, blèser ; provenç. blessament, blessedura, blessure ; d'après Diez, du moyen allemand bletzen, rapiécer, bletz, lambeau de cuir, où le sens de mettre en pièces (escuz bleciez, boucliers rompus, dans le Chevalier au lion), puis celui de blesser.

Synonymes de BLESSER

Termes proches de BLESSER