Définition de POURRIR

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : pou-rir

DÉFINITIONS

1
S'altérer par le travail intestin qui attaque et détruit les corps organisés privés de vie, au contact de l'air et à une température qui ne soit pas trop basse.
L'ouvrier habile choisit un bois fort qui ne pourrisse point
de Isaac Louis Lemaistre de SACY dans Bible, Isaïe, XL, 20
D'autres arbres gisant au pied des premiers, pour pourrir sur des monceaux déjà pourris
de Georges Louis Leclerc, comte de BUFFON dans Morc. choisis, p. 8
Les vaisseaux qui pourrissaient dans l'inaction seront réparés ; il en sera construit d'autres
de Guillaume Thomas, abbé RAYNAL dans Hist. phil. XVI, 7
2
Sémantique : Par extension, demeurer longtemps en quelque lieu où l'on pourrit, pour ainsi dire.
Sans la considération que M. Hutin a pour moi, il vous poursuivrait, et il vous ferait pourrir dans une prison
de Pierre de MARIVAUX dans Pays. parv. part. 6
On commence par le décréter de prise de corps ; on l'eût arraché de son lit pour le traîner dans les mêmes prisons où pourrissent des scélérats
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Lett. à l'archev. de Paris
Sémantique : Fig. Il ne pourrira pas dans cet emploi, il n'y restera pas longtemps, il montera plus haut.
Sémantique : Fig. Pourrir dans l'ordure, dans la misère, croupir dans la saleté, dans une misère profonde et sale.
Pourrir dans le vice, dans son ordure, persister dans ses mauvaises habitudes, dans une vie immorale.
Il se dit aussi des choses qui restent enfouies et oubliées.
Un éloge ennuyeux, un froid panégyrique Peut pourrir à son aise au fond d'une boutique
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. VII
Un livre vous déplaît : qui vous force à le lire ?... Un auteur ne peut-il pourrir en sûreté ?
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans ib. IX
Ce Priscus n'a jamais été imprimé ; il pourrit dans la bibliothèque du Vatican
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Dict. phil. Inceste.
3
Arriver à maturation, en parlant d'abcès, de maladies. Ce remède fait pourrir le rhume Votre doigt pourrira.
4
Nature : V. a. Faire pourrir. La pluie pourrit la charpenterie.
L'eau qui a, pour ainsi dire, pourri ces poudres vitreuses
de Georges Louis Leclerc, comte de BUFFON dans Min. t. VIII, p. 181
Sémantique : Fig. Donner de mauvaises qualités.
Et l'estomac gâté pourrit tout ce qu'il mange
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Sat. v.
Amener à maturation. Ce remède pourrit le rhume.
5
Se pourrir, Nature : v. réfl. Devenir pourri.
Quand la digestion est trop longue, il faut manger ; cela consomme un reste qui ne fait que se pourrir et fumer, si vous ne le réchauffez par des aliments
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 29 déc. 1679
Un corps mort, par la seule agitation de l'air auquel il est exposé, se corrompt et se pourrit
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Conn. II, 9

HISTORIQUE

1
XIe s.
Ô kiers amis [ô cher ami], de ta juvente bele ço peiset mei que si purirat terre [j'ai chagrin que la terre pourrira ainsi ta belle jeunesse]
dans St Alexis, XCVI
2
XIIe s.
.... Deus en prist vengement [du roi Guillaume le Roux] ; Al berser [tirer de l'arc] fu ocis, et fina malement ; Li corz en est purriz, e l'aneme [âme] est en turment
dans Th. le mart. 92
Li awe mismes [l'eau même] del fluve purist, quant ele encomencet esteir
de ST BERN. dans 563
Or porrira cele tenre maissele [joue] Et cil vair oel dont clere est la prunele
dans Raoul de C. 144
3
XIIIe s.
Et en poi d'eure en fu tous pouris li costés et li bras
dans Chr. de Rains, p. 80
Li tens, qui tote chose mue, Qui tout fait croistre et tout norist, Et qui tout use et tout porrist
dans la Rose, 382
Car il ne quident pas morir, Ne dedenz la terre porrir ; Mès si feront
de RUTEBEUF dans II, 4
Et il meismes son cors [de sa personne] portoit les cors pourris et touz puans pour mettre en terre es fosses
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 278
4
XVe s.
Et chascun supplioit humblement son seigneur et maistre, que pour Dieu ne les voulsist oublier, ne laisser là pourrir en prison
dans Bouciq. II, 29
Autrement la fiente et le pissat pourriront ledit mur
dans Ordonn. 1485
5
XVIe s.
Y a une fondriere d'argille et une terre si tendre et si pourrie, qu'elle n'a pas force de soustenir, quand on marche dessus
de Jacques AMYOT dans Sertor. 33
Disant que la Macedoine ne tenoit qu'à un petit filet, encore tout pourry, entendant le vieil Antipater par ce filet
de Jacques AMYOT dans Démosth. 46
Semblablement aussi fuyons nous une personne malade ou pourrie d'ulceres, comme chose hydeuse à veoir
de Jacques AMYOT dans Comm. lire les poëtes, 10
Arracher une dent pourrie
de Ambroise PARÉ dans Introd. 2
Lorsqu'une pomme commence à se pourrir, si l'on n'oste la pourriture, tost après le reste se pourrira
de Ambroise PARÉ dans V, 19
Les champs de Montcontour n'eussent pourry nos os
de Pierre de RONSARD dans 250
Oh ! que la playe est forte Qui mesm' empuantit le pourri qui la porte !
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans Tragiques, édit. LALANNE, p. 81

ÉTYMOLOGIE

1
Bourg. pôrry ; provenç. poirir ; espagn. pudrir ; du lat. putrere (1er e long), dénominatif de puter, putris. Putrescere aurait donné pouraître ; mais pourrir, comme plusieurs verbes en ir, se conjugue d'après la conjugaison des verbes inchoatifs en escere.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
Pourrir sa pourriture, achever de se dissoudre dans la corruption ; locution hardie, mais qui est analogue à dormir son sommeil, vivre sa vie.
Dans ce cas-là, brûlé par Léon X, il [Luther] eût eu le sort d'Arnold de Brescia, de Savonarole, de Bruno et de tant d'autres ; la réforme, étouffée encore, eût laissé le vieux système pourrir sa pourriture paisiblement ; point de protestants dès lors ni de jésuites
de MICHELET dans Réforme, p. 117

Synonymes de POURRIR

Termes proches de POURRIR