Définition de MAIS

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : mê ; l's se lie : mê-z un homme, mê-z aussi

DÉFINITIONS

1
Adv. qui signifie plus, et qui, usité en ce sens dans l'ancienne langue, ne se conserve plus aujourd'hui que dans la locution suivante : pouvoir mais, avec une négation ou une interrogation, n'être pas cause de, n'être pas responsable de.
Souvent nous imputons nos fautes au malheur Qui n'en peut mais
Le malheureux lion.... Bat l'air qui n'en peut mais
[Le vent] Siffle, souffle, tempête, et brise en son passage Maint toit qui n'en peut mais, fait périr maint bateau
de Jean de LA FONTAINE dans ib. VI, 3
Sacrifiant à sa mélancolie Mainte perdrix qui, las ! ne pouvait mais Des cruautés de madame Clitie
de Jean de LA FONTAINE dans Faucon.
Faut-il de vos chagrins sans cesse à moi vous prendre, Et puis-je mais des soins qu'on ne va pas vous rendre ?
Enfin, après cent tours, ayant de la manière Sur ce qui n'en peut mais déchargé sa colère....
Si mon maître est ingrat, puis-je mais de cela ?
2
Dans le sens de oui, certes, qui est une extension du sens de plus.
Elle y fut reçue très bien, mais très bien, c'est-à-dire que le roi la fit mettre dans sa calèche avec les dames
Je trouve le petit-fils fort joli, mais fort joli
Parlerai-je d'Iris ? chacun la prône et l'aime, C'est un coeur, mais un coeur.... c'est l'humanité même
Il se dit familièrement avec oui servant de réponse, et ne fait que renforcer l'affirmation. Viendrez-vous ? - Mais oui.
3
Conjonc. servant à marquer opposition, restriction, différence parce que le sens fondamental de plus qui y est, met en regard deux propositions, et les lie entre elles, soit passant de la plus faible à une autre plus forte, soit par différence ou opposition. Il est riche, mais avare.
D'autre sang, mais plus vil, expiera l'attentat
J'embrasse mon rival, mais c'est pour l'étouffer
Vous ne faites que ce que font les autres ? mais c'est ce que l'Écriture vous défend
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Carême, Élus.
Heureux, mais gouvernés, libres, mais sous des maîtres
Tu nous laissas le jour, mais pour nous avilir
Ils ont dit que le mien serait assez beau, si.... ; que celui de Denis serait assez bien ; mais.... eh ! bien, si, mais ?
4
Il s'emploie pour rendre raison de quelque chose. Je l'ai, il est vrai, maltraité, mais j'en avais sujet.
5
Il peut se répéter pour donner plus de force à l'opposition.
Immolez, non à moi, mais à votre couronne, Mais à votre grandeur, mais à votre personne...
Ce n'est point parce que ses passions le rendent contraire à Dieu, mais parce qu'elles troublent son repos, mais parce qu'elles lui causent de mortels chagrins, mais parce qu'il se voit souvent dans l'impuissance de les satisfaire...
de Louis BOURDALOUE dans Myst. Concept. de la Vierge, t. II, p. 14
À l'instant il s'éleva dans tout Israël un seul cri, mais éclatant, mais unanime
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Lév. d'Éphr. ch. 3
6
Mais.... mais.... à la fin d'une objection, se dit pour faire pressentir des objections, des restrictions qu'on ne veut pas exprimer.
Les soupers du roi [de Prusse] sont délicieux ; on y parle raison, esprit, science ; la liberté y règne, il est l'âme de tout cela ; point de mauvaise humeur, point de nuage, du moins point d'orages ; ma vie est libre et occupée ; mais.... mais... ; je suis en train de dire des mais
7
Il peut se joindre à cependant et ne fait que le renforcer.
Mais cependant ce jour il épouse Andromaque
8
Mais avec non exprime une négation sous forme d'objection.
Le peuple [juif] pour qui Dieu a fait des choses si étonnantes va sans doute être le maître de l'univers ; mais non, le fruit de tant de merveilles est de souffrir la disette et la faim dans des sables arides
9
Mais s'emploie, dans la conversation, au commencement d'une phrase, qui a quelque rapport à ce qui précède. Mais, dites-moi, que voulez-vous faire de tous ces livres ? Mais encore quel parti prenez-vous ? Mais, qu'avez-vous dit ? Mais enfin, à quoi en voulez-vous venir ?
Il sert quelquefois de transition pour revenir à un sujet qu'on avait laissé, ou pour quitter celui dont on parlait. Mais revenons à notre propos. Mais c'est trop parler de cela.
10
Mais s'oppose à non-seulement, dans deux membres de phrases qui se correspondent, et exprime une addition à ce qui est signifié par non-seulement. Non-seulement il est bon, mais encore il est généreux. Non-seulement on le blâme, mais même on l'accuse.
11
Il s'emploie sans verbe, d'une manière exclamative, pour exprimer la surprise, le blâme.
Cela est bon pour une demoiselle de St-Cyr : mais une véritable abbesse !
12
Mais ne vous en déplaise, se dit quand on veut contredire quelqu'un.
13
Eh mais, se dit pour exprimer le doute, l'hésitation, la suspension.
Que dit-elle ? une affaire, où je suis Intéressée !... eh mais ! à ceci je ne puis Rien comprendre...
de Jean-François COLLIN D'HARLEVILLE dans Optimiste, V, 7
Il marque aussi l'étonnement. Eh mais ? qu'y a-t-il là-dedans ?
14
Nature : S. m. Objection, difficulté.
Mais.... - Achevez, seigneur : ce mais que veut-il dire ?
Que le diable t'emporte avec tes si et tes mais !
Dorval : Mais...Géronte : Mais, mais, voyons votre mais
de GOLDONI dans Bourru bienfais. II, 1
C'est un homme qui n'a ni si ni mais, un homme franc, qui ne cherche ni excuse ni prétexte.
Des mais, des si, des car, se dit des objections, des difficultés qu'on oppose à une chose simple.
Il y a un mais se dit pour signifier qu'il y a des critiques à faire.

HISTORIQUE

1
XIe s.
N'en parlez mais, se je nel vous comant
dans Ch. de Rol. XI
J'i puis aler, mais n'i aurai garant
dans ib. XXIV
Quant ert-il [sera-t-il] mais recreanz d'ostoier [faire la guerre] ?
dans ib. XXXIX
Bataille aurez, onque mais tel ne fut
dans ib. LXXX
2
XIIe s.
Par tantes fois [j'] ai esté assailliz Que je n'ai mais povoir de moi defendre
dans Couci, V
Je n'en puis mes ; car je la desir si...
dans ib. VIII
Jà de mon cuer n'istra [de mon coeur ne sortira] mais la semblance Dont [ma dame] me conquist à mos pleins de douçor
dans ib. XVI
Ainz mais n'avint en France nule si granz dolors
dans Sax. XXVII
3
XIIIe s.
Et bien m'avez fait le plus haut servise que mais nule gent feist à home
de Geoffroi de VILLEHARDOUIN dans LXXXVIII
Ha Diex ! verrai-je mes, fait-ele, mes amis ?
dans Berte, XX
Or est ele mout aise, mais tost sera dolente
dans ib. X
[Elle] Ne pouvoit mes aler, car forment ert lassée
dans ib. XLVI
Moi ne chaut qu'on en fasse, mes qu'ele [pourvu qu'elle] soit tuée
dans ib. XVI
L'omme lay [laïque], quant il ot mesdire de la lay [loi, religion] crestienne, ne doit pas deffendre la lay crestienne, ne mais [sinon] de l'espée
Et le mestre dit : Sire, mes m'ennuie tant comme il me peut ennuier
Il a tant donné que il n'a mez que donner
4
XIVe s.
Vertu encline touz jours à eslire bien, et vice au contraire ; mais aucune foiz en l'operacion qui est eslue par vertu peut estre empeeschement
5
XVe s.
Si me fit-elle tant de bien que j'en suis tenu de prier à tousjours mais pour elle
Autant vault si je m'en tais, Car certainement je tiens Qu'il ne s'en fera jà rien ; En toute chose a ung mais
de Charles D'ORLÉANS dans Rondeau.
C'est son parler ne moins ne mais
6
XVIe s.
Sans si, sans mais, est son bruyt, gloire et fame
Eureuse suys, mais que [pourvu que] ce temps me dure
De quoy Numitor fut fort courroucé, mais eux ne s'en soucierent guieres, ains amasserent à l'entour d'eulx bonne trouppe d'hommes vagabonds
de Jacques AMYOT dans Rom. 7
Cela n'est pas fait en amy, mais en sophiste, qui ne quiert que l'apparence
Ma deliberation ne est de provocquer, ains d'appaiser, d'assaillir, mais de deffendre
Voire mais, que fera il si on le presse de... ?
de Michel de MONTAIGNE dans I, 190
Que peut-il mais de vostre ignorance ?
de Michel de MONTAIGNE dans II, 48
En nul endroit, comme a chanté Virgile, La foy n'est seure, et me l'a fait sçavoir Ton jeune coeur, mais vieil pour decevoir
de Pierre de RONSARD dans 96
Il estoit destiné par sentence des cieux, Que je devois servir, mais [bien plus] adorer vos yeux
de Pierre de RONSARD dans 239
Ô prince, mais o Dieu, dont la celeste face...
de Pierre de RONSARD dans 671
Mon mastin, garde bien de mordre ma mignonne, Si elle vient me voir, ains baise luy les pieds : Mais aboye de loin si de quelque personne Au milieu de nos jeux nous estions espiez
de Pierre de RONSARD dans 744
Mais dites-moy que signifie Que les ligueurs ont double croix ? C'est qu'en la ligue on crucifie Jesus Christ encore une fois
dans Sat. Mén. Quatrain sur les doubles croix de Lorraine

ÉTYMOLOGIE

1
Wallon, main, mâie, dans le sens de jamais ; Hainaut, mé ; provenç. mais, mai, mas, ma ; cat. may ; esp. et port. mas ; ital. ma et mai ; du lat. magis, qui signifie plus, davantage. Le patois normand conserve deux anciens emplois de mais : Il n'a mais que dire, il n'a plus rien à dire ; et mais que dans le sens de lorsque : Mais que j'aille chez vous, je vous l'apporterai.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
Mais que, ancienne conjonction qui est aujourd'hui hors d'usage, et qui signifiait dès que.
Vous pouvez penser comme il fera, mais qu'il soit [dès qu'il sera] doyen des cardinaux
de François de MALHERBE dans Lexique, éd. L. Lalanne.
L'affection avec laquelle j'embrasserai votre affaire, mais que je sache [dès que je saurai] ce que c'est, vous témoignera...
de François de MALHERBE dans ib.

Synonymes de MAIS

Phonétiquement proche de MAIS