Définition de ASSOUVIR
Prononciation : a-sou-vir
DÉFINITIONS
1
Rassasier, quand la faim est pressante.2
Sémantique : Fig. Satisfaire.Pour assouvir son avarice
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. II, 5
Le dragon qu'annonçait sa prophétique voix Vint sur la race humaine assouvir sa vengeance
de Jacques DELILLE dans Parad. perdu, ch. IV
Enfin les destins désormais Ont assouvi leur haine, ont épuisé leurs traits
La foi de ses aïeux, ton amour et ta crainte D'actes de piété ne pourront l'assouvir
de François de MALHERBE dans II, 1
3
S'assouvir, Nature : v. réfl. Se rassasier. Un loup s'assouvissant dans une bergerie.4
Sémantique : Fig.Adraste nage dans le sang ; il ne peut s'assouvir de carnage
Ses ennemis s'assouvissent de son sang
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. II, 4
La rigueur de la mort se voulut assouvir
de François de MALHERBE dans VI, 20
J'ai de quoi m'assouvir de cette ambition
de Pierre CORNEILLE dans Médée, II, 6
Laissez-moi m'assouvir dans mon courroux extrême
Ils ne peuvent s'assouvir de l'hyperbole
de Jean de LA BRUYÈRE dans 1
REMARQUE
1
On ne peut dire étancher sa faim, étancher emportant l'idée d'un liquide ; mais bien que assouvir se dise plus particulièrement de la faim et des choses solides, cependant, comme il signifie essentiellement rassasier, il peut se dire aussi des choses liquides ; voy. l'exemple de Bossuet.HISTORIQUE
1
XIIe s.Jamais mes ieuz [je] ne verrai aseuvis De regarder sa bele face tendre
dans Couci, v
Il est venus à l'aire [place] où cele [la dame] est qui ses bons Est preste d'asevir [assouvir ses bons, faire sa volonté]
de AUDEFR. LE BAST. dans Romancero, p. 34
2
XIIIe s.Les grands gelées et les grands iaues, par l'empeschement desquelles li talemelier [boulanger] de Paris ne puissent asouvir la ville de Paris
dans Liv. des mét. 16
Du roi [ils] durent avoir lor vie ; Li rois ne l'a pas assouvie : Or guerroient sa nascion
de RUTEBEUF dans 104
[Tu] N'asouviras pas ton desir
dans ib. II, 138
Quant le roy ot assouvie la forteresse du bourc de Jaffe
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 275
Et à l'aide de Dieu le livre est assouvi [achevé] en deux parties
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 191
3
XIVe s.Le beau soleil, pere de vie, Sa circonference assouvie En passant par un chascun signe
dans Nat. à l'alch. err.
4
XVe s.Et se peut et doit-on esmerveiller où pourveances pouvoient estre prises pour assouvir un tel ost
de Jean FROISSART dans II, II, 211
Et tout payoient pauvres gens parmi le royaume de France, car les tailles y estoient si grandes pour assouvir ce voyage que les plus riches s'en doloient
de Jean FROISSART dans II, III, 36
Et on ne les pouvoit assouffir
de Jean FROISSART dans II, III, 99
Fors et appers, convoiteux de vouloir Tout assovir et plus que mon povoir
de Eustache DESCHAMPS dans Erreurs de la jeunesse.
Il delibera faire à Dieu sacrifice du corps qu'il lui avoit presté bel et puissant, assouvi [accompli] de taille, autant et plus que personne de sa contrée, excepté que perdu avoit un oeil en un assaut
de LOUIS XI dans Nouv. XVI
Beaux compagnons, bien assouvis et adressés de tout ce qu'on doit louer en gentilhomme vertueux
de LOUIS XI dans ib. LVIII
5
XVIe s.Cesar, Hector, de vaillance assouvis, Malgré la mort par bon regnom [renom] sont vifz
de Jean des Mares ou Des Marets, dit Jean MAROT dans V, 288
Je fuz nagueres amoureux De dame en beaulté assouvie
de Jean des Mares ou Des Marets, dit Jean MAROT dans V, 332
Une heureuse rencontre, qui puisse assouvir nos longs desirs
ÉTYMOLOGIE
1
Picard, assoufi, assufi, qu'on trouve aussi dans l'ancien français. Diez le tire du gothique ga-sôthian, rassasier, par substitution du v au t, comme dans pouvoir du bas-latin potere ; mais, si cela était, on trouverait, dans l'ancien français, assoïr, comme on trouve pooir. Or, la persistance du v dans assouvir, et même la transformation en f montrent qu'il n'est pas assimilable au v de pouvoir. Littéralement, assouvir représenterait le latin assopire, si le sens le permettait. Remarquons les diverses significations de assouvir dans l'ancien français, rassasier, approvisionner, achever, accomplir, parfaire, et les deux formes assouvir et assufir ou assoufir. On peut croire qu'il y a eu confusion en un seul, de deux verbes, as-sopire, assoupir, d'où rassasier (satisfaire la faim, l'assoupir), et assuficere, suffire, satisfaire, achever, accomplir : cela rendrait compte de tout, sens et forme.