Définition de POINTE

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : poin-t'

DÉFINITIONS

1
Ce qui point, ce qui pique, piqûre.
Les cruautés... Ne me sont une pointe aux entrailles si dure Comme le souvenir de ta déloyauté
de François de MALHERBE dans I, 4
Il est vrai qu'elle n'a pas souffert de ces cruelles pointes de douleur qui percent le corps, qui déchirent l'âme, et qui épuisent en un moment toute la constance d'un malade
de Esprit FLÉCHIER dans Duch. de Montaus.
Sémantique : Fig.
Je vous disais une vérité amère, c'est que vous me quittâtes dans un état où toutes mes pensées étant autant de pointes aiguës...
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 1er oct. 1684
Mon esprit appuie présentement davantage sur chaque circonstance, et il semble que les pointes de la douleur me pénètrent plus vivement [pour la mort de Mme de Sévigné]
de Mme DE GRIGNAN dans dans SÉV. t. x, p. 400, éd. RÉGNIER
Le mal se communique au coeur ; toutes les pointes de la conscience s'émoussent ; on tombe, à l'égard du salut, dans une espèce de léthargie où l'on n'est ému de rien
de Louis BOURDALOUE dans Essai d'Avent, Confess. Pensées, t. III, p. 221
Les pointes de la pénitence qui percent sa chair
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Myst. Incarn.
2
Saveur piquante et agréable.
La longue habitude de mépriser e plaisir du goût avait éteint en lui toute la pointe de a saveur
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Panég. de S. Bernard, I
La petite pointe d'ail l'assaisonnait [un mets], avec une finesse de saveur et d'odeur qui aurait flatté le goût du plus friand Gascon
de Jean-François MARMONTEL dans Mém. VI
Sémantique : Fig.
Si M. son père n'avait point pour lui une grande passion, il en pourrait sentir une petite pointe de jalousie
de Jean-Louis GUEZ de BALZAC dans liv. VII, lett. 3
...Le peu souvent que ce bonheur arrive, Piquant notre appétit, rend la pointe plus vive
de Pierre CORNEILLE dans Veuve, I, 1, 1re édit.
La pointe du plaisir s'émousse par la souffrance
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Abrégé d'un serm. pour le 3e dim. de Pâques, III
La maréchale de Rochefort se fit prier, avec cette pointe de gloire qui lui prenait quelquefois
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 3, 54
J'y sens une petite pointe de dépit qui a son mérite : c'est la jalousie qui ne loue
de Pierre de MARIVAUX dans l'Heur. stratag. II, 3
Cette innocente raillerie Dans ces repas dignes des dieux cette une pointe d'ambroisie
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. en vers et en prose, 1
Je doute fort qu'on joue cette pièce [Sophonisbe] ; les Pélopides de M. Durand seraient plus faits pour la nation ; il y a là une petite pointe d'adultère qui ne réussirait pas mal
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. Thibouville, 9 janv. 1771
La vanité même y mêlait a pointe
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Conf. II
Une pointe de raillerie, d'ironie, un mot moqueur, un trait ironique.
Une pointe de vin, un coup de vin qui a mis en gaieté.
Celui [l'état] où vous me représentez Mlle d'Alerac est trop charmant ; c'est une petite pointe de vin qui réveille et réjouit toute une âme
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 5 nov. 1684
Être en pointe de vin, avoir un peu de vin dans la tête, être un peu échauffé par le vin.
Ils étaient déjà en pointe de vin et bien près d'être ivres
de Charles ROLLIN dans Hist. anc. Oeuv. t. V, p. 360, dans POUGENS
J'y allai l'autre jour, un peu chaud de vin ; j'étais en pointe, j'agaçais les jolis masques
de Alain René LESAGE dans Turcar. IV, 2
Ces bagatelles ne sont bonnes qu'aux yeux de ceux qui les ont faites : elles ont comme des chansons de table, qu'il ne faut chanter qu'en pointe de vin
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. Villette, 1er sept. 1765
3
Trait subtil, recherché, jeu de mots.
Il se hasarde même à faire des romans, Des chansons pour Gautier, des pointes pour Guillaume
de Pierre CORNEILLE dans Illusion, I, 3
Le style n'est pas plus élevé ci que dans Mélite ; mais il est plus net et plus dégagé des pointes dont l'autre est semée, qui ne sont, à en bien parler, que de fausses lumières dont le brillant marque bien quelque vivacité d'esprit, mais sans aucune solidité de raisonnement
de Pierre CORNEILLE dans la Veuve, Exam.
Il est mêlé de pointes, comme dans cette première ; mais ce n'était pas alors un si grand vice dans le choix des pensées, que la scène en dût être entièrement purgée
de Pierre CORNEILLE dans Clitandre, Exam.
Elle était tout habillée sur un lit, environnée de quatre ou cinq des plus doucereux, étourdie de quantité d'équivoques, qu'on appelle pointes dans les provinces, et souriant bien souvent à des choses qui ne lui plaisaient guère
de Paul SCARRON dans Rom. com. I, 8
Qu'il [Maynard] s'était adonné à un genre d'écrire auquel il n'était pas propre, voulant dire l'épigramme, et qu'il n'y réussirait pas parce qu'il n'avait pas assez de pointe
de Paul PELLISSON dans Hist. de l'Acad. IV, Maynard
Jadis de nos auteurs les pointes ignorées Furent de l'Italie en nos vers attirées
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Art p. II
Laisse-les, dans leur manie, Préférer insolemment L'exactitude au génie Et la pointe au sentiment
de CHAUL. dans à Volt.
L'amour des subtilités et l'affectation des pointes dans le discours avaient pris, dès le temps de Tibère et de Caligula, a place du bon goût qui régnait sous Auguste
de Charles ROLLIN dans Hist. anc. XXV, I, II, 3
Zozime dit que lors du siége de Rome par Alaric] l'on fondit quelques-uns de ces dieux qui étaient d'or ou d'argent, et que de ce nombre fut la Vertu ou la Force, après quoi aussi elle abandonna entièrement les Romains ; Zozime ne doutait pas que cette belle pointe ne renfermât la véritable cause de la prise de Rome
de Bernard le Bouyer de FONTENELLE dans Oracles, II, 4
Il règne ici une secte de faiseurs de pointes dont M. le chevalier de Chastellux est un des premiers apôtres ; elles sont si mauvaises, que c'est presque un des caractères d'un bon esprit que de ne pas les entendre
de Denis DIDEROT dans Salon de 1767, Oeuv. t. XIV, p. 42, dans POUGENS
Pointe d'épigramme, la pensée piquante qui doit terminer une épigramme.
Et n'allez pas toujours d'une pointe frivole Aiguiser par la queue une épigramme folle
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Art p. II
4
La pointe de l'esprit, ce qu'il y a de plus pénétrant, de plus vif dans l'esprit.
Le chaud élément Qui donne cette pointe au chaud entendement
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Sat. V
5
Bout piquant et aigu.
Avec quelle insolence ils ont de toutes parts Fait briller à nos yeux la pointe de leurs dards !
de Jean RACINE dans Iphig. V, 1
L'aventure de Régulus, enfermé par les Carthaginois dans un tonneau garni de pointes de fer, mérite-t-elle qu'on la croie ?
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Dict. phil. Histoire.
Sémantique : Fig.
La justice et la vérité sont deux pointes si subtiles, que nos instruments sont trop émoussés pour y toucher exactement
de Blaise PASCAL dans Pens. III, 3, éd. HAVET.
Pouvoir des pointes, propriété qu'ont les pointes de soutirer l'électricité des corps électrisés, et par conséquent d'en faire disparaître les signes.
À la pointe de l'épée, les armes à la main.
Les Athéniens ne pouvaient plus avoir de vivres qu'à la pointe de l'épée
de Charles ROLLIN dans Hist. anc. Oeuv. t. III, p. 684, dans POUGENS
À la pointe de l'épée, en duel.
À ce compte... les discours d'un menteur deviennent des vérités, sitôt qu'ils sont soutenus à la pointe de l'épée
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Hél. I, 57
On dit dans le même sens : à la pointe des armes.
Commandez que son bras, nourri dans les alarmes, Répare cette injure à la pointe des armes
de Pierre CORNEILLE dans Cid, II, 7
Sémantique : Fig. À la pointe de l'épée, de vive force, avec de grandes difficultés.
Point de franche lippée ! Tout à la pointe de l'épée !
de Jean de LA FONTAINE dans Fabl. I, 5
Point d'argent qu'à la pointe de l'épée
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 2 août 1689
On ne réussit dans ce monde qu'à la pointe de l'épée
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. la Harpe, 19 oct. 1765
Sémantique : Par extension, à la pointe de l'éloquence, de l'argent etc. par le moyen de l'éloquence, de l'argent, etc.
Résolvez-vous, ma belle, de me voir soutenir toute ma vie, à la pointe de mon éloquence, que je vous aime plus encore que vous ne m'aimez
de LA FAY. dans Lettr. Oeuvr. t. III, p. 218
Chez Mme Dupin même où j'étais de la maison, et où je rendais mille services aux domestiques, je n'ai jamais reçu les leurs qu'à la pointe de mon argent
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Conf. X
Il ne faut poursuivre le phénomène à la pointe de l'esprit, que quand il échappe à la portée du sens
de Denis DIDEROT dans Opin. des anc. philos. (secte éléatique).
Sémantique : Fig. Sur la pointe d'une aiguille, voy. AIGUILLE.
6
Sémantique : Terme d'escrime. Couper la pointe, faire un mouvement prompt et léger, par lequel, sans déranger la pointe de son fer de la ligne du corps, on la passe par-dessus le fer de son adversaire.
Parer de la pointe, écarter la pointe de la ligne du corps, en faisant une parade.
Un coup de pointe, un coup porté avec la pointe du sabre.
7
Sémantique : Terme de sculpteur. Outil de fer qui sert à ébaucher l'ouvrage, après que le bloc de pierre ou de marbre a été dégrossi ; ce qui s'appelle approcher à la pointe.
Double pointe, ciseau fendu par le bout.
Lorsque le marbre est dégrossi, ...on avance l'ouvrage avec une pointe, et l'on se sert quelquefois, dans ce travail, de la double pointe, qu'on nomme autrement dent de chien
dans Dict. des arts et m. Sculpteur
8
Sémantique : Terme de graveur. Pointe sèche, pointe dont on se sert pour former, sur le cuivre nu, des traits fins et délicats.
Si l'on forme, avec une pointe aiguë, des traits ou des hachures, sans recourir à l'eau-forte, ni au burin, cela s'appelle graver à la pointe sèche
de Denis DIDEROT dans Salon de 1765, Oeuv. t. XIII, p. 358, dans POUGENS
La pointe sèche ouvre le cuivre, sans en rien détacher
dans ib.
Manière d'opérer avec la pointe. Cette gravure est touchée d'une pointe fort spirituelle.
Tige de cuivre à l'extrémité de laquelle est monté un diamant qui sert aux graveurs en pierres fines à creuser les parties des pierres qu'ils veulent graver.
On a trouvé plus facile et plus sûr de faire servir la malice humaine à corriger les autres vices de l'humanité, à peu près comme on emploie les pointes du diamant à polir le diamant même : c'est là l'objet ou la fin de la comédie
de Jean-François MARMONTEL dans Oeuv. t. VI, p. 139, dans POUGENS
9
Sémantique : Terme d'imprimerie. Espèce d'alène, avec laquelle on enlève les lettres en corrigeant les épreuves.
10
Pointe de diamant, ou, simplement, diamant, diamant taillé en pointe qui sert à couper le verre.
Avançant un pied, puis un autre, et prenant bien garde à les poser par mesure, comme si elle eût marché sur des pointes de diamants
de Jean de LA FONTAINE dans Psyché, I, 83
Pointes naïves, nom que les lapidaires donnent aux diamants bruts, d'une forme extraordinaire, qui viennent particulièrement de la mine de Soumelpour, au Bengale.
11
Sémantique : Terme de relieur. Pointe à rabaisser, outil en acier, long de 24 à 30 pouces, ayant la forme d'un couteau à rogner, et qu'on fait glisser le long d'une règle en fer pour rabaisser les cartons d'un livre ; c'est ce qu'on appelle pointer.
12
Morceau de fer dont on se sert pour commencer un trou de mine.
13
Sémantique : Terme de serrurier. Pointe molle, le bout d'un lacet, d'un piton, dont les extrémités des branches sont en pointe et amincies de manière à être recourbées et rivées.
14
Sémantique : Terme de chirurgie. Pointe de feu, petite eschare que l'on produit à l'aide d'un cautère pointu.
Sémantique : Terme de vétérinaire. Pointe de feu, morceau de fer long, terminé en pointe, que l'on fait rougir pour percer la peau d'un cheval en certains cas.
15
Clou long et mince, avec ou sans tête, différant du clou proprement dit en ce que la tige en est ronde et de grosseur uniforme. Ce morceau de bois est décollé, il faut y mettre quelques pointes. On se sert de pointes pour clouer un tapis.
De la fonte au fer fin, de la pointe de Paris à la plaque tournante des chemins de fer, on y élabore, on y fabrique tout
de STÉPH. dans LIÉGEARD, au Corps législatif, Moniteur univ. 13 mai 1868, p. 650, 1re col.
16
Bout, extrémité des choses qui vont en diminuant.
Une des pointes de la montagne de Tarare vous empêcha de me voir
de Vincent VOITURE dans Lett. IX
Je suis monté avec la multitude de mes chariots sur le haut des montagnes, sur le mont Liban, j'ai coupé ses grands cèdres et ses beaux sapins, je suis monté jusqu'à la pointe de son sommet
de Isaac Louis Lemaistre de SACY dans Bible, Isaïe, XXXVII, 24
Déjà de ses vaisseaux la pointe était tournée, Et la voile flottait aux vents abandonnée
de Jean RACINE dans Phèdre, III, 1
Des fleuves pleins de neiges tombent, comme des torrents des pointes de rochers qui environnent sa tête [d'un mont]
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans Tél. III
Le premier [l'homme de coeur] n'est guère plus vain d'avoir paru à la tranchée.... que celui-ci [le couvreur] d'avoir monté sur de hauts combles ou sur la pointe d'un clocher
de Jean de LA BRUYÈRE dans II
On n'est ni ignorant, ni sot, moins encore méchant pour ne voir jamais que la pointe de son clocher
de Denis DIDEROT dans Sur les caract.
17
Pointe de terre, ou, simplement, pointe, espace de terre ou de rochers qui s'avance plus ou moins dans la mer.
Les Portugais, naviguant sur l'océan Atlantique, découvrirent la pointe la plus méridionale de l'Afrique
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Esp. XXI, 21
On doit remarquer, au sujet de ces pointes formées par les continents, qu'elles sont toutes posées de la même façon : elles regardent toutes le midi
de Georges Louis Leclerc, comte de BUFFON dans Hist. nat. Preuv. théor. terre, Oeuv. t. II, p. 148
La Californie est proprement une longue pointe de terre qui sort des côtes septentrionales de l'Amérique, et s'avance entre l'est et le sud jusqu'à la zone torride
de Guillaume Thomas, abbé RAYNAL dans Hist. phil. VI, 23
Bientôt nous reconnûmes la pointe de VanDiémen et le banc des brisants qui est au large de cette pointe
de LA PÉROUSE dans Voy. t. III, p. 252, dans POUGENS
Pointe, l'espace de terrain compris entre deux cours d'eau à leur confluent.
18
La pointe du pied, l'extrémité du pied opposée au talon.
Sur la pointe du pied ou des pieds, se dit d'une personne qui, debout, fait porter son corps sur les orteils.
Il se mit à marcher doucement, je le suivis sur la pointe du pied
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Hél. V. 5
Il s'en était allé là-dessus légèrement et sur la pointe du pied, ne se doutant pas qu'il avait offensé lord Nelvil
de Anne Staël-Holstein, dite Mme DE STAËL dans Corinne, VIII, 1
Sémantique : Terme de danse. Avoir des pointes, se dit d'un danseur qui sait s'élever sur la pointe des pieds, et faire des pas sans porter le talon à terre.
Sémantique : Fig. et populairement. Marcher sur ses pointes, être fier.
19
Sémantique : Terme de guerre. La pointe de l'aile droite, de l'aile gauche, l'extrémité de ces ailes.
En fortification, la pointe d'un bastion, l'angle du bastion le plus avancé du côté de la campagne.
Au lieu d'ouvrir la pointe et y faire un logement en diligence, il a voulu profiter d'une traverse que les ennemis avaient laissée vers la gorge de l'ouvrage
de Paul PELLISSON dans Lett. hist. t. III, p. 241, dans POUGENS
20
Sémantique : Terme de marine. Se dit quelquefois pour cap du navire.
Pointe de bordage ou de doublage, morceau de bordage ou de toile qui s'applique pour remplir un vide.
Avirons à pointe, avirons montés de manière qu'il n'y ait qu'un aviron et qu'un rameur sur chaque banc de l'embarcation.
Une des divisions du compas de mer ou boussole. Il y a trente-deux pointes qui marquent les vents. Un rumb de vent vaut quatre pointes.
21
Se dit des divisions du tablier du trictrac sur lesquelles on case ou range les dames. On dit plutôt les flèches.
22
Pointe de pavé, jonction des deux ruisseaux d'une chaussée, en forme de fourche.
23
Sémantique : Terme de sellerie. Pointe de l'arçon, les parties qui forment le bas de l'arçon d'une selle.
24
Sémantique : Terme de blason. Partie basse de l'écu.
Pointe se dit des espèces de dents que l'on fait au bout des branches d'une croix. Croix à huit pointes, à seize pointes, croix qui a deux pointes, quatre pointes à chaque branche.
25
Morceau d'étoffe taillée en pointe, qui sert à donner plus d'ampleur à un vêtement.
M. le duc d'Enghien, vêtu en pointe avec le bonnet carré, et le duc de la Trémoille se rendirent dans la grande cour des Tuileries
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 220, 222
S. f. pl. Laizes de toile taillées pour être placées dans les côtés d'une voile.
26
Petit fichu en pointe, dont les femmes se couvrent le cou. Une pointe de soie, de mérinos, de velours.
On dit d'un terrain qu'il est en pointe de fichu lorsqu'il a la forme d'un fichu en pointe.
27
Sémantique : Terme de manége. Défense d'un cheval qui se cabre.
Un cheval fait pointe, lorsque, au lieu de suivre de rond, en maniant sur les voltes, il sort un peu du terrain et fait une sorte d'angle à côté de son cercle.
Il se dit aussi du cheval qui résiste à son cavalier, s'élève et se plante sur les deux pieds de derrière.
28
Sémantique : Terme de fauconnerie. Vol d'un oiseau qui s'élève vers le ciel.
On dit qu'un oiseau fait pointe quand il s'élève ou descend d'un vol rapide.
Sémantique : Terme de chasse. On dit qu'un animal fait une pointe lorsqu'il perce très loin devant lui sans se détourner.
Sémantique : Fig. et familièrement. Faire une pointe, quitter le chemin qu'on suivait, et aller faire une course qu'on n'avait pas projetée.
En un autre sens, faire des pointes, chercher querelle.
Monsieur ne laissait pas de faire au roi par-ci par-là des pointes ; mais cela ne durait pas
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 93, 232
Sémantique : Terme de guerre. Faire une pointe, s'éloigner de sa ligne d'opération.
Suivre sa pointe, aller de l'avant dans ses opérations.
M. de Noailles suivit sa pointe, et prit Girone en six jours de tranchée ouverte
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 23, 12
Sémantique : Fig. et familièrement. Poursuivre, suivre, pousser sa pointe, poursuivre une résolution, une idée avec vigueur ou obstination.
Nonobstant les avis, je veux suivre ma pointe
de Paul SCARRON dans D. Japhet d'Arm. II, 4
Point d'affaire, il poursuit sa pointe jusqu'au bout
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans l'Ét. III, 5
Vous faites bien de pousser votre pointe, cela est naturel
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Comtesse, 21
Quel diable d'étourdi qui suit toujours sa pointe !
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Fourber. III, 11
Affligé d'un si grand mal [la discorde dans le protestantisme], il [Mélanchthon] suit sa pointe....il fit sa souscription [à l'assemblée de Smalkade], en réservant l'autorité du pape
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Var. v, 27
L'orgueilleux plaisir de supplanter un rival aimé m'excite à pousser ma pointe
de Alain René LESAGE dans Gil Blas, IX, 6
29
Ce qui commence à poindre, à paraître.
Le siége de Mons fut formé par le roi en personne, à la première pointe du printemps
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans I, 21
La pointe du jour, les premiers rayons du jour.
Enfin, à la petite pointe du jour, je me suis levée
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 166
Pointe du jusant, se disait pour commencement du jusant.
Il [Villette Mursay] donna ordre à ses quinze vaisseaux de couper [leurs câbles], tous en même temps à la pointe du jusant
dans Relat. du combat de la Hogue, dans JAL
30
En pointe, Nature : loc. adv. En forme de pointe.
Le tribunal des mathématiques de la Chine, avec toutes ses révérences et sa barbe en pointe, est un misérable collége d'ignorants qui prédisent la pluie et le beau temps
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. pr. roy. de Prusse, juin 1738
Sémantique : Terme de maçon. En pointe de diamant, se dit d'une pierre terminée par une pyramide quadrangulaire aplatie.
Sémantique : Terme de marine. Un navire est brassé en pointe, lorsque les vergues sont orientées comme pour l'allure du plus près.
31
De pointe, par la pointe, par le bout pointu.
D'autant que les parties des sels entrent de pointe et sans se plier
de René DESCARTES dans l'Homme.

HISTORIQUE

1
XIIe s.
Molt [il] resemble bien chevalier ; Des rens s'en ist trestot premier ; Vers ceus de l'ost fist une pointe, Premiers en volt [veut] aver la jointe
dans Grégoire le Grand, p. 50
En la puinte del jur fist la messe chanter
dans Th. le mart. 163
2
XIIIe s.
Petit dura cil estors [combat] ; quar Grieu tornerent le dos et furent desconfis à cele premiere pointe
de Geoffroi de VILLEHARDOUIN dans LXV
Aporche [qu'apporte] chascune coutiel à pointe
dans Lai d'Ignaur
3
XVe s.
[Le châtel d'Aiguillon] estoit bien seant et en bonne marche, en la pointe de deux grosses rivieres portans navire [le Lot et la Garonne]
de Jean FROISSART dans I, I, 235
Ces paroles douces et tractables amollirent grandement la pointe de l'ire que l'empereur avoit
de Jean FROISSART dans II, III, 93
Il se lance au chevalier par dessoubs la poincte de son escu, et l'ahert [saisit] par les costez, et le restraint si qu'il luy fist l'eschine ployer, Perforest, 1. I, f° 140. Aler baguenaulder à la cour, et regarder qui a les plus belles pointes [de souliers]
dans le Jouvencel, f° 16, dans LACURNE
4
XVIe s.
Telle est la nature et complexion des Françoys que ils ne valent qu'à la premiere poincte
de François RABELAIS dans Garg. I, 48
Comme un traict d'une poincte très delicate
de Michel de MONTAIGNE dans I, 171
La fortune envoye souvent cul sur poincte toutes nos deffenses et levées
de Michel de MONTAIGNE dans I, 314
Façon de parler bouillonnée de poinctes ingenieuses, mais fantasques
de Michel de MONTAIGNE dans I, 383
C'est ce qui donne poincte à la saulse
de Michel de MONTAIGNE dans III, 2
Marius le feit malicieusement pour l'esperance qu'il avoit de rompre les ennemis avec les deux poinctes [ailes] de la bataille
de Jacques AMYOT dans Marius, 43
Ses ennemis, s'estans cachez à l'abry de quelques poinctes de terre, le guettoient pour le surprendre au passage
de Jacques AMYOT dans Lucul. 6
Sertorius, se sentant le plus fort, suivit sa premiere poincte, tant qu'il penetra jusques à Metellus mesme
de Jacques AMYOT dans Sertor. 29
Si le sieur de la Magdelaine a envie de fournir sa poincte, il y a un beau sable entre ce lieu et Nerac
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans Vie, XLVII
Les autres cherchent le langage concis, tout hérissé de poinctes
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans Hist. préf. 3
Corbuson, qui eut la pointe [qui marcha le premier à l'assaut], perdit 120 hommes
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans ib. I, 219
En cet endroit mesme fut basti un fort de six petites poinctes
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans ib. III, 374
Le jour commençoit à faillir, telles longueurs procedant des difficultez que faisoient les capitaines estrangers d'aller à l'assaut, encore qu'ils eussent obtenu la pointe [la tête de l'attaque], au grand deplaisir des François
de VILLEROY dans Mém. t. II, p. 140, dans LACURNE

ÉTYMOLOGIE

1
Féminin du participe point, de poindre ; provenç. poncha, punta ; cat. punza ; esp. et ital. punta ; port. ponta.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
Sémantique : Terme de danse. Avoir des pointes. Ajoutez :
Les pointes, qui font pâmer les amateurs de ballet, sont de date plus récente qu'on ne croit ; c'est en 1834, à Vienne, que cet attrait nouveau de la danse théâtrale fut imaginé par le célèbre chorégraphe Duport ; il fit le premier exécuter des pointes à une élève, Mlle Schlanjouski, que ce tour de force rendit bientôt fameuse
dans Figaro, 28 mai 1870

Synonymes de POINTE

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