Définition de ÉVENTER

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : é-van-té

DÉFINITIONS

1
Agiter l'air avec un éventail. Des gens éventent le sultan pendant sa promenade.
Mettre au vent, exposer au grand air. Il faut éventer un peu ce meuble.
Éventer du grain, le remuer de temps en temps pour prévenir la fermentation.
Soulever les étoffes plongées dans le bain d'alun pour leur faire prendre l'air.
Sémantique : Terme de marine. Éventer la quille, abattre en carène un vaisseau jusqu'à ce que sa quille paraisse hors de l'eau.
2
Altérer par l'exposition à l'air. Éventer de la poudre, du levain.
Éventer une liqueur, une substance, en affaiblir la vertu en la laissant exposée à l'air.
Sémantique : Fig.
[Un de ces hommes qui].... tenaient leur doctrine Non dans la tête, ains dans certaine hermine, Bien chaudement, crainte de l'éventer, D'où la tiraient quand en avaient affaire
de SAINT-GLAS dans Contes (1672), cité dans le Chasseur bibliographe, 2e année, n° 8
Sémantique : Terme de vénerie. Éventer un piége, lui ôter l'odeur qui pourrait en éloigner l'animal.
3
Éventer une mine, découvrir l'endroit où elle est pratiquée et en empêcher l'effet.
Sémantique : Fig. Éventer la mine, la mèche, la poudre, pénétrer un dessein secret et empêcher qu'il ne réussisse, le divulguer.
Messieurs Basnage et moi serions trouvés enveloppés dans les dépositions, et il [Jurieu] se glorifiait d'avoir été le premier qui avait éventé la mine du malheureux complot, disait-il, du projet de paix qui se tramait en Suisse
de BAYLE dans Lett. à Minutoli, 14 sept. 1693
On dit dans le même sens éventer un complot, un secret.
L'artifice est trop lourd pour ne pas l'éventer
Un confident peu sûr, un parleur indiscret, Qui des plus retenus évente le secret
Fallut-il éventer les conseils d'Espagne et découvrir le secret d'une paix trompeuse que l'on proposait afin d'exciter la sédition pour peu qu'on l'eût différée....
4
Sémantique : Terme de jardinage. Éventer un oeil, approcher la coupe très près de cet oeil ; alors il ne donne plus qu'une pousse très faible.
Éventer la séve, faire de trop grandes plaies aux arbres, ou tirer ses coupes trop en longueur.
5
Sémantique : Terme de chasse. Éventer la voie, se dit du chien qui trouve une voie fraîche.
Quand un chien, maudit instrument Du plaisir barbare des hommes, Vint sur l'herbe éventer les traces de ses pas [la gazelle]
Dryope la première évente sa demeure [du sanglier]
de Jean de LA FONTAINE dans Adonis, v. 340
Si l'on élevait les enfants à éventer leur dîner, comme le chien évente le gibier, on parviendrait peut-être à leur perfectionner l'odorat au même point
Nature : Absolument.
Lorsque le loup veut sortir du bois, jamais il ne manque de prendre le vent, il s'arrête sur la lisière, évente de tous côtés, et reçoit les émanations....
Sémantique : Fig.
J'évente les beautés et leur plais d'une lieue
6
Sémantique : Terme de marine. Éventer une voile, la disposer de manière à mettre le vent dedans.
7
Sémantique : Terme de charpentier et de maçon. Éventer une pièce de bois, une pierre, la tirer avec la corde, pendant qu'on la monte, pour empêcher qu'elle ne heurte contre le mur.
8
Éventer une carrière, éventer le tuf, y pénétrer, y faire ouverture.
9
Nature : V. n. Sémantique : Terme de manége. Lever trop le nez en parlant du cheval.
10
S'éventer, Nature : v. réfl. Se donner de l'air. S'éventer pour se rafraîchir.
11
Se gâter à l'air. Ce vin s'éventera si on ne bouche la bouteille.
Avec ellipse du pronom personnel.
Pour prendre tous les jours de ce vin, on est contraint de le laisser éventer
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Déf. comm.
Sémantique : Fig.
M'obliger à porter de ces petits chapeaux Qui laissent éventer leurs débiles cerveaux [des jeunes gens à la mode]
Être découvert, connu. Le secret s'est éventé.

HISTORIQUE

1
XIIIe s.
Gaudins est oissus [sorti] du tournois, Partonopex enmaine o soi, Pour ax [eux] esbatre et esvanter
Emmi le pré un tas avoit De fein qu'aüné [rassemblé] i avoit, Por esventer et por fener
dans Ren. 22831
Li vens me vient, li vens m'esvente, Et trop sovent Plusors foïes sent le vent
de RUTEBEUF dans 25
Il l'esventoit d'un cuevre chief, Et si lui soustenoit le chief, Quant elle se clinoit vers terre
dans Bl. et Jehan, 1253
2
XIVe s.
Se le vin sent l'esventé
dans Ménagier, III, 3
3
XVe s.
Qui ont ouy le fait compter Et l'yront partout esvanter
de COQUILLART dans Droits nouveaux.
4
XVIe s.
Tant plus la drogue est precieuse, et moins se doit esventer [exposer à l'air]
Ayant descouvert qu'il avoit esventé un secret important qu'il luy avoit fié
de Michel de MONTAIGNE dans II, 36
Les passions s'alanguissent en s'esventant et en s'exprimant
de Michel de MONTAIGNE dans III, 145
J'esvente peu mes propositions [projets]
de Michel de MONTAIGNE dans IV, 94
Je ne fus pas si tost esventé [on ne sut pas plus tôt ma sortie], que voylà trois ou quatre cavalcades de divers lieux pour m'attraper
de Michel de MONTAIGNE dans IV, 228
Les ruses et subtilitez que l'on pourroit apprendre es livres, ne serviroient non plus que les mines esventées
de Jacques AMYOT dans Préf. IX, 35
Croesus commença à l'estimer homme de cervelle esventée, ou grossier et sans jugement
de Jacques AMYOT dans Sol. 57
Il commanda à ceulx qui estoient soubz sa charge, qu'ilz s'en retournassent au païs sans esventer ny publier sa mort
de Jacques AMYOT dans Cimon, 35
En quatre coups de nez, il [le chien] esvente une plaine, Et, guidé de son flair, à petits pas se traine Le front droit au gibier
de Pierre de RONSARD dans 939

ÉTYMOLOGIE

1
É- pour es- préfixe, et vent ; provenç. esventar, eventar ; ital. sventare.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
S'éventer, se purifier à l'air.
On avait peur que, lui étant mort une fille de la petite vérole, il n'apportât le mal au Louvre ; aussi il s'en est allé, ou s'éventer, ou digérer sa douleur
de François de MALHERBE dans Lexique, éd. L. Lalanne.

Synonymes de ÉVENTER

Termes proches de ÉVENTER

Phonétiquement proche de ÉVENTER