Définition de DOMMAGE

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : do-ma-j'

DÉFINITIONS

1
Préjudice ou dégât causé à quelqu'un, à quelque chose. Réparer un dommage. Les dommages faits par la grêle sont grands.
Et ce n'est qu'à dessein de pourvoir aux dommages Que du Vésuve ardent ont causés les ravages
En considérant le dommage que l'État en recevrait
Bon gentilhomme et qui, dans son courroux, N'avait encor tonné que sur les choux, Plus ne savait apporter de dommage
de Jean de LA FONTAINE dans Papef.
Tous délais y font du dommage
de Jean de LA FONTAINE dans Nic.
Perte.
Ils mirent en commun le gain et le dommage
2
Sémantique : Fig. À son dommage, c'est-à-dire en souffrant un mal, un tort, une perte.
Ces arrogants, à leur dommage, Apprendront un autre langage
de François de MALHERBE dans VI, 8
Croire en voyant son visage Que le ciel l'ait formé si beau pour mon dommage
3
C'est dommage, c'est bien dommage, c'est grand dommage, quel dommage ! manières d'exprimer ce que certaines choses ont de fâcheux, de regrettable.
C'est dommage que ce livre-là ait été condamné à Rome
Rien ne resta qu'une ferme au pauvre homme, Et peu d'amis, même amis Dieu sait comme ; Le plus zélé de tous se contenta, Comme chacun, de dire : c'est dommage
de Jean de LA FONTAINE dans Fauc.
C'eût été dommage qu'elle n'eut pas réussi
Menager mourut d'apoplexie à Paris, fort riche, sans avoir été marié ; ce fut dommage, pour sa probité, sa modestie, sa capacité
Du Héron, dont ce fut grand dommage, fut tué avec 50 officiers et 400 ou 500 hommes
C'est bien dommage qu'elle soit devenue si laide
Sémantique : Ironiquement, c'est dommage, c'est vraiment dommage. Il ne m'accuse pas, c'est dommage.
Dans un autre sens ironique et par une sorte de défi. C'est dommage qu'il ne s'attaque pas à moi, je l'en ferais repentir.
C'est grand dommage que.... il est fort à regretter que....
Et tous deux ajoutèrent : c'eût été grand dommage qu'il eût été pendu
L'Académie, dans ses remarques sur Vaugelas, ne voulait pas qu'on dît : c'est un grand dommage ; mais cela est trop rigoureux.
C'était un grand dommage que des hommes si religieux ne fussent pas plus éclairés et ne plaçassent pas mieux leur culte
4
Sémantique : Terme de jurisprudence. Dommages et intérêts, ou dommages-intérêts, somme allouée à quelqu'un pour l'indemniser d'un préjudice. Demander des dommages-intérêts.
On pouvait après la condamnation payer les dommages et intérêts
En dommage, c'est-à-dire en causant du dégât. Ce bétail a été trouvé en dommage.

REMARQUE

1
1. Après c'est dommage que.... on met le subjonctif ; cependant la Fontaine a mis l'indicatif :
C'est dommage, Garo, que tu n'es point entré Au conseil de celui que prêche ton curé
2
2. Il est dommage que.... au lieu de c'est dommage que.... a été condamné par Ménage ; cependant ce tour est correct, et, quoique un peu archaïque, pourrait être employé en bonne place.

HISTORIQUE

1
XIe s.
Cil à qui il avrad le damage fait
dans Lois de Guill. 5
Fust i li reis, n'i eüssions damage
dans Ch. de Rol. LXXXV
Mout grant domage lui est apareüt
dans ib. CL
De ceus de France, il fait mult grant damage
dans ib. CCXLIX
2
XIIe s.
Grant daumage
dans Ronc. p. 14
À maint amant [ils] ont fait ire et damage
dans Couci, XI
Car je n'i voi mon prou ne mon domaige
de QUESNES dans Romancero, p. 85
Noveles.... De duel et de demage et de confusion
dans Sax. XI
Bien a creü li rois conseil de son damage
dans ib. XXVI
.... Ce seroit trop vilains gens, Qui feroit d'un domage deus
de CHRESTIEN DE TROYES dans dans HOLLAND, p. 269
3
XIIIe s.
Si lor avint uns grans domages....
Dont ce fu moult grant damage, quar moult estoient preudome et vaillant durement
Et aussi n'entendons noz pas que le baillix doie estre trop soufrans en cose qui porte damace ne despit à son seigneur ne à soi
Por ce met on serjans à ses bestes garder que elles ne voisent en damace, ne en forfet
de Philippe de BEAUMANOIR dans XXIX, 4
Garder de damache
Grant doumage nous firent au partir, de ce que ils bouterent le feu en la fonde [bazar], là où toutes les marchandises estoient et tout l'avoir de poiz [objets qui se vendent au poids]
Souspirant pour l'umain lignage, Et penssis [pensif] au cruel domage Qui de jor en jor i avient
de RUTEBEUF dans 100
4
XIVe s.
Sauf alant, sauf venant, et cessant voz domaige
dans Girart de Ross. V. 1234
5
XVe s.
Les soudoyers de Cambrisis eurent congé et accord d'entrer en Hainaut, et d'y faire aucune envaye ou chevauchée au dommage du pays
Et y furent morts messire Jean de Berlette et plusieurs autres, dont ce fut dommage
Avoit donné sa fille en mariage au fils du seigneur de Croy, long temps avoit, et disoit y avoir dommage
de Philippe de COMMINES dans I, 2
D'autres, au contraire, qui veoient brusler et destruyre tout le pays, voulurent paix au dommage de ce que ce fust
de Philippe de COMMINES dans II, 3
6
XVIe s.
Et à nostre esvident dommage
de Michel de MONTAIGNE dans I, 99
C'est dommage que les gents d'entendement ayment tant la briefveté
de Michel de MONTAIGNE dans I, 169
Les hommes bien souvent portent plus patiemment un dommage qu'ilz ne font une injure
de Jacques AMYOT dans Timol. 43
Et luy escrivirent les ephores qu'il eust à marcher incontinent au dommage des Thebains
de Jacques AMYOT dans Agésil. 47
Après dommaige chascun est saige
de GÉNIN dans Récréat. t. II, p. 234
Dommage suit la fausse honte
de Antoine LE ROUX DE LINCY dans Prov. t. II, p. 289

ÉTYMOLOGIE

1
Berry, demage, d'mage ; bourguig. dommeige ; picard, damage ; anc. espagn. domage. Le provençal damnatge, dampnatge, et l'italien dannaggio viennent d'une forme latine fictive damnaticum, dérivée de damnum, lequel a donné dam (voy. ce mot) ; cela n'est pas douteux. Mais le français offre plus de difficultés ; les formes anciennes sont damage, domage, daumage, demage, damace, damache, doumage. La forme domage est aussi ancienne que la forme damage ; or on sait très bien que l'o latin se change très facilement en a (dame, de domina, etc.) ; mais il arrive très rarement qu'au contraire l'a latin se change en o ; c'est là une première difficulté. On remarquera en outre que l'altération de l'o en e (demage) n'est pas rare ; mais que dans des mots de ce genre l'a s'atténue rarement en e. De plus la finale aticum donne régulièrement age ; mais elle ne donne ni ace ni ache ; or ces deux formes se trouvent dans le XIIIe siècle ; c'est là une seconde difficulté. Enfin une troisième difficulté, c'est que, s'il venait de damnum, on devrait, comme en provençal, trouver quelquefois le mot écrit damnage ; or, l'historique n'en contient aucun exemple. Toutes ces raisons portent à croire qu'on ne peut faire droit à toutes les formes françaises qu'en supposant un thème domacium, domaticum. Mais d'où vient un tel thème ? du latin domare, tourné au sens de causer un tort ? du germanique : anglo-saxon, dom ; anglais, doom, condamnation, ruine, perte ? Cette dernière conjecture paraît avoir quelque probabilité, non sans admettre une influence du provençal damnatge, par assimilation. L'ancien espagnol domage ne se range pas non plus sous damnum.

Synonymes de DOMMAGE

Termes proches de DOMMAGE

Phonétiquement proche de DOMMAGE