Définition de MOUVOIR

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : mou-voir

DÉFINITIONS

1
Déplacer par un mouvement. L'eau qui meut la roue d'un moulin. Mouvoir une chose de sa place.
Par ce droit souverain [de créateur], il [Dieu] la tourne [la matière], il la façonne, il la meut sans peine
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. II, 1
2
Sémantique : Fig. Conduire par un mouvement moral.
Nous sommes enflammés suivant les divers objets qui nous meuvent
de VAUG. dans Q. C. II, 1
Quoiqu'il y ait des espaces dans lesquels je ne trouve rien qui excite et meuve mes sens
de René DESCARTES dans Médit. VI, 14
Mais on te considère, avec tes grands efforts, Comme l'âme qui meut ce détestable corps
de DU RYER dans Scévole, IV, 6
L'or mouvait ce fantôme ; et, pour perdre Dircé, Vos présents lui dictaient ce qu'il a prononcé
de Pierre CORNEILLE dans Oedipe, V, 1
Votre intérêt, Créon, vous meut plus que ma gloire
de Jean de ROTROU dans Antig. II, 4
Et son art [d'une femme], redoutable aux esprits les plus forts, Pour produire un dessein meut de puissants ressorts
de Jean de ROTROU dans Bélis. V, 6
Quand la grâce efficace meut le libre arbitre, il consent infailliblement
de Blaise PASCAL dans Prov. XVIII
Saint Augustin, celui qui a le mieux entendu que le libre arbitre est mû de Dieu
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Nouv. myst. X, 1
Sentiez-vous, dites-moi, ces violents transports Qui d'un esprit divin font mouvoir les ressorts ?
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. IX
Ce corps vil et mortel est-il donc si sacré Que l'esprit qui le meut ne le quitte à son gré ?
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Alz. V, 3
Nature : Absolument.
Et mon bras n'est du sien qu'un chétif instrument Qui ne meut et n'agit que par son mouvement
de Jean de ROTROU dans Bélisaire, I, 1
Sur un corps qui ne vit, ne meut ni ne respire
de Jean de LA FONTAINE dans Fabl. V, 20
À ces causes et autres considérations à ce mouvant, c'est-à-dire nous portant, nous excitant ; formule qui s'employait dans les édits du roi.
3
Mouvoir une querelle, une question, susciter une querelle, une question....
J'ai vu les gens Mouvoir deux questions....
de Jean de LA FONTAINE dans Quiproq.
Mouvoir guerre, faire la guerre (locution vieillie).
Cette parole fut cause à Cambyse grandement courroucé de mouvoir guerre à l'Égypte
de Paul Louis COURIER dans Trad. d'Hérodote.
Sémantique : En termes de palais, tous procès mus et à mouvoir.
4
Nature : V. n. Sémantique : Terme de féodalité. Se dit d'une terre qui relève d'une autre.
5
Se mouvoir, Nature : v. réfl. Être déplacé par un mouvement.
Aux accords d'Amphion les pierres se mouvaient
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Art poét. IV
Que Rohault vainement sèche pour concevoir, Comment, tout étant plein, tout a pu se mouvoir
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Épître V
La cause déterminante de son mouvement étant contre-balancée, l'animal ne se mouvra pas pour atteindre à l'objet de son appétit
de Georges Louis Leclerc, comte de BUFFON dans Nature des anim.
Tout se passe, se suit, se succède, se renouvelle et se meut par une puissance irrésistible
de Georges Louis Leclerc, comte de BUFFON dans Quadrup. t. I, p. 5
Avec ellipse du pronom se, faire mouvoir, mettre en mouvement.
On brûla dans le marché de Londres plusieurs statues de bois que des moines faisaient mouvoir par des ressorts
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Moeurs, 135
Sémantique : Fig.
Qu'est-ce qu'une armée ? C'est un corps animé d'une infinité de passions différentes qu'un homme habile fait mouvoir pour la défense de la patrie
de Esprit FLÉCHIER dans Turenne.
Les ressorts secrets qui font mouvoir les cours et les empires
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Carême, Immut.

REMARQUE

1
L'Académie dit que plusieurs des temps de ce verbe ne sont usités que dans le style didactique, mais les exemples classiques rapportés ci-dessus permettent d'en user partout.

HISTORIQUE

1
XIe s.
Je t'en muvrai un tel si grant contraire [opposition]
dans Ch. de Rol. X
Après lui dist : cuivert, mar i moüstes [à malheur y vîntes]
dans ib. CII
2
XIIe s.
Seignor, par tel maniere, jà nus [nul] n'en soit doutans, Fu meüe la guerre entre Saisnes et Frans
dans Sax. V
Ne la meüssent [une pierre] li buef d'une charrue
dans Ronc. p. 105
3
XIIIe s.
Avant que vous movés de ci [avant que vous partiez d'ici]
dans la Rose, 2054
Li pueples.... Qui fu tous de pitié meüs
dans ib. 5669
Li quens Baudoins leur mande, par le conseil le duc de Venise et des autres barons, qu'il meüssent [se missent en mouvement] à l'issue de mars
de Geoffroi de VILLEHARDOUIN dans LIV
Si en fu mervelles [singulièrement] meüs en pitiet
dans Chr. de Rains, 88
À mouvoir vertueuse guerre Pour nostre adversaire conquerre
de Jean Chopinel, dit Jean DE MEUNG dans Tr. 27
Se c'est heritages, li ples [le procès] demorra par devant le segneur de qui il muet
de Philippe de BEAUMANOIR dans II, 29
Du prael [pré] mouvoit une alée qui aloit au flum
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 244
N'aiez paour, je ne di pas Que meviez isnel le pas, Pour la sainte terre defendre
de RUTEBEUF dans 118
4
XIVe s.
Les utilités pour quoi les mendibles [mâchoires] desous se meuvent sans celes desus
de Henri DE MONDEVILLE dans f° 19, verso.
Ce qui les meut à telles opinions, c'est pour ce que ilz veullent fuir le mal et la misere où ilz sont
de Nicolas ORESME dans Eth. IV
5
XVe s.
Adonc commencerent à parler ces dames et ces seigneurs ensemble, et la jeune dame en estant se tenoit toute coie, et ne mouvoit ni oeil ni bouche
de Jean FROISSART dans II, II, 229
Incontinent que ung discord se mouvoit en Angleterre
de Philippe de COMMINES dans VI, 2
Qui peut avoir meu le conte de prendre cette alliance
de Philippe de COMMINES dans I, 1
Vous devez avoir entendu au long dont mouvoit ceste guerre
de Philippe de COMMINES dans III, 3
S'il y met grand merrien, tel que le mur peust empirer, il doit faire pilier de pierre de taille, mouvant de terre, suffisant pour le soustenir ; et, s'il ne meut de terre, si doit il estre fondé sur fondement ou mur de pierre de taille
dans Ordonnance, 1485
6
XVIe s.
Le chancelier Duprat, de longtemps mal meu contre le dit seigneur de Semblançay
de Martin DU BELLAY dans 72
Dieu s'esjouit grandement après qu'il eut achevé le monde, quand il le veit tourner et mouvoir son premier mouvement
de Jacques AMYOT dans Lyc. 60
Quand les Grecs movoyent armes les ungs contre les aultres
de François RABELAIS dans Garg. I, 46
Estans sur la riviere de Loyre, nous sembloyent les arbres prochains se movoir ; toutefoys ilz ne se mouvent, mais nous, par le decours du basteau
de François RABELAIS dans Pant. V, 26
Les muscles se revirans vers leurs origines mouvent l'os fracturé
de Ambroise PARÉ dans XIII, 4
Quels ressorts nous meuvent
de Michel de MONTAIGNE dans I, 172

ÉTYMOLOGIE

1
Berry et Normandie, mouver ; wallon, mouwer ; provenç. mover, movre ; cat. mourer ; esp. et port. mover ; ital. movere ; du lat. movere. Le radical sanscrit me (e long) paraît être dans movere, meare. Le participe meü, devenu mû, par contraction, suppose un participe barbare movutus.

Synonymes de MOUVOIR

Termes proches de MOUVOIR