Définition de PROPRE

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : pro-pr'

DÉFINITIONS

1
Qui appartient exclusivement à une personne, à une chose (en ce sens il se met d'ordinaire avant son substantif).
Et de quel front, seigneur, prend-il une couronne, S'il ne peut disposer de sa propre personne ?
de Pierre CORNEILLE dans Sophon. V, 7
Sganarelle : Je veux savoir de vous si je ferai bien de me marier. - Géronimo : Qui, vous ? - Sganarelle : Oui, moi-même en propre personne
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Mar. forcé, 2
Mais enfin je veux songer pour la première fois de ma vie à mes propres intérêts
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 410
Les Juifs vivent en paix et en liberté sous la puissance des rois de Syrie, et ils n'avaient guère goûté une telle tranquillité sous leurs propres rois
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. II, 5
Vous allez voir une reine qui, à l'exemple de David, attaque sa propre grandeur
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Mar.-Thér.
Le meurtre de Virginie, que son père aima mieux tuer de sa propre main que de la laisser abandonnée à la passion d'Appius
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. I, 8
Tellement qu'elle a perdu pour son propre bien cette puissance qu'elle avait pour le bien des autres
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Reine d'Anglet.
Une reine fugitive à qui sa propre patrie n'est plus qu'un triste lieu d'exil
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans ib.
Et qui vont tous les jours, d'une importune voix, T'ennuyer du récit de tes propres exploits
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Disc. au roi.
Je prétends vous traiter comme mon propre fils
de Jean RACINE dans Athal. II, 7
Notre raison est ce qui nous est le moins propre, et ce qu'on doit croire le plus emprunté
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans Exist. 56
Crispin : Est-ce là M. Oronte, mon illustre beau-père ? - La Branche : Oui, vous le voyez en propre original
de Alain René LESAGE dans Crispin rival, 8
Préparez-vous à voir ces oppresseurs Dans les accès de leur rage ennemie Vous barbouiller de leur propre infamie
de Jean-Baptiste ROUSSEAU dans Ép. I, 6
Quand on a bien cherché le bonheur, on ne le trouve jamais que dans sa propre maison
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. Elie de Beaumont, 7 juin 1771
On ne voit dans le Nord aucune femme régner de son chef jusqu'à Marguerite de Valdemar, qui gouverna quelques mois en son propre nom, vers l'an 1377
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Dict. phil. Loi salique.
Un de ces vaisseaux avait été construit de ses propres mains [le czar Pierre]
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Charles XII, 7
Il se met aussi quelquefois après son substantif. Soyez tranquille sur le succès de votre demande, j'en fais mon affaire propre.
Les deux lettres que j'aurai soin de rendre en main propre
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Lett. abb. 8
Dieu demande-t-il de vous que vous commenciez par corriger les passions d'autrui, ou par pleurer vos passions propres ?
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Carême, Pâques.
Un zèle qui cherche les périls n'est pas un zèle du salut d'autrui, mais une indifférence criminelle pour son salut propre
de Jean-Baptiste MASSILLON dans ib.
Les rois de France avaient alors pour revenus leurs biens propres et non ceux des peuples
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Moeurs, 58
On dit aussi : le caractère propre, la valeur propre, les qualités propres, le mérite propre, etc. d'une chose.
On remarque, dans l'Écriture sainte, que Dieu donne aux maisons royales certains caractères propres
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Mar.-Thér.
Se rendre propre, s'approprier une chose.
Plusieurs écrivains qui ne sont plus, ou qui se distinguent parmi les modernes, ont chacun un caractère que notre langue s'est peu à peu rendu propre
de Etienne Bonnot de CONDILLAC dans Conn. hum. II, I, 15
Amour-propre, voy. AMOUR.
2
Nom propre, voy. NOM, n° 16.
3
Le sens, la signification propre d'un mot, le sens naturel et primitif d'un mot, par opposition à sens figuré.
4
Sémantique : Terme d'astronomie. Le mouvement propre d'un astre, le mouvement réel d'un astre, par opposition à son mouvement apparent.
Sémantique : Terme de géographie ancienne. La Grèce propre, la partie de la Grèce, dite par les Romains Achaïe, et qui comprenait l'Attique, la Béotie, la Phocide, la Locride, l'Étolie et l'Acarnanie.
La Grèce propre signifie aussi la Grèce proprement dite, par opposition à la Grande Grèce et aux autres colonies grecques situées hors de la mère patrie.
5
Exactement semblable, même ; en ce sens, il s'emploie par énergie, et se met avant le substantif. Vous demeurez dans la propre maison où il logeait.
Avant ce jour fini, ces mains, ces propres mains Laveront dans mon sang la honte des Romains
de Pierre CORNEILLE dans Hor. III, 6
Ce sont ses propres mots
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Éc. des mar. II, 11
Voilà l'aventure de mon pauvre fils [danger couru à la bataille de Senef, livrée lorsque la paix était déjà faite] ; et c'est ainsi que l'on en usa le propre jour que la paix commença
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 23 août 1678
C'était un samedi, c'était le propre jour de la disgrâce de ce pauvre homme
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 29 nov. 1679
Le pape [Grégoire VII] était alors dans la forteresse de Canosse sur l'Apennin avec la comtesse Mathilde, propre cousine de l'empereur
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Ann. Emp. Henri IV, 1077
Cet ancien auteur phénicien avoue en propres mots qu'il a tiré une partie de son histoire des écrits de Thaut
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Déf. de mon oncle, 21
6
Particulier. La poésie et la prose ont chacune une harmonie qui leur est propre.
Nous y trouvons des choses que l'esprit propre qui nous fait agir n'y a pas formées
de Blaise PASCAL dans dans COUSIN
Autant admirateur du mérite, que s'il lui eût été moins propre et moins familier
de Jean de LA BRUYÈRE dans II
Les passions, qui d'ordinaire sont la source des dégoûts de la vertu, ont cela de propre que plus on les réprime, plus elles deviennent dociles
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Carême, Dégoûts.
Sucs propres, sucs colorés qui appartiennent à certains végétaux seulement, et vaisseaux propres, les espaces qui les renferment.
Pédoncules, pétioles propres, dernières divisions d'un pédoncule et d'un pétiole communs, formant le support immédiat de la fleur et de la feuille.
7
Convenable à quelqu'un ou à quelque chose. Les qualités propres au commandement. Cela est propre à toutes sortes de gens.
Quand on songe que c'est une affaire qui dépend de M. Colbert, on tremble, en sorte que, si je trouvais un autre hasard qui nous fût propre, je le prendrais
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 14 juill. 1677
Aimez-moi tous deux, car votre amitié est pour moi une chose admirable ; je vous renvoie vos mêmes paroles, je les ai trouvées très propres pour ce que je pense
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans à M. et Mme de Guitaut, 21 sept. 1675
Elle [la fille aînée de Mme de Grignan] serait abbesse ; cette place est toute propre aux vocations un peu équivoques : on accorde la gloire et les plaisirs
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 9 juin 1680
Ce texte [tout est vanité], qui convient à tous les états et à tous les événements de la vie, par une raison particulière devient propre à mon lamentable sujet
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Duch. d'Orl.
Quelle autre créature fut jamais plus propre à être l'idole du monde !
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans ib.
Les hommes, par leurs soins et par de bonnes lois, ont rendu la terre plus propre à être leur demeure
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Esp. XVIII, 6
Si on avait eu un théâtre libre, propre pour l'action, tel qu'il est chez toutes les autres nations de l'Europe
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Sémiram. Dissert. sur la tragéd. part. 2
Seul convenable à, réservé à. Le midi est l'exposition propre de cet arbuste. Le sable est le terrain propre de cette plante.
8
En parlant des personnes, qui a l'aptitude, les qualités nécessaires pour quelque chose.
Un homme de votre âge, de votre humeur, si propre à la société et à rendre une femme heureuse
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 25 sept. 1689
Je ne songe point encore au voyage de Nantes ; j'y fais exécuter des gens qui me doivent : je serais peu propre à ces sortes de choses
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 26 juin 1689
Je vous écris peu de nouvelles.... d'ailleurs je n'en sais point ; je serais toute propre à vous dire que M. le chancelier a pris un lavement [Séguier, qui n'allait jamais au conseil sans avoir pris un lavement]
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 13 mars 1671
Durant douze ans qu'elle fut dans le monastère, on lui voyait tant de modestie et tant de sagesse, qu'on ne savait à quoi elle était le plus propre, ou à commander, ou à obéir
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Anne de Gonz.
Un enfant est peu propre à trahir sa pensée
de Jean RACINE dans Ath. II, 6
Descartes les jugeait [les femmes] plus propres que nous à la philosophie, et une princesse malheureuse a été son plus illustre disciple
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Lett. à J. J. Rouss. Oeuv. t. v, p. 351, dans POUGENS.
On pensa à moi pour une place ; mais par malheur j'y étais propre
de Pierre Augustin Caron de BEAUMARCHAIS dans Mar. de Fig. v, 3
Il est propre à tout, disent ses amis ; ce qui signifie toujours qu'il n'a pas plus de talent pour une chose que pour une autre, ou, en d'autres termes, qu'il n'est propre à rien
de Jean de LA BRUYÈRE dans II
Un de ces esprits indéterminés qui ne sont propres à tout que parce qu'ils ne sont propres à rien
de DUBOS dans Réfl. poés. et peint. II, 6
Quand on veut tout savoir, que peut-on savoir bien ? Qui se croit propre à tout, souvent n'est propre à rien
de Louis-Benoît PICARD dans Entrée dans le monde, I, 2
Nature : S. m. Populairement. Un propre à rien, un homme qui n'a d'aptitude ni de goût pour aucune sorte de travail.
9
Qui peut servir à. Ce bois est propre à bâtir. Ce remède est propre à telle maladie.
C'est [Port Royal des Champs] un vallon affreux, tout propre à faire son salut
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 26 janv. 1674
Les Rochers sont tranquilles et tout propres à vous conserver votre chère mère pour vous revoir
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 24 juill. 1689
La presse n'est pas grande à soupirer pour elle [la charge de Ch. de Sévigné], quoiqu'elle soit propre à faire soupirer
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 12 avr. 1680
Vous aurez M. de Coulanges.... Grignan est tout propre pour le charmer
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 15 juin 1680
Le bec de la frégate, très propre à la proie, puisqu'il est terminé par une pointe perçante et recourbée
de Georges Louis Leclerc, comte de BUFFON dans Ois. t. XVI, p. 160
Propre à, suivi d'un verbe actif avec le sens passif.
Cet avis est plus propre à donner à la reine
de Pierre CORNEILLE dans Nicom. III, 3
Il se dit aussi, en mauvaise part, de ce qui peut produire un effet fâcheux. La conduite de son fils est propre à lui causer un violent chagrin. Ce remède est propre à augmenter la maladie.
10
Mal propre, qui n'est pas propre à, qui ne convient pas (locution tombée en désuétude à cause de la confusion de sens, mal propre signifiant sale aussi).
Et nous parlons peut-être avec trop d'imprudence Dans un lieu si mal propre à notre confidence
de Pierre CORNEILLE dans Cinna, II, 2
Monsieur, je suis mal propre à décider la chose
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Mis. I, 2
Je me sens mal propre à bien exécuter ce que vous souhaitez de moi
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Am. magn. I, 2
11
Le mot propre, l'expression propre, le mot, l'expression qui seule convient et rend précisément la pensée.
L'on doit avoir une diction pure, et user de termes qui soient propres, il est vrai ; mais il faut que ces termes si propres expriment des pensées nobles, vives, solides
de Jean de LA BRUYÈRE dans I
Le grand malheur de tant d'auteurs est de n'employer presque jamais le mot propre ; ils sont contents pourvu qu'ils riment ; mais les connaisseurs ne sont pas contents
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Pauvre diab. note.
Que le mot propre est rare, mais qu'il est nécessaire !
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Comm. Corn. Rem. Héraclius, II, 6
Les mots propres, répondit Euclide, forment le langage de la raison ; les expressions figurées, celui de la passion
de Auguste Marseille BARTHÉLEMY, dit L'ABBÉ BARTHÉLEMY dans Anach. ch. 58
D'où vient que les malheureux trouvent avec tant de facilité le secret d'attendrir et de déchirer nos âmes ? c'est que leurs accents et leurs cris sont le mot propre de la douleur
de Auguste Marseille BARTHÉLEMY, dit L'ABBÉ BARTHÉLEMY dans ib. ch. 27
Cette langue n'a point de mot propre, de terme propre, pour désigner telle chose, elle n'a point de mot, de terme qui soit particulièrement destiné à désigner telle chose.
12
Bien soigné, bienséant, bien arrangé (par une extension facile à concevoir du sens de convenable).
Comment, monsieur Jourdain, vous voilà le plus propre du monde !
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Bourg. gent. III, 4
Sémantique : Populairement. Il est propre, il est dans de mauvaises affaires.
Il se dit aussi des choses. Ses habits sont toujours fort propres.
Je fis mon lundi gras avec la princesse : un petit dîner aussi bon, aussi délicat, aussi propre qu'il est possible
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 7 mars 1685
On dit de même : Son écriture est propre et bien rangée.
Sémantique : Par dénigrement. C'est quelque chose de propre que vous m'offrez là.
Substantivement et dans le même sens de dénigrement, le peuple dit : C'est du propre ! En voilà du propre !
13
Net, par une extension facile du sens de bien rangé, de soigné ; il est opposé à sale. Cet escalier n'est pas propre.
Propre sur soi, dont la personne est très nette ainsi que le vêtement.
Quoique très pauvre, il [Socrate] se piquait d'être propre sur soi et dans sa maison
de Charles ROLLIN dans Hist. anc. Oeuv. t. IV, p. 355, dans POUGENS
14
Nature : S. m. Qualité distinctive.
Le propre des os est de tenir le corps en état, et de lui servir d'appui
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Conn. II, 7
Le propre de ce spectacle [l'opéra] est de tenir les esprits, les yeux et les oreilles dans un égal enchantement
de Jean de LA BRUYÈRE dans I
C'est le propre des grands hommes d'avoir de méprisables ennemis
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Louis XIV, écrivains, Fontenelle.
Si le propre du génie est de créer en grand, celui de l'esprit dans les petits ouvrages est d'imaginer, celui du talent est de mettre en oeuvre, et celui du goût de mettre en place
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Éloges, Saint-Aulaire.
Les définitions et les analyses sont proprement des périphrases dont le propre est d'expliquer une chose
de Etienne Bonnot de CONDILLAC dans Art d'écr. II, 3
Le propre des hommes est de s'instruire beaucoup plus par l'épreuve des maux que par la jouissance des biens
de Guillaume Thomas, abbé RAYNAL dans dans GIRAULT-DUVIVIER
Ce qui appartient particulièrement à.... Le propre des jeunes gens est d'être légers.
Si c'est le propre des rois de juger les peuples, il n'est pas moins vrai que c'est le propre de Dieu de juger les rois
de Louis BOURDALOUE dans Jugem. dern. 1er avent, p. 49
Le propre de la justice est de conformer le châtiment à l'offense
de Louis BOURDALOUE dans Serm. 19e dim. après la Pentecôte, Dominic. t. IV, p. 164
15
Le propre, le sens primitif, naturel d'un mot. Prendre un mot au propre. Le propre et le figuré.
Il parle ordinairement au propre et seulement pour être entendu
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Ém. IV
16
Sémantique : Terme de jurisprudence. Immeuble qui appartient à une personne par succession. Ce bien était un propre.
Clagny, bâti par Mme de Montespan en son propre, passa à M. le duc du Maine
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 410, 151
Ainsi s'établit, malgré la disposition du droit romain et de la loi salique, cette règle du droit français : propres ne remontent point
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Esp. XXXI, 34
Dans un pays où une coutume locale a disposé des propres, Bodin dit très bien qu'il ne faudrait confisquer que les acquêts
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans ib. V, 15
Sémantique : Fig.
Ma nièce, monsieur, ne peut s'aliéner ; C'est comme un propre ; enfin on va vous chicaner
de DUFRÉNY dans Réconc. norm. IV, 5
Propre ancien, bien immeuble qui vient de l'aïeul ou au-dessus.
Propre naissant, bien immeuble qui faisait partie des acquêts de celui dont on hérite.
Il se dit aussi des biens du mari ou de la femme qui n'entrent pas en communauté.
Il serait bon que les femmes sussent ce que c'est que propre, ce que c'est que communauté
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans t. XVII, p. 99
Propres par stipulation, se dit, par exemple, d'une dot qui consiste en argent, ce qui se nomme aussi propre fictif.
17
Dans le langage général, ce qui appartient à quelqu'un.
Qu'ils ont comme leur propre en leur grange entassé !
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Sat. III
Ils ne possèdent point de biens en propre
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Var. 11
Gnathon.... oublie que le repas est pour lui et pour toute la compagnie ; il se rend maître du plat, et fait son propre de chaque service
de Jean de LA BRUYÈRE dans XI
Le roi.... lui conta que l'extrême besoin de ses affaires l'avait forcé à de furieux impôts.... qu'à la fin il s'en était ouvert au P. Tellier, qui lui avait demandé quelques jours pour y penser, et qu'il était revenu avec une consultation des plus habiles docteurs de Sorbonne qui décidait nettement que tous les biens de ses sujets étaient à lui en propre
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 284, 110
Sans compter la jument Borac sur laquelle il [Mahomet] monta au ciel ; mais il ne l'avait que par emprunt, elle appartenait en propre à l'ange Gabriel
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Dict. phil. Alcoran.
La première idée qu'il faut lui donner [à l'enfant] est moins celle de la liberté que de la propriété ; et, pour qu'il puisse avoir cette idée, il faut qu'il ait quelque chose en propre
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Ém. II
Sémantique : Fig.
Cette louange [du courage, en Louis XIV, vieux et malheureux] eut du moins le mérite que n'avaient pas eu tant d'autres ; elle appartenait en propre au monarque, et n'était ni basse, ni exagérée
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Éloges, Saint-Aulaire.
Sémantique : Fig. De son propre, de son propre fond, de sa propre intelligence, connaissance, etc.
Je n'entreprendrais pas de vous porter ce secours [consolations] de mon propre
de Blaise PASCAL dans Lett. sur la mort de son père.
18
Sémantique : Terme de liturgie catholique. Le propre du temps et le propre des saints forment la division des fêtes de l'année liturgique de l'Église romaine. Le propre du temps est l'ensemble des offices qui se font conformément à l'esprit du temps où l'on se trouve. Le propre du temps se divise en cinq grandes époques appelées : le temps de l'Avent, le temps de Noël et de l'Épiphanie, le temps de la Septuagésime et du Carême, le temps pascal et les dimanches après la Pentecôte. Le propre des saints est l'ensemble des offices qui se font conformément à l'esprit des fêtes que l'Église a instituées en l'honneur des mystères de la sainte Vierge et des saints ; on le divise en trois classes de fêtes : les fêtes de la sainte Vierge ; les fêtes des anges ; les fêtes des saints.
Propre de certaines églises, ce qui ne se dit qu'en certains lieux.
19
Dans la scolastique, le propre ou la propriété était un des cinq universaux.
20
Propres s'est dit au pluriel, au sens de proches, de parents.
M. Vautier qui n'a jamais fait de bien à personne, pas même à ses propres
de Gui PATIN dans Lett. t. II, p. 603

REMARQUE

1
1. Les propres termes sont les mêmes mots sans y rien changer. Des termes propres sont des mots qui expriment bien et selon l'usage de la langue ce que l'on veut dire.
2
2. Il a été dit que, dans le sens du 1°, propre se met d'ordinaire avant son substantif. Le fait est que jadis il n'y avait point d'usage à cet égard, et que propre se mettait, suivant l'oreille, tantôt avant, tantôt après. Mais à mesure que le sens de net s'est davantage attaché à propre, l'usage a montré de la tendance à le mettre avant son substantif, au sens du 1°. Cependant l'on doit dire qu'on peut user de l'ancienne liberté, toutes les fois qu'il n'y aura pas lieu à une confusion ridicule avec le sens de net.
3
3. Dans le sens de net, propre suit le substantif : un habit propre, une femme propre.

HISTORIQUE

1
XIe s.
Li burgeis qui ad en soun propre chatel [un bien, un avoir] demi marc vailant
dans Lois de Guill. 18
2
XIIIe s.
Et sor tout ce doit li parleres [l'orateur] user moz propres biaus et acostumez
de Brunetto LATINI dans Trésor, p. 521
Trestuit pareil [égaux] estre soloient, Ne riens propre avoir ne voloient
dans la Rose, 8486
C'est la coutume au roi de France que, s'il va en ost sour aucun baron, çou qu'il conquest par force li demeure propre à tous jors
dans Chr. de Rains, 195
3
XIVe s.
Il dit en aucuns textes que le jeune de aage ou de meurs n'est pas propre auditeur de polithiques
de Nicolas ORESME dans Eth. 1111
4
XVe s.
Malgré le proprel roi et tous ses aidans
de Jean FROISSART dans I, I, 22
Les fruits et feuilles et fleurs furent si proprement faitz, qu'ils sembloient proprement arbres et propres fruits, et les faisoit très beau voir
de Olivier DE LA MARCHE dans Mém. II, p. 583, dans LACURNE
Comme luy mesmes propre m'a compté
de Philippe de COMMINES dans III, 5
5
XVIe s.
Si je me veux monstrer innocent, ma bouche propre me condamnera
de Jean CALVIN dans Instit. 596
Voire contre sa propre creance
de Michel de MONTAIGNE dans I, 21
L'argument le plus propre au temps et au lieu
de Michel de MONTAIGNE dans I, 41
Elle estoit cousue à un ruban propre à rattacher soubs le menton
de Michel de MONTAIGNE dans I, 95
Le propre jour que le roy mourut....
de Michel de MONTAIGNE dans I, 202
Le roy François fut au propre [à même] d'eslire, ou de.... ou de....
de Michel de MONTAIGNE dans I, 235
Que ne plaist il un jour à nature nous faire veoir au propre ses moyens ?
de Michel de MONTAIGNE dans II, 279
Le mari ne pouvant directement ou indirectement obliger les propres de sa femme
de Antoine LOYSEL dans 114
Le premier des noms que portoient les Romains, comme Caius, estoit leur propre : le second, comme Martius, estoit le nom de la famille et maison
de Jacques AMYOT dans Cor. 15

ÉTYMOLOGIE

1
Bourg. prôpe ; provenç. propri ; espagn. propio ; ital. proprio ; du lat. proprius, qui se rattache à prope : ce qui approche, ce qui touche. Propre a passé de son sens primitif à celui de con venable, puis, devenant tout à fait spécial. à celui de net ; cette dernière acception ne paraît pas ancienne ; on en trouvera un exemple du XVIe siècle à l'historique de proprement.

Synonymes de PROPRE

Termes proches de PROPRE