Définition de MARCHANDER

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : mar-chan-dé

DÉFINITIONS

1
Demander et discuter le prix d'une chose. Il a longtemps marchandé la maison qu'il vient d'acquérir.
Nature : Absolument. Il marchanda et obtint une diminution de prix.
Sémantique : Fig.
Si vous me vendez vos dons, je marchanderai sur le prix
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Ém. IV
2
Marchander ou faire à la tâche, prendre de l'entrepreneur d'une bâtisse une partie d'ouvrage que l'on s'engage à exécuter pour un prix convenu.
Être marchandé, se dit d'ouvriers qui travaillent par marchandage.
Les ouvriers [en ardoise] chargés du travail de la pierre sont toujours marchandés
de BLAVIER dans Presse scientif. 1864, t. I, p. 119
3
Sémantique : Fig. Faire avec des choses qui ne se vendent pas ce que fait l'acheteur en marchandant les choses qui se vendent.
Pour gagner la couronne Par qui sa passion marchande ta personne
de DU RYER dans Scév. II, 3
Que ce don à sa mère était le prix fatal Dont leur [des Romains] Flaminius marchandait Annibal
de Pierre CORNEILLE dans Nicom. I, 1
Quand vous seriez impératrice, Je vous dis que ce pèlerin A de quoi marchander non pas une mortelle, Mais la déesse la plus belle
de Jean de LA FONTAINE dans Petit chien.
Tu penses me séduire, Me vendre ici ma honte et marchander la paix
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Fanat. I, 4
Paul Jove dit qu'Alexandre VI, par un traité avec le sultan, marchanda la mort de Zizim
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Moeurs, 107
Le duc de Savoie marchande l'appui de l'empereur
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Louis XIV, 18
Les délateurs, vendant leurs voix et leurs écrits, Viennent dans son palais marchander les proscrits
de Marie-Joseph CHÉNIER dans Tibère, I, 1
Tout s'achète : au forum on trafique de voix, On marchande l'honneur de triompher des rois
de ARNAULT dans Marius à Minturnes, III, 6
4
Marchander quelqu'un, lui faire des difficultés.
De sorte qu'étant plus riche [M. de Grignan] qu'il n'a jamais été, et se trouvant d'ailleurs et par sa naissance et par ses établissements et par ses bonnes qualités, tel que nous le pouvons souhaiter [pour Mlle de Sévigné], nous ne le marchandons point, comme on a accoutumé de faire
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans à Bussy, 4 déc. 1668
Sémantique : Familièrement. Ne pas marchander quelqu'un, ne pas l'épargner. Si je le rencontre, je ne le marchanderai pas.
Chèvres et boeufs nous aperçûmes Qui paissaient sans être gardés ; Ils ne furent point marchandés
de Paul SCARRON dans Virg. III
Il n'est pas de ces médecins qui marchandent les maladies
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Pourc. I, 7
Sans la marchander davantage [la fièvre], Noyez-la de vos propres mains
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Femm. sav. III, 2
Et vive la jalousie ! elle ne vous marchande pas
de Pierre Augustin Caron de BEAUMARCHAIS dans Mariage de Figaro, III, 18
Ne pas marchander une chose, ne pas hésiter à la donner, en être prodigue.
Le maréchal de Grammont conte en son langage que le comte de Guiche n'était pas un misérable, sans naissance, sans dignité, et que jamais il n'a marchandé le monseigneur à aucun maréchal de France
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans Lett. 19 août 1675
Frappez, ne marchandez point les coups
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Ém. II
Ne pas marchander sa vie, ne pas hésiter à l'exposer.
Sémantique : Fig. Menacer à loisir et en faisant languir.
J'affronterais plus aisément la mort dans la chaleur du combat.... que de voir de grosses vagues me marchander, et me mettre à loisir à deux doigts de ma perte [comme avait été mise Mme de Grignan]
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 2 juin 1672
5
Nature : V. n. Marchander à, témoigner une hésitation semblable à celle de quelqu'un qui débat le prix d'une chose, hésiter.
Là-dessus lui [à Attalus, roi de Pergame] étant réussi un combat contre les Galates en un temps où leur nouvelle venue en Asie les rendait extrêmement redoutables, il ne marchande plus à prendre ouvertement le titre de roi
de François de MALHERBE dans XXXIIIe livre de T. Live, ch. 21
Que veulent dire ces gestes-là ? - Nous marchandons, mon frère et moi, à qui parlera le premier ; et nous avons tous deux quelque chose à vous dire
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans l'Avare, I, 5
Ils ne marchandent point à dire que Dieu dispose des créatures
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 440
J'ai appris que feu Saint-Luc mettait monseigneur à tous les maréchaux de France.... cela donne la loi aux autres, et ce n'est plus la mode d'y marchander, quand on fait tant de leur écrire
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 21 août 1675
Je continue à vous conjurer, ma très chère, de décider en ma faveur, et de ne plus balancer à faire un voyage que vous m'avez promis, et qu'en vérité vous me devez un peu ; je ne suis pas seule à trouver que vous marchandez beaucoup à me faire ce plaisir
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 21 oct. 1676
Nature : Absolument.
Çà, dépêchons : c'est par trop marchander
de Jean de LA FONTAINE dans Jum.
Trouvant son vilain visage près du vôtre, vous n'aviez pas marchandé et lui aviez donné un soufflet pour la faire reculer
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 70
Choquée qu'un homme qui faisait l'amoureux eût marchandé
de Antoine HAMILTON dans Gramm. 7
Sans marchander, sans hésitation.
Assemblez une bonne bande De nos citoyens échappés, Et sans marchander décampez
de Paul SCARRON dans Virg. II
6
Anciennement. Faire le métier de marchand.
7
Se marchander, Nature : v. réfl. Être marchandé.
Dans la même place où se vendaient autrefois les bestiaux, se marchandaient publiquement les consulats et les prétures
de Jacques DELILLE dans Trois règ. disc. prél.
Sémantique : Fig. S'épargner l'un l'autre.
Ils se marchandèrent moins et se battirent plus opiniâtrément en cette rencontre, que....
de François de MALHERBE dans Le XXXIIIe livre de T. Live, ch. 37

HISTORIQUE

1
XIIIe s.
Porce que cil qui marqueandent ne se puissent pas legierement escuser par yvrece
de Philippe de BEAUMANOIR dans VI, 24
Et por les perix qui en poent naistre, se fet il bon garder à qui on marceande et à qui on s'acompaigne
de Philippe de BEAUMANOIR dans XXI, 29
2
XIVe s.
Jadis vous marchandastes à un cuivert [coquin] felon, De mon corps à mordrir par grande traïson
dans Baud. de Seb. X, 852
Si dictes à maistre Jehan qu'il ne les embesoigne point [qu'il ne charge point des ouvriers de la besogne], sans marchander avant
dans Ménagier, II, 3
3
XVe s.
[Il essaya] si pour argent il pourroit marchander à lui, par quoi il r'eut en sa baillie la dite ville de Calais
de Jean FROISSART dans I, I, 326
Et contregardez vos gens et vos marchands de aller, ni venir, ni marchander en Flandre
de Jean FROISSART dans II, II, 169
Ceulx d'Amiens marchandoient [à se décider], car l'armée du roy estoit auprès, et le duc à Dourlans avec quatre ou cinq cens chevaulx
de Philippe de COMMINES dans III, 2
Il [l'ours] me disoit que jamais je ne marchandasse de la peau de l'ours jusques à ce que la beste feut morte
de Philippe de COMMINES dans IV, 3
4
XVIe s.
L'armée marchandoit [était sur le point] de se mutiner
de Michel de MONTAIGNE dans I, 4
Sans dire aultre chose et sans marchander
de Michel de MONTAIGNE dans I, 19
Nul ne se peult dire estre resolu à la mort, qui craint à la marchander [qui se hâte de mourir]
de Michel de MONTAIGNE dans II, 385
Il ne les marchanda plus, en mit en pieces quelque trentaine
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans Hist. II, 453
Comme le duc marchandoit l'attaque de cette ville....
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans ib. III, 6
Le mesnager, marchander et trafiquer y estoit defendu aux hommes libres
de Jacques AMYOT dans Numa et Lyc. comp. 4
Il apperceut que l'on alloit marchandant et acheptant des voix du peuple
de Jacques AMYOT dans C. d'Utiq. 33

ÉTYMOLOGIE

1
Marchand ; Berry, marcander, faire le commerce.

Synonymes de MARCHANDER

Termes proches de MARCHANDER