Définition de HAINE

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : hê-n'

DÉFINITIONS

1
Action de haïr.
Au lieu de répondre par la haine à la haine que me portent mes rivaux, je sens que je dois me venger d'eux en leur faisant du bien et du plaisir
de POUSSIN dans Lett. 6 juin 1642
La haine que les coeurs conservent au dedans Nourrit des feux cachés, mais d'autant plus ardents
de Pierre CORNEILLE dans Cid, II, 3
Je n'ai reçu de vous que mépris et que haine
de Pierre CORNEILLE dans Pomp. I, 3
La haine entre les grands se calme rarement
de Pierre CORNEILLE dans Rodog. I, 7
La haine confond tout, et, quoiqu'on lui propose, En son propre aliment convertit toute chose
de Jean de ROTROU dans Bélis. IV, 1
L'absence est aussi bien un remède à la haine Qu'un appareil contre l'amour
de Jean de LA FONTAINE dans Fabl. X, 12
Mais pour vingt mille francs j'aurai droit de pester Contre l'iniquité de la nature humaine, Et de nourrir pour elle une immortelle naine
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Mis. V, 1
Ils ont en cette ville une haine effroyable pour les gens de votre pays
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Pourc. III, 2
Ces haines vigoureuses Que doit donner le vice aux âmes vertueuses
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Mis. I, 1
Il concevait une haine implacable contre les Romains
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. I, 8
Une haine se mit entre les deux peuples
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans ib.
La haine irréconciliable qu'ont les hommes vicieux contre ceux qui déclarent la guerre aux vices
de Esprit FLÉCHIER dans Panég. II, p. 210
Nous avons l'un et l'autre une haine obstinée
de Jean RACINE dans Théb. IV, 1
Combien je vais sur moi faire éclater de haines !
de Jean RACINE dans Andr. III, 7
Quoi ? vous le soupçonnez d'une haine couverte !
de Jean RACINE dans Brit. V, 1
N'allons point nous charger d'une haine immortelle
de Jean RACINE dans Bérén. III, 2
.... Quelle haine endurcie Pourrait en vous voyant n'être pas adoucie ?
de Jean RACINE dans Phèdre, II, 2
L'envie et la haine s'unissent toujours, et se fortifient l'une l'autre dans un même sujet ; et elles ne sont reconnaissables entre elles qu'en ce que l'une s'attache à la personne, l'autre à l'état et à la condition
de Jean de LA BRUYÈRE dans XI
L'amitié dort, la haine veille
de FAVART dans Soliman II, II, 3
La colère est une haine ouverte et passagère ; la haine, une colère retenue et suivie
de Charles Pinot, sieur DUCLOS dans Consid. moeurs, 14
Soleil si doux au déclin de l'automne, Arbres jaunis, je viens vous voir encor, N'espérant pas que la haine pardonne à mes chansons leur trop rapide essor
de Pierre Jean de BÉRANGER dans Adieu.
L'avant-garde laissa au corps qui la suivait le soin de les ramasser [des soldats russes restés à Moscou] ; ceux-là à d'autres, et ainsi de suite ; de sorte qu'ils restèrent libres au milieu de nous, jusqu'à ce que, l'incendie et le pillage leur ayant marqué leur devoir et les ayant tous ralliés dans une même haine, ils allèrent rejoindre Kutusof
de Philippe de SÉGUR dans Hist. de Nap. VIII, 5
Sémantique : Familièrement. Haine de prêtre, haine implacable.
Ils [Calvin et Servet] disputèrent par lettres ; de la dispute, Calvin passa aux injures, et des injures à cette haine théologique, la plus implacable de toutes les haines
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Moeurs, 134
La Haine est quelquefois personnifiée, et alors le mot prend une majuscule.
Venez, venez, Haine implacable, Sortez du gouffre épouvantable Où vous faites régner une éternelle horreur
de QUINAULT dans Armide, III, 3
Objet de la haine.
Vous êtes son amour, craignez d'être sa haine
de Pierre CORNEILLE dans Tite et Bérén.
Activement. La haine de..., sentiment éprouvé contre. La haine des tyrans.
Cette vie de foi, de violence, de renoncement, de haine de soi-même, qui fait comme le fonds de la pénitence et de la piété chrétienne, ils ne la connaissent pas
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Carême, D. prosp. tempor.
Passivement. Haine de..., sentiment éprouvé par.
Je dois plus à leur haine [de mes ennemis], il faut que je l'avoue, Qu'au faible et vain talent dont la France me loue
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Épître VII
Mais sa haine sur vous autrefois attachée Ou s'est évanouie, ou s'est bien relâchée
de Jean RACINE dans Phèdre, I, 1
Si la haine peut seule attirer votre haine
de Jean RACINE dans ib. II, 5
Qu'il est aisé de supposer de nouveaux crimes à ceux qui sont chargés de la haine d'un parti !
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Moeurs, Rem. XI
Haines nationales, inimitiés des peuples entre eux.
Tel est donc un des effets de la haine nationale : on aime mieux se priver d'un bien que de le devoir à des étrangers
de Guillaume Thomas, abbé RAYNAL dans Hist. phil. IX, 3
On ne connaît pas de haine nationale plus profonde et plus active que celle des Portugais pour l'Espagne
de Guillaume Thomas, abbé RAYNAL dans ib. IX, 3
Sémantique : Terme de théologie. Haine d'abomination, l'horreur pour le péché, sans aversion néanmoins pour la personne du pécheur.
2
Sentiment d'aversion qu'on éprouve pour certaines choses. La haine du changement.
Ce sont là toutes choses que j'ai en haine, dit le Seigneur
de Isaac Louis Lemaistre de SACY dans Bible, Zachar. VIII, 19
Une doctrine qui les engageait à la haine du monde
de Esprit FLÉCHIER dans Serm. t. I, p. 194
Je vous demande la haine du péché, une horreur éternelle de l'impiété et du libertinage
de BOURDALOUE dans Instruct. sur la communion, Exhort. t. II, p. 469
J'ai pris la vie en haine et ma flamme en horreur
de Jean RACINE dans Phèdre, I, 3
.... Je crois surtout avoir fait éclater La haine des forfaits qu'on ose m'imputer
de Jean RACINE dans ib. IV, 2
Rome à ce nom [de roi], si noble et si saint autrefois, Attacha pour jamais une haine puissante
de Jean RACINE dans Bérén.
Mon coeur en belle haine A pris la liberté
de Pierre Jean de BÉRANGER dans Liberté.
Quand il s'agit de choses, tandis que haïr se dit même des répugnances physiques, par ex. haïr le froid, haine ne se dit que des grandes aversions morales, et l'on ne dirait pas la haine du froid.
3
Ce qu'il y a d'odieux, l'odieux.
S'il y avait quelque bataille perdue, s'il arrivait quelque inondation ou quelque sécheresse, on les chargeait [les chrétiens] de la haine de toutes les calamités publiques
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Précis d'un 2e panég. de saint Gorgon
Pour se donner la gloire de la réussite, et pour détourner sur les autres la haine d'un mauvais succès
de Jean de LA BRUYÈRE dans II
4
En haine de, loc. prép. En haïssant, par animosité contre.
En haine de ce que son mari avait épousé Rodogune
de Pierre CORNEILLE dans Ex. de Rodog.
En haine de cet empereur, Dèce, qui le tua, renouvela la persécution avec plus de violence que jamais
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. I, 10
C'est en haine des Juifs et d'Esdras, et en haine du premier et du second temple qu'ils [les Samaritains] ont inventé leur chimère de Garizim
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans ib. II, 13

HISTORIQUE

1
XIIIe s.
Bien lui monstra Constance qu'à lui n'a pas haïne [qu'elle n'a pas de haine contre elle]
dans Berte, LVI
Se li parrastres ou le [la] marrastre mainent malvese vie as enfans, ou qu'il lor monstre sanllant de hayne
de Philippe de BEAUMANOIR dans XXI, 15
2
XIVe s.
Adès [toujours] ha vielle haine novele mort portée
dans Girart de Ross. V. 885
3
XVe s.
Si s'engendrerent et nourrirent en Gascogne, pour ces besognes, plusieurs haines couvertes, dont plusieurs meschefs depuis en naquirent
de Jean FROISSART dans II, II, 2
Long conseil orgueil et envie, Grant haïne, et petit confort
de Eustache DESCHAMPS dans Du noble royaume de France.
Pour la grant hayne qu'ilz avoient audit connestable
de Philippe de COMMINES dans IV, 12
4
XVIe s.
La haine n'est qu'ire enracinée
de Jean CALVIN dans Instit. 302
Je n'eusse rapporté du college que la haine des livres
de Michel de MONTAIGNE dans I, 197
Nous ne hayssons rien de ce que nous debvons ; car, s'il y a quelque chose à hayr en ce monde, c'est la hayne mesme
de Pierre CHARRON dans Sagesse, I, 27
Haine de prince signifie mort d'homme
de Randle COTGRAVE dans
Nul bien sans haine
de ID. dans

ÉTYMOLOGIE

1
Wall. haïme, hèïme (voy. HAÏR). L'ancien français avait haür et haenge à côté de haine. Haïne, d'où par contraction haine, vient de haïr, comme saisine de saisir. Quant au wallon haïme, l'm y est sans doute pour n, comme dans rancume et rancune. L'ancien haenge représente une forme fictive hademia ; enge équivalant au latin emia, comme on le voit dans vendange de vindemia.

Synonymes de HAINE

Termes proches de HAINE