Définition de ON

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : on ; l'n se lie : on aime, dites : on n'aime ; d'autres ne conservent pas le son nasal de la voyelle

DÉFINITIONS

1
Il indique d'une manière générale ou vague les gens, les personnes ; il n'est employé jamais que comme sujet du verbe, qui se met toujours au singulier.
On est toujours trop prêt quand on a du courage
On garde sans remords ce qu'on acquiert sans crimes
Tout le monde s'intéresse dans cette affaire [le procès de Foucquet] : on ne parle d'autre chose ; on raisonne, on tire des conséquences, on compte sur ses doigts, on s'attendrit, on espère, on craint, on peste, on souhaite, on hait, on admire, on est accablé
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans Lett. à Pompone, 17 décemb. 1664
Par le travail, on charmait l'ennui, on ménageait le temps, on guérissait la langueur de la paresse
On aime les gens, on en est aimé, on en est sûr, on les néglige, on ne se contraint point avec eux
On ne surmonte le vice qu'en le fuyant
L'on n'est rien devant Dieu quand on n'est pas ce que l'on doit être
On est plus criminel quelquefois qu'on ne pense
On fut consterné dans Stockholm [à la suite de victoires des Russes], et l'on ne s'y croyait pas en sûreté
On a vu des souris se loger sur leur dos [des cochons], et leur manger le lard et la peau sans qu'ils parussent le sentir
On entre dans le monde, on en est enivré, Au plus frivole accueil on se croit adoré
On riait un moment des épigrammes, et on retournait pleurer au Préjugé à la mode et à Mélanide
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Éloges, la Chaussée.
On relit tout Racine, on choisit dans Voltaire
2
On remplaçant un sujet déterminé.
Vous êtes malade, ma chère enfant : vous dites quelquefois que votre estomac vous parle ; vous voyez que votre tête vous parle aussi : on ne peut pas vous dire plus nettement que vous la cassez, que vous la mettez en pièces
On [Mme de la Vallière dans la grille d'en haut et se faisant carmélite] vous dira de là haut qu'on peut quelque chose de plus difficile, puisqu'on peut embrasser tout ce qui choque
Quand on n'a jamais eu un mouvement de coquetterie, qu'on n'a dans ce genre aucune espèce d'expérience, et qu'on n'a que dix-huit ans, on s'engage avec beaucoup plus de facilité qu'une coquette de trente ans
de Stéphanie Félicité Ducrest de St-Albin, comtesse de GENLIS dans Mlle de la Fayette, p. 148, dans POUGENS
On n'a pas plus d'esprit, de grâce....
de Jean-François COLLIN D'HARLEVILLE dans Moeurs du jour, I, 2
3
On, désignant en général les hommes, les gens, peut, selon la signification du discours, restreindre son sens à telle ou telle personne désignée par je, tu, il, nous, vous, ils.
On se dit pour je. Soyez tranquille, on songera à vos intérêts. Il y a longtemps qu'on ne vous a vu.
Allez, vous êtes fou dans vos transports jaloux, Et ne méritez pas l'amour qu'on a pour vous
On ne s'attache à nulle société, on ne prend aucun plaisir, on a toujours le coeur serré
On a certains attraits, un certain enjouement, Que personne ne peut me disputer, je pense
Encore si on pouvait bien digérer ! mais avoir toujours mal à l'estomac, craindre les rois et les libraires ! on n'y résiste pas
Le je est presque aussi scrupuleusement banni de la scène française que des écrits de Port-Royal, et les passions humaines, aussi modestes que l'humilité chrétienne, n'y parlent jamais que par on
On se dit pour tu.
Qu'on l'embrasse tout à l'heure devant moi ; qu'on lui témoigne son repentir et qu'on la prie de vouloir te pardonner
On se dit pour il ou elle.
On l'écouta, on se laissa lorgner [en parlant d'une femme]
On était ! on parlait ! on m'a vu !.... quel langage ! Mon neveu, ce garçon méconnaît-il l'usage De nommer les gens par leur nom ?
de IMBERT dans Jaloux sans amour, III, 6
On se dit pour nous, et alterne avec nous.
Je trouve qu'on ne souhaite l'estime que de ceux que nous aimons et que nous estimons
Qu'on hait un ennemi quand il est près de nous !
On sait sur les maris ce que l'on a d'empire
On se dit pour vous.
Quoi ! Madame !.... Le soin de son repos [d'Agamemnon livrant Iphigénie à la mort] est le seul qui vous presse ! On me ferme la bouche, on l'excuse, on le plaint [Achille à Iphigénie] !
Et vous, à m'obéir, prince, qu'on se prépare
Vous, Narcisse, approchez ; Et vous, qu'on se retire
On se dit pour ils ou elles, ou pour une compagnie, une masse de personnes dont on fait partie.
En vain de tous côtés on l'a voulu tourner ; Hors de son sentiment on n'a pu l'entraîner
On se lève à huit heures ; très souvent je vais, jusqu'à neuf heures que la messe sonne, prendre la fraîcheur de ces bois ; après la messe on s'habille, on se dit bonjour, on retourne cueillir des fleurs d'orange, on dîne, jusqu'à cinq heures on travaille ou on lit
Mais, s'il vous plaît, Ne ferions-nous pas bien d'aller voir où l'on est ?
4
On peut désigner très clairement une femme ; et alors, emportés par la signification, nous accordons l'adjectif avec le sens et non avec la forme du mot, et le mettons au féminin ; c'est une syllepse. On n'est pas plus belle que cette femme-là.
C'est un admirable lieu que Paris, il s'y passe cent choses tous les jours qu'on ignore dans les provinces, quelque spirituelle qu'on puisse être
À quoi qu'en reprenant on soit assujettie, Je ne m'attendais pas à cette repartie
On a beau se sentir de la résolution, on est femme, et on ne répond point de soi pour l'avenir
de HOUDAR DE LA MOTTE dans Minutolo, sc. 3
On vous épousera, toute fière qu'on est
S'attrister est bien fou.... On est plus jolie à présent, Et d'un minois plus séduisant On a les piquantes finesses
de Jean-François MARMONTEL dans Mél. de litt. Rép. à Voltaire.
On espérait le lendemain qu'il viendrait de bonne heure et avant la foule : on l'attendit, on fut inquiète ; il ne vint point, on eut de l'humeur ; il écrivit, on lut son billet et l'humeur cessa
Et que trouvez-vous donc de si extravagant à vouloir régner avec vous ? est-on faite de manière à déparer un trône ?
5
On, par une syllepse semblable à la précédente, peut prendre l'adjectif pluriel masculin ou féminin. Est-on allé là ? on y est allé deux. Ici on est égaux, en parlant d'un cimetière.
On n'a tous deux qu'un coeur qui sent mêmes traverses
Que tous deux on se taise
De tous vos façonniers on n'est point les esclaves
Quand je vois qu'on ne me veut point, il me prend une envie pareille de ne les avoir point
Hier on [le roi et Mme de Montespan] alla ensemble à Versailles, accompagnés de quelques dames ; on fut bien aise de le visiter avant que la cour y vienne
Le commencement et le déclin de l'amour se font sentir par l'embarras où l'on est de se trouver seule
de Jean de LA BRUYÈRE dans IV
Personne n'est surpris de me voir passer l'hiver à la campagne ; mille gens du monde en ont fait autant ; on est toujours séparés, mais on se rapproche par de longues et fréquentes visites
Mais par l'effet d'un rare aveuglement Qui fait bien voir que, quoi qu'on soit princesses, On peut parfois causer des maladresses....
de DUMOURIEZ dans Richardet, II, 11
On est réconciliées [Mme de Sévigné et sa fille], on dit les plus belles choses sur l'amitié, sur l'absence
de ABBÉ DE VAUXCELLES dans Réflexions sur les lettres de Mme de Sévigné, t. XII, p. LXXV, édit. GROUVELLE, 1813
6
On admet devant lui l'article l', particulièrement dans les cas où l'euphonie l'exige.
Pour paraître à mes yeux son mérite est trop grand, On n'aime pas à voir ceux à qui l'on doit tant
Il faut mettre que l'on et non pas qu'on devant des mots qui commencent par con ; je ne dirais pas qu'on conduise, mais que l'on conduise
C'est l'oreille seule qu'on doit prendre pour juge sur le choix d'on et de l'on
dans Acad. Observ. sur Vaugel. p. 15, dans POUGENS
Mais puisque l'on s'obstine à m'y vouloir réduire
C'est d'un roi que l'on tient cette maxime auguste, Que jamais on n'est grand qu'autant que l'on est juste
Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement
L'on hait avec excès lorsque l'on hait un frère
L'on marche sur les mauvais plaisants ; et il pleut par tous pays de cette sorte d'insectes
Pour éviter un hiatus ou pour rompre la mesure du vers dans la prose, il est très permis d'écrire l'on, et c'est le seul de nos pronoms substantifs qui, par lui-même et sans que cela change rien à sa nature, souffre quelquefois l'article
de D'OLIVET dans Ess. gramm. III, 1
7
Quand on suit le verbe dont il est le sujet, il s'y joint par un trait d'union.
Pensait-on que je céderais ? Mon père y tient l'urne fatale [aux enfers] ; Le sort, dit-on, l'a mise en ses sévères mains
Si le verbe se termine par un e muet ou par un a, on le joint à on par un trait d'union et par un t euphonique. Pense-t-on que je céderai ? Prie-t-on ? Alla-t-on à Paris ? Ira-t-on à Lyon ?
8
On dit, sorte de locution jouant le rôle de substantif, et signifiant : ce qui se dit. Un on dit. Les on dit. Croire les on dit, croire des rapports sans preuve, ajouter foi à des bruits vagues.
9
Le qu'en dira-t-on, sorte de substantif composé. Se moquer du qu'en dira-t-on, se moquer de ce que les autres peuvent dire.
Anselme : Et partout sa vertu lui donne tant de lustre, Que sur ce qu'on en dit.... - Le marquis : Monsieur on est un sot
de Thomas CORNEILLE dans Comtesse d'Orgueil, II, 1

REMARQUE

1
1. Il faut éviter dans une phrase que on se rapporte à des personnes différentes.
Ce défaut se trouve dans les exemples suivants : On amorce le monde avec de tels portraits ; Pour les faire surprendre, on les apporte exprès ; On s'en fâche, on fait bruit, on nous les redemande ; Mais on tremble toujours de crainte qu'on les rende
Au moins en pareil cas est-ce un bonheur bien doux, Quand on sait qu'on n'a point d'avantage sur vous
Si ces personnes étaient en danger d'être assassinées, s'offenseraient-elles de ce qu'on les avertirait de l'embûche qu'on leur dresse ?
Puisqu'on [Orgon] ne veut point croire à tout ce qu'on [Elmire] peut dire, Et qu'on [Orgon] veut des témoins qui soient plus convaincants ; Il faut bien s'y résoudre et contenter les gens
2
2. On se met devant et après le verbe ; mais l'on ne se met jamais que devant.

HISTORIQUE

1
IXe s.
Si cum om per dreit son fradra [frère] salvar dist [doit]
dans Serment
2
XIe s.
Ce sait hom bien que je sui tis parastres [ton beau-père]
dans Ch. de Rol. X
3
XIIe s.
Ço est la lei à hume, ke hum te serve en simplicited e pureted
dans Rois, p. 145
Iluec dit on que Lucifer desçant
dans Bat. d'Aleschans, v. 5980
Quant prez erent [étaient] de cel endreit Come hom piere jeter porreit, Rou, v, 6702. Ne dira l'on en France la louée....
dans Ronc. p. 23
Mais à dame de valor Doit on penser nuit et jor
dans Couci, I
Mais se vos ieuz où l'on se puet mirer....
dans ib. II
On ne puet [peut] pas servir à tant seigneur
dans ib. XXIV
4
XIIIe s.
L'en doit bien reculer pour le plus loin saillir
dans Berte, XII
Si en fache on [qu'on en fasse] un mangier faire
dans Lai d'Ignaurès
Une chançon tote de Rome, Onques si bele n'oït home
dans Ren. t. III, p. 47
5
XVe s.
Tost serons au lieu que vouldroye, Que l'en appelle Nonchaloir
de Charles D'ORLÉANS dans Départie d'Amour en ball.
À commencer la guerre et à l'entreprendre ne se fault point tant haster, et a l'on assez de temps
de Philippe de COMMINES dans V, 18
Tant chauffe on le fer qu'il rougit
Tant aime on Dieu, qu'on craint l'eglise
6
XVIe s.
Il est des peuples où on tourne le dos à celuy qu'on salue, et ne regarde l'on jamais celuy qu'on veult honorer
de Michel de MONTAIGNE dans I, 110
Il en est où l'on pleure la mort des enfants, et festoye l'on celle des vieillards
de Michel de MONTAIGNE dans I, 112
On l'esteindroit [une antipathie], qui s'y prendroit de bonne heure
de Michel de MONTAIGNE dans I, 184
J'aime mieulx, dit-il, que l'on demande pourquoy l'on n'a point dressé de statue à Caton, que pourquoy on luy en a dressé
de Jacques AMYOT dans Caton, 38
Quand on est bien, qu'a l'on besoing d'amis ?
Qu'on chante les nouveaux hymnes, Mais qu'on vante les vins vieux
de Pierre de RONSARD dans 394
L'en, l'on ou on peult estre bien joyeux
de PALSGR. dans fol. 102, verso.

ÉTYMOLOGIE

1
Picard, un, ein, o, ol, os ; Berry, ou ; provenç. et anc. catal. hom ; anc. espagn. omne ; anc. portug. ome ; anc. ital. huom ; du lat. homo, homme. Hom, om, on, est le nominatif du mot dont le régime est home. On comprend comment ce mot homme a pu devenir le substantif abstrait on. Dans l'ancien français on a dit souvent en pour on, par une tendance à changer la voyelle on en en, comme o latin en a (exemple dame de domina).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
3. Selon l'usage de la langue de Malherbe, on et l'on pouvaient avoir dans la phrase une place qu'on ne leur donnerait pas aujourd'hui. Rochefontaine s'est sauvé, et n'a-t-on trouvé sur Montchrestien autre chose qu'un billet, Lexique, éd. L. Lalanne. Le marché d'enclore les faubourgs dans la ville est fait, et y commencera l'on à ce printemps, ib. On l'a ouvert aujourd'hui [le comte de Sault], et a l'on trouvé qu'il avait les boyaux pourris, ib.

Synonymes de ON