Définition de GIBIER

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : ji-bié ; l'r ne se prononce pas et ne se lie jamais

DÉFINITIONS

1
Terme collectif. Animaux qu'on prend à la chasse.
Le gibier du lion, ce ne sont pas moineaux
de Jean de LA FONTAINE dans Fabl. II, 19
En général, la qualité du gibier dépend beaucoup de la nourriture
de Georges Louis Leclerc, comte de BUFFON dans Ois. t. V, p. 393, dans POUGENS
Peu de jours après il me fit envoyer un panier de gibier, que je reçus comme je le devais
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Conf. X
Corneille de la Pierre, dans ses commentaires sur l'Écriture sainte, rapporte qu'un moine soutenait et prêchait que le bon gibier avait été créé pour les religieux, et que, si les perdreaux, les faisans, les ortolans pouvaient parler, ils s'écrieraient : Serviteurs de Dieu, soyons mangés par vous
de SAINT-FOIX dans Ess. Paris, Oeuv. t. IV, p. 239, dans POUGENS
Quoiqu'entre nous, Mon cher, je ne sois point de ces seigneurs jaloux Qui gardent leur gibier comme on fait sa maîtresse
de Jean-François COLLIN D'HARLEVILLE dans Optimiste, III, 10
Gibier à plumes, les perdrix, cailles, etc. Gibier à poil, les lièvres, lapins, chevreuils, etc. Gros gibier, les cerfs, daims, sangliers, etc. Menu gibier, les lièvres, perdrix, bécasses, etc.
Sémantique : Fig. Il se dit par mépris de personnes peu recommandables, dignes d'être chassées comme on fait le gibier.
Vous savez que je suis quelque peu du métier à me devoir connaître en un pareil gibier
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Ét. III, 2
Sémantique : Fig. et familièrement. Cela n'est pas de son gibier, cela dépasse sa portée, sa capacité, ses ressources, et aussi cela n'est pas de son goût, ne lui convient pas.
La vérité n'est pas de notre portée ni de notre gibier
de Blaise PASCAL dans dans COUSIN
On le dit aussi de personnes qui sont au-dessus de notre condition.
Dorante : Et me dis seulement si tu connais ces dames. - Cliton : Non : cette marchandise est de trop bon aloi, Ce n'est point là gibier à des gens tels que moi
de Pierre CORNEILLE dans Ment. I, 1
2
Sémantique : Fig. et familièrement. Personne que l'on poursuit, que l'on attrape, que l'on dupe.
Nous autres fourbes de la première classe, nous ne faisons que jouer, lorsque nous trouvons un gibier aussi facile que celui-là
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Pourc. II, 3
Comme le duc m'avait permis de lui parler en faveur des personnes à qui je voudrais rendre service, il me fallait un chien de chasse pour découvrir le gibier, c'est-à-dire un drôle qui eût de l'industrie et fût propre à déterrer et à m'amener des gens qui auraient des grâces à demander au premier ministre
de Alain René LESAGE dans Gil Blas, VIII, 7
3
Gibier de potence, celui qui mérite d'être pendu.
Allons, que l'on détale de chez moi, maître juré filou, vrai gibier de potence
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans l'Avar. I, 3
On a dit dans le même sens : gibier à prévôt, gibier de bourreau.
D'un gibier de bourreau tu prends donc l'intérêt ?
de Thomas CORNEILLE dans Comt. d'Org. v, 10
Sémantique : Familièrement. Gibier à commissaire, fille publique, filou repris de justice.

HISTORIQUE

1
XIIIe s.
Un jour d'aoust, après mangier, Alerent tous trois en gibier
de Victor Henri-Joseph Brahain, dit DU CANGE dans gibicere.
2
XIVe s.
Martin, escuier, allant en gibier un espervier au poing
de Victor Henri-Joseph Brahain, dit DU CANGE dans ib.
L'aloe de gibier, c'est l'aloe de cest an qui a courte queue sans blancheur
dans Ménagier, III, 2
3
XVe s.
Le roy luy dit que il avoit conclu que point ils ne seroient combatus ; et ainsi ne le furent ils point ; et si s'estoient ils mis au plus beau gibier que jamais furent
dans Hist. d'Artus III, connest. de France, p. 778, dans LACURNE
Bourgeoise hante le gibier [a des amants] ; Et pour mieux faire son debvoir, Elle aime un plaisant escuyer
de COQUILLART dans p. 44, dans LACURNE
4
XVIe s.
Un soldat guascon y banda par deux fois son arbaleste et tira à ceux de dedans autant assurement que s'il eust tiré au gibier pour son plaisir
de BEAUGUÉ dans Guerre d'Écosse, I, 10
Leur amitié et leur concorde, lesquelles deux choses sont certes du gibier de la philosophie
dans l'Amant ressuscité, p. 88, dans LACURNE
Ne vous ruez si fort sur la saincte Escriture ; ce n'est votre gibier ny le mien aussi
de CHOLIÈRES dans Contes, t. II, Après-dînée 8
Le deable dont tu es le vrai gibier
de NOËL DUFAÏL dans Cont. d'Eutrap. ch. 1

ÉTYMOLOGIE

1
Bourguign. jubié. La locution primordiale est aler en gibier ; gibier est donc un nom verbal d'un verbe gibeer, giboyer (voy. ce dernier mot).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
GIBIER. - HIST. XIIIe s. Ajoutez :
Esperviers [ils] portent et faucons, Ostoirs, tercets, esmerillons ; Car ils vivoient de jebiers ; Quant il les vit, moult en fu liés
dans Li biaus desconneus, V. 3906
2
XVe s. Ajoutez :
Puisque nous volons nestoyer Le pays de ces Anglois ci, Et que les voyons en gibier, Pourquoy demoront il ainsi ?
dans Myst. du siége d'Orléans, p. 764

Synonymes de GIBIER

Termes proches de GIBIER