Définition de H?RO?QUEMENT

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : ti-ran

DÉFINITIONS

1
Dans l'antiquité, parmi les Grecs, celui qui s'emparait de l'autorité souveraine sur une communauté républicaine, soit qu'il l'exerçât avec modération et douceur, soit qu'il en abusât. Pisistrate fut tyran d'Athènes.
C'est ce qu'on appelle un tyran ; il ne fait pas le mal par le seul plaisir de le faire ; mais le mal ne lui coûte rien, toutes les fois qu'il le croit utile à l'accroissement de sa grandeur
Ce fut alors que parut une suite de souverains connus sous le nom de tyrans, parce qu'ils jouissaient d'une autorité absolue
Comme l'usurpation amène et nécessite la tyrannie, les Grecs prirent bientôt le nom de tyran dans la même acception que nous
de SAINTE-CROIX dans Instit. Mém. hist. et litt. anc. t. II, p. 510
2
Celui qui a usurpé la puissance souveraine dans un État (sens qui a vieilli).
La soif de commander enfanta des tyrans
Puisqu'il [César] était tyran, il n'eut point de vertus
Les habiles tyrans ne sont jamais punis
On donne aujourd'hui le nom de tyran à un usurpateur, ou à un roi qui fait des actions violentes et injustes ; Cromwell était un tyran sous ces deux aspects
Les trente tyrans, voy. TRENTE.
3
Prince, usurpateur ou non, qui gouverne avec injustice, avec cruauté, en foulant aux pieds les lois divines et humaines.
Aux noces d'un tyran, tout le peuple en liesse Noyait son souci dans les pots
Ses yeux indifférents [de Néron] ont déjà la constance D'un tyran dans le crime endurci dès l'enfance
Les vices ont aussi leur perfection : un demi-tyran [au théâtre] serait indigne d'être regardé ; mais l'ambition, la cruauté, la perfidie, poussées à leur plus haut point, deviennent de grands objets
de Bernard le Bouyer de FONTENELLE dans Réfl. poét. 17
J'aimerais autant mettre les voleurs de grand chemin au rang des corps de l'État, que de placer les tyrans au rang des rois
On appelle tyran le souverain qui ne connaît de lois que son caprice, qui prend le bien de ses sujets, et qui ensuite les enrôle pour aller prendre celui de ses voisins ; il n'y a point de ces tyrans-là en Europe
Henri VIII était tyran dans son gouvernement comme dans sa famille, et couvert du sang de deux épouses innocentes, comme de celui des plus vertueux citoyens
Les grands le traitaient de tyran [Louis XI], parce qu'il ne leur permettait pas de l'être
de Charles Pinot, sieur DUCLOS dans Oeuv. t. III, p. 356
4
Sémantique : Par extension, il se dit de tous ceux qui tyrannisent. Il est le tyran de sa famille. C'est un tyran dans sa maison. Ce chef est un tyran pour ses subordonnés.
Et donnons un tyran à ces tyrans du monde [les Romains]
Et la fuite est permise à qui fuit ses tyrans
Ne se contentant pas de faire le petit tyran dans une fête
Telle est l'ingratitude des hommes ; plus vous les rendez maîtres de votre coeur, plus ils s'en rendent les tyrans
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Carême, Pécheresse.
Les Romains, après avoir été les tyrans des nations....
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Philos. Lett. de Memmius, III
Voilà bien, reprit-elle, le propos d'un tyran qui ne croit jouir de sa liberté qu'autant qu'il trouble celle des autres
Il faut en ce monde-ci avoir le moins de tyrans qu'il est possible
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Lett. à Voltaire, 23 juin 1766
Lorsqu'il [Aristote] dit que le peuple souverain est un tyran à mille têtes
de SAINTE-CROIX dans Instit. Mém. hist. et litt. anc. t. II, p. 510
Tyran domestique, se dit d'un homme qui tyrannise sa famille, sa maison.
Il est le tyran de sa compagnie, il a pris dans sa compagnie une autorité dont il abuse.
Sémantique : Fig.
Vous vous souvenez du vieux pédagogue de la cour, et qu'on appelait autrefois le tyran des mots et des syllabes
Adjectiv.
Je ne fus plus cet homme malhonnête et tyran, qui voulais sacrifier tous mes amis à mon ambition et à mon caprice ; on ne parla dans la conversation que de la tendresse qu'on avait pour moi
C'est être faux et tyran de dire : il n'est pas fort, donc je ne l'estimerai pas ; il n'est pas habile, donc je ne le craindrai pas
5
Sémantique : Fig. Il se dit de choses dont on compare l'action à la tyrannie des hommes.
Secrets tyrans de ma pensée, Respect, amour, de qui les lois....
Mon Dieu ! que votre amour en vrai tyran agit !
L'art est un tyran qui se plaît à gêner ses sujets, et qui ne veut pas qu'ils paraissent gênés
de Bernard le Bouyer de FONTENELLE dans Refl. poét. LXI
Ainsi lorsque les vents, fougueux tyrans des eaux, De la Seine ou du Rhône ont soulevé les flots
D'une sainte folie un peuple furieux Chanter : Amour, tyran des hommes et des dieux !
de André CHÉNIER dans l'Invention.
L'usage est le tyran des langues, l'usage prévaut sur les règles de la grammaire.
6
Oiseau du genre faucon.
Le nom de tyran donné à des oiseaux doit paraître plus que bizarre
Genre d'oiseaux sylvains ou de passereaux de la famille des gobe-mouches.

REMARQUE

1
Quelques-uns ont essayé de dire tyranne, par exemple Desportes ; mais cela n'a pas réussi ; et il faut dire tyran en parlant d'une femme. Cette femme est un tyran domestique. Toutefois Fr. Soulié a employé ce mot dans le style familier.
Assurément, mais.... - Il n'y a pas de mais ; je veux, j'exige que vous teniez votre parole, entendez-vous ? - Soit, tyranne, dit M. de Simon, en embrassant sa femme
de SOULIÉ dans Au jour le jour, § XI

HISTORIQUE

1
XIIe s.
Et en la croix vous pendirent tyrant
dans Ronc. p. 152
2
XIIIe s.
Ne ja, pour nul desirier, [je] Ne remainrai avecque ces tirans Qui sont croisés à loier Pour dimer clers et bourjois et serjens
de QUESNES dans Romancero, p. 97
3
XIVe s.
Et pour ce nous ne disons pas que les tyrans soient prodiges [prodigues]
Je vous deliverrai de ceste gent tirant
dans Guesclin 3035
Mesmes vont les Juifs Pietre le roy blasmant ; En derrieres de lui l'apeloient tirant
dans ib. 6948
4
XVe s.
Est licite de adompter et endormir par belles paroles les oreilles du tyran
de Enguerrand de MONSTRELET dans I, 39
Adonc marcha avant le tyrant [bourreau], qui print la royne par la main ; si la mena jusque à l'estache
dans Perceforest, t. v, f° 102
5
XVIe s.
Il sembloit, quand ils [les huguenots] oyoient parler de moy, qu'ils avoient le bourreau à la queue ; aussi m'appeloient-ils ordinairement le tyran
dans Mém. de Montluc, t. II, p. 57
Mais vous, belle tyranne, aux Nerons comparable

ÉTYMOLOGIE

1
Provenç. tiran ; catal. tirá ; espagn. tirano ; ital. tiranno ; du lat. tyrannus. L'anglais dit tyrant ; c'est une orthographe qu'il a reçue de l'ancien français, et que l'ancien français, par erreur, avait adoptée, prenant ce mot pour un participe présent.

Synonymes de TYRAN

Termes proches de TYRAN