Définition de TORDRE

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : tor-dr'

DÉFINITIONS

1
Tourner un corps long et flexible par les deux bouts en sens contraire, ou par un seul bout, l'autre étant fixe. Tordre du fil, un lien.
L'une, penchée vers la surface de l'eau, y trempe son linge ; l'autre, accroupie, le tord
L'homme est sur un flot qui gronde, L'ouragan tord son manteau
Sémantique : Fig.
Pressez-les, tordez-les, ils dégouttent l'orgueil, l'arrogance, la présomption
de Jean de LA BRUYÈRE dans VIII
Qui te tordrait le nez, il en sortirait encore du lait (Comédie des Prov. III, 7, XVIIe siècle), se dit par moquerie à un jeune homme, à un blanc-bec, qui se mêle de choses dont son âge le rend incapable.
Sémantique : Populairement. Ne faire que tordre et avaler, manger très avidement, avaler presque sans mâcher.
2
Tordre de la laine, de la soie, du fil, tourner à la main, au rouet ou au moyen d'une machine, plusieurs brins pour n'en former qu'un seul.
Attacher ces matières sur une cheville, et en rouler plusieurs écheveaux ensemble
Tordre le câble, joindre en un les cordons qui doivent le composer.
3
Tourner violemment, en parlant d'un membre.
Finissez donc, monsieur, vous me tordez le bras
Tordre le cou, faire mourir en tournant le cou.
Voit son faucon, lui tord le cou, le plume
de Jean de LA FONTAINE dans Fauc.
Si je résiste, il me tordra le cou
Tout ce qui restait de la Ligue à Paris ne publia-t-il pas que le diable avait tordu le cou à la belle Gabrielle d'Estrées ?
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Pol. et lég. Avis au public, exemples.
Se tordre les bras, les mains, tordre à soi les bras, les mains, dans un excès de passion, de douleur.
Échevelée, étendue sur le cercueil de son amie, se tordant les mains
de Denis DIDEROT dans Él. de Richardson.
Se roulant par la chambre en se tordant les mains et mordant les pieds des chaises
4
Tourner de travers.
Je leur remontrerai, en penchant le cou et en tordant la bouche, que tu as une opinion erronée sur les cellules où furent renfermés les Septante
Et de bals où il a dansé en bâillant à se tordre la bouche
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Lett. au roi de Pr. 19 déc. 1768
5
Sémantique : Fig. Détourner de sa signification naturelle un texte.
Avouez la vérité, monseigneur : on aimerait mieux s'être expliqué plus précisément, et employer son esprit à bien définir les mots pour parler conséquemment, que de les tordre après coup pour se sauver comme on peut
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Réponse à quatre lettres, 1
L'Écriture se laissait tordre et violenter à qui le voulait
Ils tordent une phrase d'Hippocrate pour faire accroire que les Grecs connaissaient la circulation du sang mieux que Harvey
Tordre le sens d'un auteur, d'un passage, lui donner une interprétation fausse et forcée.
6
Se tordre, Nature : v. réfl. Agiter son corps en le tournant en sens contraire. Un ver qui se tord.
Je vous assure que j'aurais crié plus d'une fois, au lieu qu'il a fallu soupirer, se mordre les lèvres et se tordre
il se tord
de Pierre Jean de BÉRANGER dans Mort du diable.
Connaître un pas qu'on aime et que jaloux on suit, Rêver le jour, brûler et se tordre la nuit
Rire à se tordre, rire extrêmement.
7
Devenir contourné. Cette branche s'est toute tordue.
Ses yeux, remplis d'un feu sombre, roulaient avec égarement, sa bouche se tordait
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Facéties, appar. Bertier.

HISTORIQUE

1
XIIIe s.
Et cil va la robe [mouillée] tordant, Qui entour le comte ot esté
dans Bl. et Jeh. 2748
La male passion le torde !
dans Ren. 884
Et aus vieilletes [vieilles femmes] vont les mameles torgant
dans Chans. d'Ant. II, 38
La descordance acordent des maux que recordons, En lor lit se descordent por ce que nos tortons
de RUTEBEUF dans 181
Ses puins et ses caveus [cheveux] torjant
dans Ms de poés. franç. av. 1300, t. IV, p. 1354, dans LACURNE
2
XIVe s.
Se tu ne pues souder la voine ou l'artere [blessées] pour aucun empeschement, donc te convient il la voine tirer ou l'artere hors de son lieu, et tortre le bout, ou ardre à ung fer chault
de LANFRANC dans f° 14, verso.
3
XVe s.
Qui lors vit hommes et femmes et les enfans d'iceux pleurer et tordre leurs mains.... il n'est si dur coeur qui n'en eust pitié
Et heurterent de la chasse du dit sainct contre une maison..., et ilz dirent que ledit sainct vouloit passer par la maison sans se tordre [se détourner], et en ung mouvement l'abbatirent
de Philippe de COMMINES dans II, 4
Cy le traie [qu'elle tire son enfant] du puis et le couche à terre, puis die en tuertant ses mains : hareu ! lasse ! filz, tu es mort
dans Mir. de sainte Genevieve
4
XVIe s.
Panurge tordoyt la gueulle et retiroyt les doigtz
Je tors bien plus volontiers une belle sentence, pour la coudre sur moy, que je ne tors mon fil pour l'aller querir
de Michel de MONTAIGNE dans I, 191
Quelqu'un des siens luy tord le col
de Michel de MONTAIGNE dans I, 130
S'efforceans ordinairement de redresser la commune quand elle se tord
de Jacques AMYOT dans Lucull. et Cimon, 5
Les Atheniens ne tiroient que dards, flesches et traicts, dont le branlement des vaisseaux tordoit et empeschoit le droit fil
de Jacques AMYOT dans Nicias, 45
Les curieux sont subjects à tordre le col et se retourner. ..
À qui on les a tors et comprimés [les testicules] par violence
de Ambroise PARÉ dans XVIII, 43
Il ne se tord pas qui va plain chemin
de Randle COTGRAVE dans

ÉTYMOLOGIE

1
Berry, tortre ; norm. terquer, teurquier, et aussi teurdre (mais l'o revient quand la syllabe n'est pas accentuée : nous tordons) : tu mens, le nez te teurd, par allusion à un ancien usage : un menteur pris sur le fait devant faire amende honorable en se tordant le nez et disant : j'ai menti ; bourg. todre ; wallon, toîd ; provenç. torser ; espagn. et portug. torcer ; ital. torcere ; du lat. torquere. Les étymologistes le rapprochent du grec, tourner. Le français tordre représente une accentuation barbare torquere (1er e accent bref).

Synonymes de TORDRE

Termes proches de TORDRE

Phonétiquement proche de TORDRE