Définition de TRES

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : trê ; l's se lie : trê-z heureux

DÉFINITIONS

1
Particule qui marque le superlatif absolu, et qui se joint à un adjectif, à un participe et à un adverbe ; on unit ces deux mots par un trait d'union ; du moins c'est l'usage du Dictionnaire de l'Académie. Une campagne très agréable. Il est très estimé et très aimé. Cela lui arrive très rarement.
Il est très informé des questions du temps, et il sait parfaitement le secret des jésuites
2
Très se met devant une locution adverbiale ; alors le trait d'union ne s'emploie pas.
Quand je parle de labourer la terre, je parle très à la lettre : je me sers du nouveau semoir....
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans d'Argental, 19 déc. 1758
Mon ouvrage, qui avait été écrit à Gênes, très à la hâte
de GALIANI dans Lett. à Mme d'Épinay, 28 avril 1770
Ce qui restera doit être donné à mon ambassadeur, qui m'a avancé cet argent ; mais, comme il est très en état d'attendre...
de ID. dans ib. 18 sept. 1769
.... sur l'état de l'industrie et de l'agriculture en France, qu'il dit être très en souffrance
de GUDIN dans Rapport au sénat, Monit. univ. 21 mars 1868, p. 423, 1re col.
3
On a contesté s'il pouvait se mettre devant un substantif. Cela est peu usité ; mais l'usage de bons auteurs y autorise.
Il ne laisse pas de se fier à celui-ci, comme à un très homme de bien
Oui, vous êtes sergent, monsieur, et très sergent
4
Mme de Sévigné l'a mis devant un verbe à un temps composé. Ils m'ont très assuré que la vendange de cette année [un bain de vendange, pour des douleurs] m'aurait empirée, 30 sept. 1676.

HISTORIQUE

1
XIe s.
Tres qu'en la mer [il] conquist la tere altaigne
dans Ch. de Rol. I
Si li truvez ki tres bien li ajut [aide]
dans ib. LX
Le cors [il] li trenchet tres l'un costet qu'al altre
dans ib. CXIII
2
XIIe s.
Mais ma dame est de si tres grant vaillance [prix], Que son ami ne doit faire faillance
dans Couci, XXIV
L'apostoiles de Rome, tres en mi le palais, Les princes en apele
dans Sax. X
3
XIIIe s.
Aliste, se je puis, tres bien [je] marierai
dans Berte, VII
Et si tres en mal aise et si fort tourmentée
dans ib. LXVIII
Sachiez, si tres m'en deut li cuers [le coeur] sous la mamele
dans ib. LXXXVI
Amis, dit Renart, di moi voir, Sez-tu ci entor nul manoir Où je trovasse que mengier ? Je ne manjoi tres [dès] avant er [hier]
dans Ren. 23348
Je n'os mie bien recorder Sa beauté que ele a si tres
dans Ms. de poés. franç. av. 1300, t. I, p. 248
4
XIVe S.
En batailles les tres plus forts ne sont pas les mieux combatans
L'en a de tiex [tels] tres pitey et misericorde
de Nicolas ORESME dans ib. 75
Pour ce que felicité est operacion selon vertu, il est raisonnable que ce soit selon la tres meilleur vertu
de Nicolas ORESME dans ib. 313
Vous estes le cinquieme message vraiement Qu'envoié a li rois, dont je sui moult dolent, Qu'à lui n'ai obei tres le commencement
dans Guesclin. 17222
5
XVe s.
Et tres adont [aussitôt] furent instituées reigles et ordonnance d'ost mettre en forme d'eschieles
6
XVIe s.
L'autre [trait] dangereux plus que très , Porte un fer de plomb mal couché, Par la pointe tout rebouché
de Clément MAROT dans I, 169

ÉTYMOLOGIE

1
Bourguig. tré ; du lat. trans, au delà. Si l'on prend en considération le sens de très dans l'anç. français, qui est beaucoup, dès, jusqu'à ; si on le voit en composition dans trespasser et autres mots ; si on tient compte de l'ital. tracodardo, très couart, trafreddo, très froid, etc. on reconnaîtra que très est la forme française de trans.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
Nature : Absolument.
Vous êtes belle, plus que très
de Pierre CORNEILLE dans Lexique, éd. Marty-Laveaux.
Le même Lexique dit que les paysans des environs de Paris emploient très de cette même manière : Ce terrain est-il bon ? - Il ne l'est pas très.

Synonymes de TRÈS