Définition de MORT

DÉFINITIONS - PROVERBES - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : mor ; le t ne se prononce pas et ne se lie pas : la mor a des rigueurs ; excepté dans les locutions 

DÉFINITIONS

1
Fin de la vie. On distingue la mort naturelle et la mort accidentelle.
Le peuple offre le sceptre [à qui délivrerait Thèbes du Sphinx].... De cent cruelles morts cette offre est tôt suivie
Faites du bien à votre ami avant la mort, et donnez l'aumône au pauvre selon que vous pouvez
de Isaac Louis Lemaistre de SACY dans Bible, Ecclésiastiq. XIV, 13
Les hommes n'ayant pu guérir la mort, la misère, l'ignorance, se sont avisés, pour se rendre heureux, de n'y point penser
La mort est plus aisée à supporter sans y penser, que la pensée de la mort sans péril
de Blaise PASCAL dans ib. VI, 58
Le présent ne nous satisfaisant jamais, l'espérance nous pipe, et, de malheur en malheur, nous mène jusqu'à la mort qui en est un comble éternel
de Blaise PASCAL dans ib. VIII, 2
Mort soudaine seule à craindre, et c'est pourquoi les confesseurs demeurent chez les grands
de Blaise PASCAL dans ib. XXV, 59
Nous savons que la vie, et la vie des chrétiens, est un sacrifice continuel qui ne peut être achevé que par la mort
De sorte que la mort est le couronnement de la béatitude de l'âme et le commencement de la béatitude du corps
de Blaise PASCAL dans ib.
Je suis toujours surprise de la mort des jeunes personnes
La mort est affreuse quand on est dénué de tout ce qui peut nous consoler en cet état
La mort, qui est la plus importante action de notre vie, a été aussi le plus bel endroit de la sienne
[La reine d'Espagne, fille de Madame, et mourant très rapidement] mandant au roi qu'elle n'a point de regret à la vie, et qu'elle meurt de sa mort naturelle, quoique d'abord elle eût dit comme feu Madame, et se repentant, comme elle, de l'avoir dit
Quel est notre aveuglement, si, toujours avançant vers notre fin, et plutôt mourants que vivants, nous attendons les derniers soupirs, pour prendre des sentiments que la seule pensée de la mort devrait nous inspirer à tous les moments de la vie !
Au lieu de déplorer la mort des autres, grand prince, dorénavant je veux apprendre de vous à rendre la mienne sainte
Il doit mourir de mort violente
La mort se déclare ; on ne tente plus de remèdes contre ses funestes attaques
Au lieu de l'histoire d'une belle vie, nous sommes réduits à faire l'histoire d'une admirable mais triste mort
Et dans les tourments inouïs de sa dernière maladie.... elle n'a eu à se repentir que d'avoir une seule fois souhaité une mort plus douce
Qu'il [l'homme] se multiplie tant qu'il lui plaira, il ne faut toujours pour l'abattre qu'une seule mort
Alors donc [après la résurrection] l'homme sera rétabli dans son premier état, la mort mourra
Si j'allais (ah ! plutôt la mort), si j'allais vous enseigner quelque erreur, je verrais tout mon auditoire se révolter contre moi
Ces langueurs, ces abattements, ces diminutions, que Tertullien appelle des portions de la mort, ne la lui faisaient-ils pas éprouver par avance ?
La mort de madame la Dauphine est une de ces morts précieuses qui couronnent une belle vie
Je ne suis point fort triste, nous n'en avons point de nouveaux sujets ; mais la mort est préférable à la vie
Ces histoires de morts lamentables, tragiques
Les haines sont si longues et si opiniâtres que le plus grand signe de mort dans un homme malade, c'est la réconciliation
de Jean de LA BRUYÈRE dans XI
Qui ne craint point la mort est sûr de la donner
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Oreste, III, 8
Je crois, toutes réflexions faites, qu'il ne faut jamais penser à la mort ; cette pensée n'est bonne qu'à empoisonner la vie ; la grande affaire est de ne point souffrir
Le corps meurt peu à peu et par parties ; son mouvement diminue par degrés, la vie s'éteint par nuances successives, et la mort n'est que le dernier terme de cette suite de degrés, la dernière nuance de la vie
La mort, ce changement d'état si marqué, si redouté, n'est dans la nature que la dernière nuance d'un état précédent
La mort n'est pas une chose aussi terrible que nous nous l'imaginons, nous la jugeons mal de loin, c'est un spectre qui nous épouvante à une certaine distance, et qui disparaît lorsqu'on vient à en approcher de près
Enfin la joie bête et ridicule de tous les fanatiques au sujet de cette mort [de Voltaire]
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Lett. au roi de Pr. 29 juin 1778
La mort, mon fils, est un bien pour tous les hommes, elle est la nuit de ce jour inquiet qu'on appelle la vie
Sémantique : Fig.
Ne sont-ce pas des morts, et des morts effroyables, Que tant de changements d'êtres si variables, Qui se disent toujours fatigués d'espérer ?
de Alfred DE MUSSET dans Poésies nouv. Lett. à Lamartine.
Belle mort, mort glorieuse.
Mourir pour son pays est un si digne sort, Qu'on briguerait en foule une si belle mort
Une bonne mort, une mort au milieu des sentiments religieux et en s'acquittant de tous les devoirs de la religion.
Nous espérons obtenir par elle [la Vierge] une bonne mort après une vie toute mondaine
de Louis BOURDALOUE dans Assompt. de la Vierge, Myst. t. II, p. 342
Mort subite, mort qui survient instantanément. Les morts subites sont causées d'ordinaire par des ruptures du coeur ou des gros vaisseaux.
Il disait que, loin de craindre une mort subite, c'était celle qu'il choisirait
de Charles Pinot, sieur DUCLOS dans Oeuvr. t. VI, p. 178
Donner la mort, voy. DONNER, n° 6.
Mettre à mort, voy. METTRE.
Dans le langage élevé et poétique, porter la mort, voy. PORTER.
Sémantique : Familièrement. Souffrir mort et passion, voy. PASSION.
Sémantique : Familièrement. Mourir de sa belle mort, mourir de mort naturelle.
Il serait plus honnête de me laisser mourir de ma belle mort
Sémantique : Fig.
Tu dis qu'il faut brûler mon livre ; Les tiens auront un meilleur sort, Ils mourront de leur belle mort
Être à l'article de la mort, être à l'agonie.
Être malade à la mort, être fort malade, être près de mourir.
Gens du monde, vous ne pensez pas à ces horribles profanations [de la messe] ; à la mort, vous y penserez avec confusion et saisissement
Il est plaisant que je sois si politique, en étant continuellement à la mort
Au milieu de ce premier triomphe, le roi tomba malade à Calais ; il fut plusieurs jours à la mort
Dès qu'on a le genre nerveux véritablement attaqué, on est porté à se croire continuellement à la mort
de Stéphanie Félicité Ducrest de St-Albin, comtesse de GENLIS dans Maison rust. t. II, p. 261, dans POUGENS
Entre la vie et la mort, dans un fort grand péril par maladie ou par accident.
Alors qu'entre la vie et la mort incertaine, Comme un fruit par son poids détaché du rameau, Notre âme est suspendue et tremble à chaque haleine....
Être au lit de la mort, au lit de mort, être à l'extrémité.
Un pécheur qui, étendu dans le lit de la mort, commence à ne plus compter sur sa vie
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Avent, Mort du pécheur.
À son lit de mort, avant de mourir, en mourant.
Sémantique : Fig. Avoir la mort entre les dents, être fort vieux ou fort malade.
Je vois tout l'excès du ridicule où je me jette à mon âge [en faisant une tragédie à 84 ans], la syndérèse dans le coeur, et la mort entre les dents, ou du moins entre les gencives, car de dents je n'en ai plus
Avoir la mort sur les lèvres, être près de mourir, avoir la figure d'un mourant.
Mille morts, se dit, par exagération, pour les plus grands supplices ou les plus grandes douleurs, ou les plus grands périls. La goutte lui a fait souffrir mille morts.
Xipharès... à travers mille morts, ardent, victorieux, S'était fait vers son père un chemin glorieux
Plutôt de mille morts dussiez-vous me punir....
de Jean RACINE dans ib. III, 5
Vouloir mal de mort, vouloir beaucoup de mal à quelqu'un.
Je me veux mal de mort d'être de votre race
La mort exécute le vif, les héritiers du créancier mort peuvent faire exécuter l'obligé qui vit.
Pères de la Mort, s'est dit d'hommes religieux ou de moines qui se vouaient à l'assistance des moribonds. À Paris, on appelait particulièrement ainsi les augustins déchaussés ou Petits pères.
Hussards de la mort, nom donné à certains régiments de hussards qui portaient pour insignes une tête et des os de mort, et qui, disait-on, ne faisaient aucun quartier à l'ennemi.
2
Dans le style soutenu, la mort est souvent personnifiée.
La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles ; On a beau la prier, La cruelle qu'elle est se bouche les oreilles, Et nous laisse crier
de François de MALHERBE dans VI, 18
La mort ne surprend point le sage, Il est toujours prêt à partir
Défendez-vous par la grandeur ; Alléguez la beauté, la vertu, la jeunesse ; La mort ravit tout sans pudeur
de Jean de LA FONTAINE dans ib.
Ce que vous dites sur la liberté que prend la mort d'interrompre la fortune est incomparable
Un tel homme voyant approcher la mort.... lui montre lui-même l'endroit où elle doit frapper : Ô mort, lui dit-il d'un visage ferme, tu ne me feras aucun mal.... achève donc, Ô mort favorable, et rends-moi bientôt à mon maître
Sans menacer, sans avertir, la mort se fait sentir tout entière dès le premier coup
Laissons donc au sage mépriser tous les états de cette vie, puisqu'enfin, de quelque côté qu'on s'y tourne, on voit toujours la mort en face qui couvre de ténèbres nos plus beaux jours
Il s'affaiblissait, ce grand prince, mais la mort cachait ses approches
La grandeur et la gloire ! pourrons-nous encore entendre ces noms dans ce triomphe de la mort ?
Madame fut douce envers la mort, comme elle l'était envers tout le monde
[Les princes] dégradés à jamais par les mains de la mort
Elle se trouve toute vive et tout entière entre les bras de la mort, sans l'avoir presque envisagée
La voilà, malgré ce grand coeur, cette princesse si admirée et si chérie ! la voilà telle que la mort nous l'a faite !
La mort a rejoint ce qu'elle avait séparé
Ô mort, cruelle mort, que ne lui laissais-tu plus longtemps le plaisir de voir le fruit de ses travaux ?
3
La Mort, personnification de la mort, personnage mythologique que l'on représente le plus souvent sous la forme d'un squelette armé d'une faux (on met une majuscule). Un malheureux appelait tous les jours La Mort à son secours : Ô Mort, lui disait-il, que tu me sembles belle ! Viens vite, viens finir ma fortune cruelle.
La Mort crut, en venant, l'obliger en effet
Un mourant qui comptait plus de cent ans de vie, Se plaignait à la Mort que précipitamment Elle le contraignait de partir tout à l'heure
de Jean de LA FONTAINE dans ib. VIII, 1
Un fantôme s'élance sur le seuil des portes inexorables, c'est la Mort ; elle se montre comme une tache obscure sur les cachots qui brûlent derrière elle ; son squelette laisse passer des rayons livides de la lumière infernale
4
Dans le langage de l'Écriture, les ombres de la mort, la mort (voy. OMBRE).
5
Mort d'homme, se dit des accidents, des rixes où quelqu'un est tué.
En ces occasions l'on frappe, l'on assomme, Et pour moins, bien souvent, il arrive mort d'homme
de Noël LEBRETON, sieur de HAUTEROCHE dans le Soup. mal apprêté, sc. 6
Il y a ici mort d'homme et supposition
de Florent Carton, sieur d'Ancourt, dit DANCOURT dans Mari retrouvé, sc. 22
Et si je n'avais pas apaisé la querelle, Il serait arrivé mort d'homme ou de femelle
Crime de mort, crime emportant la peine de mort ; coupable de mort, coupable méritant la mort (locutions qui ne se disent plus beaucoup).
C'était un crime de mort de paraître en la présence du roi [sans être appelé]
de Louis RACINE dans Rem. Esth. I, 3
Quand Assuérus y était [dans la chambre du trône], quiconque y entrait sans être appelé était coupable de mort
de Louis RACINE dans ib. II, 1
6
La peine capitale. Il vota la mort. Abolir la peine de mort. Toutes les voix allaient à la mort, ont été à la mort.
Cette affaire va à la mort, elle doit finir par un arrêt de mort.
Sentence, arrêt de mort, condamnation qui porte la peine de mort.
Testament de mort, déclaration que fait un condamné avant son supplice.
Sémantique : Par extension. Testament de mort, écrit qui atteste les derniers sentiments d'une personne.
7
Sémantique : Terme de droit. Mort civile, cessation de toute participation aux droits civils.
8
La mort éternelle, la mort de l'âme, la seconde mort, la condamnation des pécheurs aux peines de l'enfer.
Quand il [le livre de l'Apocalypse] les condamne tous [les timides] à la seconde mort, à cette mort si terrible et si étrange, à ce lac ardent de feu et de soufre
Craignez les occasions prochaines ; car qui aime son péril, il aime sa mort
Des infidélités légères qui ne donnent pas la mort à l'âme
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Carême, Tiédeur, 1
Tous les péchés ne sont pas des péchés à la mort
Mort de l'âme, la perte de la grâce sanctifiante par le péché mortel.
Mort morale, état de l'âme où tout sentiment moral est éteint.
Pour garantir le jeune infortuné de cette mort morale dont il était si près, il commença par réveiller en lui l'amour-propre et l'estime de soi-même
9
La mort au monde, la retraite loin du monde, soit dans une maison religieuse, soit chez soi et dans la demeure privée.
Faites bien comprendre à nos soeurs en quoi consiste la mort au monde
Sémantique : Par extension.
Je ne connais personne qui ait autant de besoin que vous, monseigneur, d'une mort continuelle à tout intérêt et à toute passion
Mort mystique de l'âme, détachement général du péché.
10
Sémantique : Fig. Extinction, destruction, ruine. Le monopole est la mort de l'industrie.
Je veux, dans un seul malheur, déplorer toutes les calamités du genre humain, et, dans une seule mort, faire voir la mort et le néant de toutes les grandeurs humaines
...Ce marquis... qui sans cesse au jeu... Voit la vie ou la mort sortir de son cornet
On a ri à la mort du jansénisme et du molinisme
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Mél. litt. Avert. d'une éd. des pensées de Pascal.
Les moralités sont la mort de toute bonne éducation
Les jeunes gens quelquefois se passionnent pour l'étude : c'est la mort à tout avancement
Sémantique : Familièrement. La mort au beurre, se dit de mets dont la préparation demande beaucoup de beurre. Les épinards sont la mort au beurre.
11
Sémantique : Fig. Un grand chagrin. Ce fils dénaturé lui donne la mort.
Et le coup qui surprend un espoir légitime, Porte plus d'une mort au coeur de la victime
Avoir la mort dans l'âme, dans le coeur, être très affligé.
Mme de Chaulnes m'a fort conté les affaires des états... elle me paraît la mort au coeur de toutes les troupes [envoyées en Bretagne]
Vous voyez devant vous une reine éperdue Qui, la mort dans le sein, vous demande deux mots
Elle a.... la fièvre, la migraine, Tout ce qu'on peut avoir.... la mort au fond du coeur
de Francois LANOUE, dit Lanoue Bras de Fer dans Coquette corr. V, 1
Sémantique : Familièrement. C'est une mort que d'avoir affaire à un pareil homme, que de poursuivre une telle affaire, c'est-à-dire c'est une grande peine, c'est une grande misère que de.... C'est une mort que d'attendre si longtemps.
C'est une mort, signifie aussi : il y a de quoi rendre malade, de quoi tuer.
Vous savez ce que c'est pour moi que la santé de votre chère femme ; mais vous l'avez laissée trop écrire ; c'est une mort que cet excès [Mme de Grignan venait d'accoucher]
C'est ma mort, c'est la chose la plus désagréable pour moi.
12
Sémantique : En termes de jeu, jouer à la mort de telle somme, jouer jusqu'à ce que telle somme soit perdue.
13
Mort aux rats, drogue dont on se sert pour faire mourir les rats ; c'est d'ordinaire une substance arsenicale.
Le sulfate de baryte est employé en Angleterre comme mort aux rats
de THENARD dans Traité de chimie, t. II, p. 425, dans POUGENS
Mort aux mouches, cobalt ou arsenic délayé dans l'eau.
Mort aux chiens, colchique d'automne.
Mort de safran, petite truffe parasite, rhizoctonia crocorum. DC.
Mort au chanvre, orobanche rameuse.
Mort aux poules, jusquiame noire.
Mort aux vaches, renoncule scélérate.
Mort aux poux, staphysaigre.
14
Sémantique : Populairement. La petite mort, le frisson. J'ai la petite mort dans le dos.
15
Mort noire ou peste noire, nom donné à la grande peste qui dévasta le monde au milieu du XIVe siècle.
16
À mort, Nature : loc. adv. De manière qu'on en meure. Il fut blessé à mort.
Fig être frappé à mort, être attaqué d'une maladie dont les symptômes annoncent une mort certaine.
Condamner, juger à mort, condamner quelqu'un à la peine de mort.
Combat à mort, combat qui ne doit se terminer que par la mort d'un des combattants.
C'est un duel ? - à mort : ou ma vie, ou la vôtre !
de Casimir DELAVIGNE dans Marino Faliero, II, 13
Sémantique : Populairement. À mort, excessivement. Boire à mort.
À mort ! exclamation pour menacer de mort. À mort les traîtres !
On dit dans le même sens et dans le même emploi exclamatif : mort à ! Mort aux traîtres !
17
À la mort, Nature : loc. adv. Extrêmement, excessivement, en parlant de la haine, de l'ennui et d'autres sentiments analogues.
Je suis ennuyée à la mort d'en entendre parler
Elle soutint que c'était obstination pure, que je m'ennuyais à la mort dans ma retraite
Brutal, avare, amoureux et jaloux à l'excès de sa pupille, qui le hait à la mort
Je hais la toilette à la mort
de Stéphanie Félicité Ducrest de St-Albin, comtesse de GENLIS dans Théât. d'éduc. l'Enfant gâté, I, 3
18
À la vie et à la mort, Nature : loc. adv. Pour toujours. Je suis votre ami à la vie et à la mort.
Entre nous, c'est à la vie et à la mort, notre amitié durera toujours.
Il ne me pardonnera ni à la vie ni à la mort, il ne me pardonnera jamais.
Vous voyez bien ces vingt sols-là, Marianne, je ne vous les pardonnerai jamais, ni à la vie, ni à la mort
Sémantique : Terme de vénerie. À la mort, chiens ! cri que les chasseurs emploient pour appeler les chiens quand le cerf est pris.
19
Par la mort ! sorte de serment et de menace.
Par la mort ! par la tête ! si je le trouve, je le veux échiner
Quiconque remuera, par la mort, je l'assomme !
Mort de ma vie, autre serment qui sert à affirmer avec une sorte d'impatience.
Et mort de ma vie, la grâce saura bien vous préparer les chemins !
Mort de ma vie, que les gens sont sots quand ils sont amoureux !
de BRUEYS dans Grondeur, III, 5

PROVERBES

1
De tant de douleur on ne saurait faire qu'une mort.
2
Exemple : Dieu ne veut pas la mort du pécheur, c'est-à-dire il faut être indulgent pour la faiblesse humaine.
3
Exemple : Après la mort le médecin, voy. MÉDECIN.
4
Il y a remède à tout, hors à la mort.

HISTORIQUE

1
XIe s.
Si me gardez et de mort et de honte
dans Ch. de Rol. II
Ne lui chaut, sire, de quel mort nous mourions
dans ib. X
Si chalengez [défendez] et vos morz et vos vies
dans ib. CXLI
Oliviers sent que à mort est ferut
dans ib. CXLIV
2
XIIe s.
De mort à vie suscitas Lazaron
dans Ronc. 48
Jà de plus aspre mort nel pouvez justicier
dans ib. 200
E tu, bels sires, en cel lieu ù tu seras, u à mort u à vie, jo i serai
dans Rois, p. 175
En vostre amor, qui donra [donnera] mort ou vie
dans Couci, XX
3
XIIIe s.
Sa fille [elle] i a trouvée, que la male mort fiere [puisse frapper]
dans Berte, XI
Se je n'ai d'une cose [chose] que je desire à mort
dans Chron. de Rains, 108
Li uns des sers sunt si soujet à lor seigneurs, que lor sires pot penre quanqu'il ont, à mort et à vie, et lor cor tenir en prison toutes les fois qu'il lor plest, soit à tort, soit à droit, qu'il n'en est tenus à respondre fors à Dieu
de Philippe de BEAUMANOIR dans XLV, 31
S'il i a mort d'homme, tout cil qui sont au fet quieent [tombent] en la merci du comte, de cors et d'avoir
de Philippe de BEAUMANOIR dans LX, 10
4
XIVe s.
Et ainsi celui est principalement dit fort qui se met en perilz de bonne mort
Qui plus despend qu'à lui n'afiert, Sans coup ferir, à mort se fiert [blesse]
de J. DE VIGNAY dans Esches moralisés, f. 74
Il me fera morir, bien sai, sans nul detri [retard] ; Car il me het à mort, et aussi foi-je lui
dans Guesclin. V. 16416
Mais mettez tout à mort, celle soudoierie ! Avant à ces ribaus ! lor puissance est faillie
dans ib. V. 17456
Mieux vaut prison que mort ; car adès en yst-on [sort-on] ; Mais li homs qui est mors, jamais ne revoist-on
dans ib. V. 12260
5
XVe s.
Mort de moy ! vous y jouez vous Avec dame merencolie ? Mon cueur, vous faictes grant folye, C'est la nourrisse de courroux
de Charles D'ORLÉANS dans Rond.
Rien n'est d'armes, quand la mort assaut
de Antoine LE ROUX DE LINCY dans t. II, p. 413
Le marechal a le jour du vendredi en grande reverence ; il n'y mange chose qui prenne mort, ne vest couleur fors noire
dans Bouciq. IV, 3
Qui croit de leger les rapports De ses yeulx sans autre esperance, Pourroit mourir de mille morts Ainçois qu'ataindre à sa plaisance
Mourir de mort acquise [violente]
dans Perceforest, t. IV, f° 85
Or entendez, chere cousine, qu'il est ici malade avecques un sien compaignon ; si vous prie pour Dieu, que je puisse parler à luy, car c'est ma mort et ma vie
dans ib. t. I, f° 43
6
XVIe s.
Elle en faisoit l'essai sur les criminels de mort qui estoient detenus es prisons
de Jacques AMYOT dans Anton. 93
Le jeudi consequent, nonobstant grand tempeste, De canonner à mort l'Anglets sur nous tempeste
de MORIN dans Siége de Boulogne, p. 34
Ceux qui voyent comment ce mal me met au bas, Comme il revient soudain, n'attendent qu'un trespas Qui ces petites morts d'heure à autre finisse
Beze est mort de mort civile, à sçavoir par bannissement, et de mort spirituelle, à sçavoir par l'excommunication
Ils crioient, Nouvelles, nouvelles, comme on crie la mort aux rats et aux souris
dans Sat. Mén. p. 197
Syncope ou petite mort
de Ambroise PARÉ dans VII, 14
J'apperceu une vigne plus chargée de fruits que toutes les autres, et m'enquerant de la raison, on me respondit qu'elle estoit chargée à la mort
de Bernard PALISSY dans 30
Et ne voyant moyen de se desveloper, voulut vendre sa mort
de Martin DU BELLAY dans 6
Le semblable se fera pour toutes mises outre des plaintes, significations et recours à mort de la chandelle [extinction des feux]
dans Nouv. coust. génér. t. II, p. 189
On dit en commun proverbe que telle vie, telle mort
La mort n'a point d'ami, le malade n'en a qu'un demi
de Randle COTGRAVE dans
Bonne la mort qui nous donne la vie [qui ouvre le paradis]
de Randle COTGRAVE dans
Contre la mort n'y a point d'appel
de Randle COTGRAVE dans
À longue corde tire qui la mort d'autrui desire
de Randle COTGRAVE dans
Haine de prince signifie mort d'homme
de Randle COTGRAVE dans
À toute heure la mort est preste
de Antoine LE ROUX DE LINCY dans Prov. t. II, p. 231
Le capitaine Bayard, se sentant blecé à mort d'une arquebusade dans le corps
de Michel de MONTAIGNE dans I, 16
....ceux qui entreprennent, vivants et respirants, jouyr de l'ordre et honneur de leur sepulture, et qui se plaisent de veoir en marbre leur morte contenance ; heureux qui sachent resjouyr et gratifier leur sens par l'insensibilité, et vivre de leur mort
de Michel de MONTAIGNE dans I, 18
Jamais homme ne se prepara à quitter le monde plus purement et pleinement, et ne s'en desprint plus universellement que je m'attends de faire ; les plus mortes morts sont les plus saines
de Michel de MONTAIGNE dans I, 79
Moy qu'il [la Boétie] laissa d'une si amoureuse recommandation, la mort entre les dents, par son testament, heritier de sa bibliotheque et de ses papiers
de Michel de MONTAIGNE dans I, 206

ÉTYMOLOGIE

1
Pays messin, moûe ; prov. mort ; esp. muerte ; ital. morte ; du lat. mortem (voy. MOURIR).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
Arbre de mort, le mancenillier, BAILLON, Dict. de botan. p. 257.

Synonymes de MORT

Phonétiquement proche de MORT