Définition de SIFFLER

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : si-flé

DÉFINITIONS

1
Former un son aigu en serrant les lèvres, ou avec un sifflet, ou avec une clef forée, etc. Les voleurs sifflent pour s'avertir. On entend les oiseaux siffler.
M. d'Orléans faisait l'empressé et le passionné en parlant à la reine ; je ne l'ai jamais vu siffler avec plus d'indolence qu'il siffla une demi-heure en entretenant Guerchy dans la petite chambre grise
Je les rassemblerai, comme le pasteur en sifflant rassemble son troupeau
de Isaac Louis Lemaistre de SACY dans Bible, Zachar. X, 8
C'est un petit jeune homme à quatre pieds de terre, Homme de qualité qui revient de la guerre, Qu'on voit toujours sautant, dansant, gesticulant, Qui vous parle en sifflant, et qui siffle en parlant
Il siffle en parlant, sa prononciation est accompagnée d'un certain sifflement, ce qui arrive surtout quand manque quelque dent de devant.
Siffler en paume, disposer la paume de la main au devant de sa bouche, de manière à produire un sifflement prolongé.
Sémantique : Fig. et familièrement. Il n'a qu'à siffler, il n'a qu'à faire connaître sa volonté pour être obéi.
Mais qu'entends-je de certains personnages qui ont des couronnes, je ne dis pas des comtes ou des marquis, dont la terre fourmille, mais des princes et des souverains ? ils viennent trouver cet homme dès qu'il a sifflé, ils se découvrent dès son antichambre, et ils ne parlent que quand on les interroge
de Jean de LA BRUYÈRE dans XII
Il n'y a qu'à siffler et remuer les doigts, c'est une chose fort aisée.
2
Sémantique : Par extension, faire entendre un bruit aigu en respirant, quand la respiration est gênée. Sa poitrine siffle.
3
Il se dit du son aigu que font entendre certains animaux, le serpent, le cygne, etc. quand ils sont en colère.
La Discorde, à l'aspect d'un calme qui l'offense, Fait siffler ses serpents....
Hé bien ! filles d'enfer, vos mains sont-elles prêtes ? Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes ?
.... à son rire moqueur Le serpent de l'envie a sifflé dans son coeur
4
Il se dit du bruit aigu que fait le vent, une flèche, une balle de fusil, etc.
Ce volume effroyable.... Va frapper en sifflant l'infortuné Sidrac
L'air siffle ; une horrible tempête Aujourd'hui gronde sur ta tête ; Demain tu seras dans le port
[Le vent] Siffle et frappe la voile à grand bruit déchirée
Le vent du nord se faisait sentir souvent dans notre château ; je l'entendais siffler la nuit à travers les longs corridors de notre demeure
Au manége, siffler la gaule, la faire siffler pour avertir le cheval, quand il se ralentit.
5
Siffler sur, désapprouver, blâmer.
La Marans était l'autre jour seule en mante chez Mme de Longueville ; on sifflait dessus
Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.
6
Nature : V. a. Chanter un air en sifflant. Il siffle un air entre les dents. Ce serin siffle plusieurs airs.
7
Appeler en sifflant.
Je sifflai vainement le chien du pauvre prêtre
8
Siffler un oiseau, siffler près de lui pour lui apprendre à siffler des airs.
Il donne pension à un homme qui n'a point d'autre ministère que de siffler des serins au flageolet, et de faire couver des canaries [canaris]
de Jean de LA BRUYÈRE dans XIII
Sémantique : Fig. Siffler la linotte, voy. LINOTTE.
Sémantique : Fig. et familièrement. Siffler quelqu'un, l'instruire de ce qu'il doit dire ou faire en certaine occasion.
Un docteur politique qui les a sifflés, et qui leur a mis dans la tête cinq ou six mots de notre Tacite.... leur a recommandé le secret ou la dissimulation
9
Témoigner sa désapprobation, soit à coups de sifflet, soit par quelqu'autre bruit.
Et siffler un jeune moineau Qui parlait comme un étourneau
Il fut sifflé de tout l'auditoire
En Angleterre, où l'on élève Shakespeare au-dessus de Corneille, et où l'on siffle ceux qui l'imitent
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Comm. Corn. Rem. Héracl. V, 8
Ils m'ont sifflé ; mais si jamais je puis les rassembler !
Il chassa de Rome et de l'Italie Pilade lui-même, pour avoir montré du doigt et fait remarquer un spectateur qui le sifflait
de BERNARDI dans Instit. Mém. inscr. et belles-lett. t. VIII, p. 297
Nature : Absolument.
Si un auteur hasardait aujourd'hui sur le théâtre une telle incongruité [Séleucus peint comme un amant, et effectivement assassiné], comme on se récrierait ! comme on sifflerait !
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Comm. Corn. Rem. Rodog. V, 6
Au passif et impersonnellement.
Au beau drame de Cléopatre, Où fut l'aspic de Vaucanson, Tant fut sifflé, qu'à l'unisson Sifflaient et parterre et théâtre ; Et le souffleur, oyant cela, Croyant encor souffler, siffla
de LEBRUN dans Épigr. sur la Cléopatre de Marmontel
10
Sémantique : Fig. Désapprouver avec dérision.
Si j'allais, madame, accorder vos demandes [changer le style officiel des notaires], Je me ferais siffler de tous mes compagnons
Qu'elle nous mette au rang des grands et beaux esprits Un benêt dont partout on siffle les écrits
Mais bien que ses durs vers, d'épithètes enflés, Soient des moindres grimauds chez Ménage sifflés
Faire siffler Cotin chez nos derniers neveux
Ô vieux Denys, je me ris de ton glaive ; Je bois, je chante et je siffle tes vers
de Pierre Jean de BÉRANGER dans Damoclès.
11
Sémantique : Populairement. Boire. Siffler une bouteille. Le long de la journée Je siffle autant que trois, Chanson bachique dans FR. MICHEL, Argot.
On a dit de même : Siffler la rôtie.
Vaut mieux à Saint-Denys être dessous la mitre à siffler la rôtie, Et prendre du tabac, Que de se faire perdre au milieu des combats
dans Chanson nouvelle, dans FR. MICHEL, Argot.

REMARQUE

1
On a dit chiffler jusqu'au commencement du XVIIe siècle :
Encore que.... Il méritast au Louvre estre chifflé des pages
La calomnie a eu le succès qu'elle méritait : elle a été chifflée, où elle pensait être applaudie

HISTORIQUE

1
XIIIe s.
Et dient que Mahommes et sa loiz ne vaut rienz, et ne s'en font se chiffler non
de GUILL. dans DE TYR, t. II, p. 614
Molt [elles] i jetent à grant fuison Biax gas, biax dis, biel acointier, Com il convient à tel mestier, Ciflent et gabent et si rient
de GUI DE CAMBRAI dans Barl. et Jos. p. 226
2
XIVe s.
Adonc commença ledit Jehan le houlier à sibler et crier si hault....
3
XVe s.
Tenez vous cy quoy, et ne vous avancez, jusques à tant que je sifflerai
Le comte siffla un levrier qu'il avoit delez lui
Le suppliant yssit de la taverne et oyt subler, et alors Chauveau subla aussi
La femme : Guillot est un bon compagnon. - Guillot : à bien siffler [boire] ne faulx jamais
dans Recueil de farces, dans FR. MICHEL, Argot
4
XVIe s.
J'oy [j'entends] d'autre part le pivert jargonner, Siffler l'escouffle [milan] et le butor tonner
de Clément MAROT dans I, 223
Il menace, qu'en siblant, il fera venir les peuples infideles pour destruire Israel
Ses compagnons ne faillirent pas, dès qu'ils ouïrent siffler l'amorce [de la mine], de prendre leur course
Au bransle de ces gens tout ce qui demeuroit à la cour estoit sifflé
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans ib. II, 180
Ces refformez estoient ravis de joie d'ouir siffler les balles de Paris
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans ib. III, 181
Des oiseaux qui parlent, sublent et sifflent
de Ambroise PARÉ dans Animaux, 20
Nous ne sifflens pas noz paroles de levres comme les serpens
Et ceux dont plus j'estoy favorisée Sifflent sur moy d'une longue risée, Se vergongnans de m'avoir voulu bien
Sifflant en paume, je me rendrai à vous
de Randle COTGRAVE dans
Frappant et jouant des doigts sur le pommeau de son espée, sublant ou sifflant, lequel que l'on voudra, ou tous deux, une chanson du pays fort harmonieusement
de NOEL DU FAIL dans Propos rustiques, 181, dans JAUBERT, Gloss. du Berry.

ÉTYMOLOGIE

1
Berry, sibler, subler, chiffler ; wallon, hufler ; namur. chuffler ; bourguig. subliai ; châtillonnais, suiller ; provenç. siblar, ciblar, siular, eschiular ; catal. siular, xiular ; espagn. silbar ; portug. sibilar ; ital. sibilare, sibillare ; du lat. sifilare, pour les formes en f, et sibilare, pour les formes en b. De sibilare, les étymologistes rapprochent le grec, creux, et, siphon.

Synonymes de SIFFLER

Termes proches de SIFFLER