Définition de ENTERRER

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : an-tè-ré

DÉFINITIONS

1
Mettre dans la terre. Enterrer son or, ses bijoux.
La méfiance et la tyrannie font que tout le monde enterre son argent
Sémantique : Fig. Enterrer de l'argent, le dépenser en travaux, en remuements de terre. Ce jardin lui coûte gros, il y a enterré plus de dix mille francs.
Sémantique : Terme de marine. Mettre avec le lest du vaisseau. On a enterré ces futailles.
2
Inhumer, mettre un corps mort en terre. On l'a enterré avec beaucoup de pompe. On l'enterra sans cérémonie.
On enterrera vif qui l'enterrera mort [Polynice]
Si elle meurt, ne manquez pas de la faire enterrer du mieux que vous pourrez
Un mort s'en allait tristement S'emparer de son dernier gîte ; Un curé s'en allait gaiement Enterrer ce mort au plus vite
Ils n'avaient pas de quoi se faire enterrer
Criton lui ayant demandé [à Socrate] comment il souhaitait qu'on l'enterrât : comme il vous plaira, dit Socrate, si pourtant vous pouvez me saisir et que je n'échappe pas de vos mains
Nature : Absolument.
Sous la première et la seconde race, on n'enterrait pas même dans l'enceinte des villes
de SAINT-FOIX dans Ess. Paris, Oeuvres, t. IV, p. 27, dans POUGENS
Sémantique : Par extension, survivre à. Il nous enterrera tous. Ce malheureux père a enterré ses enfants.
Je ne savais pas que vous eussiez enterré votre médecin
Sémantique : Fig.
Que le monde voit peu de ces femmes dont parle saint Paul, qui, vraiment veuves et désolées, s'ensevelissent, pour ainsi dire, dans le tombeau de leur époux et y enterrent tout amour humain avec ces cendres chéries !
Sémantique : Par moquerie, en parlant d'un médecin inhabile, faire mourir ou laisser mourir. Encore un malade qu'il vient d'enterrer.
3
Recouvrir de choses comparées à un tas de terre. La maison tomba et les débris l'enterrèrent. Être enterré sous les décombres d'un édifice.
4
Obliger à demeurer dans un lieu triste et ennuyeux. Il veut m'enterrer en province.
Mais sur une terreur qui peut être indiscrète, L'enterrer toute vive au fond d'une retraite
de LA CHAUSSÉE dans Gouvern. II, 10
Ainsi loin du palais où vous fûtes nourrie, Vous allez, belle Irène, enterrer votre vie
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Irène, IV, 1
Il se dit des choses qu'on met comme en terre et qu'on fait oublier.
À qui la peur de perdre enterre le talent
Cette honte qu'aurait le silence enterrée, Court le pays, et vit du vacarme qu'il fait
de Jean de LA FONTAINE dans Coupe.
5
Faire oublier, effacer la réputation de quelqu'un. Ce poëte avait des rivaux, il les a tous enterrés.
Il y a telle femme qui anéantit ou enterre son mari au point qu'il n'en est fait dans le monde aucune mention
de Jean de LA BRUYÈRE dans III
C'est ce qui donna lieu à ce mot de Benserade, où le double sens est assez visible : Si quelqu'un de nous, dit-il à Racine, avait pu prétendre d'enterrer M. Corneille, c'était vous, monsieur ; cependant vous ne l'avez pas fait
de D'OLIVET dans Hist. Acad. t. II, p. 308, dans POUGENS
6
Voir la fin de.
Si nous t'enterrons, Bel art dramatique, Pour toi nous dirons La messe en musique
de Pierre Jean de BÉRANGER dans Musique.
Sémantique : Familièrement. Enterrer le carnaval, se livrer aux dernières folies du carnaval.
Enterrer la synagogue avec honneur, sortir d'un engagement avec honneur et d'une manière irréprochable (voy. SYNAGOGUE).
7
Tenir caché. Enterrer ses secrets.
Il faut enterrer cela, il n'en faut plus parler.
8
S'enterrer, Nature : v. réfl. Être inhumé. Les morts ne s'enterrent pas dans l'enceinte des villes.
9
Être recouvert de débris qui s'écroulent. Samson s'enterra sous le temple des Philistins.
Sémantique : Fig. S'enterrer sous les ruines d'une place, mourir en défendant une place de guerre. S'enterrer sous les ruines de la patrie, ne pas survivre aux désastres de la patrie.
10
Se mettre dans un lieu retiré, dans une retraite profonde. S'enterrer dans une province, vivre hors de Paris, au fond d'une province.
L'offre que vous me faites de venir à Bourbon est tout à fait héroïque ; mais il n'est pas nécessaire que vous veniez vous enterrer dans le plus vilain lieu du monde
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Lett. à Racine, 13 août 1687
S'enterrer tout vif, rompre tout commerce avec le monde.
Mon dessein n'est pas de renoncer au monde et de m'enterrer toute vive dans un mari
La dame s'enterrait ainsi toute vivante
de Jean de LA FONTAINE dans Matr.
J'eus en horreur le monde et les maux qu'il enfante ; Loin de lui pour jamais je m'enterrai vivante
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Olympie, II, 2
Le marquis de Mirepoix s'amouracha de la fille d'un cabaret en Allemagne, et s'enterra si bien avec elle qu'on ne l'a pas vu depuis
11
Sémantique : Terme de manége. On dit qu'un cheval s'enterre quand, cherchant un point d'appui sur la main du cavalier, il baisse la tête et s'abandonne sur les épaules.

HISTORIQUE

1
XIe s.
À grant honur puis les ont enterrez
dans Ch. de Rol. CCIX
Long un autel belement [ils] l'enterrerent
dans ib. CCLXXI
2
XIIe s.
Baron, dit Charles, nos amis enterrons
dans Ronc. p. 154
Funt il : que s'a li reis si fort à dementer ? Se il veïst ses fiz e sa femme enterrer, E trestute sa terre ardeir e embraser, Ne deüst il tel duel [deuil] ne faire ne mener
dans Th. le mart. 133
3
XIIIe s.
Et fu entierée [la reine] en l'eglise Sainte-Crois
dans Chr. de Rains, p. 88
Si recevez mon palefroi, Et as gens irez demander S'il i a cors à enterrer Ne nul enfant à bautizier
dans Ren. 21150
Au temps que les corneilles braient, Qui por la froidure s'esmaient, Qui sor les cors lor vient errant, Qu'eles vont ces noiz enterrant Et s'en garnissent por l'yver
de RUTEBEUF dans II, 66
4
XVIe s.
Disant qu'il ne falloit point deterrer Lysandre, ains plus tost enterrer avec luy sa harengue
de Jacques AMYOT dans Lysand. 57

ÉTYMOLOGIE

1
En 1, et terre ; bourguig. antarré ; provenç. et espagn. enterrar ; ital. interrare.

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