Définition de BAILLER

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : ba-llé, ll mouillées, et non ba-yé ; il faut bien prendre garde à ne pas assimiler ce mot à bâiller

DÉFINITIONS

1
Donner. Bailler des coups.
Un échange Où se prend et se baille un ange pour un ange
de François de MALHERBE dans VI, 6
Telle je me résous de vous bailler en garde Aux fastes éternels de la postérité
de François de MALHERBE dans IV, 4
Qui baillent pour raisons des chansons et des bourdes
... Et baillant à chaque être et corps et mouvements
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Poem. sacré.
Que l'autre.... Même, s'il est besoin, baille son héritage
Ils ne les pourraient quitter sans bailler au monde sujet de parler
Comme vous baillez des soufflets
Je m'en vais te bailler une comparaison
Je te baillerai sur le nez si tu ris
Je veux vous bailler ici quelque petite signifiance de ce que j'ai remarqué de la littérature actuelle
Dans le langage de l'ancienne chevalerie, bailler sa foi était synonyme de tous les prodiges de l'honneur
2
Sémantique : En termes de pratique, donner, mettre en main. Bailler à ferme, bailler par contrat.
Un sergent baillera de faux exploits, sur quoi vous serez condamné sans que vous le sachiez
3
Sémantique : Familièrement. En bailler d'une belle ; la bailler bonne, belle ; c'est-à-dire chercher à en faire accroire.
Vous me la baillez bonne
Bailler le lièvre par l'oreille, faire de belles promesses.
Napoléon ne nous baillait pas le lièvre par l'oreille, jamais ne nous leurra de la liberté de la presse
4
Sémantique : Terme de marine. Jeter de la rogue des maquereaux sur les filets traînés par des bateaux, pour prendre des sardines.

HISTORIQUE

1
XIe s.
Il nen est dreiz que Paien te [Durandal l'épée] baillisent [portent]
dans Ch. de Rol. CLXX
Charles lui dist : Cuivert, mar le baillastes [vous l'avez maltraité]
dans ib. CCLI
Baliganz sire, mal estes hui baillit
dans ib. CCLV
2
XIIe s.
[Ils] Ne sorent la corone cui [à qui] donner ne baillier
dans Sax. IV
Puis li bailliez la chartre où li seax d'or pend
dans ib. XX
L'arcevesque Thomas tut avant s'en ala ; La cruiz arceveskal il meïsmes porta ; à nul ne l'ad baillie
dans Th. le mart. 39
Li autre l'ont laissié tut sul enmi l'estur, Et le corn ont baillié en main à pecheür, Ne l'espée Deu traire n'en osent par poür [peur]
dans ib. 28
Trestote Espaigne vous tenrez à bailler [gouverner]
dans Ronc. p. 3
Or me bailliez le gant
dans ib. p. 12
Mais ne plut [à] Deu, qui tout a à baillir
dans ib. p. 55
Qui tant fut preuz pour ses armes baillier
dans ib. p. 99
Escu [ils] lui baillent où ot peint un lion
dans ib. p. 182
3
XIIIe s.
Et li dus li bailla de vaisseaus et de galies tant comme il li en convint
Et de ce leur baillerent il bonnes chartes pendans, por confermier tout pleinement tex convenances comme il feroient
À sa mere [elle] le [l'anneau] baille, mout pleure et mout s'esmaie
dans Berte, VIII
Mantiau de fin drap d'or [il] fait à chascun bailler
dans ib. CXXIX
N'il n'i a point d'amor sans faille En fame qui por don se baille
dans la Rose, 8318
Li bers a trait l'espée dont li pons [poignée] fu d'or mier, Vers Sansadoine point, mais ne le pot baillier [tenir, atteindre] ; Car plus va ses chevaus que ne vole espervier
dans Ch. d'Ant. V, 602
Voirs est que li demanderes qui se veut aidier des letres, ne les baurra [baillera] pas, s'il ne li plest, au deffendeur
de Philippe de BEAUMANOIR dans VII, 24
Et aussi se partie me requiert que je li baille conseil
dans ib. V, 19
S'aucuns me prie que je rechoive vingt livres por li d'aucun qui li doit, ou il me baut vingt livres à garder
dans ib. XXIX, 17
Et s'il est si povres, qu'il ne puist baillier nans [nantissements]
de Philippe de BEAUMANOIR dans LI, 7
Le roy commanda à monseigneur Jehan de Biaumont, que il feist bailler une galie [galère] à monseigneur Erart de Brienne et à moy
Se li rois vous avoit baillé la Rochelle à garder qui est en la marche....
dans ib. 197
4
XIVe s.
Et les sciences [étaient] communement baillées en grec, et en ce pays le langaige commun et naturel c'estoit latin
de Nicolas ORESME dans Prolog.
Une science qui est forte quant est de soy, ne peult pas estre baillée en termes legiers à entendre
de Nicolas ORESME dans ib.
5
XVe s.
Avisez-vous, seigneurs cardinaux, et nous baillez un pape romain, qui nous demeure
Et autres villes baillées par le roy Charles septiesme au duc....
de Philippe de COMMINES dans I, 1
Les villes leur bailloient ce qu'ils vouloient pour leur argent
de Philippe de COMMINES dans I, 2
6
XVIe s.
Je luy baillyz si vert dronos [un coup si sec] sus les doigts, à tout mon javelot, que il n'y retourna pas deux foiz
Bailler une grande somme d'argent au change
de Michel de MONTAIGNE dans I, 44
Plus les tyrans pillent, plus ils exigent ; plus on leur baille, plus on les sert
de Michel de MONTAIGNE dans IV, 351
Tu en bailles bien à nos resveurs de philosophes
Il lui bailla sa coquille : Aristide escrivit luy-mesme son nom dessus la coquille, et la luy rebailla
de Jacques AMYOT dans Arist. 20

ÉTYMOLOGIE

1
Normand, je baurai, je baillerai ; provenç. bailar, baillir ; anc. catal. baillir ; bas-lat. bajulare, diriger, gouverner, de bajulus, tuteur, baile, pédagogue, du latin bajulare, porter ; de sorte qu'un mot qui ne signifiait dans le latin que porter un fardeau, a pris, dans les langues romanes, les sens dérivés les plus étendus : tenir, donner, garder, gouverner, traiter. La conjugaison était double : bailler et baillir, d'où, dans l'ancien français, baillie, autorité, puissance, et bailli. On remarquera aussi le futur, je baurai, conservé dans les patois, mode ancien de conjuguer dont des traces se retrouvent dans je lairrai, forme populaire de je laisserai, et dans j'enverrai.

Synonymes de BAILLER

Termes proches de BAILLER

Phonétiquement proche de BAILLER