Définition de SACRÉ, ÉE

DÉFINITIONS - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : sa-kré, krée

DÉFINITIONS

1
Qui a reçu le sacre. Charles X sacré à Reims.
2
Qui est consacré à un emploi spirituel, en parlant des personnes ou des choses.
Recevez des mains de l'Église le dévot habit du grand saint Bernard, ou plutôt représentez-vous la main de Jésus invisiblement étendue ; c'est lui qui vous couvre de ce sacré voile, qui sera le rempart de votre pudeur
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans 3, Vêture, 2
Quelle ardeur de vengeance De ces hommes sacrés rompit l'intelligence ?
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Lutr. I
Si l'on dit qu'une personne, un édifice sont sacrés, cela signifie qu'ils sont consacrés, employés à des usages spirituels
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Dict. phil. Droit canonique.
Vases sacrés, vases servant au culte dans les diverses religions.
Balthazar fait apporter les vaisseaux sacrés enlevés du temple de Jérusalem, et mêle la profanation avec le luxe
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. II, 4
Ordres sacrés, la prêtrise, le diaconat et le sous-diaconat, par opposition aux ordres mineurs.
Les livres sacrés, l'Ancien et le Nouveau Testament.
Les lettres sacrées, l'étude et la connaissance de ces livres et de la religion.
L'histoire sacrée, l'histoire du peuple de Dieu, par opposition à l'histoire profane ou des gentils.
Le sacré collége, le collége des cardinaux.
La sacrée faculté, la faculté de théologie.
Le Sacré-Coeur, voy. COEUR, n° 1.
3
Il se dit, par antiphrase, de ce qui, étant sacré de sa nature, est détourné à une mauvaise fin.
[Les faux dévots] D'autant plus dangereux dans leur âpre colère Qu'ils prennent contre nous des armes qu'on révère, Et que leur passion, dont on leur sait bon gré, Veut nous assassiner avec un fer sacré
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Tart. I, 6
Les sacrés attentats qu'on ose préparer
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lois de Minos, I, 1
4
Qui concerne la religion et le culte des dieux, chez les polythéistes. Le boeuf sacré des Égyptiens.
Furieuse elle vole, et sur l'autel prochain Prend le sacré couteau, le plonge dans son sein
de Jean RACINE dans Iphig. V, sc. dern.
Feu sacré, feu qui chez les Romains et d'autres peuples anciens était constamment entretenu. Le feu sacré de Vesta.
Qu'un Perse ait conservé le feu sacré cent ans, Le pauvre homme est brûlé quand il tombe dedans
dans Vers de Sadid, dans VOLT. Dict. phil. Zoroastre
Sémantique : Fig. Le feu sacré, voy. FEU 1, n° 4.
Les livres sacrés des Indiens, les Védas ; les livres sacrés des parsis, le Zend-Avesta.
Guerre sacrée, se dit de trois guerres entreprises par les Grecs pour la défense du temple de Delphes.
Bataillon sacré, voy. BATAILLON, n° 3.
Cette dénomination s'est appliquée à des corps d'élite, chez plusieurs nations modernes, et surtout à ceux qui se formèrent dans des retraites et des déroutes.
L'empereur rassembla autour de lui tous les officiers de cette arme [cavalerie] encore montés ; il appela cette troupe d'environ cinq cents maîtres, son escadron sacré
de Philippe de SÉGUR dans Hist. de Nap. XI, 3
Le bataillon sacré, seul devant une armée, S'arrête pour mourir
de Casimir DELAVIGNE dans Messéniennes, Waterloo.
Année sacrée, année pendant laquelle on célébrait des jeux périodiques.
Nouvelle ou première année sacrée, s'est dit de celle de l'avénement de l'empereur régnant ; les suivantes s'appelaient, seconde année sacrée, etc.
Danse sacrée, danse faisant partie du culte.
Poulets sacrés, poulets dont on observait à Rome la manière de manger pour en tirer des augures.
Un autre fit plus, et, voyant que les poulets sacrés ne mangeaient point, il les jeta dans la mer, disant : Qu'ils boivent donc, puisqu'ils ne veulent pas manger
de Charles ROLLIN dans Hist. anc. Oeuv. t. XI, 2e part. p. 441, dans POUGENS.
Nos poulets sacrés et nos augures dont vous [Cicéron] vous moquez avec tant de grâce dans votre traité de la Divination
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. de Memmius, 2
Un homme qui avait fait à Rome un argument contre les poulets sacrés se regardait peut-être comme un philosophe
de VAUVENARGUES. dans Réfl. et max. 325
La voie Sacrée, nom d'une rue de l'ancienne Rome.
5
Langue sacrée, langue dans laquelle sont écrits les ouvrages qui traitent d'une religion. Le sanscrit est la langue sacrée chez les Indiens.
Je suis très étonné qu'aucun de nos Français n'ait eu la curiosité d'apprendre à Bénarès l'ancienne langue sacrée, comme ont fait M. Holwell et M. Dow
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. Bailly, 27 févr. 1777
6
Sacré a été dit de quelques maladies qu'on attribuait à une influence surnaturelle.
Vous devez savoir qu'il y avait beaucoup de maladies diaboliques, qu'on appelait sacrées chez presque toutes les nations, et que l'on croyait guérir avec des exorcismes
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Mél. hist. Un chrétien contre six Juifs, 37
Particulièrement, la maladie sacrée, l'épilepsie.
Feu sacré, sorte de maladie (voy. BOUQUET 2).
7
Consacré à.
Oh ! que j'aime la solitude ! Que ces lieux sacrés à la nuit, Éloignés du monde et du bruit, Plaisent à mon inquiétude !
de ST-AMAND dans Ode à la solitude.
8
Il se dit des choses qui méritent d'être vénérées inviolablement.
Consultons des grands dieux la majesté sacrée
de Pierre CORNEILLE dans Hor. III, 2
Enfin, dans une heureuse vieillesse, prêt à rendre avec sa grande âme le sacré dépôt de l'autorité si bien confié à ses soins
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans le Tellier.
La société conjugale était sacrée parmi eux [les Grecs]
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. II, 5
Déjà se formaient dans le ciel ces noeuds sacrés qui devaient unir éternellement son coeur à celui de l'incomparable Julie
de Esprit FLÉCHIER dans Duc de Mont.
Lors même qu'on rend à Dieu de solennelles actions de grâces, et qu'on pend aux voûtes sacrées de ses temples des drapeaux déchirés et sanglants qu'on a pris sur les ennemis
de Esprit FLÉCHIER dans Turenne.
Ô rives du Jourdain ! ô champs aimés des cieux ! Sacrés monts, fertiles vallées
de Jean RACINE dans Esth. I, 2
Non, vous n'espérez plus de nous revoir encor, Sacrés murs, que n'a pu conserver mon Hector !
de Jean RACINE dans Andr. I, 4
Fais-je de ma maison en vain fermer l'entrée ? Et ne savez-vous pas que la nuit est sacrée ?
de P. LEBRUN dans le Cid d'And. II, 8
Sacré à, digne d'être respecté par.
Les intérêts des Juifs déjà me sont sacrés
de Jean RACINE dans Esth. III, 5
Venez, les malheureux me sont toujours sacrés
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Oreste, II, 2
Ainsi, quand sur les bords du lac qui m'est sacré, Séduit par la douceur de son flot azuré, J'abandonne ma barque à l'onde qui dérive
de Alphonse de LAMARTINE dans Ép. à C. Delavigne.
Crois-tu donc que les rois, à moi, me sont sacrés ?
de Victor HUGO dans Hern. II, 3
Sacré signifie aussi à quoi on ne touche pas.
Il leur distribuait [aux pauvres] par la miséricorde ce qu'il avait acquis par la justice ; cette portion de son bien lui était sacrée
de Esprit FLÉCHIER dans Lamoignon.
Sémantique : Par plaisanterie.
Venez, prenez mes cantiques sacrés ; Sacrés ils sont, car personne n'y touche
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Pauvre diable.
C'est un homme pour lequel il n'y a rien de sacré, qui n'épargnerait pas ce qu'il y a de plus sacré dans le monde, au monde, il n'est retenu par aucune considération de religion ni de morale.
Près de leurs passions [des princes] rien ne me fut sacré
de Jean RACINE dans Ath. III, 3
La fière ambition dont il est dévoré Est inquiète, ardente et n'a rien de sacré
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Mér. I, 2
Il n'y a rien de sacré pour la sottise, la méchanceté et l'envie
de Denis DIDEROT dans Lett. à Mlle Voland, 25 nov. 1760
9
Il se dit des personnes que leur qualité rend inviolables. à Rome la personne des tribuns du peuple était sacrée.
Ceux qui l'avaient ouï parler [le prince de Condé] si souvent de ce grand roi [Louis XIV] dans ses entretiens familiers, pouvaient assurer que jamais ils n'avaient rien entendu de plus respectueux et de plus tendre pour sa personne sacrée
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Louis de Bourbon.
Toutefois épargnez votre tête sacrée
de Jean RACINE dans Mithr. III, 1
Faut-il que je me mette à vos sacrés genoux ?
de Jean RACINE dans Athal. V, 2
Sacrée Majesté, titre qu'on donnait à l'empereur d'Allemagne, et qu'on donne à l'empereur d'Autriche quand on lui parle.
Je vous entends, Sacrée Majesté, quand vous vous êtes levé ici de bon matin, vous y trouvez la journée bien longue
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans Dial. des morts mod. (Charles-Quint, un jeune moine).
Que l'empereur est le général-né, le défenseur, l'avoué de l'Église, principalement contre les infidèles ; et que de là lui vient le titre de Sacrée Majesté
de Bernard le Bouyer de FONTENELLE dans Leibnitz.
Un petit moine de Saint-Just disait à Charles-Quint : Sacrée Majesté, n'êtes-vous pas lasse d'avoir troublé le monde ? faut-il encore désoler un pauvre moine dans sa cellule ?
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. au roi de Pr. 21 avr. 1760
Le titre de Sacrée Majesté s'est donné jadis à d'autres souverains que l'ancien empereur d'Allemagne.
Dans le fameux traité de Munster, on nomme Sa Sacrée Majesté Impériale, Sa Sacrée Majesté Très Chrétienne, et Sa Sacrée Majesté Royale de Suède
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Ann. Emp. Ferdinand III, paix de Vestph.
Sémantique : Fig.
L'épître sur Sa Sacrée Majesté le Hasard a bien un grand fonds de vérité, et, si cette épître était rabotée, je la regarderais comme le meilleur de vos ouvrages
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. au roi de Pr. 30 mars 1759
10
Sacré est une épithète qui s'ajoute à des termes d'injure pour leur donner plus de force ; mais cela en fait des blasphèmes, et n'est tout au moins que d'un emploi bas et grossier.
Sémantique : Populairement. Sacré chien, de l'eau-de-vie très forte. Un petit verre de sacré chien.
11
Sémantique : Terme d'anatomie. Qui appartient à l'os sacrum. Nerfs sacrés.
Trous sacrés, trous dont huit antérieurs, situés sur la face pelvienne du sacrum, quatre de chaque côté de la ligne médiane, les uns au-dessus des autres, et huit postérieurs, placés à la face spinale du même os, et présentant la même disposition que les antérieurs avec lesquels ils correspondent.
12
Nature : S. m. Ce qui est sacré.
Il paraît ici depuis peu un poëme anglais intitulé le Paradis perdu et qui a été traduit en français par une main habile, où l'on a été généralement blessé d'un mélange du sacré et du profane qui s'y rencontre
de Charles ROLLIN dans Traité des Ét. II, 1

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
Ajoutez :
Vous boirez quelquefois le sacré chien tout pur pour noyer le chagrin
dans Let. du P. Duchène, 1re lettre, p. 2

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