Définition de PROSE

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : prô-z'

DÉFINITIONS

1
Discours non assujetti à une certaine mesure, à un certain nombre de pieds et de syllabes.
Il y en a qui tiennent que ce n'est point un vice qu'un vers dans la prose, encore qu'il fasse un sens complet et qu'il finisse en cadence, pourvu qu'il ne soit pas composé de mots spécieux et magnifiques, et qui sentent la poésie ; mais je ne suis pas de leur avis
de Claude Favre de VAUGELAS dans Rem. t. I, p. 163, dans POUGENS
Ronsard, qui était un grand poëte, disait fort bien dans la connaissance qu'il avait de la différence qu'il y avait entre la poésie et la prose, qu'elles étaient mortelles ennemies
de Claude Favre de VAUGELAS dans Nouv. Rem. p. 200, dans POUGENS
Il est certain que la prose, pour satisfaire l'oreille, doit avoir ses cadences et ses mesures, comme la poésie
de Claude Favre de VAUGELAS dans Rem. not. Th. Corn. t. I, p. 165, dans POUGENS
Écrit en prose qui veut, mais en vers qui peut
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. St Lambert, 7 mars 1769
On a tenté de nous donner des tragédies en prose ; mais je ne crois pas que cette entreprise puisse désormais réussir ; qui a le plus ne saurait se contenter du moins
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Brutus, Disc. trag.
Ce morceau [de Buffon], dérobé à la poésie, semble être de Massillon ou de Fénelon, qui se permirent si souvent d'être poëtes en prose
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Singul. natur. X
Je suis indigné, depuis quelques années, de la prose de Paris, et surtout de la prose des avocats, qui parlent presque tous comme maître Petit-Jean
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett Mme du Deffant, 30 mars 1775
Vous m'ordonnez, monseigneur, de vous présenter quelques règles pour discerner les mots de la langue française qui appartiennent à la prose, de ceux qui sont consacrés à la poésie
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. pr. roy. de Prusse, 20 déc. 1737
Despréaux écrivait ordinairement ses ouvrages en prose, avant que de les mettre en vers ; on assure que Racine en usait de même pour ses tragédies
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Éloges, Despréaux.
La prose avait-elle autrefois cette précision, cette rapidité, ce mouvement, cette couleur, cette âme enfin, qu'elle a reçue de nos modernes écrivains ?
de Jean-François MARMONTEL dans Essai sur le goût.
Ces bosquets de Saint-Pierre, île délicieuse, Qu'embellit de Rousseau la prose harmonieuse !
de Jacques DELILLE dans Pitié, IV
Hérodote suivit de près ces premiers inventeurs de la prose [Xanthus, Hellanicus, etc.], et mit plus d'art dans sa diction, moins incohérente, moins hachée
de Paul Louis COURIER dans Préf. d'une trad. d'Hérode
La prose naissante [dans la Grèce] s'empara de l'histoire, en exclut la poésie comme de bien d'autres sujets
de Paul Louis COURIER dans ib.
C'est que vraiment la poésie est l'enfance de l'esprit humain, et les vers l'enfance du style, n'en déplaise à Voltaire et autres contempteurs de ce qu'ils ont osé appeler vile prose
de Paul Louis COURIER dans ib.
Prose poétique, prose qui a les caractères de la poésie, sauf la mesure.
Le style de Platon prévalut, quoique ce style de prose poétique ne convienne point du tout à la philosophie
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Phil. Hist. établ. christ. 3
Sémantique : Fig. Faire de la prose sans le savoir, réussir par hasard et sans dessein (locution tirée de la phrase du Bourgeois gentilhomme de Molière, qui elle-même provient de l'aventure du comte de Soissons, ci-dessous rapportée).
Le maître : Tout ce qui n'est point prose est vers, et tout ce qui n'est point vers est prose. - M. Jourdain : Et comme l'on parle, qu'est-ce que c'est donc que cela ? - Le maître : De la prose. - M. Jourdain : Quoi ! quand je dis : Nicole, apportez-moi mes pantoufles, et me donnez mon bonnet de nuit, c'est de la prose ? - Le maître : Oui, monsieur. - M. Jourdain : Par ma foi, il y a plus de quarante ans que je dis de la prose, sans que j'en susse rien
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Bourg. gent. II, 6
Comment, ma fille ? j'ai donc fait un sermon sans y penser ? j'en suis aussi étonnée que M. le comte de Soissons quand on lui découvrit qu'il faisait de la prose
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 433
Sémantique : Fig. En vers et en prose, de toute façon.
Je suis assurée de votre santé.... dites-le-moi cependant encore ; écrivez-le-moi en vers et en prose
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 28 juill. 1677
Sémantique : Familièrement. De la prose de quelqu'un, un écrit, une lettre de lui.
Mais, monsieur, n'avez-vous jamais vu de ma prose ?
de Jean-François REGNARD dans Sat. VIII
Le maître est tout à vous, et voici de sa prose
de Pierre CORNEILLE dans le Ment. IV, 8
2
Sémantique : Terme d'Église. Hymne latine rimée que l'on chante à la messe immédiatement avant l'Évangile dans les grandes solennités, ainsi dite parce qu'on y observe seulement le nombre des syllabes, sans avoir égard à la quantité prosodique. La prose des morts.
La plus belle prose de l'Église, le Dies irae, qui devrait être l'objet de l'émulation de tous les grands musiciens
de Jean-François MARMONTEL dans Oeuv. t. IV, p. 197
Racine, en imitant ces proses, a pensé qu'elles étaient dignes de sa muse
de François René CHATEAUBRIAND dans Génie, IV, I, 3
Sémantique : Fig. et familièrement. Que diable !
tu réponds toujours la même prose. - Mais tu me dis aussi toujours la même chose
de Jean-François REGNARD dans le Distr. IV, 3

HISTORIQUE

1
XIIIe s.
La grans partisons [division] de tous parleors est en deus manieres, une qui est en prose, et une autre qui est en rime ; mais li enseignement de rhetorique sont commun andui [tous les deux], sauf ce que la voie de prose est large et pleniere, si comme est ore la commune parleure des gens ; mais li sentiers de rime est plus estroiz et plus fors
de Brunetto LATINI dans Trésor, p. 481
2
XIVe s.
Or vus vueil dire.... Les paroles.... Car retenues les ay bien, ce me semble ; Si les diray en prose ; car il semble Auculnes fois qu'on adjoute ou assemble Trop de langage à la matiere de quoy on fait ouvrage
de CRETON dans Hist. litt. de la Fr. t. XXIV, p. 447
Ung commandement de l'empereur Chailes le Chauve, par quoy il revestoit son fils du royaulme de France, et luy requeroit [au pape] qu'il conferma celle prose par son privilege
dans Chron. de St Denis, t. I, f° 196, dans LACURNE
3
XVe s.
Quoy ! tu fais le rimeur en prose : Et à qui vends-tu tes coquilles ?
dans Patelin
4
XVIe s.
Letanies, hymnes et proses, où ils magnifient les saincts jusques au bout
de Jean CALVIN dans Instit. 698
Et semble à ces versificateurs avoir beaucoup fait pour la republique, quand ils ont composé de la prose rimée
de Pierre de RONSARD dans 583
Comme disoit celuy-là [Sénèque], aussi poetiquement en sa prose [qu Horace en ses vers]....
de Michel de MONTAIGNE dans I, 188
La meilleure prose ancienne, et je la seme ceans indifferemment pour vers, reluit partout de la vigueur et hardiesse poetique
de Michel de MONTAIGNE dans IV, 137
De peu de chose peu de prose
de Randle COTGRAVE dans au mot peu

ÉTYMOLOGIE

1
Provenç. espagn. et ital. prosa ; du lat. prosa et aussi prorsa, de prorsus, direct, droit : le grec nommait aussi la prose , la droite, parce que la prose a moins de transpositions que les vers.

Synonymes de PROSE

Termes proches de PROSE

Phonétiquement proche de PROSE