Définition de EXTRAORDINAIRE

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : èk-stror-di-nê-r'. La prononciation où l'a est nul est encore la plus usitée ; mais l'écriture comme

DÉFINITIONS

1
Qui n'est pas selon l'ordinaire, selon l'ordre. Séance extraordinaire. Action extraordinaire. Événement extraordinaire.
Dieu, qui fait tout en son temps, avait choisi celui-ci pour faire cesser les voies extraordinaires, c'est-à-dire les prophéties
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. II, 4
Il n'est pas inouï de voir des États hypothéquer leurs fonds pendant la paix même, et employer, pour se ruiner, des moyens qu'ils appellent extraordinaires et qui le sont si fort que le fils de famille le plus dérangé les imagine à peine
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Esp. XIII, 17
Dépense extraordinaire, dépense qui excède celle que l'on fait ordinairement, ou dépense imprévue que l'on fait en sus de celle qu'on s'était proposé de faire.
Conseiller d'État en service extraordinaire, conseiller d'État qui n'a pas de traitement et qui ne remplit pas de fonctions au conseil.
Ambassadeur extraordinaire, envoyé extraordinaire, celui qu'un gouvernement envoie en certains cas particuliers.
Affaires extraordinaires, se disait, sous l'ancienne monarchie, des ressources financières qu'on se créait en dehors du produit des impôts.
Sous l'administration du grand Colbert, les revenus ordinaires de la couronne n'allaient qu'à cent dix-sept millions, à vingt-sept livres, et puis à vingt-huit livres le marc d'argent ; tout le surplus [des dépenses] fut toujours fourni en affaires extraordinaires
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Louis XIV, 30
Aujourd'hui, budget extraordinaire, partie du budget qui comprend les dépenses non obligatoires, et auxquelles on fait face par des ressources extraordinaires.
Autrefois, procédure extraordinaire, la procédure criminelle, par opposition à la procédure civile. Juger à l'extraordinaire, juger au criminel.
Question extraordinaire, voy. QUESTION.
2
Singulier, rare, peu commun. Un génie extraordinaire. Un homme extraordinaire. Il est d'une laideur, d'une avarice extraordinaire.
3
Étrange, bizarre, choquant. Langage, habit extraordinaire. Avoir l'air extraordinaire.
4
Nature : S. m. Chose qui se fait contre l'ordinaire. C'est pour lui un extraordinaire que de boire du vin.
L'extraordinaire est une action qui arrive à la vérité moins souvent que sa contraire, mais qui ne laisse pas d'avoir sa probabilité assez aisée pour n'aller point jusqu'au miracle
de Pierre CORNEILLE dans 2e disc. trag.
Cet extraordinaire que l'on voyait dans les institutions de la Grèce, nous l'avons vu dans la corruption de nos temps modernes
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Esp. IV, 6
Le goût de l'extraordinaire est le caractère de la médiocrité
de Denis DIDEROT dans Salon de 1765, Oeuv. t. XIII, p. 108, dans POUGENS
D'extraordinaire, en surplus, non attendu.
Vingt personnes d'extraordinaire à table
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 430
5
Dans les comptes, ce qui est outre la dépense ordinaire, fonds pour y faire face. L'extraordinaire monte à tant. L'extraordinaire est complétement dépensé.
6
Anciennement. L'extraordinaire des guerres, ou de la guerre, et, absolument, l'extraordinaire, fonds destiné aux dépenses de la guerre.
M. de Louvois, dont un des fils avait appris de lui [Rolle] les éléments de mathématiques, lui donna au bureau de l'extraordinaire des guerres une seconde place qui valait mieux que celle de l'Académie, et pouvait le mener plus loin
de Bernard le Bouyer de FONTENELLE dans Rolle.
La Tourane et Sauvion, trésoriers de l'extraordinaire des guerres, culbutèrent et firent banqueroute
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 92, 214
Chamillart chassa d'autorité, pour friponnerie, un principal commis de l'extraordinaire de la guerre, résidant en Flandre
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 199, 147
Trésorier extraordinaire des guerres, employé supérieur des finances qui prenait immédiatement ses fonds au trésor royal pour les dépenses de la guerre.
7
Nom donné autrefois à un supplément de la gazette, qui contenait les nouvelles étrangères.
8
En matière ecclésiastique, autorité placée en dehors de celle du diocésain.
M. le Preux peut confesser celles qui ont coutume de s'y confesser à l'ordinaire ou à l'extraordinaire
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Lett. abb. 58
9
Sémantique : Terme d'ancienne jurisprudence. Casuel d'une seigneurie.

HISTORIQUE

1
XIVe s.
Les poursuites des crimes sont appellées extraordinaires, parce qu'on n'y observe les anciennes formes
de BOUTILIER dans Somme rural, p. p. 184, dans LACURNE
2
XVIe s.
Il faudroit une extraordinaire valeur aux ennemis, ou une grande lascheté aux nostres pour perdre la bataille
de Francois LANOUE, dit Lanoue Bras de Fer dans 427
La cour advertie de telle venue, accompagnée de mille lances d'extraordinaire, s'avance à Orleans
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans Hist. I, 101
Je vis du jour à la journée, et me contente d'avoir de quoy suffire aux besoins presents et ordinaires ; aux extraordinaires toutes les provisions du monde n'y sçauroient baster
de Michel de MONTAIGNE dans I, 317

ÉTYMOLOGIE

1
Provenç. extraordinari ; espagn. extraordinario ; ital. straordinario ; du lat. extra ordinarius, de extra, hors, et ordo, ordinis, ordre.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
Ancien terme de théâtre. Jouer à l'extraordinaire, doubler le prix de certaines places.
Une ordonnance de police de l'an 1609 avait défendu aux comédiens de prendre plus de cinq sous au parterre et dix sous aux loges et galeries, sauf les cas où, ayant à représenter des pièces pour lesquelles il conviendrait de faire plus de frais, il y serait pourvu exceptionnellement sur leur requête ; les comédiens ne se faisaient pas faute de profiter de cette latitude, et, dès qu'une pièce était supposée devoir attirer la foule, ils jouaient à l'extraordinaire
de J. LOISELEUR dans le Temps, 31 oct. 1876, 3e page, 4e col.

Synonymes de EXTRAORDINAIRE

Phonétiquement proche de EXTRAORDINAIRE