L'oeuvre Pensées sur la peinture de Denis DIDEROT
Ecrit par Denis DIDEROT
Date : 1795
Citations de "Pensées sur la peinture"
Pages 1
Utilisé pour le mot | Citation |
DADAIS | Si Marcel rencontrait un homme placé comme l'Antinoüs, lui portant une main sous le menton et l'autre sur les épaules : Allons donc, grand dadais, lui dirait-il, est-ce qu'on se tient comme cela ? |
DÉCOIFFER | À force de s'irriter, de s'injurier, de se battre, de crier, de se décoiffer pour un liard, ils avaient contracté, pour toute leur vie, l'air de l'intérêt sordide, de l'impudence et de la colère |
DÉGRADATION | La perspective approche les parties des corps ou les fait fuir, par la seule dégradation de leurs grandeurs |
DÉLIÉ, ÉE | Je vais vous développer, par un ou deux exemples, le fil secret et délié qui les a conduits dans le choix délicat de leurs accessoires |
DESCRIPTION | Dans la description d'un tableau, j'indique d'abord le sujet, je passe au principal personnage.... |
DESSIN | Le dessin est de rigueur en sculpture |
DÉTAIL | Il ne faut jamais interrompre de grandes masses par de petits détails ; ces détails les rapetissent en m'en donnant la mesure |
ENHARMONIQUE | L'habitude perpétuelle de regarder les objets éloignés et voisins, d'en mesurer l'intervalle par la vue, a établi dans notre organe une échelle enharmonique de tons, de semi-tons, de quarts de tons tout autrement étendue et tout aussi rigoureuse que celle de la musique pour l'oreille |
ENSEMBLE | Ce n'est pas assez que d'avoir bien établi l'ensemble, il s'agit d'y introduire les détails sans détruire la masse |
EUMÉNIDE | Les Euménides des anciens sont belles, et n'en sont que plus effrayantes |
EXAGÉRÉ, ÉE | Il ne faut pas mettre la nature exagérée à côté de la nature vraie sous peine de contradiction |
FAÇADE | Michel Ange était grand dessinateur, lorsqu'il conçut le plan de la façade et du dôme de Saint-Pierre de Rome |
FAUX, FAUSSE | On peint faux pour l'oeil, comme l'on chante faux pour l'oreille |
FLOTTER | Les cheveux d'Atalante, noirs comme l'ébène, flottaient sur ses épaules blanches comme l'ivoire |
FORT, ORTE | L'Hercule de Glycon a le cou très fort relativement à la tête et aux jambes |
FRANCHISE | Sa tête [du sauvage] est droite et relevée, son regard fixe ; il est le maître dans sa forêt ; plus je le considère, plus il me rappelle la solitude et la franchise de son domicile |
GARDER | Il marche sur une ligne difficile à garder |
GENRE | Le peintre de genre a sa scène sans cesse présente sous les yeux |
GERCÉ, ÉE | Si vous me peignez une chaumière, et que vous placiez un arbre à l'entrée, je veux que cet arbre soit vieux, rompu, gercé, caduc |
GOÛT | Peut-on avoir le goût pur quand on a le coeur corrompu ? |
GRÂCE | La grâce n'appartient guère qu'aux natures délicates |
GRIMACER | Le Laocoon souffre, il ne grimace pas ; cependant la douleur cruelle serpente depuis l'extrémité de son orteil jusqu'au sommet de sa tête |
GROUPE | Quel groupe plus simple, plus beau que celui du Laocoon et de ses enfants ? |
HARMONISTE | Il y a un prestige dont il est difficile de se garantir, c'est celui d'un grand harmoniste |
ICTÉRIQUE | S'il est ictérique et qu'il voie tout jaune, comment s'empêchera-t-il de jeter sur sa composition le même voile jaune que son organe vicié jette sur les objets de la nature ? |
IDÉE | Je crois que nous avons plus d'idées que de mots ; combien de choses senties et qui ne sont pas nommées ! |
IMPOSER | Il est sûr que de hautes montagnes, que d'antiques forêts, que des ruines immenses en imposent |
INDIVIDUALISER | Quand la distance est telle qu'à cette distance les caractères qui individualisent les autres [objets] ne se font plus distinguer |
INGRAT, ATE | Tout est ingrat, pour une tête stérile |
INITIER | Si j'étais initié dans les mystères de l'art, je saurais peut-être jusqu'où l'artiste doit s'assujettir aux proportions reçues |
INTERROGER | Interrogez-vous à l'aspect d'un homme ou d'une femme, et vous reconnaîtrez que c'est toujours l'image d'une bonne qualité ou l'empreinte plus ou moins marquée d'une mauvaise qui vous attire ou vous repousse |
LIVRE | Un tableau, une statue licencieuse est peut-être plus dangereuse qu'un mauvais livre |
MANIÈRE | Il n'y aurait point de manière ni dans le dessin ni dans la couleur, si l'on imitait scrupuleusement la nature |
MANIÈRE | La manière est dans les beaux-arts ce que l'hypocrisie est dans les moeurs |
MANIÉRÉ, ÉE | Le contraste mal entendu est une des plus funestes causes du maniéré |
MANIÉRER | Mon homme droit, tous ses membres bien composés, se maniérant, se rendant très agréable pour la visite qui lui arrive |
MAQUETTE | Une maquette du Christ enfant, de Léonard de Vinci |
MIGNARDISE | J'aime mieux la rusticité que la mignardise, et je donnerais dix Watteau pour un Teniers |
MODÈLE | J'ai connu un jeune homme plein de goût, qui, avant de jeter le moindre trait sur la toile, se mettait à genoux, et disait : Mon Dieu, délivrez-moi du modèle |
MODULE | Si l'on a appauvri l'architecture, en l'assujétissant à des mesures, à des modules, elle qui ne doit reconnaître de loi que celle de la variété infinie des convenances.... |
MON ou MA ou MES | Je ne suis pas scrupuleux ; je lis quelquefois mon Pétrone |
MONSTRE | La tête d'un homme sur le corps d'un cheval nous plaît ; la tête d'un cheval sur le corps d'un homme nous déplaira ; c'est au goût à créer des monstres |
MORIBOND, ONDE | Que voit-on dans le tableau d'Eudamidas ? le moribond sur la couche, à côté le médecin qui lui tâte le pouls |
MOUVEMENT | Ils disent d'une figure en repos qu'elle a du mouvement, c'est-à-dire qu'elle est prête à se mouvoir |
NAÏF, IVE | Tout ce qui est vrai n'est pas naïf : mais tout ce qui est naïf est vrai, d'une vérité piquante, originale et rare |
NEUF | La toile [d'un tableau], comme la salle à manger de Varron : jamais plus de neuf convives |
NEZ | Déployez-moi cette figure, ce nez un peu au vent |
NONCHALANCE | La nonchalance embellit une petite chose, et en gâte toujours une grande |
OMBRE | Il y a des objets que l'ombre fait valoir, d'autres qui deviennent plus piquants à la lumière |
ORDONNANCE | On a prétendu que l'ordonnance était inséparable de l'expression ; il me semble qu'il peut y avoir de l'ordonnance sans expression |
OVALE | L'ovale du visage, arrondi dans la femme, dans l'enfant ; caractère de jeunesse, principe de la grâce |
PAILLETTE | Tu remues le sable d'un fleuve qui roule des paillettes d'or, et tu reviens les mains pleines de sable, et tu laisses les paillettes |
PASSAGE | Alors, les passages de l'obscurité à l'ombre, de l'ombre à la lumière, de la lumière au grand éclat, sont si doux, si touchants |
PEINTRE | Soyez sûr qu'un peintre se montre dans son ouvrage autant et plus qu'un littérateur dans le sien |
PERSONNEL, ELLE | Voulez-vous que je vous raconte un fait qui m'est personnel ? |
PINCÉ, ÉE | Ne confondez point les minauderies, la grimace, les petits coins de bouche relevés, les petits becs pincés, et mille autres puériles afféteries, avec la grâce, moins encore avec l'expression |
PIQUE-NIQUE | Quand je suis en pique-nique avec mes amis, et que la tête s'est un peu échauffée de vin blanc |
POËTE | Qu'est-ce qu'un poëte négligé ? c'est celui qui sème de temps en temps de la prose lâche et molle à travers de beaux vers |
PORTRAIT | Point de grands peintres qui n'aient su faire les portraits : témoins Raphaël, Rubens, Lesueur, Vandick |
POSSIBLE | Tous les possibles ne doivent point avoir lieu en bonne peinture, non plus qu'en bonne littérature |
PRATIQUE | Quelque habile que soit un artiste, il est facile de discerner s'il a appelé le modèle ou travaillé de pratique |
RAISONNEUR, EUSE | Il y a bien de la différence entre un raisonneur et un homme raisonnable : l'homme raisonnable se tait souvent, le raisonneur ne déparle pas |
RECOMMANDATION | Si l'âme d'un homme ou sa nature a donné à son visage l'expression de la bienveillance, vous le sentirez.... ce visage est une lettre de recommandation écrite dans une langue commune à tous les hommes |
RECONNAÎTRE | Il se regarda dans un miroir, et se reconnaissait à peine, tant il était changé ! Qui est-ce qui ne se reconnaît pas dans Molière ; et, si l'on ressuscitait les héros de nos tragédies, ils auraient bien de la peine à se reconnaître sur notre scène |
RECUEIL | L'homme entre en colère, il est attentif.... l'oeil s'allume, s'éteint, languit, s'égare, se fixe ; et une grande imagination de peintre est un recueil immense de toutes ces expressions |
REFLET | Ce sont ces reflets infinis des ombres et des corps qui engendrent l'harmonie |
REGARDER | Je crois qu'il faut plus de temps pour apprendre à regarder un tableau, qu'à sentir un morceau de poésie |
REHAUSSER | En passant de la palette sur la scène entière de la composition, la couleur est modifiée, affaiblie, rehaussée, et change totalement d'effet |
REHAUT | Les rehauts sont des effets nécessaires du reflet, ou ils sont faux |
RENTRER | Le vieillard, une autre masse informe et sèche, qui rentre en elle-même et tend à se réduire à rien |
REPOUSSOIR | Il faut en peinture que les objets essentiels se tournent en repoussoirs |
RÉVEILLON | Les artistes appellent réveillons des accidents de lumière qui rompent la monotonie d'un endroit de la toile |
RIEUR, EUSE | On rit par occasion, mais on n'est pas rieur par état |
ROMAIN, AINE | Bouchardon a vêtu Louis XV à la romaine, et il a bien fait |
ROMPRE | Si l'artiste introduit une façade dans son tableau, il ne manquera pas d'en rompre la monotonie par quelque artifice |
SAILLANT, ANTE | Rendre la vertu aimable et le vice odieux, le ridicule saillant, voilà le projet de tout honnête homme qui prend la plume, le pinceau ou le ciseau |
SAILLIR | Le bras du Jupiter foudroyant d'Apelle saillait hors de la toile, menaçait l'impie |
SAUVER | Le plus grand effort de l'art consiste souvent à sauver la difficulté |
SÉRÉNITÉ | La sérénité n'habite que dans l'âme de l'homme de bien ; il fait nuit dans celle du méchant |
SERPENTER | Le Laocoon souffre, il ne grimace pas ; cependant la douleur cruelle serpente depuis l'extrémité de son orteil jusqu'au sommet de sa tête |
SILENCIEUX, EUSE | En général, la scène silencieuse nous plaît plus que la scène bruyante |
SIMPLICITÉ | La simplicité est un des principaux caractères de la beauté ; elle est essentielle au sublime |
SITE | ôtez à Watteau ses sites, sa couleur, la grâce de ses figures, de ses vêtements, ne voyez que la scène et jugez |
TACT | Ce tact fin que nous tenons de l'observation continue des phénomènes |
TECHNIQUE | Le jugement du moral appartient à tous les hommes de goût, celui du technique n'appartient qu'aux artistes |
TEINTE | Si la richesse de la langue s'y prêtait et qu'elle possédât huit cent dix-neuf mots correspondants aux huit cent dix-neuf teintes de la palette, il faudrait qu'il employât le seul qui rendrait précisément la teinte de l'objet |
TEINTE | La tête des brunes s'embellit dans la demi-teinte, celle des blondes à la lumière |
TENIR | Le vrai, le bon et le beau se tiennent de bien près |
TERMINATEUR, TRICE | Tracez sur votre toile le cercle terminateur de la lumière et de l'ombre |
TOUCHER | Le peintre aura été plus sûr de l'effet de son pinceau, aura touché plus fièrement, plus librement, aura moins remanié, tourmenté sa couleur |
TRANSFORMER | Le soleil penche à son couchant, il transforme en autant de diamants les gouttes d'eau qui pendent attachées aux extrémités inégales des pierres |
VIOLÂTRE | Celui qui copiera d'après Greuze, sera gris et violâtre |
VOIR | Qui est-ce qui a vu Dieu ? c'est Raphaël, c'est le Guide ; qui est-ce qui a vu Moïse ? c'est Michel-Ange |
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