Définition de MUSER
Prononciation : mu-zé
DÉFINITIONS
1
S'amuser, perdre son temps à des riens.Cet arrangement, qui devenait pour moi l'oeuvre de Pénélope, me donnait le plaisir de muser quelques moments
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Confess. XI
Avec lui tu pourras, sans te compromettre, faire de la musique, te promener, t'égarer, enfin muser tout à ton aise
de Louis-Benoît PICARD dans M. Musard, sc. 33
Je m'en vais musant et baguenaudant jusqu'à Naples
de Paul Louis COURIER dans Lett. II, 64
Nature : Impersonnellement, au passif. C'est assez musé, on a assez musé, perdu de temps.
Je lui dis : homme qui refuse Ordinairement après muse
de Paul SCARRON dans Virg. II
Tel refuse qui après muse
de Jean de LA FONTAINE dans Stances en vieux lang.
Tu veux de moi ; Je veux de toi ; Voilà ma foi ; Qui refuse, muse
de LEGRAND dans Famille extrav. Divert.
Cette locution trouve son explication dans les vers de Scarron : elle signifie que celui qui refuse est ensuite dans la situation de l'homme qui muse, qui perd son temps.
Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.
HISTORIQUE
1
XIIIe s.Tout ce li disoit ele pour li faire muser, Pour avoir plus d'espace de leur chose areer
dans Berte, XVII
Il [Narcisse] musa tant à la fontaine Qu'il ama son umbre demaine
dans la Rose, 1501
Qu'il ne m'i convient plus muser, Ne mon tems en gloses user
dans ib. 7241
Qui en sa conscience voudroit souvent muser, Assez y troveroit de quoi soi accuser
Dame, gardez-vous de la bée [l'attente, l'action d'être béant après], Qui en maint leu par la contrée S'arest et fet la gent muser
dans Lai du conseil
2
XVe s.Elle s'en revint devers le roi, qui encore pensoit et musoit fortement
de Jean FROISSART dans I, I, 166
Je ne veul plus, dame, sur vous muser ; Vous povez bien querir autre musart ; Car m'aperçoy qu'on m'a fait amuser
de Eustache DESCHAMPS dans Poésies mss. f° 182
3
XVIe s.Tel refuse qui après muse
Pendant le parlement [capitulation] et qu'ils musoient sur leur seuretez
de Michel de MONTAIGNE dans I, 27
ÉTYMOLOGIE
1
Wallon, mûzer, être triste, mus', morne, taciturne ; provenç. musar, muzar ; anc. espagn. musar ; ital. musare. Origine incertaine. Diez y voit un dérivé du radical mus, museau ; de sorte que muser serait tenir le museau béant, la bouche béante. D'autres y voient le latin mussare, parler entre les dents, hésiter ; mais les lettres et même le sens concordent mal. Huet alléguait le latin musa, muse ; muser serait se livrer aux muses, à l'étude, à la contemplation, etc. Les patois suisses ont musen, être triste, mus, mélancolie, qu'on peut rapprocher des significations wallonnes. Enfin l'allemand offre Musse, loisir, anc. haut all. muezôn, être oisif ; ce qui est la dérivation la plus probable.