Définition de TUER

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : tu-é

DÉFINITIONS

1
Frapper, assommer ; sens primitif, aujourd'hui tout à fait oublié.
2
Éteindre (voy. à l'étymologie comment frapper a passé au sens d'éteindre). Tuer le feu, la chandelle.
On doute pour quelle raison Les destins si hors de saison De ce monde l'ont appelée ; Mais leur prétexte le plus beau, C'est que la terre était brûlée, S'ils n'eussent tué ce flambeau
de François de MALHERBE dans VI, 14
Sémantique : Terme d'alchimie. Tuer l'eau philosophale, la fixer en continuant toujours le feu.
L'un tue l'autre, le fixe et le volatil se détruisent l'un l'autre.
3
Par généralisation de l'idée de frapper, d'assommer, ôter la vie d'une manière violente.
Tant que personne ne leur résiste [aux Espagnols qui avaient pris Corbie], ils tiennent courageusement la campagne, ils tuent nos paysans et brûlent nos villages
de Vincent VOITURE dans Lett. 74
Les gens que vous tuez se portent assez bien
de Pierre CORNEILLE dans Ment. IV, 2
Le voyage de Fontainebleau est rompu par une des plus cruelles nouvelles du monde qui vient d'arriver ce soir : un coup de canon a tué M. de Turenne le 27, sur les neuf heures du matin
de Paul PELLISSON dans Lett. hist. t. II, p. 379
Il [Abimélech] appela son écuyer, et lui dit : Tirez votre épée et tuez-moi, de peur qu'on ne dise que j'ai été tué par une femme ; l'écuyer, faisant ce qu'il lui avait commandé, le tua
de Isaac Louis Lemaistre de SACY dans Bible, Juges, IX, 54
C'est un de ces braves de profession, de ces gens qui sont tout coups d'épée.... qui ne font non plus de conscience de tuer un homme que d'avaler un verre de vin
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Scapin, II, 8
Pourquoi me tuez-vous ? Eh quoi ! ne demeurez-vous pas de l'autre côté de l'eau ? mon ami, si vous demeuriez de ce côté, je serais un assassin, et cela serait injuste de vous tuer de la sorte ; mais, puisque vous demeurez de l'autre côté, je suis un brave, et cela est juste
de Blaise PASCAL dans Pens. VI, 3, édit. HAVET.
Quand il est question de juger si on doit faire la guerre et tuer tant d'hommes, condamner tant d'Espagnols à la mort, c'est un homme seul qui en juge, et encore intéressé ; ce devrait être un tiers indifférent
de Blaise PASCAL dans ib. VI, 9
Au passage de l'Issel, sous les ordres de M. le Prince, M. de Longueville a été tué ; cette nouvelle accable
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 147
On tue beaucoup de fanatiques [protestants] et on espère en purger le Languedoc
de Françoise d'Aubigné, marquise de MAINTENON dans Lett. au duc de Noailles, 14 mai
Ou qu'il voit la justice en grosse compagnie Mener tuer un homme avec cérémonie
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. VIII
Tuer un homme à terre, le tuer quand il est abattu.
N'avez-vous pas reçu ma lettre où je vous donnais la vie [dans le duel entre Mme de Sévigné et Bussy], et ne voulais pas vous tuer à terre ?
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans à Bussy, 4 déc. 1668
Se faire tuer, périr dans un combat.
Il se fera tuer comme mon frère ; il vaudrait bien mieux qu'il fût sous-diacre
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans l'Ingénu, 7
Se faire tuer signifie aussi chercher la mort, de propos délibéré. Il s'est fait tuer plutôt que de se rendre.
Nature : Impersonnellement, au passif. Il fut tué beaucoup de gens dans la dernière bataille.
Nature : Absolument.
Il [l'homme] tue pour se nourrir, il tue pour se vêtir, il tue pour se parer, il tue pour attaquer, il tue pour se défendre, il tue pour s'instruire, il tue pour s'amuser, il tue pour tuer
de J. DE MAISTRE dans Soirées de St-Pétersbourg, Entretien 7
Sommes-nous des soldats qui tuent et se font tuer pour des intérêts qu'ils ignorent ?
de Pierre Augustin Caron de BEAUMARCHAIS dans Mar. de Fig. v, 12
Tue, tue, exclamation de gens qui en attaquent d'autres et ne veulent en épargner aucun.
M. de Longueville et ceux qui le suivirent de plus près, croyant avoir trouvé un chemin pour forcer la barrière, commencèrent à crier : Tue, tue, sans quartier
de Paul PELLISSON dans Lett. hist. t. I, p. 143
Nature : Substantivement.
Au premier bruit qu'ils firent d'un tue, tue, on leur répondit si bien par de grands cris de Vive le roi, qu'ils ne passèrent pas plus avant
de Paul PELLISSON dans ib. t. III, p. 172
Fig. à tuer chiens, s'est dit de prétextes, comme quand on veut tuer son chien.
Des objections à tuer chiens
de D'ARGENSON dans Mém. t. II, p. 299
4
Faire périr d'une manière quelconque, de mort violente ou par maladie. Une tuile lancée du haut d'un toit tua Pyrrhus. C'est une apoplexie qui l'a tué.
La faim [dans Jérusalem assiégée] en tuait plus que la guerre, et les mères mangeaient leurs enfants
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. II, 8
Dieu veuille que quelque gelée ne me tue pas à Berlin, comme le froid de Stockholm tua Descartes !
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. Thiriot, 27 nov. 1736
Elle aimait trop le bal, c'est ce qui l'a tuée
de Victor HUGO dans Orient. 33
Fig. Sémantique : En termes de l'Écriture, tuer l'âme, la souiller, lui faire perdre le bonheur éternel.
Je sais que le trouble intérieur est la peine de tout péché qui tue l'âme
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Carême, Enf. prod.
5
Causer la mort.
Le bruit qui a couru de ma mort ne m'a point tué
de Jean-Louis GUEZ de BALZAC dans liv. IX, lett. 34
J'approuve extrêmement le dessein que vous faites de vous désabuser de la fortune, et de la quitter comme une dangereuse maîtresse ; ses caresses et ses mépris sont également à craindre ; d'une façon ou d'autre, elle tue tous ses amants
de Vincent VOITURE dans Lett. 44
Ma vengeance est perdue, S'il ignore en mourant que c'est moi qui le tue
de Jean RACINE dans Andr. IV, 4
Il se dit d'un médecin qui, par inhabileté, cause la mort du malade.
Le frère de Mme de Coulanges est mort ; on dit que c'est le cordelier qui l'a tué ; et moi, je dis que c'est la mort
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 466
6
Il se dit des animaux qu'on met à mort. La cuisinière a tué le poulet. Tuer des perdrix. Nous avons chassé toute la journée sans rien tuer.
Non, j'ai tué fort peu, tout au plus trois levrauts, Autant de cailles, oui, peut-être dix perdreaux
de Jean-François COLLIN D'HARLEVILLE dans M. de Crac, sc. 9
7
Il se dit des bouchers qui égorgent ou assomment les animaux. Tuer des boeufs, des moutons.
Dans le langage familier. Ce boucher tue de meilleure viande que tel autre. Les bouchers, en été, tuent leur viande pendant la nuit.
Nature : Absolument. Ce boucher ne tue qu'une fois par semaine.
8
Faire périr, en parlant des arbres, des plantes ou des insectes. Le grand froid a tué les oliviers. Il est recommandé de tuer les chenilles.
Sémantique : Populairement. Tuer le ver, voy. VER.
9
Sémantique : Par exagération, causer une fatigue, une peine excessive, compromettre la santé, la vie. Il porte de trop grands fardeaux, cela le tue. Vous tuez votre cheval de le mener toujours au grand galop.
Albe vous a choisi, je ne vous connais plus. - Je vous connais encore, et c'est ce qui me tue
de Pierre CORNEILLE dans Hor. II, 3
Deux heures durant, dans une posture qui tue la poitrine
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 5 nov. 1684
Elle [ma tante] me fait des caresses qui me tuent ; elle parle de sa mort comme d'un voyage
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 20 avr. 1672
Vous n'y êtes pas [auprès de moi], et c'est ce qui me tue ; vous faites du bien où vous êtes, et c'est ce qui me console
de Françoise d'Aubigné, marquise de MAINTENON dans Lett. au duc de Noailles, 27 déc. 1710
Mais ne différez point : chaque moment vous tue, Réparez promptement votre force abattue
de Jean RACINE dans Phèdre, I, 3
On sent le vide du plaisir ; il est des moments de réflexion qui vous tuent
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Mystères, Visitation.
Son âme tuait son corps
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans l'Ingénu, 19
Abrégeons cet entretien ; malgré tout le charme que j'y trouve, il me tue
de Stéphanie Félicité Ducrest de St-Albin, comtesse de GENLIS dans Théât. d'éduc. la Curieuse, IV, 7
Nature : Absolument.
Cette vie me tourmente trop, il est trop question de moi, on ne se peut cacher, cela tue
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 24 juill. 1689
Se tuer le corps et l'âme, se donner beaucoup de peine.
Il se dit des peines mortelles que cause l'amour Fuyez un ennemi qui sait votre défaut, Qui le trouve aisément, qui blesse par la vue, Et dont le coup mortel vous plaît quand il vous tue
de Pierre CORNEILLE dans Poly. I, 1
10
Sémantique : Fig. Importuner, incommoder. Le grand bruit me tue.
Adieu, mon très cher comte, je vous tue par la longueur de mes lettres
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 13
11
Compromettre causer la chute, la ruine. Les acteurs ont tué l'ouvrage.
On pourra regarder comme une espèce de paradoxe ce que nous venons de dire, que les Lettres Provinciales, publiées en 1656, ont tué les jésuites cent ans après, en 1760
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Élog. Bossuet. note 14
C'est en France qu'on a dit ce mot : la légalité nous tue
de LAUGEL dans Rev. des Deux-Mond. 15 mai 1872, p. 300
Tuer un auteur, tuer son original, son modèle, le surpasser au point de le faire oublier.
12
Sémantique : Fig. Faire disparaître, annuler, écarter.
Tuez ce qui vous tue, armez-vous de constance
de Jean de ROTROU dans Bélis. II, 2
Cela tue l'effet du spectacle, cela tue tout le plaisir de la partie, cela le contrarie, le détruit, l'anéantit.
Payer jusqu'aux sourires des femmes ! c'est tuer le plaisir, et non le temps
de P. DE MUSSET dans Rev. des Deux-Mond. 1er déc. 1854, p. 963
Tuer un poëte, ôter, en le traduisant, tout éclat poétique. Hic gelidi fontes... traduisez ave l'abbé Desfontaines : Que ces clairs ruisseaux, etc.
et vantez-vous d'avoir tué un poëte
de Denis DIDEROT dans sur Térence.
Tuer le temps, s'occuper de choses futiles pour échapper à l'ennui.
[Des vers] Que, pour tuer le temps, je m'efforce d'écrire
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Sat. VIII
On dit aussi quelquefois : tuons le temps qui nous tue.
13
Sémantique : Terme de peinture. Se dit quelquefois de l'effet d'une couleur, d'une lumière, qui en détruit, en affaiblit une autre.
On dit de même qu'une figure en tue une autre.
Se dit aussi dans le langage ordinaire. Si vous mettez votre robe bleue, je ne mettrai pas la mienne ; la vôtre est d'un bleu plus vif et tue la mienne complétement.
14
Nature : Absolument. La lettre tue, quand on s'attache servilement aux mots, on ne saisit pas la pensée.
La lettre tue : tout arrivait en figures, il fallait que le Christ souffrît
de Blaise PASCAL dans Pens. XVI, 8 bis, éd. HAVET.
Répétez souvent que la lettre tue, et que c'est l'esprit qui vivifie
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans t. XVII, p. 70
Cela se dit aussi d'un traducteur servile.
15
Se tuer, Nature : v. réfl. Se donner la mort, par accident ou volontairement. Il s'est tué en tombant de cheval.
Brutus et Cassius se tuèrent avec une précipitation qui n'est pas excusable
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Rom. 12
Il n'y avait point de loi civile à Rome contre ceux qui se tuaient eux-mêmes
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Esp. XXIX, 9
Il y a une loi de Marc-Aurèle qui ordonne de ne point confisquer les biens de ceux qui se sont tués
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. Thibouville, 10 nov. 1777
On ne se tue point pour les douleurs de la goutte ; il n'y a guère que celles de l'âme qui produisent le désespoir
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Ém. I
Se donner la mort l'un à l'autre. Les deux adversaires, tirant en même temps, se tuèrent l'un l'autre.
Sémantique : Par exagération, on s'y tue, se dit d'un endroit où l'affluence est excessive.
16
Nuire au corps, à la santé. Vous vous tuez à mener une pareille vie. Il se tue à boire.
Je vous demande la grâce de ne vous point tuer pour moi, et que je n'aie point la douleur de contribuer à détruire une vie pour laquelle je donnerais la mienne
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 378
J'ai pensé me tuer depuis trois mois, afin d'achever un morceau que je veux y mettre [dans l'Esprit des lois].... je vous jure que cela m'a coûté tant de travail, que mes cheveux en ont blanchi
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Lett. à Mgr Cerati, 18 mars 1748
Faudra-t-il que M. le marquis se tue à calculer une éclipse, quand il la trouve à point nommé dans l'almanach ?
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Jeannot et Colin.
Se tuer à plaisir, faire sans nécessité des choses qui nuisent à la santé.
17
Se donner beaucoup de peine.
Les autres [les érudits] se tuent pour remarquer toutes ces choses, non pas pour en devenir plus sages, mais seulement pour montrer qu'ils les savent
de Blaise PASCAL dans Pens. IV, 2, éd. HAVET
On dit ordinairement se tuer à.
On se tue à vous faire un aveu des plus doux
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Tart. IV, 5
Pour moi, je ne me tue point à écrire ; je lis, je travaille, je me promène, je ne fais rien
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 224
Il [Chapelain] se tue à rimer : que n'écrit-il en prose ?
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. IX
Montesquieu, dans ses Lettres persanes, se tue à rabaisser les poëtes
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. Saurin, 28 déc. 1768
Figurez-vous ce que c'est que de faire imprimer à la fois son Siècle et une nouvelle édition de ses pauvres oeuvres ; de se tuer du soir au matin à tâcher de plaire à ce public ingrat
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. d'Argental, 28 août 1751
Pour moi, quand je me tuerais par mes travaux, le nom de Durand n'en deviendrait pas plus célèbre
de Stéphanie Félicité Ducrest de St-Albin, comtesse de GENLIS dans Théât. d'éduc. le Magistrat, II, 4
18
Se tuer de, faire incessamment.
Je me tuais moi-même à tous coups de lui dire Que mon âme pour lui n'a que de la froideur
de Pierre CORNEILLE dans Veuve, III, 4
Le bruit est grand autour d'elle [une dame à qui on prétendait que Monsieur faisait la cour] ; Monsieur en est au désespoir ; il se tue de dire qu'elle ne prétend à rien
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans t. x, p. 148, dans POUGENS
Son ami [de Matha] se tuait de lui dire, qu'ils [ses procédés de galanterie] étaient insolents plutôt que familiers
de Antoine HAMILTON dans Gram. 4
Je me tue de vous faire signe que j'ai quelque chose à vous dire
de BRUEYS dans Muet, IV, 7
19
Ces deux nuances se tuent mutuellement, elles se ternissent l'une l'autre.
20
On dit que le cidre se tue ou est tué, lorsque, restant en vidange, il prend une teinte brune et perd de sa saveur.
21
À tue-tête, Nature : loc. adv. Très fort, en parlant de la voix (si fort que l'on tue, casse la tête).
Ils parlent tous à tue-tête
de Paul SCARRON dans Virg. VI
Un jour d'audience, où se trouvaient les ambassadeurs et nombre de gens distingués, le cardinal [Dubois], importuné par quelqu'un, l'envoya promener en termes grenadiers, jurant et criant à tue-tête
de Charles Pinot, sieur DUCLOS dans Oeuv. t. VI, p. 135
Dans l'instant, nous avons commencé un duo que nous avons chanté un peu faux, mais à tue-tête
de Stéphanie Félicité Ducrest de St-Albin, comtesse de GENLIS dans Ad. et Th. t. II, p. 284, dans POUGENS

REMARQUE

1
On ne se sert pas du verbe tuer en parlant des morts violentes par exécution de justice, ni en parlant de ceux qui ont été noyés, étouffés ou empoisonnés

HISTORIQUE

1
XIIe s.
Icel orage e cel tempiz Lur dura tant que port unt pris En Engleterre, ceo m'est vis, Morz e tuet e esturdiz
de Benoît de Sainte-Maure dans I, v. 1874
Si bruit li cox [le coup] com foudre contre oré ; De trente maux [maillets] ne fust il miex tué, Et li chevals par desoz asomé
dans Bat. d'Aleschans, v. 5775
E tuout [tuait] à glaive les enfanz e les vielz par tutes les citez
dans Rois, p. 19
2
XIIIe s.
Paor ai ne vous tue, si me puist Diex aider
dans Berte, X
3
XVe s.
Or ne fait rien, et si se tue, Fors soy partout faire escharnir [moquer]
de Eustache DESCHAMPS dans Miroir de mariage. p. 64
Homs qui se marie se tue
de Eustache DESCHAMPS dans Ball.
Item à maistre Jacques James, Qui se tue d'amasser biens
de François de Montcorbier, dit VILLON dans Gr test.
Ils trouverent devant St-Mery un nommé Jehan le Prestre qu'ils tuerent [percèrent de coups] plus de dix fois
dans Journal de Paris, Paris sous Charles VI et VII, an. 1438
4
XVIe s.
Si ma chambriere m'en eust fait autant, je me fusse levée, et lui eusse tué la chandelle sur le nez
de Marguerite de Navarre, dite aussi de Valois, ou d'Angoulême, reine de Navarre dans Nouv. LIX.
Ils tuent le feu à une pipe de vinaigre defoncée
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans Hist. III, 14
L'ambition se tue en se faisant cognoistre
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans Tragiques, édit. LALANNE, p. 135
De sept tuez sur la terre gisans, Mille en y a les tueurs s'en disans
de Jacques AMYOT dans Galba, 33
Tel tue qui ne pense que blesser, et tel cuide frapper qui tue
de Randle COTGRAVE dans
Tuez, il fait bon saler
de Antoine OUDIN dans Curios. franç.

ÉTYMOLOGIE

1
Berry, cuer le feu, cuer la chandelle ; wallon, touwé ; provenç. tuar, tuer ; tudar, éteindre, étouffer ; bas-lat. tutare, éteindre. Du grec, tuer, n'a pu être indiqué que quand on ignorait les règles de l'étymologie ; il faut un mot qui rende compte du t ou d (tutare, tudar). Diez, écartant le germanique (goth. dauthjan, anc. haut-allem. tôtan, qui aurait donné en provençal daudar ou taudar, et en français touer), tire tuer du latin tutari, protéger, recouvrir pour protéger, puis étouffer : tuer le feu, qui serait l'emploi primitif, était, à l'origine le couvrir de cendres pour le maintenir ; d'où le sens d'étouffer qui s'est généralisé dans l'acception tuer. Mais tous les intermédiaires manquent pour appuyer un pareil écart de signification. L'origine est le latin tuditare, frapper, choquer, ou même tudare ; du moins du Cange a tudatus, marteau. Ici la forme et le sens sont d'accord. Le sens fondamental est frapper, assommer. Pour passer à éteindre, on a l'ancien texte qui dit : tenens cannam unam in manu sua, tutat lampadem unam, il frappe une lampe et l'éteint ; du langage ecclésiastiqne tutare a passé au sens d'éteindre dans le parler vulgaire ; de là le tudar, provençal, l'at-tutare, italien, lequel, figurément, a pris le sens d'amortir, apaiser. Enfin frapper est devenu sans peine donner la mort d'une manière violente.

Synonymes de TUER

Phonétiquement proche de TUER