Définition de ADORER

DÉFINITIONS - REMARQUE - SYNONYME - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : a-do-ré

DÉFINITIONS

1
Rendre à la divinité le culte qui lui est dû. Dieu veut être adoré de ses créatures.
J'adore la bonté de Dieu, je l'admire, j'y mets ma confiance
de Louis BOURDALOUE dans Pensées, t. I, p. 67
Et comme ces rois de l'aurore, Un instinct que mon âme ignore, Me fait adorer un enfant
Assis à ce degré suprême, Il faut s'y défendre soi-même, Comme les dieux sur leurs autels ; Rappeler en tout leur image, Et faire adorer le nuage Qui les sépare des mortels
de Alphonse de LAMARTINE dans ib.
Ah ! j'aurais dû peut-être.... Et courbant sous sa foi ma raison qui l'ignore [Dieu], L'adorer dans la langue où l'univers l'adore
Il voulut se faire adorer comme un dieu
De l'ombre de Ninus l'oracle est adoré
2
Adorer la croix, se dit par relation à J. C. en parlant d'une des cérémonies du culte catholique. On dit de même : Adorer les reliques.
3
Adorer se dit aussi absolument.
De tous les endroits de la terre, les Israélites étaient obligés d'y venir adorer [dans le temple]
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Car. Respect des temples.
L'immobilité d'un corps anéanti et la profonde religion d'une âme qui adore
4
Se prosterner devant.
D'où vient, lui dit Alexandre, que tu ne m'adores pas ?
5
Sémantique : Fig.
Je ne vais pas au Louvre adorer la fortune
Détestais-tu la tyrannie ? Adorais-tu la liberté ? De l'oppression impunie Ton oeil était-il révolté ?....
Les uns, sacrifiant leur vie à leur mémoire, Adorent un écho qu'ils appellent la gloire
de Alphonse de LAMARTINE dans IV, 11
6
Sémantique : En termes de spiritualité, se soumettre avec adoration.
Que j'adore en silence l'ordre de votre providence
de Blaise PASCAL dans Prière.
Ils adorent les jugements de Dieu
Ne laissez pas d'adorer la main qui nous l'enlève
7
En général, dans le même sens.
Puisqu'ils font des heureux, adorez leur ouvrage
....permettez Que jusques au tombeau j'adore vos bontés
Et le peuple, inégal à l'endroit des tyrans, S'il les déteste morts, les adore vivants
Ils adorent la main qui les tient enchaînés
Je sais rendre aux sultans de fidèles services ; Mais je laisse au vulgaire adorer leurs caprices
J'adore avec dépit cet excès de courage
8
Aimer avec passion.
Il adore Émilie, il est adoré d'elle
Vous que de tout mon coeur j'ai toujours adorée
Rome sait vos hauts faits, et déjà vous adore
Cette princesse se fait adorer de toute la cour
Allez, en lui jurant que votre âme l'adore, Ä de nouveaux mépris l'encourager encore
Déjà de ma faveur on adore le bruit
Ils ne seraient pas inutiles à l'éducation d'une fille qu'elle adore
Je te jure, à mon tour, de n'adorer que toi
9
Proverbial et figuré, adorer le veau d'or, faire la cour à un homme de peu de mérite, à cause de ses richesses.
S'ADORER, v. réfl.
10
S'adorer l'un l'autre. Ces deux amants s'adorent.
11
Être en adoration de soi. Cet homme n'est occupé que de lui ; il s'adore véritablement.

REMARQUE

1
C'est par abus qu'on emploie adorer pour aimer beaucoup, quand il s'agit d'objets que l'on ne peut supposer sensibles à notre adoration. Delille dit que Voltaire adorait le café. Un autre adore les huîtres. De telles expressions, dites sérieusement, corrompent la langue.

SYNONYME

1
ADORER, VÉNÉRER, HONORER. Rendre des hommages, un culte ou une espèce de culte. Honorer est un terme général qui n'implique que l'hommage qui est rendu ; vénérer enchérit, il s'y joint une idée de crainte respectueuse qui n'est pas incluse dans honorer ; enfin adorer ajoute à l'honneur, à la crainte respectueuse, l'idée d'un amour profond et sans bornes.

HISTORIQUE

1
XIe s.
[Dieu] Le glorius, que deüsse aürer
dans Ch. de Rol. 9
N'i ad paien, [qui] nel prit [prie] et nel aort
dans ib. 66
Touz ses idoles que il seult adorer
dans ib. 185
2
XIIe s.
Et de cil Deu qu'aorent li Persant
dans Roncisv. p. 28
Mais par Mahom, cui je doie aourer
dans ib. p. 78
Ainz [je] l'aim et serf et aor por usage ; Si [je] ne lui os [ose] mon penser descouvrir
dans Couci, 19
Dame, dit-il, que très bon jour Vous doint cil que j'aime et aour
de AUDEFR. LE BAST. dans Romanc. p. 9
3
XIIIe s.
Qui plus a à soufrir, plus vous doit aourer
dans Berte, 43
Par toz les sainz que l'en [on] aeure, Et se dame diex me sekeure [secourt]....
dans Ren. 9799
Car de cent amis aparens, Soient compaignons ou parens, S'uns lor en pooit demorer, Dieu en devroient aorer
dans la Rose, 4904
Lors je plorai et rendis graces à Dieu, et li dis ainsi : Sire, aouré soies tu de ceste soufraite que tu me faiz
4
XIVe s.
Le commencement et premier article parle de adourer et du lever
dans le Menagier, I, 1
Et aourez de tout vostre cuer
dans ib. I, 2
5
XVe s.
Et l'adoroient toutes gens comme leur dieu, pour tant qu'il avoit donné le conseil dont....
6
XVIe s.
Ils baiseront la terre où vos piez marcheront, Ils iront après vous, ils vous adoreront, Leurs cueurs seront bruslants aus rais de votre flame
de DE BRACH dans Olimpe.

ÉTYMOLOGIE

1
Picard, aorer ; provenç. adorar, azorar ; espagn. adorar ; ital. adorare ; de adorare, de ad, à (voy. à), et orare, parler, de os, bouche (voy. ORAISON, ORAL). D'après quelques étymologistes, adorare signifie proprement porter à la bouche, baiser, de là adorer : adorare purpuram principis, se présenter au prince, parce qu'en l'abordant, on baisait le bas de sa robe. D'autres, prenant en considération le sens de orare qui est parler, ne voient dans adorare que parler à, s'adresser à, et, finalement, prier. Cette dernière explication est la plus simple. L'ancien français était aorer, suivant la tendance à supprimer les consonnes et à rapprocher les voyelles. Le picard a gardé cette forme.

Synonymes de ADORER

Termes proches de ADORER