Définition de BAISER
Prononciation : bè-zé
DÉFINITIONS
1
Appliquer sa bouche sur le visage, la main ou un objet quelconque. Son père le baisa et le congédia. Il portait un reliquaire qu'il baisait avec effusion.Viens baiser cette joue et reconnais la place Où fut jadis l'affront que ton courage efface
de Pierre CORNEILLE dans Cid, III, 6
Et baiser une main qui nous perce le coeur
de Pierre CORNEILLE dans Hor. IV, 4
Apprenons .... à trahir nos amis, nos ennemis baiser
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Sat. IV
Chacun baise en tremblant la main qui nous enchaîne
Il baise avec respect ce vase qu'il me rend
de Pierre CORNEILLE dans Pomp. V, 1
Allons à nos martyrs donner la sépulture, Baiser leurs corps sacrés, les mettre en digne lieu
de Pierre CORNEILLE dans Poly. V, 6
Tu le vois tous les jours, devant toi prosterné, Baiser avec respect le pavé de tes temples
de Jean RACINE dans Esth. Prol.
Les colonels [russes] ainsi traités [battus de verges] par leurs soldats, furent encore obligés de les remercier, selon l'usage oriental des criminels, qui, après avoir été punis, baisent la main de leurs juges
Sémantique : Fig.
Hé, se peut-il qu'un roi craint de la terre entière, Devant qui tout fléchit et baise la poussière....
de Jean RACINE dans Esth. II, 7
Les rois des nations devant toi prosternés De tes pieds baisent la poussière
de Jean RACINE dans Athal. III, 7
Il faut pouvoir baiser ses fers et aimer son esclavage
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Bonh.
Elle nous fait baiser la main qui nous frappe
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Dégoûts.
Baiser la main, porter sa main par respect près de sa bouche, quand on veut présenter ou recevoir quelque chose, ou quand on veut saluer quelqu'un.
Anciennement, baiser dans le sens de rendre ou de recevoir visite, parce qu'on se baisait à chaque visite.
Vous avez donc baisé toute la Provence ?
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 229
Sémantique : Familièrement. Baiser les mains à quelqu'un, lui faire ses compliments.
Sur cela je vous baise très humblement les mains
Je baise les mains à monsieur le docteur
Sémantique : Ironiquement. Je vous baise les mains, je ne suis pas de cet avis, je ne ferai pas ce que vous voulez.
Répare ce malheur et me sois secourable. - Je vous baise les mains, je n'ai pas le loisir
Je vaux bien que de moi l'on fasse plus de cas, Et je baise les mains à qui ne me veut pas
Sémantique : Fig. Vous devriez baiser la trace de ses pas, c'est-à-dire vous devriez à chaque instant lui prouver votre reconnaissance, votre respect.
Sémantique : Populairement, à certains jeux, baiser le cul de la vieille, perdre sans prendre un point, sans gagner un coup.
Sémantique : Terme de féodalité. Baiser le verrou, la serrure, espèce d'hommage du vassal, le seigneur étant absent.
2
Sémantique : Par extension. Toucher légèrement.Ces flots qui baisent sans murmure Les flancs de ce rocher....
de Victor HUGO dans Orient. 14
L'onde qui baise ce rivage, De quoi se plaint-elle à ses bords ?
de Alphonse de LAMARTINE dans Méd. II, 15
Ancien terme de mathématiques. Avoir une osculation ou un contact de second ordre.
3
Sémantique : Fig. Arriver jusqu'à.Ceux du conseil des finances y entrèrent ce jour-là sans en savoir davantage que le public, ni même si l'affaire baiserait ou non le bureau de ce conseil
4
Se baiser, v. réfl.Il est constant qu'elles se baisent de meilleur coeur devant les hommes
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Ém. V
HISTORIQUE
1
XIe s.Quand l'ot [ouit] Marsile, si l'ad baiset al col
dans Ch. de Rol. XLIV
2
XIIe s.Au departir de li [elle] [il] l'a doucement baisie
dans Sax. VII
Fait dunc li arcevesques, cui Deus esteit mult près : Sire, à l'onur de Deu e la vostre vus bes
dans Th. le mart. 109
Si vint devant le rei, si aürad à terre, puis sil baisad li reis
dans Rois, 172
3
XIIIe s.En larmes et en pleurs souvent le baiserai
dans Berte, VII
La terre mout souvent par humbleté [elle] baisoit
dans ib. XXVIII
Il deviennent si homme, chascun en foy [il] baisa
dans ib. CXXXI
Grant joie fait à sa mesnie, Qui devant li est esmaïe, Celui bese et cestui enbrace
dans Ren. 11851
Et, par behordeïs [combat] de vens, Les undes de mer eslevans, Font les flots as nues baisier
dans la Rose, 19147
Et tu qui la rose baisas, Par quoi de duel si grant fais as, Que tu ne t'en sez apaisier ? Cuidoies-tu tous jors baisier, Tous jors avoir aide et delice ?
dans ib. 6771
Et ces choses dites, il le doit baisier en fei, et crier quanque il peut : Entrez
dans Ass. de Jér. I, 30
Et lors vint frere Henri de Ronnay à li, qui avoit passé la riviere, et li besa la main tout armée
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 228
L'en disoit que la royne Blanche le [le fils d'Élisabeth de Thuringe] besoit ou [au] front par devocion
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 206
4
XIVe s.Toutes bouches qui rient à le fois [parfois], te dist-on, Ne voilent [veulent] pas baisier ; bien souvent le voit-on
dans Baud. de Seb. XIII, 42
5
XVIe s.Ou elle tient Ascaigne qu'elle embrasse, Et baise en luy de son pere la grace
de Joachim DU BELLAY dans IV, 8, verso.
Je sçay le vent Libyen, Je sçay bien Quelz flots ceste coste baisent
de Joachim DU BELLAY dans IV, 35, recto.
De là il donne à ces deux cornettes qui venoient de charger les Suisses, et aux Lanskenets qui ne les avoient fait que baizer [aborder]
Avant que cette armée eut baisé [gagné] la frontière
Tout cela exploité si courageusement, que sans la venuë des Anglois ils allaient baiser [atteindre] l'artillerie
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans III, 391
Là sera ajusté et ajencé l'escusson, de telle sorte que l'escorce de la partie superieure baise la ligne traversante [de l'incision de l'arbre]
de Olivier DE SERRES dans 668
ÉTYMOLOGIE
1
Bourguig. boisé ; picard, boisier, bager ; wallon, bâhi ; namurois, bauji ; rouchi, basier ; provenç. baisar ; espagn. bezar ; portug. beijar ; ital. baciare ; du latin, basiare.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
1
1. Figurément, baiser les mains signifie aussi dire adieu, renoncer.Elle va louer une maison pour cent ans, et baise très humblement les mains à la pauvre Bretagne
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 236
S'il est ainsi, je vous baise les mains, Muses ; gardez vos faveurs pour quelqu'autre
de Jean-Baptiste ROUSSEAU dans Liv. I, Epître I
2
2. C'est à grand tort que plusieurs écrivains remplacent baiser par embrasser. On lit souvent : il lui embrasse les mains. Ainsi défigurée, la locution devient ridicule.