Définition de JEUNESSE

DÉFINITIONS - PROVERBES - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : jeu-nè-s'

DÉFINITIONS

1
Temps de la vie entre l'enfance et l'âge adulte.
En jeunesse j'aimai, ta mère fit de même
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Dial.
Les critiques du temps m'appellent débauché, Que je suis jour et nuit aux plaisirs attaché, Que j'y perds mon esprit, mon âme et ma jeunesse
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Sat. V
Rodrigue a du courage .- Il a trop de jeunesse
de Pierre CORNEILLE dans Cid, II, 3
Elle [Marie-Thérèse] vous dit.... que la grandeur est un songe, la joie une erreur, la jeunesse une fleur qui tombe, et la santé un nom trompeur
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Mar.-Thér.
Sous cet air de jeunesse qui semblait ne promettre que des jeux
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Duch. d'Orl.
M. de Turenne a eu dans sa jeunesse toute la prudence d'un âge avancé, et dans un âge avancé toute la vigueur de la jeunesse
de Esprit FLÉCHIER dans Turenne.
Assez dans les forêts mon oisive jeunesse Sur de vils animaux a montré son adresse
de Jean RACINE dans Phèdre, III, 5
Les yeux devenaient humides de tendresse pour ce pauvre petit prince [Louis XV] échappé à tant de dangers en jeunesse
de D'ARGENSON dans Mém. t. II, p. 87
Que reste-t-il à l'homme après une telle jeunesse ? un corps énervé, une âme amollie, et l'impuissance de se servir de tous deux
de Georges Louis Leclerc, comte de BUFFON dans Nature des anim.
La jeunesse est souvent la saison des douleurs
de Jean-François DUCIS dans Othello, II, 5
Là sont nos rêves pleins de charmes ; ....Là refleuriront nos jeunesses
de Alphonse de LAMARTINE dans Méd. II, 1
C'est une jeune fiancée Qui, le front ceint du bandeau, N'emporta qu'une pensée De sa jeunesse au tombeau
de Alphonse de LAMARTINE dans Harm. II, 1
La première jeunesse, les premières années de la jeunesse.
Dès sa première jeunesse, Marie-Thérèse fut, dans les mouvements d'une cour alors assez turbulente, la consolation et le seul soutien de la vieillesse infirme du roi son père
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Mar.-Thér.
L'inconnue n'était pas de la première jeunesse, mais elle était d'une beauté parfaite
de Stéphanie Félicité Ducrest de St-Albin, comtesse de GENLIS dans Ad. et Théod. t. II, p. 316
État d'une personne jeune.
J'admire ton courage et je plains ta jeunesse
de Pierre CORNEILLE dans Cid, II, 2
Le maître qui prit soin d'instruire ma jeunesse, Ne m'a jamais appris à faire une bassesse
de Pierre CORNEILLE dans Nicom. II, 3
Ces âges [cinquante ans avec vingt] n'ont jamais grand rapport ; Jeunesse avec jeunesse est chose fort plaisante
de Noël LEBRETON, sieur de HAUTEROCHE dans Appar. tromp. II, 5
J'aime Pauline ; vous me la représentez avec une jolie jeunesse et un bon naturel ; je la vois courir partout, et apprendre à tout le monde la prise de Philisbourg
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 17 nov. 1688
Qui eût pu seulement penser que les années eussent dû manquer à une jeunesse qui semblait si vive ?
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Duch. d'Orl.
La mort a plus de prise sur une princesse qui a tant à perdre ; que d'années elle va ravir à cette jeunesse !
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans ib.
La mère de M. de Montausier, contenant sous les lois d'une austère vertu une grande beauté et une florissante jeunesse
de Esprit FLÉCHIER dans Duc de Mont.
Le marquis de Mortemar, qui est sage comme on l'est à trente ans, quand on n'a pas une aussi longue jeunesse que vous
de Françoise d'Aubigné, marquise de MAINTENON dans Lett. à d'Aubigné, 5 fév. 1682
La bouillante jeunesse est facile à séduire
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Brut. I, 4
Sémantique : Familièrement. De jeunesse, c'est-à-dire dès la jeunesse. Il est accoutumé à cela de jeunesse.
Ce n'est pas qu'il ne sût l'analyse moderne plus expéditive, moins embarrassée, mais il avait pris de jeunesse l'autre pli
de Bernard le Bouyer de FONTENELLE dans Lahire.
Avoir un air de jeunesse, paraître encore jeune, quoique l'on soit déjà d'un certain âge.
Sémantique : Fig. Jeunesse, air de jeunesse.
La jeunesse en sa fleur brille sur son visage
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Lutr. I
Sémantique : Fig.
Il [le printemps] est d'une beauté, et d'une jeunesse, et d'une douceur que je vous souhaite à tout moment
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 2 mai 1689
2
Seconde jeunesse, néologisme ; on désigne ainsi aujourd'hui l'âge mûr et même très mûr, chez les personnes qui ont conservé les goûts et les passions de la jeunesse, et surtout les habitudes de galanterie et d'intrigues amoureuses.
Par malheur les conquêtes coûtent cher ; j'y ai laissé une partie de ma fortune ; mais il m'en reste encore, ainsi que quelques moyens de séduction, de la philosophie, une seconde jeunesse et de l'expérience
de SCRIBE et DUVEYRIER dans Oscar, I, 5
Fig. 3° Jeunesse se dit des qualités intellectuelles qui se conservent même dans un âge avancé. La jeunesse d'esprit.
Une vigueur spirituelle qui se renouvelle de jour en jour.... c'est cette jeunesse intérieure qui soutenait ses membres lassés, dans sa vieillesse décrépite, et lui a fait continuer sa pénitence jusqu'à la fin de la vie
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Panég. St Franç. de Paule, 1
Quelle délicatesse, et, pour un savant de ce rang-là et dans un âge si avancé, quelle fleur, et, si nous osions parler ainsi, quelle jeunesse d'imagination !
de OLIVET dans Hist. Acad. t. II, p. 401, dans POUGENS
Une certaine jeunesse de coeur qui ne se lasse pas du passé ni de l'attendrissement qu'il cause
de Anne Staël-Holstein, dite Mme DE STAËL dans Corinne, XV, 8
Sémantique : Fig.
Une des qualités de l'Église, qui est célébrée dans les Écritures, c'est sa perpétuelle jeunesse et sa nouveauté qui dure toujours
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Sermons, jubilé, 2
3
La jeunesse du monde, les temps voisins de l'origine des choses.
Il se peut que le meilleur temps pour la poésie ait été celui d'ignorance, et que la jeunesse du genre humain soit passée pour toujours ; cependant on croit voir dans les écrits des Allemands une jeunesse nouvelle, celle qui naît du noble choix qu'on peut faire après avoir tout connu
de Anne Staël-Holstein, dite Mme DE STAËL dans Allem. III, 9
4
Collectivement, ceux qui sont dans l'âge de la jeunesse.
On voit par ta rigueur [de toi, la Mort] tant de blondes jeunesses, Tant de riches grandeurs, tant d'heureuses vieillesses, En fuyant le trépas au trépas arriver
de François de MALHERBE dans I, 4
Il [le vieillard] parle de son temps, difficile et sévère ; Censurant la jeunesse, use des droits de père ; Il corrige, il reprend....
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Sat. V
La jeunesse se flatte et croit tout obtenir
de Jean de LA FONTAINE dans Fabl. XII, 5
Est-ce que vous voulez qu'un père ait la mollesse De ne savoir pas faire obéir la jeunesse ?
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Éc. des f. V, 8
....La jeunesse est sotte, et parfois la vieillesse
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Éc. des mar. I, 2
Il y fait de sa cour inviter la jeunesse
de Jean RACINE dans Brit. V, 1
Les jeunes gens, à l'exclusion des jeunes filles. La jeunesse de la ville s'exerçait aux armes.
Comme une autre Diane elle hante les bois, N'aime rien que la chasse, et de toute la Grèce Fait soupirer en vain l'héroïque jeunesse
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Princ. d'Él. I, 1
Une téméraire jeunesse se jetait sans étude et sans connaissance dans les charges de la robe
de Esprit FLÉCHIER dans le Tellier.
5
Sémantique : Par extension. La jeunesse et l'enfance prises ensemble. Enseigner la jeunesse. Élever la jeunesse.
Vous m'avez de César confié la jeunesse
de Jean RACINE dans Brit. I, 2
6
Une personne jeune, et surtout une jeune fille. C'est une jolie jeunesse. Cette jeunesse-là fait la coquette.
Je suis tout réjoui de voir cette jeunesse
de Jean RACINE dans Plaid. III, 4
Mme Dupré n'aime pas que des jeunesses comme nous sortent souvent
de Stéphanie Félicité Ducrest de St-Albin, comtesse de GENLIS dans Théât. d'éduc. la March de modes, sc. 2
7
Jeunesse, se dit des animaux. Cet animal est très folâtre dans sa jeunesse.
Si on les élève de jeunesse, elles s'apprivoisent très bien
de Georges Louis Leclerc, comte de BUFFON dans Ois. t. III, p. 262
Il se dit aussi des arbres. Les arbres fruitiers dans leur jeunesse.
Il se dit enfin de certaines boissons, le vin, l'eau-de-vie, etc. L'excès de jeunesse dans les eaux-de-vie est nuisible.
8
Acte de jeune homme, imprudence, légèreté.
Que c'étaient [les croisades] des jeunesses de vos princes et des chaleurs de foie de leurs conseillers
de Jean-Louis GUEZ de BALZAC dans De la cour, 5e disc.
Mais qui est-ce qui n'a ses taches et qui n'a eu ses jeunesses ?
de Jean-Louis GUEZ de BALZAC dans Lett. à Chapelain, 16 fév. 1640
Si mon fils vous a écrit qu'il envoyait 10 000 livres pour tous les achats qu'il ordonnait de faire, qui montaient à beaucoup davantage, il a eu tort ; c'est une jeunesse et une faute qu'il a faite
dans Corresp. de Colbert, III, 495
Argenson avait obligé les gens de qualité en cachant au feu roi les aventures de leurs enfants et parents qui n'étaient guère que des jeunesses
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 480, 210
Le fils du maréchal de Boufflers retourna au collége des Jésuites ; je ne sais quelle jeunesse il y fit avec les deux fils d'Argenson ; les jésuites fouettèrent le petit garçon
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 289, 196

PROVERBES

1
Exemple : La jeunesse revient de loin, c'est-à-dire les personnes jeunes reviennent de maladies dangereuses ou de longues erreurs, de grands égarements.
2
Exemple : Si jeunesse savait et vieillesse pouvait, les choses en iraient mieux, c'est-à-dire si la jeunesse avait de l'expérience, et que la vieillesse eût de la force.
3
Exemple : Jeunesse est forte à passer, ou est difficile à passer, c'est-à-dire dans la jeunesse on a bien de la peine à modérer ses passions.
4
Exemple : Il faut que jeunesse se passe, se dit pour excuser les fautes que les jeunes gens commettent par inexpérience ou par vivacité de tempérament.

HISTORIQUE

1
XIIIe s.
Et fu baus [bailli] pour la jouneche de lui, tant come il vesqui
dans Chr. de Rains, 223
2
XIVe s.
Donques ne a il pas petite difference de soy accoustumer en jonesce et au commencement à faire en une maniere, ou en une autre
de Nicolas ORESME dans Eth. 34
3
XVe s.
Frere Ancel commança à blasmer son neveu d'aucunes jeunesses qu'il disoit qu'il avoit faites
de Victor Henri-Joseph Brahain, dit DU CANGE dans juvenitudo.
Et pour ce, seigneurs, les assis entre mes douze niepces, pour ce que je me pensay que jeunesse avecques vielesse se tapist et faint que ce ne soit elle pas ; et, quant elle est à son pareil, adonc elle monstre quelle elle est
dans Perceforest, t. I, f° 133
4
XVIe s.
Ainsi comme Antonius prenoit ses esbats en telles folies et telles jeunesses, il luy vint de mauvaises nouvelles de deux costez
de Jacques AMYOT dans Anton. 37
Cette genercuse jeunesse desdaignant tout aultre joug que de la vertu....
de Michel de MONTAIGNE dans I, 151
Le bon chevalier estoit pris, et par sa hardiesse ; toutes fois il y avoit eu de la jeunesse meslée parmy
dans Hist. du chev. Bayard, p. 76, dans LACURNE
Jeunesse qui veille et vieillesse qui dort, c'est signe de mort
de Antoine OUDIN dans Curios. franç.
Ce que aprent poullain en jeunesse, Tout ce veut il maintenir en vieillesse
dans Médecines des chevaux, p. 17, dans LACURNE
Jeunesse oiseuse, vieillesse disetteuse
de Randle COTGRAVE dans
Un tas de jeunesses folles
de Joachim DU BELLAY dans III, 76, recto
Donne que les esprits de ceux que je soupire N'esprouvent point, Seigneur, ta justice et ton ire ; Rens les purifiez par ton sang precieux, Cancelle leurs pechez et leurs folles jeunesses
de Philippe DESPORTES dans Oeuvres chrétiennes, plainte

ÉTYMOLOGIE

1
Jeune, et la finale substantive esse. comme sagesse, de sage, etc.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
La grande jeunesse, ancien nom de certaines confréries d'artisans dans le Midi.

Synonymes de JEUNESSE

Termes proches de JEUNESSE