Définition de IDOLE

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : i-do-l'

DÉFINITIONS

1
Figure, statue représentant une divinité et exposée à l'adoration. Une idole de pierre, de bois. Les prêtres des idoles.
Si nous ne courbons les genoux Devant une muette idole
de Jean RACINE dans Esth. II, 9
Si personne ne sait quand les hommes commencèrent à se faire des idoles, on sait qu'elles sont de l'antiquité la plus haute
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Dict. phil. Idolâtrie.
Sémantique : Fig.
Ces pasteurs cruels.... qui font servir les trésors du sanctuaire à des décorations profanes, qui érigent des idoles des débris de l'autel...
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Or. fun. Villars.
La divinité même que l'idole représente.
Jusque à quand, trompeuse idole [Fortune], D'un culte honteux et frivole Honorerons-nous tes autels ?
de Jean-Baptiste ROUSSEAU dans Ode à la Fortune.
Sémantique : Fig. Fléchir le genou devant l'idole, se courber devant une personne riche, puissante, etc.
On crut que tout fléchirait devant cette idole de la cour
de PATRU dans Plaid. 13, dans RICHELET
On ne sait pas combien il reste de bonnes gens qui n'ont pas fléchi le genou devant l'idole
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Ém. V
Dans le style élevé. Idole d'iniquité, l'iniquité considérée comme une idole que l'on sert.
Elle renonce à cette idole d'iniquité qu'elle s'est faite dans sa colère
de PATRU dans Plaid. 2, dans RICHELET
2
Sémantique : Fig. Personne à qui on prodigue les honneurs, les louanges.
Il y a toujours eu, dans les cours, des idoles et des idolâtres
de Jean-Louis GUEZ de BALZAC dans le Prince, 5
Au premier imposteur.... Qui.... Voudra servir d'idole à son zèle charmé
de Pierre CORNEILLE dans Héracl. I, 1
Quelle erreur à une chrétienne, et encore à une chrétienne pénitente, d'orner ce qui n'est digne que de son mépris, de peindre et de parer l'idole du monde, de retenir comme par force et avec mille artifices autant indignes qu'inutiles, ces grâces qui s'envolent avec le temps ?
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Anne de Gonz.
Quelle créature fut jamais plus propre à être l'idole du monde ? mais ces idoles que le monde adore, à combien de tentations délicates ne sont-elles pas exposées ?
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Duch. d'Orl.
Ces petites délicatesses qu'on remarque en la plupart des grands, auprès de qui un simple oubli est un crime qu'à peine mille soins et de longues assiduités peuvent expier ; vaines idoles qu'on ne peut aborder qu'en rampant...
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Villars.
Il n'est point de prince ni de grand, malgré la bassesse et le déréglement de ses moeurs et de ses penchants, à qui de vaines adulations ne promettent la gloire.... il est vrai que le monde, qui avait élevé ces idoles de boue, les renverse lui-même le lendemain
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Petit carême, Gloire.
L'idole du jour, de la veille, personne qui excite l'enthousiasme, l'admiration aujourd'hui, qui l'excitait hier.
3
Personne qui est l'objet d'une affection excessive.
Que je faisais de vous une idole dans mon coeur
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 48
Le prince [le duc du Maine] est l'idole du roi ; plus sa tendresse pour le fils augmente, plus il semble que son amour pour la mère [Mme de Montespan] diminue
de Françoise d'Aubigné, marquise de MAINTENON dans Lett à Mme de St Géran, 28 oct. 1679
Te voilà seul avec toi-même qui étais ton idole
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans Tél. XVIII
Quand je fus de retour auprès de ma mère, j'avais tellement l'air de la cour et du monde qu'elle eut du respect pour moi, au lieu de me gronder de mon entêtement pour les armes ; j'étais son idole
de Antoine HAMILTON dans Gramm. 9
Le coeur.... se lasse de ses propres idoles
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Carême, Pécheresse.
Le duc de Guise était l'idole des troupes et du parti catholique
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 374, 3
Gustave Vasa, le héros et l'idole de la Suède
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Moeurs, 119
Blanca de Sivar était l'idole de son père
de François René CHATEAUBRIAND dans Dern. Abenc.
4
Ce qui fait le sujet de l'affection, de la passion de quelqu'un.
Cet honneur a toujours été l'idole des hommes
de Blaise PASCAL dans Prov. 14
Je veux me faire une idole de la réputation et de l'amitié
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans t. XVIII, p. 36
Il y a longtemps que les hommes, toujours vains, font leur idole de la gloire
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Petit car. Gloire.
5
Il se dit d'un homme qui se tient à ne rien faire. Il est là comme une idole.
D'abord nous n'avons su non plus que d'une idole Lui tirer de la bouche une seule parole
de Jean de MAIRET dans Soliman, III, 8
Et de n'entrevoir point de plaisirs plus touchants Qu'une idole d'époux et des marmots d'enfants
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Femmes sav. I, 1
Lysimon : Le second de mes fils n'est qu'une franche idole ; Vous le savez. - Pyrante : Eh bien ? - Lysimon : J'en ai fait un abbé
de Philippe Néricault DESTOUCHES dans Irrésolu, I, 1
Une idole, en parlant d'une femme, celle qui n'a guère d'esprit et qui paraît insensible comme une statue. Elle est belle, mais c'est une idole, une vraie idole.
Poppée est bien [dans son buste] la jolie idole que devait élever puis briser un caprice de Néron
de AMPÈRE dans Hist. rom. à Rome, Introd. p. LV
6
Idole des Maures, poisson de la mer des Indes.
Idole des nègres, boa devin.
Coquille univalve.

REMARQUE

1
Le genre de ce mot a varié ; idole est masculin dans Corneille, dans la Fontaine :
Et Pison ne sera qu'un idole sacré Qu'ils tiendront sur l'autel pour répondre à leur gré
de Pierre CORNEILLE dans Othon, III, 1
Jamais idole, quel qu'il fût, N'avait eu cuisine si grasse
de Jean de LA FONTAINE dans Fabl. IV, 8

HISTORIQUE

1
XIe s.
Touz les yd les que il seult adorer
dans Ch. de Rol. CLXXXV
[Ils] Froissent ymages et toutes les ydeles
dans ib. CCLXVIII
2
XIIe s.
Li pecchiez de ydle aürer [adorer]
dans Rois, p. 56
3
XIIIe s.
Ne ne revoil dire, biau prestre, Où tex [telles] ydoles ont lor estre
dans la Rose, 18460
Et dès ce commencement les gens aorerent les ydles
de Brunetto LATINI dans Trés. p. 31
4
XVIe s.
Si un homme se pouvoit nourrir d'or, o que ce seroit un bel idole !
de Bernard PALISSY dans 226
Ore en mes bras, ore devant mes yeux, Tu fais errer l'idole [l'image] de ma dame
de Pierre de RONSARD dans 17
Brisant les idoles feints De tes mains, De leurs dieux tu seras maistre
de Pierre de RONSARD dans 443
Masques de rois, idoles animées, Et non pasteurs ny princes des armées
de Pierre de RONSARD dans 652
Embrassant pour le vrai l'idole du mensonge
de Pierre de RONSARD dans 256
Ignorez-vous que, quand cette idole de M. l'eschevin aura donné le mot, qu'ils ne le changent pas entre eux ?
de Vincent CARLOIX dans IV, 14

ÉTYMOLOGIE

1
Provenç. et ital. idola ; espagn. et portug. idolo ; du lat. idolum ; qui vient du grec, image, statue, idole ; de même radical que le grec, forme, idée (voy. IDÉE). Dans idolum ( o long), l'accent est sur do, et la forme régulière est, en français, idole ; cependant, en de très anciens textes, on trouve idle ; il faut donc admettre qu'il y a eu, dans la latinité, du moins à l'époque de formation des langues romanes, une prononciation avec accent sur i conforme à l'accentuation grecque ; comparez ENCRE, qui offre un cas pareil.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
IDOLE. - REM. Corneille qui a fait idole du masculin, l'a fait aussi du féminin : Angélique n'a point de charmes Pour me défendre de vos coups ; Ce n'est qu'une idole mouvante, Place Royale, II, 3. Malherbe, qui l'a fait féminin, l'a fait aussi masculin : Votre honneur, le plus vain des idoles, t. I, p. 227, éd. Regnier.

Synonymes de IDOLE

Termes proches de IDOLE