Définition de CROULER

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : krou-lé

DÉFINITIONS

1
S'affaisser avec fracas, en parlant de masses solides qui tombent.
N'est-ce que quand la maison croule Qu'on permet de crier au feu ?
de Pierre Jean de BÉRANGER dans G. nat.
Ses greniers crouleront sous leur charge pesante
de SEGRAIS dans Géorg. I
Ces gigantesques monts crouleront à leur tour
L'illusion n'est plus, et son temple a croulé
de BERNIS dans Relig. vengée, III
Tes greniers crouleront sous tes grains entassés
À demi renversé croule un antique mont Avec les vieux sapins qui couronnent son front
de ID. dans Parad. perdu, VI
Et sur son frêle appui le colosse a croulé
de ID. dans Trois règnes, I
2
Sémantique : Fig.
Je vois crouler sur moi le fatal édifice Que mes mains élevaient avec tant d'artifice
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Marianne, II, 1
Tous leurs systèmes [à ceux-ci ou à ceux-là] croulent par quelque endroit
Ce point une fois manqué, Il est aisé de voir que tout le système de M. l'abbé Dubos croule de fond en comble
L'ouvrage de la sagesse n'est pas éternel, mais celui de la folie s'ébranle sans cesse et ne tarde pas à crouler
3
Nature : V. a. Agiter, secouer. En ce sens il a vieilli, mais il reste très usité comme terme provincial.
Je les compare à ces ambitieux Qui, monts sur monts, déclarèrent la guerre Aux immortels ; Jupin, croulant la terre, Les abîma sous des rochers affreux
de Jean de LA FONTAINE dans Ballade au roi, 1684, Poésies mêlées, LVII
Sémantique : Terme de marine. Lancer à la mer. Crouler un vaisseau.
Sémantique : Terme de vénerie. Crouler la queue, remuer la queue, en parlant d'une bête qui s'effraye.

REMARQUE

1
Crouler se conjugue avec l'auxiliaire avoir quand il exprime l'acte : la maison a croulé cette nuit ; avec l'auxiliaire être, quand il exprime l'état : la maison est croulée depuis hier.

HISTORIQUE

1
XIe s.
De son algeir [dard] [il] a la haste crollée [agitée]
dans Ch. de Rol. XXXIII
2
XIIe s.
Par tel vertu [il] l'a [la lance] crolée et brandie
dans Ronc. p. 33
Et de cors et de membres [elle] par fu si avenanz, Qu'onques Dex ne fist homme, tant soit vielz ne crolanz, Se l'osast esgarder, ne li muast talanz
dans Sax. V
E nostre sires ferrad [frappera] Israel, e croler le frad si cume fait li rosels par cele riviere
dans Rois, 293
Les fundemenz des munz sunt esmeüz e crodlez ; kar nostre sires est curuciez
dans ib. 205
3
XIIIe s.
Et assemblerent si grant ost qu'avis estoit que toute la terre deust croller dessous aus [eux]
dans Chr. de Rains, 144
Et fist garnir Saintes et les autres quatre castiaus moult bien, et s'en revint en France, et n'estoit roiaumes qui contre lui s'osast croller
dans ib. 195
Et quant il entendit teus paroles, si crolla la tieste, et dist que par l'ame son pere biel li estoit
dans ib. p. 74
Tapiz s'est desoz une espine, Que ne volt mie estre veüz, Ne s'est crolez, ne s'est meüz, Coiz se tient et puis si escoute
dans Ren. 5015
4
XVe s.
De paour le corps me croule tous
dans la Pass. de N. S. J. C
5
XVIe s.
Adonc veissiez armes bruyre et crouller, Chevaulx hennir, harnoys estinceller
À ce seul mot, un gros marteau carré Frappe tel coup contre un portal barré Qu'il fait crousler les tours du lieu infame
de Clément MAROT dans I, 253
[Les vents] Croulent son tronc d'une horrible menace, Et de fueillars pavent toute la place
Ung aultre jour, s'exerceoyt à la hasche, laquelle tant bien croulloyt, que....
Abattans les noiz, croullans tous les fruictz des arbres
de François RABELAIS dans ib. I, 26
C'est un bastiment qui croulera tout, si vous y touchez
de Michel de MONTAIGNE dans I, 316
La secousse de nos entrailles en est si violente qu'il est malaysé qu'elle ne croulle tout le corps
de Michel de MONTAIGNE dans I, 356
J'ay le pied si instable et si mal assis, je le treuve si aysé à crouler et si prest au branle....
de Michel de MONTAIGNE dans II, 323
Ils manient cette matiere, comme gents qui ont peur de s'eschaulder : croulez la tant soit peu ; elle leur eschappe
de Michel de MONTAIGNE dans IV, 56
Tout croule autour de nous [change et se ruine]
de Michel de MONTAIGNE dans IV, 86
Ils sentent le poids du joug, et ne peuvent tenir de le crouler
de Michel de MONTAIGNE dans IV, 364
Courant çà et là, et croulant sa lance toute teinte du sang qui couloit au long
de Jacques AMYOT dans Galba, 32
La terre du fossé par sa propre pesanteur croule d'elle-mesme de jour à autre
de Olivier DE SERRES dans 409
Pour garder les dents qu'elles s'esbranlent, les affermir croulans, les nettoier estans ordes et sales
de Olivier DE SERRES dans 904

ÉTYMOLOGIE

1
Normand, croller, remuer ; Berry, groûler, grouller, remuer ; wallon, hrouler, tamiser ; bourguig. craulai ; provenç. crollar, crotlar ; ital. crollare. Les formes crodler, crotlar, nécessairement plus anciennes que les autres, conduisent à un verbe bas-latin co-rotulare (rotulare a donné en effet le provençal rotlar), de co, avec, et rotulare, rouler (voy. ROULER).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
Se crouler, s'écrouler (inusité).
Les choses qui ne sont pas achevées ne sont jamais fermes : tantôt elles s'entr'ouvrent, tantôt elles penchent, tantôt elles se croulent
de François de MALHERBE dans Lexique, éd. L. Lalanne.
C'est de la même manière que Corneille a dit : Quand nous verrions partout les roches ébranlées, Et jusqu'au fond des mers les montagnes croulées, Nous n'aurions point lieu de trembler, Lexique, éd. Marty-Laveaux.

Synonymes de CROULER

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