Définition de BOUGER
Prononciation : bou-jé
DÉFINITIONS
1
Se mouvoir, changer de place. Si vous bougez, vous tomberez.Se remuer. Cette femme est avancée dans sa grossesse, elle a senti son enfant bouger, ou, elliptiquement, elle a senti bouger.
2
Avec la négation, demeurer assidûment dans un lieu, auprès d'une personne ; en ce cas on supprime souvent pas ou point : Je n'ai presque point bougé d'ici
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Lett. Corn. 32
Vous qui.... touchés de la grâce, ne bougez plus comme elle [Marie Madeleine] des pieds du sauveur....
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Carême, Lazare.
Je croyais que je ne bougerais d'ici ou de Vitré
M. de Larochefoucauld ne bouge plus de Versailles
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 168
Je n'ai bougé toute nuit d'auprès d'elle
de Jean de LA FONTAINE dans Berc.
Et mesurant les cieux sans bouger d'ici-bas, Il connaît l'univers et ne se connaît pas
de Jean de LA FONTAINE dans Fabl. VIII, 26
Désormais je ne bouge et ferai cent fois mieux
de Jean de LA FONTAINE dans ib. VII, 12
On trouvera insupportable de ne bouger de la ville
de Blaise PASCAL dans Div. 2
Sans bouger de la terre, allez au firmament
de Jean-François REGNARD dans Sat. IX
[Plaisirs] qu'il abandonnait pour ne bouger d'auprès de ses charmes
de Antoine HAMILTON dans Gramm. 10
La famille du duc n'en bougeait
de Antoine HAMILTON dans Gramm. 6
Du coin d'où le soir je ne bouge, J'ai vu le petit homme rouge
de Pierre Jean de BÉRANGER dans H. rouge.
3
Sémantique : Fig. S'agiter, se soulever. Les mécontents n'osèrent pas bouger.REMARQUE
1
1. Molière a fait de bouger un verbe actif et réfléchi : Et personne, monsieur, qui se veuille bouger Pour retenir des gens qui se vont égorger, Dép. am. V, 7. C'est un archaïsme (voy. l'historique) qui n'est plus usité : bouger est neutre maintenant, et ne peut plus devenir réfléchi.2
2. Les puristes du siècle de Louis XIV, Marguerite Buffet et Caillières trouvaient que bouger d'un lieu était un terme fort rude ou une façon de parler bourgeoise ; mais, comme on a vu, les meilleurs écrivains s'en sont servis.HISTORIQUE
1
XIVe s..... Li verseïs [la chute] de Pierre Qui dort ne ne se bouge ne que fait une pierre
dans Girart de Ross. 1789
Se li consuls se bouge
de Pierre BERCHEURE dans f° 47, recto
2
XVe s.L'argent ne devoit estre contourné ailleurs ni bouger de Paris
de Jean FROISSART dans II, II, 128
Le mareschal les convoya jusques à la vue de Galipoli, et de là ne se bougea afin de les secourir si aulcune chose leur advenoit
dans Bouciq. I, ch. 30
Tenez-vous saintement en cloistre ; Là mettez peine à vous cognoistre ; N'en bougiez ; car le villoter Fait mains et maintes assoter
dans Miracles de sainte Geneviève
Je croy bien que je ne bougeray d'ici encore d'un mois
dans Bibl. des chartes, 4e série, t. I, p. 26
Et un peu de reconfort leur est venu, c'est que ladite dame, princesse de Castille et royne de Portugal, a esté grosse d'un enfant bougeant
de Philippe de COMMINES dans VIII, 17
Et tira [le roy] à l'avant garde, qui jamais n'estoit bougée
de Philippe de COMMINES dans VIII, 6
3
XVIe s.Ponocrates advisoyt quelque jour bien serain, onquel bougeoient on matin de la ville, et alloyent à Gentilly
de François RABELAIS dans Garg. I, 24
Maintenant je suis fort bien, et ay senti bouger mon enfant
Je vous prie encores me mander si l'intention du roy est que je ne bouge d'avecques la royne
Elle n'a bougé de couchée [de son lit] depuis vostre partement, sinon ung jour ou deux qu'elle alla jusques en la garde-robe
Le dieu leur respondit qu'ils ne bougeassent rien
de Michel de MONTAIGNE dans I, 123
Il ne feut d'advis de bouger de sa place
de Michel de MONTAIGNE dans I, 342
Ilz se desfirent l'un l'autre à combattre d'homme à homme au milieu de leurs deux armées, sans qu'elles se bougeassent
de Jacques AMYOT dans Rom. 24
Sa coustume estoit de frapper rudement, jamais ne bouger le pied, ny reculer en arriere
de Jacques AMYOT dans Caton, 3
ÉTYMOLOGIE
1
Provenç. et espagn. bojar. Ménage a parlé de l'allemand wogen, s'agiter ; mais wogen donnerait guoguer et non bouger. Diez a mis le doigt sur la vraie étymologie, remarquant, dans le provençal, bolegar, remuer, s'agiter, dont bojar et bouger sont des contractions et qui répond à l'italien bulicare, bouillonner, qui est un fréquentatif du latin bullire, bouillir : bouillonner, et, de là, par métaphore, ne pas rester en place, bouger.