Définition de OUI

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : oui ; ce mot a une demi-aspiration : ce oui ; des oui, dites : dê oui ; un oui, dites : un (sans lia

DÉFINITIONS

1
Il affirme et est opposé à non.
J'y vois des bergères qui ne savent que oui et non
de Jean-Louis GUEZ de BALZAC dans liv. IV, lett. 15
Ils rapportent les raisons de ceux qui disent que oui
de Blaise PASCAL dans Prov. XI
Et si l'on trouve que oui, vous aurez la gloire de l'avoir mieux entendu
de Blaise PASCAL dans ib. XVII
M. de Montausier ne voulut apprendre d'autre langage que celui de l'Évangile : oui, oui, non, non
de Esprit FLÉCHIER dans duc de Mont.
Un honnête homme qui dit oui et non mérite d'être cru
de Jean de LA BRUYÈRE dans V
Pour moi, j'aime les gens dont l'âme se peut lire, Qui disent bonnement oui pour oui, non pour non
de Jean-Baptiste Louis GRESSET dans Méchant, I, 5
Il ne dit ni oui, ni non, il ne veut pas s'expliquer sur la chose dont il s'agit.
Je ne dis oui ni non, de crainte de mentir
de TH. CORN dans D. Bertr. de Cigarral, III, 1
On dit dans le même sens : il ne m'a répondu ni oui ni non.
Dire oui, consentir, surtout en parlant du mariage.
Enfin, le bon de tout, c'est qu'à d'autres qu'à lui On ne peut vous lier que vous ne disiez oui
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Tart. II, 4
Que maudits soient l'heure et le jour où je m'avisai d'aller dire oui !
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Méd. malgré lui, I, 1
2
Oui est souvent la réponse à une interrogation, et alors il équivaut à une phrase entière : Avez-vous fait cela. - Oui, c'est-à-dire j'ai fait cela.
Ariste : Et son coeur est épris des grâces d'Henriette. - Chrysale : Quoi ? de ma fille ? - Ariste : Oui ; Clitandre en est charmé
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Femm. sav. II, 3
Henriette : Moi, ma mère ? - Philaminte : Oui, vous ; faites la sotte un peu
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans ib. III, 6
Un bonheur si étrange sera peut-être bientôt évanoui ; le perroquet répondit oui
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Zadig, 6
3
Quelquefois il est simplement affirmatif, sans opposition à non, et en ce cas il se met au commencement du membre de phrase.
Oui, c'est Agamemnon, c'est ton roi qui t'éveille
de Jean RACINE dans Iphig. I, 1
Oui, monsieur, j'aime mieux le Tartufe et le Misanthrope que les comédies nouvelles ; oui, j'ose préférer Racine à mes drames, et j'aime mieux Roland et Armide que certains opéras
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. la Touraille, 5 juill. 1774
Avant que, dégagé des ombres de l'enfance, Je pusse voir l'abîme où j'étais descendu, Père, mère, fortune, oui, j'avais tout perdu
de Nicolas GILBERT dans le Poëte malheureux.
Dans les phrases familières, il se met quelquefois à la fin.
Chrysale : Notre soeur est folle, oui. - Ariste : Cela croît tous les jours
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Femm. sav. II, 4
Redoublé, il augmente la force de l'affirmation. Oui, oui, je le ferai.
Oui, oui, vous me suivrez, n'en doutez nullement
de Jean RACINE dans Andr. II, 3
4
Oui marquant la surprise. Il a dit telle chose, oui ? c'est-à-dire est-ce vrai qu'il ait dit telle chose ?
5
Oui-da, certainement.
Direz-vous par exemple qu'un homme ait, la nuit et sans aucune lumière, le pouvoir prochain de voir ? - Oui-da, il l'aurait selon nous, s'il n'est pas aveugle
de Blaise PASCAL dans Prov. I
Carin : Byrrhie, instruit d'un mal que j'ai peine à vous taire, Vous peut de mes malheurs découvrir le mystère. -Byrrhie : Oui-da, je le ferai très volontiers
de BARON dans Andrienne, II, 2
Vraiment.
Néron : N'avais-je pas ma maison Dorée qui devait être plus grande que les plus grandes villes ? oui-da, je m'entendais en magnificence
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans t. XIX, p. 313
Oui-da, l'état de veuve est une douce chose
de Jean-François REGNARD dans le Bal, 4
Oui-da est quelquefois ironique. Le croyez-vous ?- Oui-da, je n'en crois rien.
6
Oui, joint à des adverbes. Oui vraiment. Vraiment oui. Eh mais oui.
Oui bien, se dit et surtout se disait par opposition à une affirmation pour affirmer autre chose.
Prononcez, messieurs, un arrêt digne de vous, qui fasse voir à toute l'Europe que le Cid n'est point le chef-d'oeuvre du plus grand homme de France, mais oui bien la moins judicieuse pièce de M. Corneille
de SCUDÉRY dans Lett. à l'Académie
Philis : Si vous nommez ma flamme un bien commun à tous, Je n'aime, pour le moins, personne plus que vous ; Cela vous doit suffire. - Cléandre : Oui bien à des volages Qui peuvent en un jour adorer cent visages
de Pierre CORNEILLE dans la Place Roy. II, 8
Je n'ai point encore vu M. Fagon depuis que j'ai reçu de vos nouvelles ; oui bien M. Daquin, qui trouve fort étrange que vous ne vous soyez pas mis entre les mains de M. des Trapieres
de Jean RACINE dans Lett. à Boileau, 4 août 1687
7
Nature : S. m. Un oui, une affirmation par oui.
À des offres d'hymen répondre par des larmes, Et tarder tant à dire un oui si plein de charmes
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Sgan. 2
Et, loin qu'un pareil oui me donnât de la peine, Croyez que j'en dirais bien vite une douzaine
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans ib. 2
Ah ! ce oui se peut-il supporter ?
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Fem. sav. I
Eh ! nous ne différons que du oui et du non, ce n'est qu'une bagatelle
de Pierre de MARIVAUX dans Double inconst. I, 7
Un prêtre, un oui, trois mots latins à jamais fixent vos destins
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Épît. 37
Savoir le oui ou le non de quelque chose, savoir si une chose se fera ou ne se fera pas.
La pensée du moment où je saurai le oui ou le non d'avoir ou de n'avoir pas de vos nouvelles....
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 14 juill. 1680
Dire le grand oui, se marier. C'est demain qu'elle dit le grand oui.
Sémantique : Fig. Pour un oui, pour un non, pour la cause la plus légère.
Pour un oui, pour un non, on va se jeter à l'eau
de TH. LECLERCQ dans Proverb. t. V, p. 168, dans POUGENS
8
Langue d'oui, voy. OÏL.

REMARQUE

1
Dans la citation de Molière au n° 2, l'e muet du mot avant oui n'est pas élidé, et il l'est dans la citation de Gilbert au n° 3.

HISTORIQUE

1
XIe s.
Et cil respont : oïl, sire, assez bien
dans Ch. de Rol. L
2
XIIe s.
Oïl, par Dieu, ne puet estre autrement
dans Couci, XXII
3
XIIIe s.
Sire, fait-ele, oil, mon cuer [je] lui ai donné
dans Berte, XLV
Ert-il o [avec] vos ?-ouïl sanz faille
dans Ren. 8367
Il me demanda, se je voulois estre honorez en ce siecle et avoir paradis à la mort, et je li diz : oyl
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 194
4
XIVe s.
Auil, dient ly aultre, n'en serez escondiz
dans Hugues Capet, v. 2142
Et dist ly connestablez : auwy, certainement
dans ib. v. 5775
5
XVe s.
Par ma foi, respondit le duc de Lancastre, ouil
de Jean FROISSART dans II, III, 31
6
XVIe s.
Et tant qu'ouy et nenny se dira, Par l'univers le monde me lira
de Clément MAROT dans II, 221
Je ne suis pas marry que.... mais oui bien de quoy nous soyons si....
de Michel de MONTAIGNE dans I, 240
Quand j'imagine l'homme tout nud, ouy [même] en ce sexe qui semble avoir plus de part à la beauté...
de Michel de MONTAIGNE dans II, 203
Non que la difference y soit comme de la nuict à une clarté vifve ; ouy, comme de la nuict à l'umbre
de Michel de MONTAIGNE dans II, 368
Il faut conclure que qui ayme le jeu, ne fera jamais grande fortune, ouy bien qu'il se verra avec le temps reduit à une miserable pauvreté
de Étienne PASQUIER dans Lettres, t. III, p. 68
Son advis ne dit rien qu'un riste oui qui tremble
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans Tragiques, édit. LALANNE, p. 142

ÉTYMOLOGIE

1
La forme primitive est oïl, toujours dissyllabe, et formée du latin hoc illud, oui cela (hoc ayant pris le sens de oui : Ne dit ne o ne non, R. de Cambrai 264) ; oïl est donc fait comme nennil, qui représente non illud, non cela. Picard, awi ; Berry, voui ; wallon, awoi, dans lequel Grandgagnage regarde l'a comme prosthétique ; bourguig. vouei ; différents dialectes cités par Grandgagnage ai, âï, oï. On trouve dans les anciens textes, quoique rarement, des formes singulières de ce mot : oal, ouail, ol, odil.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
L'usage veut qu'à une interrogation affirmative on réponde par oui, et à une interrogation négative, par non. Avez-vous fait cela ? oui. N'avez-vous pas fait cela ? non. La raison en est que, dans les interrogations négatives, la réponse par oui serait amphibologique, et qu'on ne saurait si oui détruit la négation ou la confirme.
2
Malherbe élidait l'e de le devant oui : En matière de choses futures, l'oui et le non trouvent des amis, qui parient les uns d'un côté, les autres d'un autre, Lexique, éd. L. Lalanne.

Synonymes de OUI