Définition de ÉCHAUFFER

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : é-chô-fé

DÉFINITIONS

1
Rendre chaud. Le soleil échauffe la terre. Les oiseaux échauffent leurs petits sous leurs ailes.
2
Causer un excès de chaleur dans l'économie animale. Les liqueurs alcooliques échauffent le corps.
Nature : Absolument.
Ce n'est pas par la nature des aliments que le maigre échauffe
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Ém. I
Dans le langage vulgaire, se dit pour constiper. Certains aliments échauffent.
Sémantique : Terme de vénerie. Échauffer les faisans, leur donner une nourriture échauffante, afin d'exciter à la ponte les jeunes femelles.
3
Il se dit aussi de l'action qui cause une sorte de fermentation et d'altération dans les substances organiques.
Ils y contractaient une moisissure, une espèce de mousse qui les échauffait
de Guillaume Thomas, abbé RAYNAL dans Hist. phil. XVI, 17
4
Sémantique : Fig. Échauffer quelqu'un, lui donner une sorte de chaleur morale qui l'excite, l'enflamme, l'irrite.
S'il est prompt et bouillant, le roi ne l'est pas moins ; Et comme à l'échauffer j'appliquerai mes soins....
de Pierre CORNEILLE dans Nicom. III, 2
Laissons cette matière qui t'échauffe un peu trop
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Critique, 1
Il se dit aussi des choses.
Pour échauffer notre amour
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Euch. 3
Échauffant par mes pleurs ses soins trop languissants
de Jean RACINE dans Baj. IV, 1
Échauffer mes transports trop lents, trop retenus
de Jean RACINE dans Phèd. IV, 4
Figure-toi Pyrrhus, les yeux étincelants, Et de sang tout couvert échauffant le carnage
de Jean RACINE dans Andr. III, 8
Nature : Absolument.
Les conseils de la vieillesse éclairent sans échauffer, comme le soleil de l'hiver
de VAUVENARGUES. dans Max. CLIX.
5
Sémantique : Familièrement. Échauffer les oreilles, impatienter, irriter.
Retire-toi, te dis-je, et ne m'échauffe pas les oreilles
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Avare, II, 3
Qu'elle ne vienne pas m'échauffer les oreilles
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Fem. sav. III, 8
Échauffer le sang, la bile, la tête à quelqu'un, l'irriter.
Mes yeux sont trop blessés ; et la cour et la ville Ne m'offrent rien qu'objets à m'échauffer la bile
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Mis. I, 1
Si vous m'échauffez la tête, je vous ferai rire d'une autre sorte
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans l'Avare, III, 6
Il ne fallait pas grand'chose pour leur échauffer la tête
de Antoine HAMILTON dans Gramm. 4
6
Sémantique : Terme de vénerie. Échauffer la voie, la suivre avec ardeur.
7
Sémantique : Terme de manufacture. Échauffer une étoffe, la rider en la foulant trop.
8
S'échauffer, Nature : v. réfl. Devenir chaud. Les continents s'échauffent pendant l'été. Il avait la fièvre et ne put s'échauffer auprès d'un bon feu.
Pulchérie répétait des vers, en se promenant à grands pas pour s'échauffer
de Stéphanie Félicité Ducrest de St-Albin, comtesse de GENLIS dans Veillées du chât. t. I, p. 531, dans POUGENS
9
Se donner une irritation. Ne courez pas tant, vous vous échaufferez. Il s'est échauffé en travaillant trop.
On dit de même : Il est trop sédentaire ; son sang s'échauffe.
10
Sémantique : Fig. S'animer, s'exciter.
Puisque chacun, dit-il, s'échauffe en ce discord
de Pierre CORNEILLE dans Hor. III, 2
Tu me contais alors l'histoire de mon père ; Tu sais combien mon âme, attentive à ta voix, S'échauffait au récit de ses nobles exploits
de Jean RACINE dans Phèd. I, 1
Mon homme s'échauffa là - dessus d'un zèle dévot
de Blaise PASCAL dans Prov. 1
Un homme s'échauffe lui-même par de faux raisonnements
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Conn. de Dieu, 1
À mesure qu'il s'échauffait contre l'Église
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Var. 1
On dira peut-être que le sujet ne valait guère la peine qu'on s'échauffât ; car de quoi s'agissait-il ? de savoir si les fleurs et les fruits suffisaient pour établir les genres....
de Bernard le Bouyer de FONTENELLE dans Tournefort.
Puis, s'échauffant peu à peu, il se répandit en reproches et en injures contre les Romains en général et personnellement contre Quintius
de Charles ROLLIN dans Hist. anc. Oeuvres, t. VIII, p. 362, dans POUGENS
Le peuple s'échauffera pour un acteur comme il aurait fait pour les affaires
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Espr. III, 2
11
Se mettre en colère, s'emporter.
C'était se moquer que de s'échauffer ainsi pour rien
de Antoine HAMILTON dans Gramm. 4
S'échauffer en son harnois, parler de quelque chose avec beaucoup de véhémence et d'émotion.
12
Sémantique : Par extension. La dispute s'échauffe. Le jeu s'échauffe.
Les brigues s'échauffent
de Claude Favre de VAUGELAS dans Q. C. liv. IV, dans RICHELET
La guerre s'échauffe tous les jours
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 148
De parole en parole le différend s'échauffa jusqu'à tel point que la femme demanda son bien et voulut se retirer chez ses parents
de Jean de LA FONTAINE dans Vie d'Ésope.
Si, pour éprouver et châtier ses enfants, il [Dieu] permet que la persécution s'échauffe contre eux
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Polit. VI, II, 6
Le premier ministre des Indes et le nôtre soutinrent dignement les droits de leurs maîtres ; la querelle s'échauffa
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Babouc.
13
Sémantique : Terme de chasse. S'échauffer sur la voie, se dit des chiens qui suivent la voie avec trop d'ardeur.
14
On dit que des substances organiques, grains, farines, etc. s'échauffent, quand elles ont subi un commencement de fermentation par la chaleur succédant à l'humidité. Ce grain, cette farine risque de s'échauffer dans ce lieu.

HISTORIQUE

1
XIIe s.
David li reis fut de grant aage, et quant l'um le cuverid, eschaulfer ne poeit
dans Rois, p. 220
2
XIIIe s.
Au senateur meïsme moult souvent il jouoit, Et li uns et li autres forment s'y eschauffoit, Jeu de dez
de JUBINAL dans t. II, 232
[La dame] Qui aukes [un peu] est jà eskaufée Del fu [feu] dunt Gugemer se sent
de MARIE dans Gugemer.
Tant que mon cors [j'] eüsse un petit eschaufé
dans Berte, XLV
Car aussi com quant est li pors [sanglier] Eschauffés des chiens par effors, Et il à tous estal leur livre, Tant que les pluiseurs à mort livre
dans Bl. et Jeh. V. 4360
Li vif deable, li maufé, L'ont si en amer [aimer] échaufé
dans la Rose, 6416
Ele tint ung brandon flamant [flambant] En sa main destre dont la flame A eschauffée mainte dame
dans ib. 3436
Les chevaus estoient lassez et le jour estoit eschaufé
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 227
3
XIVe s.
Certains esbatemens, comme luittes ou courses, pour soy eschauffer et exerciter
de Nicolas ORESME dans Eth. 94
Ainsi grans menaces coroint, Mais les Bretons tout escoutoint Sans s'eschauffer ne poy ne grant
dans Livre du bon Jehan, V. 3212
De l'un costé et l'autre pensoient de frapper, Ainsi que la bataille se prist à eschauffer
dans Guesclin. V. 19153
Toute personne qui s'eschauffe en sa parole n'est mie bien attrempée en son sens
dans Ménagier, I, 8
4
XVe s.
Madame sa mere, qui fut toute ensoignée de le rapaiser, tant estoit eschauffé et aïré
de Jean FROISSART dans I, I, 100
5
XVIe s.
Hanibal avoit faict espandre du feu par tout son ost pour eschauffer ses soldats
de Michel de MONTAIGNE dans I, 261
M. L'admiral, qui n'estoit pas novice ès affaires d'estat, prevoyant que le jeu s'alloit eschauffer
de Francois LANOUE, dit Lanoue Bras de Fer dans 546
Elle pendit sur le feu un grand vaisseau plein de vin, et pendant qu'il eschauffoit....
de Jacques YVER dans p. 567
Toute rigueur s'amollit par priere ; Tout gentil coeur s'eschauffe d'amitié
de Pierre de RONSARD dans 756
Essayant par des manieres insinuantes de l'eschaufer en sa faveur
dans Mém. sur du Guescl. 16
Benoist monsieur, dit Panurge, vous vous eschauffez dans vostre harnois, à ce que je voy et cognoy
de François RABELAIS dans Pant. IV, 7

ÉTYMOLOGIE

1
É- pour es- préfixe, et chauffer ; picard, écaufer ; provenç. escalfar.

Synonymes de ÉCHAUFFER

Termes proches de ÉCHAUFFER