Définition de MÂCHER

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : mâ-ché

DÉFINITIONS

1
Broyer avec les dents. Mâcher du pain, de la viande.
La pythie mâchait du laurier ; elle en jeta en passant sur le feu sacré quelques feuilles mêlées avec de la farine d'orge
de Auguste Marseille BARTHÉLEMY, dit L'ABBÉ BARTHÉLEMY dans Anach. ch. 22
Nature : Absolument.
S'il avait peine à bien mâcher Faute de dents en la gencive !
de Paul SCARRON dans Poés. div. Oeuv. t. VII, p. 193
Les chats ne peuvent mâcher que lentement et difficilement : leurs dents sont si courtes et si mal posées qu'elles ne leur servent qu'à déchirer et non pas à broyer les aliments
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Quadrup. t. I, p. 381
Sémantique : Familièrement. Mâcher de haut, manger sans appétit.
Mâcher à vide, mâcher sans avoir rien sous la dent.
....Simonide, Qui dit, pour être sain, qu'il faut mâcher à vide
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Sat. X
Les gens qui sont priés pourront mâcher à vide
de Noël LEBRETON, sieur de HAUTEROCHE dans Souper mal apprêté, sc. 1
Nous les attachions au râtelier [les chevaux], où nous les laissions fort bien mâcher à vide
de Alain René LESAGE dans Guzm. d'Alf. II, 1
Ne pouvant trouver des pensées nouvelles, ils [les académiciens dans leurs discours de réception] ont cherché des tours nouveaux, et ont parlé sans penser, comme des gens qui mâcheraient à vide
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Dict. phil. Société royale.
Sémantique : Fig. Se repaître de fausses espérances.
Cette légère amorce, irritant tes désirs, Fait que l'illusion d'autres meilleurs plaisirs Vient la nuit chatouiller ton espérance avide, Mal satisfaite après de tant mâcher à vide
de Pierre CORNEILLE dans Mél. I, sc. dern. 1re édit.
Sémantique : Fig. et familièrement. Mâcher à quelqu'un sa besogne, la lui préparer, en faire ce qu'il y a de plus difficile.
Il faut lui mâcher tous ses morceaux, il faut tout lui mâcher, il a besoin qu'on lui explique les choses les plus simples.
Mâchez-lui les morceaux, et il les avalera, c'est-à-dire faites-lui le plus difficile de la besogne, et il achèvera le reste.
Sémantique : Fig. Ne point mâcher une chose à quelqu'un, dire durement, sans adoucissement, une chose désagréable ou fâcheuse.
Je vous parle un peu franc, mais c'est là mon humeur ; Et je ne mâche point ce que j'ai sur le coeur
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Tart. I, 1
On dit dans le même sens : ne pas mâcher le mot. Là je verrai de quoi il tourne ; je ne leur mâcherai pas le mot, Corresp. de Klinglin, t. I, p. 292.
2
Serrer entre les dents sans broyer. Les enfants mâchent les hochets, quand ils sont près de faire des dents.
C'était [dans les journées de Juillet 1830] la bouche aux vils jurons Qui mâchait la cartouche, et qui, noire de poudre, Criait aux citoyens : mourons !
de Auguste BARBIER dans la Curée.
Ce cheval mâche son frein, se dit d'un cheval qui joue avec son mors et qui le ronge.
Son cheval [du soldat] mâche un frein blanc d'écume
de Victor HUGO dans Orient. 15
Sémantique : Fig. Se mâcher le coeur, se tourmenter, se ronger d'impatience.
Qui ronge ses poumons et se mâche le coeur
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Épît. I
3
Sémantique : Familièrement. Manger avec sensualité, avec gourmandise. Il aime à mâcher.
Vieilli en ce sens.
4
Se mâcher, V. réfl. Être mâché. Une viande tendre qui se mâche facilement.
Sémantique : Fig. Avec ellipse de se, laisser mâcher, donner à une chose le temps d'être préparée, acceptée.
Les choses en cet état, j'estimai qu'il les fallait laisser reposer et mâcher, ne les point gâter par un empressement à contre-temps
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans t. VIII, p. 233, éd. CHÉRUEL.

HISTORIQUE

1
XIIIe s.
Bien soit la honte seue [sienne], je nel vous quier [veux] maschier
dans la Fole et la Sage
Se tu demandes quel la viande [mangée par les anges] devenoit, on puet dire que elle devenoit niens en maskant
dans Comput, f° 13
Que vaut morsiaus que bien ne mache ?
de G. DE COINCY dans p. 485
2
XIVe s.
La langue tourne la viande par la bouche, à ce qu'elle soit miex maschie
de Henri DE MONDEVILLE dans f° 19
La quarte branche de gloutonnie si est quant une personne mengue si gloutement d'une viande qu'elle ne la mache pas, ains l'engloutit
dans Ménagier, I, 3
3
XVe s.
Moult rejoui de ce que messire Pierre avoit si franchement parlé et relevé la parole de messire Jean.... et dit ainsi [le roi] en riant : Leur a-t-il bien masché ! je n'en voudrois pas tenir vingt mille francs
de Jean FROISSART dans II, II, 46
Ce ne m'est que chose commune ; Obeir fault à ma maistresse Sans machier, soit joye ou tristesse
de Charles D'ORLÉANS dans Rondeau.
Il le me convient avaller Sans mascher
dans Patelin
4
XVIe s.
Ressemblans aux petits oysellets qui baillent tousjours attendans la becquée d'autruy, et voulans que l'on leur baille ja tout masché et tout prest
de Jacques AMYOT dans Com. il faut ouïr, 28
Le duc de Maienne s'encourt à la maison de ville, et, maschant les menaces avec les raisons, estonna au commencement ceux qui avoient ainsi parlé
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans Hist. III, 274
... Qui fait le brave, et de sa bouche humide Maschele frein de l'escumeuse bride
de Joachim DU BELLAY dans IV, 10, recto.
Tantost il luy en donnera la moelle et la substance toute maschée
de Michel de MONTAIGNE dans I, 174
Celui qui n'aime que pour mascher [manger], n'estime pour ton ami cher
de Antoine LE ROUX DE LINCY dans Prov. t. II, p. 257

ÉTYMOLOGIE

1
Wallon, mausî ; picard, maker ; provenç. mastegar, maschar, machar ; espagn. mascar ; portug. mastigar ; ital. masticare ; du lat. masticare.

Synonymes de MÂCHER

Termes proches de MÂCHER

Phonétiquement proche de MÂCHER